Publié par Joëlle de Paris le 18 septembre 2017

 

Kavod peut se traduire par respect, gloire, honneur, reconnaissance, amour propre.

Le judaïsme utilise la notion de Kavod pour la gloire de D.ieu, « Honore ton père et ta mère », l’honneur du shabbat, le respect dû au corps d’un défunt, etc.

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« As-tu donné du kavod à ton mari ? » demandait le tribunal rabbinique à Viviane Amsalem dans le film « Guet »

Le mot kavod a la même racine que le mot « poids » koved, car donner du kavod à quelqu’un c’est lui donner un poids moral ou social, le contraire de le prendre « à la légère ».

 

Comment mesure-t-on la valeur d’un homme ?

À part les footballeurs qui ont un prix d’achat, l’honneur d’un homme se mesure en kavod.

Le Prince d’Égypte : « Comment mesure-t-on la valeur d’un homme ?

En force, en taille, en poids ?
Ce qu’il a gagné, ce qu’il a donné ?

Un berger pour une brebis égarée

Vaut plus que le plus riche des rois.

Si un homme perd tout ce qu’il possède,

Perd-il sa valeur aussi ? »

 

Le Prince d’Égypte – Le Regard Divin

Tous les hommes recherchent le kavod, je recherche le kavod en publiant cet article.

Mon père zl a été administrateur d’une synagogue, tâche bénévole et ingrate qui le conduisait à rentrer tard le soir après des réunions épuisantes. Il en tirait une seule satisfaction, le kavod de s’asseoir sur le banc de la synagogue portant l’inscription dorée “Réservé aux administrateurs”.

Le premier meurtre de l’histoire a eu lieu pour un problème de kavod quand D.ieu a agréé l’offrande d’Abel et dédaigné celle de Caïn.

Korah s’est rebellé contre Moïse dans le désert, car il estimait ne pas avoir reçu le Kavod qui lui revenait de droit par sa naissance, et il a fait croire aux Hébreux que Moïse ne leur donnait pas le kavod qui leur revenait de droit, car ils étaient « tous des saints » puisqu’Hébreux.

Pentateuque – תורה  Nombres – במדבר  Kora’h – קרח  Ch. 16 V. 3

A l’opposé de Korah, Moïse « était fort humble, plus qu’aucun homme qui fût sur la terre » et pourtant « l’Éternel s’entretenait avec Moïse face à face, comme un homme s’entretient avec un autre; »

Pentateuque – תורה Exode – שמות Ki Tissa – כי תשא Ch. 33

Pentateuque – תורה  Nombres – במדבר  Beaalote’ha – בהעלותך  Ch. 12

 

Le kavod factice

Le kavod factice se mesure en nombre de like ou de followers sur sa page Facebook et en nombre de musiciens à la Bar Mitsva de son fils.

Combien de mariés vont se dire après une fête destinée à épater les autres :« Au fond, cette fête ne nous correspondait pas» ?

Le regard des gens, le standing impose de changer de voiture, de s’habiller à la mode, de faire un lifting, de faire des voyages plus coûteux et exotiques que ses relations et surtout le leur faire savoir sur Facebook.

Ça dépend des civilisations, en Égypte pharaonique, on frimait en se payant un somptueux tombeau :

« L’élite de l’Égypte ancienne dépensa des fortunes à bâtir des pyramides et à faire momifier ses cadavres, mais aucun de ses membres ne songea à faire du shopping à Babylone ou à passer des vacances de ski en Phénicie… (« Sapiens, une brève histoire de l’humanité » de Yuval Noah Harari)

Nous sommes dans une génération d’avoir et de paraître : on envoie ses photos sur snapchat ou instagram et on tweete son avis sur tout.

Le Rav Solovetchik (1903-1993), qui n’a pas connu les réseaux sociaux, évoquait déjà le danger pour l’ego de la communication sans retour :

« Néanmoins, je ne dois pas me sentir blessé si mes pensées ne génèrent aucune réaction auprès de mes auditeurs. » (The lonely man of faith, p. 9) torah-box.com.

 

Quelques trucs de rabbins pour éviter l’orgueil :

  • Se dire que la plupart des bienfaits qui nous sont accordés le sont par pur effet de la bonté divine et non pour nos mérites,
  • Chercher chaque jour les qualités et mérites des autres,
  • Collecter de l’argent pour des œuvres charitables : vraiment efficace pour oublier son ego!

