Publié par Sidney Touati le 16 octobre 2017

L’histoire est peuplée de conflits, guerres en tous genres où vainqueurs et vaincus après le fracas des armes, apprennent à vivre ensemble. Il arrive bien souvent qu’avec le temps, les rôles s’inversent de sorte que le dominant soit à son tour dominé par le vaincu.

Marx notait que « Le mort saisit le vif » était la plus vieille loi de l’histoire.
Que voulait dire le philosophe allemand par cette remarque ? Il est fréquent qu’un pays l’emporte militairement sur un autre issu d’une civilisation plus développée, et finisse à la longue par être dominé par le vaincu.

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Marx citait comme exemple les rapports entre les Grecs et les Romains. Ces derniers l’ont emporté sur les premiers, mais par la suite, la civilisation grecque infiniment plus raffinée et plus complexe, a fini par envahir la société romaine et par s’imposer à elle. La société romaine vivait à la mode grecque. Les élites étaient fascinées par le modèle culturel grec. Le vaincu s’est mis ainsi à dominer le vainqueur. « Le mort saisit le vif ».

Il se pourrait que l’opposition des démocraties européennes à la dictature nazie, qui s’est traduite par la capitulation sans condition du 3ème Reich, nous fournisse un exemple de cette fatidique loi. Comme l’huile remonte à la surface de l’eau, les valeurs dont les vaincus étaient les porteurs finissent par remonter à la surface de la société du vainqueur, envahissant progressivement l’espace.

Si cette terrible règle s’applique à l’Europe post-nazie, alors l’examen de l’histoire de la construction européenne depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, devrait nous conduire au terrible constat selon lequel les puissances qui ont écrasé le 3ème Reich et mis un terme à la barbarie nazie, notamment les puissances européennes, sont envahies progressivement par la « culture » qu’elles ont combattue et qu’elles sont certaines d’avoir évincée.

L’Union Européenne n’est-elle pas en train de réaliser, un à un, avec des méthodes et des moyens certes différents, les grands objectifs, les principaux « rêves » du 3ème Reich ?

Examinons le premier de ses rêves qui remonte à la construction même de l’Allemagne. Le Reich bismarckien n’avait-il pas pour objectif de faire de l’Allemagne la première puissance européenne ?

Le deuxième de ses rêves, celui-là, strictement attaché au 3ème Reich, n’était-il pas de faire de l’Europe unie sous domination allemande, un espace sans Juif, un espace judenrein ?

Le troisième de ses rêves nazis n’avait-il pas pour objectif de créer une race de « seigneurs » dominant les masses réduites à l’état de troupeaux composés d’hommes interchangeables, sans identité ?

Réalisation du premier rêve : La grande Allemagne

La découverte des camps de concentration et d’extermination a provoqué un choc immense.

Les Alliés ont pris la décision de mettre un terme définitif aux guerres opposant les pays européens, guerres qui à deux reprises ont entraîné toute la planète dans l’horreur. 11 millions de morts pour la première. 60 millions de morts pour la deuxième.

« Plus jamais ça » ! Tel est le serment que les vainqueurs ont prononcé.
Comment s’y prendre pour éviter la répétition de ce sinistre scénario ?

Prendre le contre-pied des fondamentaux du nazisme. Telle fut la démarche adoptée par nos dirigeants pour construire un ordre nouveau européen. Un ordre de paix, de prospérité, de progrès.

1) Rejeter toute forme ou tout ce qui peut avoir un quelconque rapport avec le nationalisme, car dans cette problématique nazisme = nationalisme et inversement, nationalisme=nazisme.

Il faut donc en tout premier lieu, résoudre le problème des « nationalismes » jugés responsables de la rivalité entre les peuples et in fine, de cette immense boucherie que furent les deux grandes guerres mondiales.

Donc, construire une unité transnationale susceptible de faire travailler ensemble les nations toujours potentiellement hostiles. Réaliser à terme l’union des nations européennes.

Pour ce faire, la France fera le choix de son ennemi de la veille, l’Allemagne et rejettera son allié des jours sombres, l’Angleterre.

L’Angleterre qui s’est non seulement résolument engagée dans la lutte contre le nazisme, mais a soutenu le général de Gaulle pendant cette terrible période, est dans un premier temps, exclue par ce dernier du processus d’unité européenne. La France, moteur de ce rapprochement, propose de construire la nouvelle Europe autour de l’axe franco-allemand.

Le de Gaulle d’après guerre étant devenu un farouche opposant à l’hégémonie américaine ne veut pas de l’Angleterre, trop proche des États-Unis. Par contre, il ne craint pas l’Allemagne dont il sous-estime les capacités de redressement et la puissance potentielle; le général est persuadé que l’heure du retour de la France a sonné. Débarrassée du bourbier algérien, la France pourra asseoir son leadership sur une Europe meurtrie dont il dit que l’Allemagne a les reins cassés :

« L’Italie n’est pas sérieuse : donc elle n’existe pas. Les Anglais se consolent de leur déclin en se disant qu’ils partagent l’hégémonie américaine. L’Allemagne a les reins cassés. » (In Alain Peyrefitte, C’était de Gaulle, t.2 page 33, fayard éd. 1997).

