Publié par Guy Millière le 14 avril 2018

Il est curieux et inquiétant de constater que des lecteurs en nombre apparemment croissant manifestent une mansuétude aveugle vis-à-vis de la Russie de Poutine, de l’Iran des mollahs et de la Chine fasciste.

Cette mansuétude aveugle se retrouve assez largement dans la presse française et chez des analystes du danger islamique qui persistent à voir celui-ci incarné essentiellement par l’Arabie Saoudite et semblent ignorer tout des bouleversements géopolitiques en cours au Proche-Orient.

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Oser écrire que la Russie “cherche la paix” et l’”organise pragmatiquement” me fait penser à ce qu’écrivaient les compagnons de route au temps ou l’Union Soviétique existait encore

Elle conduit d’aucuns à accuser les Saoud de crimes de guerre au Yémen en oubliant totalement les activités des milices djihadistes Houthi qui ont été mandatées par leurs maîtres à Téhéran pour s’emparer du Bab el-Mandeb. Elle conduit à la publication d’articles qui relèvent de la propagande de bas étage plus que de l’analyse géopolitique et qui me conduisent à me demander qui finance cette propagande.

Un article publié récemment dans Le Figaro sous la signature d’une certaine Caroline Galacteros est particulièrement suspect et nauséabond.

Oser écrire que la Russie “cherche la paix” et l’”organise pragmatiquement” me fait penser à ce qu’écrivaient les compagnons de route au temps ou l’Union Soviétique existait encore : comment peut-on oser écrire cela sans passer pour un crétin absolu ? Ajouter que “la Russie a réussi son retour sur la scène mondiale” montre qu’on est atteint de poutinite aiguë, la maladie qui s’attrape en léchant les pieds du tyran qui règne a Moscou. Ajouter ces mots, “résilience populaire syrienne” relève de la complicité de crime contre l’humanité. Parler un peu plus loin de l’Iran en évoquant “l’émergence régionale” au “niveau sociétal, culturel, technologique et commercial” du régime que dirige l’antisémite fanatique Ali Khamenei, fournit une preuve supplémentaire de complicité de crime contre l’humanité. La suite de l’article annonce la couleur en attaquant l’Alliance atlantique, en évoquant positivement un ordre mondial dominé par Pékin, et en montrant une nostalgie pour les années Obama.

Il manque à l’article un souhait explicite de destruction d’Israël pour qu’il soit complet: ce sera sans doute pour une prochaine “analyse”.