 

L’envie du kavod des riches

« La jalousie, la concupiscence et l’ambition expulsent l’homme du monde ».(Pirké Avot 4-21) :

Parce que l’herbe du jardin du voisin sera toujours plus verte, il est inutile d’acheter la maison du voisin, ça ne résoudra pas le problème.

Dans le judaïsme, la seule convoitise autorisée est celle de la sagesse d’autrui.

Ton voisin est plus riche que toi ? C’est que D.ieu lui a donné les moyens et le devoir de réaliser beaucoup de bien dans le monde.

Pourquoi les riches bienfaiteurs de la synagogue reçoivent-ils tant de respect ? Parce que, dans un monde idéal, les riches partageraient leur richesse avec les pauvres sans chercher de reconnaissance, mais nous ne sommes pas dans un monde idéal et les riches pour faire le bien ont parfois besoin d’être encouragés sous forme de reconnaissance ou de prestige.

De toute façon, “Chacun sait que l’argent va aux riches, la chance aux chanceux, les honneurs aux hommes déjà importants (car c’est l’importance qui nous rend importants!); Les décorations attirent les décorations et vont d’elles-mêmes garnir les poitrines déjà constellées. ” (Jankelevitch – Berlowitch “Quelque part dans l’inachevé” p 148)

 

Kavod intérieur ou self-kavod

Pour construire son propre Kavod, il faut repérer ses propres qualités, décider ce qui est bien pour soi et ce qu’on veut être, et ainsi on ne craindra pas l’avis des autres et on ne sacrifiera pas ses valeurs pour leur plaire.

C’est la conscience de sa valeur qui fait

  • qu’un étudiant refuse de se laisser humilier par ses professeurs et part en claquant la porte,
  • qu’un jeune homme qui n’aime pas l’alcool refuse de boire malgré les moqueries des copains,
  • qu’un avocat reconnu commande un lait grenadine devant ses clients,
  • qu’un collégien juif contredit un prof qui affirme que les juifs enferment les footballeurs palestiniens dans des frigos,
  • qu’une jeune fille refuse de s’habiller en lolita même si les garçons la traitent de « coincée »
  • qu’une bourgeoise ose afficher un peu de religion dans un milieu où les gens raisonnables sont laïques et moqueurs.

Et si on passe son temps à résister aux pressions de son milieu, faudra voir à changer de milieu…

Rabbi Zusha d’Anipoli disait :

« Lorsque je mourrai et que je me présenterai devant mon Créateur, il ne me reprochera pas de ne pas avoir été Moïse, je n’avais pas sa sagesse, ni Abraham, je n’avais pas sa bonté, mais il me demandera « Zusha, pourquoi n’as-tu pas été Zusha ? » et je n’aurai pas de réponse. »

 

Jewish kavod

Kavod : « Le mot unique pour dire l’élection et son fardeau » (L’esprit du judaïsme p261, Bernard Henri Levy) avec un joli jeu de mot : Fardeau = lourd

Pour un juif, pas besoin de mendier du Kavod, en principe, nous sommes convaincus que D.ieu nous observe et compte sur nous pour réparer le monde. Et si tu veux mon élection, prends aussi les persécutions!

Yuval Noah Harari, l’auteur juif athée du best-seller « Sapiens, une brève histoire de l’humanité » ironise que les Juifs puissent croire que le principal centre d’intérêt du maître de l’univers soit « la minuscule nation juive et l’obscure terre d’Israël » et considère que le judaïsme « a peu à offrir aux autres nations ». jewishreviewofbooks.com

Jérusalem centre du monde, Heinrich Bunting 1581

Jérusalem centre du monde, Heinrich Bunting 1581

Le simple fait que « l’Ancien Testament » dise à deux milliards de chrétiens que D.ieu a donné les 10 commandements aux Juifs, que Jérusalem capitale juive soit le principal problème actuel des Nations, mais que lesdites Nations se reposent le 7e jour, ou qu’on parle des «racines judéo-chrétiennes» de l’Europe devrait le rassurer sur l’utilité de sa religion.

la Déclaration des droits de l’homme ressemble étrangement aux Tables de la Loi

Par ailleurs, et ce n’est pas contradictoire, les trois qualités du Juif sont

  • l’humilité, dans le sens de retenue, pudeur, soumission à la vérité (sefer Maamarim second discours, chapitre 1)
  • et aussi ressentir la pitié
  • faire des bonnes actions.

Ce vieux principe talmudique (traité Yabamot 71a) est toujours d’actualité, car avant d’épouser quelqu’un, on conseille de vérifier s’il ou elle possède bien ces 3 qualités.

