Publié par Ftouh Souhail le 7 mars 2018

Un nouveau revers pour la liberté de la presse au Maroc. Signaler l’absence de l’épouse du roi lors d’un évènement peut coûter cher aux journalistes. Le crime de lèse-majesté protégeant la famille royale est dénoncé par de nombreux observateurs comme un moyen de limiter la liberté d’expression et de réprimer la dissidence. 

Des journalistes au Royaume de Mohammed VI ont été condamnés à de la prison ferme pour « crime de lèse-majesté» par un tribunal marocain. Ces peines de prison ont frappé des journalistes ayant publiés des informations évoquant l’absence de l’épouse du roi, qui venait de se faire opérer dans une clinique parisienne, à son chevet.

L’absence remarquée de l’épouse du roi, qui se trouvait a Marrakech au lieu d’être à Paris au chevet de son mari, en a surpris plus d’un.

Le journal espagnol El Confidencial, dans son édition du 5 mars 2018, rapporte que, pour avoir soulever la question, des journalistes se sont retrouvés en prison car ils ont constaté l’absence de la princesse Lalla Salma, épouse du roi Mohammed VI du Maroc. Le journal considère que Mohamed VI règle ses comptes avec sa femme à travers la presse. Selon des sources, les journalistes ont été condamnés à un an et demi de prison pour avoir parlé de l’épouse du roi.

Deux articles ont été publiés anonymement sur le blog “Le Crapouillot marocain”, «L’absence d’une princesse dilettante» et «L’attitude cool et trompeuse d’une princesse», le 27 février et le 2 mars, annonçant l’absence de Lalla Salma, 39 ans, épouse du monarque allaouite depuis 2002, mère du prince héritier Moulay Hassan et de la princesse Lalla Khadija.

Tout le monde a, en effet, constaté l’absence de la princesse sur la photo de famille prise à la clinique Ambroise-Paré, à Paris, autour du roi convalescent. On y lit que Lalla Salma était absente parce qu’«elle était absolument indifférente à cette osmose familiale, refusant de supporter l’hiver rigoureux de la Ville Lumière, préférant rester à Marrakech et flâner dans ses rues ensoleillées», écrit le journal. Et de poursuivre : «Elle est plus obsédée par le maintien de son image glamour que par le devoir naturel de prendre soin de son mari.»

Elle a également été accusée d’afficher “une bien fausse cool attitude “, d’être “dédaigneuse et méprisante”, “colérique et agressive”, “narcissique”, “ego démesuré” et d’avoir un “souci disproportionné pour l’apparence et l’image”.

Trois jours plus tard, “Le Crapouillot marocain” revient à la charge. L’attaque était plus directe cette fois-ci.

Lalla Salma est décrite comme une femme «méprisante» avec un caractère «colérique et agressif» qui persiste aussi à «affronter ses belles-sœurs de la famille royale». Elle le fait malgré les «rappels récurrents à l’ordre» de son mari le souverain.

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Au mois de janvier 2018, la presse people française s’interrogeait aussi sur la présence du prince Hassan à la place de la Princesse Salma, l’épouse du roi, lors d’un dîner offert à Paris par le couple présidentiel français à l’occasion du sommet sur le climat. Cette nouvelle absence de la first lady marocaine a attiré l’attention de la presse.

Cette fois-ci, elle a manqué à la photo de famille prise par le roi dans sa chambre à l’hôpital de Neuilly Sur Seine après une opération cardiaque. Face aux nombreuses questions posées sur cette absence de la première dame du Maroc, les journalistes et bloggeurs marocains ont commencé à se poser publiquement des questions. D’aucuns se demandent si cette absence de la première dame ne constitue pas une annonce de divorce.

D’ailleurs le très pieux et vénéré Mohammed VI, descendant du Prophète, a reçu la visite de Mélanie Amar, une candidate de télé-réalité ayant participé à la sixième saison du Bachelor 2016. Cette juive algérienne de 27 ans est devenue la mannequin préférée du Commandeur des croyants. Mélanie a en effet publié une photo d’elle en présence du Roi du Maroc Mohammed VI précisant, selon le journal espagnol El Confidencial, qu’elle avait dîné avec lui.

Comme tout les dirigeants musulmans, Mohammed VI veut laisser son peuple dans l’ignorance et museler les gens.  Cette condamnation est une illustration supplémentaire de l’état catastrophique de la liberté de presse au Royaume.

La présence de nombreux journalistes parmi les plus de 5 000 personnes incarcérées pour des raisons politiques inquiète les partenaires occidentaux du Maroc, pays qui est déjà un mauvais élevé dans le classement de la liberté de la presse établi par Reporters Sans Frontières (RSF).

Le Maroc figure à la 133ème place sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse en 2017, derrière l’Afghanistan, le Liberia ou encore le Niger. Plusieurs figures du monde politique ou de l’entreprise ont ainsi été condamnées et forcées de quitter le pays. Le Maroc refuse de modifier sa loi sur le crime de Lèse-majesté.

Le quotidien espagnol El País, daté du 16 février 2012, a été censuré au Maroc au motif de la présence d’une caricature du roi Mohammed VI.

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Une volonté d’intimider la société civile

Écrire et informer sur les affaires de corruption est aussi un crime au Maroc.

Le mois dernier, quatre journalistes de la presse écrite et électronique ont été poursuivis devant le tribunal de première instance de Rabat pour diffusion d’informations confidentielles mais néanmoins «vraies» concernant une commission d’enquête parlementaire sur la situation de la Caisse marocaine des retraites.

Leur procès, dont la première audience a eu lieu le 25 janvier 2018, a été reporté au 8 mars parce que l’un des prévenus n’était pas présent. Le même jour, une centaine de manifestants, dont des journalistes, des militants et des syndicalistes, se sont rassemblés devant le tribunal pour défendre la liberté de la presse et soutenir les quatre journalistes. Les peines encourues varient entre 1 et 5 ans de prison. Ces journalistes d’Al Massae, Akhbar al Yaoum et Aljarida24 sont poursuivis pour avoir publié des extraits d’une enquête parlementaire sur des soupçons de corruption à la Caisse marocaine des retraites.

Écrire et informer sur un mouvement de protestation social est aussi un crime au Maroc.

Reporters sans Frontières (RSF) a fustigé, l’an dernier, les poursuites judiciaires à l’encontre de 5 journalistes pour leurs articles sur la révolte du Rif. Abdelkabir al Horr, le fondateur du site d’information généraliste Rassdmaroc, a été condamné 1er février 2018 à quatre ans de prison ferme par la Cour d’appel de Rabat.

Il était poursuivi depuis août 2017 pour “apologie du terrorisme, incitation à une manifestation interdite dans la région du Rif et insulte à corps constitué“. Le fondateur du site d’information indépendant a été arrêté le 6 août dernier à Marrakech puis transféré à Casablanca. Il a été même jugé un magistrat spécialisé dans les affaires terroristes à Rabat.

Quatre autres journalistes-citoyens et collaborateurs de médias ont été arbitrairement détenus pour avoir couvert la révolte du Rif et la région d’Al-Hocaïma. Ces journalistes qui n’ont fait que leur travail d’information suite à leur couverture des événements.

Le Maroc s’apprête pourtant à déposer le 15 mars 2018 sa candidature à l’organisation de la Coupe du monde 2026.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Ftouh Souhail pour Dreuz.info.

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