Que ce soit Daesh ou d’autres groupes islamiques combattants, l’islam radical reste omniprésent dans cette région.
Dans les siècles précédents, la religion mahométane a travaillé à éradiquer les chrétiens de cette terre mésopotamienne où ils furent majoritaires. Cette situation récemment médiatisée sous l’angle d’événements militaires devrait inciter à connaître le passé de ce pays meurtri, afin de comprendre de quelle manière son avenir a été compromis.
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L’Iraq d’aujourd’hui est en effet un état récent : c’est une création des Occidentaux voulant répondre à la conjoncture du début du 20ème siècle, après l’effondrement de l’Empire ottoman et face à un nationalisme arabe en effervescence. Anglais et Français ont cherché à imposer une transition à la région en arbitrant la concurrence interne à l’islam entre musulmans turcs et arabes, mais cela s’est fait hélas sur le dos des chrétiens. Aujourd’hui les Occidentaux sont dépassés par l’affrontement entre sunnites et chiites.
C’est donc au début du 20ème siècle – époque marquée par le génocide arménien et chaldéen perpétré par les Ottomans (2 millions de victimes chrétiennes) – que fut créée la Jordanie sur 70% de l’ancienne Palestine historique, et qu’à l’instigation de Churchill, furent dessinées, sur des territoires assyro-chaldéens, arabes, kurdes et perses, les frontières de l’Iraq actuel …
Si cela eut pour effet de calmer le jeu des revendications nationalistes arabes, au prix de l’oubli des Kurdes et de leur ancien territoire, le Kurdistan, la communauté historique des chrétiens autochtones (assyro-chaldéens) fut marginalisée et condamnée dès lors à la disparition progressive. Alors qu’il avait été question de donner naissance à un état assyro-chaldéen pour assurer la survie des autochtones chrétiens, la SDN en 1925 n’eut pas le courage de donner suite au projet. Le Hakkâri, bastion montagneux de repli chrétien séculairement harcelé par les Kurdes fut rattaché à la Turquie.
Ce problème spécifique de survie pour les chrétiens indigènes de culture syriaque a commencé à vrai dire à une époque déjà ancienne: car il y a environ vingt siècles, la Mésopotamie était un vaste territoire de riche civilisation héritée de l’antiquité. Une population nombreuse, composée de Juifs depuis l’exil à Babylone, et de Zoroastriens présents depuis longtemps, avait vu se développer sur ce terreau favorable de très nombreuses communautés chrétiennes dynamiques : Assyriens, Chaldéens, et Nestoriens, parlant tous une langue hébraïque semblable à celle de Jésus: l’araméen.
L’invasion brutale de l’islam au 7ème siècle dans cette région judéo-chrétienne florissante a (malgré quelques rares périodes tolérantes) provoqué le déclin inexorable des non-musulmans. En raison du djihad, fer de lance de la colonisation islamique, les chrétiens ainsi que les juifs disparurent progressivement au gré des persécutions, mises en esclavage, expropriations, conversions forcées, etc.
Pourtant, sous l’empire abbasside aux 8ème et 9ème siècles, Bagdad était devenue un centre islamique réputé. Toutefois on a souvent occulté le fait que cette gloire revendiquée par l’islam était essentiellement due aux chrétiens locaux enrôlés par les califes et sultans. C’est en raison de leurs connaissances bibliques (hébreu et grec) que les nestoriens furent appelés à traduire en arabe les œuvres majeures de la science et de la philosophie gréco-romaine. Humaïn al Hishaq, célèbre intellectuel chrétien, animait la “maison de la sagesse” du calife de Bagdad Al Mamoun. Le premier ouvrage d’ophtalmologie écrit en arabe le fut par le chrétien Youhanna Ibn Massawayh, médecin personnel d’Haroun al Rachid.
Mais les chrétiens, utilisés par les califes comme ressources d’appoint pour développer leur civilisation, étaient surtout des “dhimmi“, citoyens inférieurs pour lesquels la considération était variable et aléatoire. De nombreux épisodes sanglants marquèrent cette région au fil des décennies, par exemple avec Tamerlan, qui enterra vivants des milliers de chrétiens, ou encore le féroce Sélim 1er et d’autres sultans qui massacrèrent massivement les populations chrétiennes de Mésopotamie occupée.
Ainsi, cette terre qui avait été spirituellement et culturellement rayonnante devint peu à peu, sous domination arabe puis turque, le plus grand champ de ruines de monastères et d’églises, et aussi le plus grand cimetière chrétien, du Moyen-Orient, selon l’expression de l’historien jésuite le père J.M. Fiey.
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Qui aujourd’hui se souvient du rayonnement pluriséculaire de cette région du Moyen Orient? Les désastres successifs ont été totalement occultés par une arabisation forcée au temps de la dictature de Saddam Hussein, sous les yeux d’une Europe plus soucieuse de ses alliances commerciales et de ses moyens énergétiques, que des fondements d’anciennes valeurs humanistes et spirituelles aujourd’hui reniées et abandonnées.