Mais comme dit Flaubert, « Le comble de l’orgueil, c’est de se mépriser soi-même » : de tout temps, des Juifs ont souffert de « Kavod inversé », un « auto-antisémitisme qui est un phénomène socio-psychologique dans lequel le Juif éprouve une haine et un mépris obsessionnels contre son peuple, sa culture, sa tradition, ses usages et contre les Juifs qui tiennent à cette tradition » : cette excellente définition du kavod inversé est de Naftali Benett, ministre israélien de l’Éducation.

lphinfo.com

 

Comment concilier self-kavod et humilité ?

Rabbi Simha Bounam de Pjyzha conseille de mettre

  • dans sa poche droite : un papier avec écrit « Moi je suis poussière et cendre » (Abraham dans Genèse 18 : 27)
  • dans sa poche gauche : un billet avec écrit « C’est pour l’amour de moi que le monde a été créé » (Talmud traité Sanhedrin 37 a)

« La modestie est surtout une fidélité à soi-même indépendamment du souci de considération de la part des autres. Cette humilité témoigne d’une personnalité assez riche et épanouie pour ne pas être soumise aux diktats de la reconnaissance sociale. » (Les prophètes, les enfants et les fous, p 124, Sébastien Allali)

 

Le kavod est la nourriture de l’âme

Il y a des entreprises ou des familles où on vous dira : « Ici, on n’est pas très compliments »

C‘est comme si on disait “ Ici, on n’est pas très nourriture ” ou “Ici, on n’est pas très oxygène

Le manque de Kavod donné à un enfant va lui causer des troubles du comportement : une fois adulte, il ne saura pas donner du kavod à ses propres enfants qui en retour auront du mal à lui en donner, ou bien il risque de rechercher désespérément du Kavod, ce qui donnera aux autres le pouvoir sur sa vie.

Le seul remède sera qu’il donne du Kavod aux autres pour réintroduire la notion de Kavod dans sa vie.

Rabbi Eléazar de Modiine dit : « Celui .. qui humilie son prochain en public, même s’il peut se prévaloir d’avoir étudié la Torah et accompli de bonnes actions, n’a pas de part au monde futur » (Pirké Avot – 3-11)

Si on enlève tout Kavod à un homme, on le tue : un employeur peut conduire un salarié au suicide par un mépris affiché de son travail, et au contraire, une prime de quelques euros reconnaissant le savoir-faire d’ouvrières dans la tâche délicate de mettre les asperges en cageots peut résoudre un malaise social.

Les racistes veulent retirer toute densité à l’homme méprisé en le réduisant à une caractéristique infamante: couleur, ethnie, religion.

Les nazis voulaient retirer au Juif sa vie et même son humanité en remplaçant son nom par un numéro.

 

Le vrai kavod, c’est en donner aux autres

Quelques exemples tout simples:

  • se lever quand ses parents ou ses maîtres arrivent,
  • se baisser pour parler à un enfant,
  • regarder les gens quand on leur parle,
  • n’exclure personne d’une conversation,
  • formuler un compliment quand on remarque une chose positive,
  • ne pas faire de reproches en public,
  • accompagner les membres de sa famille à la porte quand ils sortent et attendre que l’ascenseur soit parti pour refermer la porte,
  • accueillir les membres de sa famille à la porte quand ils rentrent…

 

Kavod et Guematria

En gematria (à chaque lettre correspond un nombre) :

Le mot KAVOD vaut 32

kaf 20 כ

bét-vét 2 ב

vav 6 ו

dalet 4 ד

 

Comme le mot BLÉ, khita, car le kavod est aussi vital à l’homme que le pain

khet 8 ח

yod 10 י

tet 9 ט

hé 5 ה

 

Comme le mot INDIVIDU, yakhid, car le kavod c’est aussi le respect de soi-même ou « self-Kavod »

yod 10 י

khét 8 ח

yod 10 י

dalét 4 ד

 

et comme le mot CŒUR, lev, car le kavod se ressent

lamed 30 ל

bét-vét 2 ב

gemgeneration.blogspot.fr

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Joëlle de Paris pour Dreuz.info.

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Sources :

youtube.com : cours « Se libérer du regard des autres” par Rav Eliahou Uzan pour Torah Box

chabad.org

Kitsour Choul‘han ‘aroukh (29, 3)

torah-box.com cours : « Education (3/12) : donner du Kavod à l’enfant » par Rav Serge ATTIA pour Torah box

 

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