2) L’étrange choix de l’Allemagne

La France, grâce à la formidable volonté et perspicacité du général, se trouve dans le camp des vainqueurs. L’Allemagne est en ruines et la France a relativement moins souffert que son voisin. Sous la direction du chef de la Résistance, en 1945, sa supériorité est manifeste.

Contrairement à ce qui s’est passé au lendemain de la guerre 14-18, il n’est pas question de faire payer au vaincu les dommages inouïs qu’il a occasionnés.
Au contraire, guerre froide oblige, les vainqueurs vont aider les vaincus à se redresser. Les États-Unis apportent une aide massive à l’Allemagne, laquelle en un temps record effacera les terribles destructions de la guerre.

Ironie de l’histoire, de Gaulle, qui dans les heures sombres de la défaite s’est dressé contre l’occupant allemand, va devenir l’instrument privilégié du rétablissement de la toute-puissance de l’Allemagne et corrélativement, de l’affaiblissement de la France.

​Causes de ce dramatique renversement

Comment l’Allemagne détruite est-elle devenue en moins de trente années, la première puissance européenne ? Comment l’Europe est-elle devenue « Allemande » ?

​Bref rappel historique.

Construit sur la défaite française de 1870, le deuxième Reich est proclamé dans la galerie des Glaces à Versailles, le 18 janvier 1871.

C’est un Empire qui regroupe vingt-cinq États dont les principaux sont les royaumes de Prusse, Bavière, Saxe et Wurtemberg.

« Pendant vingt ans, Bismarck domine l’Europe. Personne sur le continent européen ne peut contester cette position. » (R. Poidevin, S. Schirmann, histoire de l’Allemagne, Hatier 1992, p.126).

La France mutilée (elle a perdu l’Alsace-Lorraine), appauvrie (elle a payé 5 milliards au Reich triomphant) tente de se reconstituer.

Mais le rêve d’une Allemagne hégémonique viendra se briser en 14-18. Son expansion foudroyante, ses appétits démesurés ont inquiété les vieilles puissances européennes auxquelles elle dispute les empires coloniaux. Persuadée qu’elle obtiendra par les armes ce qu’elle n’a pu obtenir par la politique et la diplomatie, l’Allemagne déclare la guerre et entraîne le monde dans une conflagration catastrophique.

Après 14-18, l’Allemagne ruinée se retrouve à la case départ. Avec le « Traité de Versailles » la revanche de la France semble complète. Mais l’euphorie sera de courte durée. L’Allemagne non seulement refuse de payer les dommages de guerre, mais prépare activement la revanche. Le nationalisme allemand exacerbé par une défaite jugée « humiliante », reprend de plus belle. Il se focalise sur les thèmes de la supériorité de la race allemande et se construit sur la haine des Juifs jugés coupables de tous les maux de la planète.

Idéologie raciale et antisémite ; militarisation à outrance de l’économie ; dictature totalitaire ; c’est sur ce triptyque que le troisième Reich s’affirme avec brutalité, entraînant le monde dans la Deuxième Guerre mondiale. L’Allemagne grisée par ses fulgurantes victoires entend asseoir sa domination absolue de manière définitive sur les peuples vaincus et asservis.

Le second rêve de domination de l’Allemagne viendra une nouvelle fois se briser.

En 1945, l’Allemagne est totalement vaincue et ruinée. Pire. La découverte des camps de concentration et notamment des grands camps d’extermination provoque un choc moral énorme. L’image de l’Allemagne est atteinte. Les Allemands sont perçus comme ayant été dans leur majorité, les complices actifs ou passifs des crimes commis contre les Juifs, des crimes commis contre l’humanité.

La suite nous la connaissons.

Avec l’aide de ses ennemis d’hier, l’Allemagne se redressera et deviendra rapidement la première puissance économique européenne.

La France enfermée dans ses contradictions, prisonnière de ses a priori idéologiques, n’a pas su faire les réformes pour s’adapter au nouvel environnement qu’elle a pourtant activement contribué à mettre en place.

Avec l’Union européenne, le rêve gaullien d’une France rétablie dans son rang, agonise tandis que le rêve deux fois brisé d’une Allemagne hégémonique devient réalité. La nouvelle Europe est sans contestation possible, sous domination allemande.

L’Angleterre farouchement attachée à son indépendance et à sa liberté, refuse cet état de fait et quitte avec fracas l’Union Européenne.

La France persiste et signe dans la politique du déclin. Elle ne voit d’issue qu’en se mettant à la remorque d’une Allemagne qui ne sait que faire de son triomphe.

Comment l’Europe est-elle devenue l’instrument de cette domination ?
Pourquoi la France « universaliste » a-t-elle perdu alors que la victoire était à portée de mains ?

Dans un prochain article, nous examinerons comment et pourquoi une nouvelle fois cette terrible règle « Le mort saisit le vif » s’est imposée ; comment et pourquoi l’Europe est devenue, malgré elle, l’instrument de la réalisation des grands rêves du 3ème Reich, notamment le plus terrible de tous les rêves d’Hitler : une Europe sous domination allemande sans juifs et par delà, un monde débarrassé de l’influence juive ?

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