La libération de Mossoul par l’armée irakienne aidée par les Américains n’est qu’une étape significative d’un long processus. Celui-ci a été au long des siècles celui de la destruction progressive par l’islam d’une foi et d’une culture préexistantes, où l’être humain avait encore une valeur inestimable.
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Abbé Alain René Arbez prêtre, pour Dreuz.info.
Merci pour cette analyse historico politique d’une autre de ces controverses du XXe siècle , la partition territoriales des précédents Impérialismes et pour ce condensé éclairé du début de l’ éradication des chrétiens par les mahométans , peu enseigné , peu connu , ignoré , souvent volontairement mis de côté pour pas contredire les fables d’ une expansion « pacifique » de l’Islam envers les populations conquises par le sabre .
Est cet ignorance qui explique en partie le lâche abandon de tout l’Occident envers ces chrétiens d’ Iraq et de Syrie victimes de leurs bourreaux , bourreaux , accueillis , fêtés par cet Occident qui n’ a de sentiments que pour ces mahométants venus les conquérir par le nombre et le ventre ?
C’ est comme si le monde actuel est pressé que le sort de ces chrétiens soit définitivement réglé par l’ hécatombe , le massacre , dispersé par l’ esclavage et qu’on s’ en souvienne plus .
Pourtant un juif lui se souvient
https://www.youtube.com/watch?v=fcC0GCdpmHg
Pour les fidèles intéressés , il existe à Sarcelles une belle église chaldéo-assyrienne où
l’on entend la messe en araméen !
De cela la presse gauchiste n’en parle pas !
C’est parce qu’il ne lui reste pas la moindre parcelle d’humanité.
Notre ” cher pape ” au lieu de s’ occuper des migrants ferait mieux de defendre les Chrétiens d’Orient et de leur venir en aide .
c’est la triste vérité
Merci à vous Père Alain René Arbez. Si les écoles et les églises enseignaient aux enfants et aussi aux chrétiens l’histoire comme vous la citez, même si l’islam occupe par la force et la violence tous les pays où il a posé un jour les pieds, même si l’islam détruit tout et ruine les hommes et les femmes de leur passé et de leurs croyances, comme pour ces chrétiens de Syrie ou d’Iraq, il y aurait une autre compréhension des faits et plus de solidarité pour eux dans les sociétés occidentales et dans le monde chrétien. Bien sûr, il faudrait aussi l’enseigner à l’ENA pour qu’ils sachent que la civilisation judéo-chrétienne a existé bien avant “leur règne”!
Par contre, cela reste marginal par rapport au sujet traité, mais il n’est pas possible d’affirmer que Jésus parlait strictement l’araméen et non pas l’hébreu. Trop de vraisemblances et d’études exégétiques extrêmement sérieuses permettent d’affirmer le contraire. En premier l’hébreu de Qumrân, un hébreu ancien, proche de l’araméen comme d’une langue soeur, et dont les caractéristiques linguistiques des hébraïsmes se retrouvent de nos jours dans l’hébreu des textes bibliques que nous étudions. Ce rouleau original d’Esaïe est exposé au Musée d’Israël . A la synagogue de Nazareth ou de Kfar Nahum, Jésus lisait ce rouleau d’Isaïe en hébreu.Nous pouvons aujourd’hui lire ce texte et bien d’autres, tels quels, c’est à dire en hébreu.
Merci pour votre étude.
Merci à l’abbé Arbez pour ce magistral cours d’Histoire et merci à vous, bebaviv pour votre commentaire très instructif.
je suis tout à fait d’accord avec vous, je ne crois pas que Jésus s’exprimait seulement par l’araméen, comme on l’entend affirmer couramment.
Jésus faisant son marché parlait araméen. Mais lisant le sefer torah à la synagogue, il parlait hébreu. Sa connaissance fine des écritures comme d’ailleurs la prière liturgique des psaumes était en hébreu.
On peut supposer qu’il connaissait marginalement quelques mots de grec et de latin.
Merci Monsieur l’Abbé Arbez pour votre développement. Je vous suis tout à fait.
C’est pour cela qu’il est préférable de préciser la langue de Jésus par rapport à sa fonction liturgique et d’enseignement de la Torah, donc l’hébreu. C’est certain qu’il devait aussi parler araméen, plus connu du peuple, l’hébreu étant la langue sacrée. Les enseignants de la Bible aujourd’hui généralisent en effet : mais pourquoi donnent-ils la priorité à l’araméen plutôt qu’à l’hébreu contre toute évidence?? Vous avez certainement la même réponse que moi ! Et la deuxième réponse, c’est la polémique très vive sur la rédaction des textes de l’Evangile quand d’aucuns continuent de soutenir qu’il furent écrits en ..grec!
Là encore, les études prouvent le contraire. Décidément, on ne situe jamais l’hébreu à sa place, l’hébreu passe mal!!
je rejoins l’hypothèse sérieuse et documentée de Claude Tresmontant: les évangiles ont eu une version première en hébreu, avant d’être plus tard vulgarisés en grec.