Remettons dans ce contexte les points sur les i

  • Au temps où l’Union Soviétique existait, le monde occidental se trouvait appelé “monde libre” pour une raison très claire : il y avait d’un côté des pays défendant les valeurs du droit, de la démocratie et de la liberté, et d’un autre côté des régimes totalitaires. Il y avait dans le monde libre des adeptes du totalitarisme, et les compagnons de route auxquels je fais allusion plus haut. Adeptes du totalitarisme, les compagnons de route pouvaient se dire “pacifistes” et hostiles à la guerre, “anti-impérialistes”, etc. Ils ont adopté au fil du temps quasiment toutes les causes infectes : ils ont été du côté de Castro à Cuba, du côté des communistes vietnamiens au Vietnam et de Pol Pot au Cambodge, et, bien sûr, du côté des terroristes “palestiniens”. Quand Reagan a fait pression sur l’Union Soviétique, ils ont été anti-américains et ont rêvé d’habiter la “maison commune” proposée par Gorbatchev. En Europe, ils ont été, toujours, hostiles à l’alliance atlantique, sans laquelle l’Europe occidentale aurait été absorbée dans le bloc soviétique dès le début des années 1950. 
  • Depuis la chute de l’Union Soviétique, obtenue grâce à la mise en œuvre de la doctrine Reagan, tant décriée par les adeptes du totalitarisme et leurs compagnons de route, le monde est devenu un peu plus compliqué, mais pas tant que cela :
    • La Russie est passée par une phase de chaos, puis a été reprise en main par un ancien du KGB qui n’a cessé de montrer sa nostalgie de la délétère puissance soviétique, Vladimir Poutine. Celui-ci, plutôt que de chercher à intégrer le monde libre (ce qui aurait été possible) a fait d’autres choix et a considéré que tout rapprochement des anciennes républiques soviétiques et des anciens pays soumis au pacte de Varsovie avec le monde libre était une menace pour la Russie.
    • Il s’est placé en position de rivalité hostile avec les Etats-Unis et a cherché à placer l’Europe occidentale sous influence (avec un certain succès).
    • Il a appuyé tous les pays hostiles au monde libre, et toutes les dictatures qui étaient alliées de l’Union Soviétique : le Cuba de Castro et le Venezuela de Chavez en Amérique latine, la Corée du Nord et le Vietnam en Asie, la Syrie et l’Iran au Proche-Orient.
    • Il est devenu allié stratégique de la Chine, et l’adjectif fasciste que j’utilise pour qualifier la Chine est adéquat.
    • Le régime chinois est un régime de parti unique qui a substitué au communisme un nationalisme aux accents bellicistes et conquérants, qui repose sur une armée omniprésente, intimide les pays qui l’entourent et utilise des moyens mercantilistes pour s’efforcer de dominer le monde.
    • L’Iran depuis la chute du shah en 1979 a été la principale force de déstabilisation au Proche-Orient et le principal soutien au terrorisme islamique : les mollahs ont soutenu et soutiennent al-Qaida, le Hezbollah, le Hamas et une multitude d’autres groupes djihadistes sur les cinq continents. Le seul groupe islamiste qu’ils n’ont pas soutenu a été l’Etat Islamique fondé par Abou Bakr al Baghdadi. Voir l’Iran essentiellement sous l’angle sunnisme-chiisme est procéder à une analyse fausse : le régime iranien est un régime révolutionnaire islamique et soutient fondamentalement le djihad contre le monde libre. Il peut s’allier avec des groupes sunnites pour peu qu’ils déstabilisent le monde libre et pour peu qu’ils s’en prennent aux régimes musulmans alliés du monde libre. Il a été l’allié de Mohamed Morsi en Egypte, et a eu longtemps des liens étroits avec le Qatar et les Frères musulmans. 

Les années Obama ont été désastreuses (j’ai publié un livre appelé Le désastre Obama*). Obama a pratiqué l’apaisement avec tous les ennemis du monde libre et est allé si loin que cela s’est apparenté à de la complicité.

Sous Obama,

  • la Corée du Nord est devenue effectivement puissance nucléaire grâce à des moyens fournis par la Russie et la Chine, puis a coopéré avec l’Iran en matière nucléaire ;
  • la Chine s’est emparée peu à peu des eaux du commerce maritime en mer de Chine et a construit une base militaire à Djibouti, en face du Yémen, elle a continué sa politique prédatrice vis-à-vis de la propriété intellectuelle d’entreprises américaines ;
  • des révolutions islamistes ont eu lieu, avec assentiment américain, en Tunisie, en Egypte, au Yémen ;
  • le régime libyen a été renversé au profit de factions islamistes ;
  • le départ des troupes américaines d’Irak a permis la création de l’Etat Islamique ;
  • la Turquie est passée sous régime islamique ;
  • une tentative de renversement du régime Assad en Syrie par les Frères musulmans a conduit à la guerre civile qui a ravagé le pays ;
  • le Hezbollah s’est emparé du Liban ;
  • le Hamas qui avait pris contrôle de Gaza en 2007 y a créé un régime terroriste islamique ;
  • des flux d’invasion islamique ont déferlé sur l’Europe depuis la Libye et la Turquie ;
  • Israël a été mis sous pression terroriste et diplomatique intense ;
  • et pour finir, l’Iran a reçu 1600 milliards de dollars utilisés aussitôt pour la cause du djihad, pour tenter de créer une hégémonie régionale, pour acheter du matériel militaire et des installations nucléaires à la Russie, pour faire fabriquer des bombes atomiques en Corée du Nord, et pour acheter des gouvernements européens.
  • Enfin, Obama a permis à la Russie de reprendre pied militairement en Syrie au côté de l’Iran et du Hezbollah.

Que certains en France aient la nostalgie des années Obama est bien davantage qu’une honte. 

Trump s’efforce de remédier au désastre Obama, et il avance

  • Les pressions extrêmes sur la Corée du Nord et sur la Chine ont conduit Xi Jinping à convoquer Kim Jong-un à Pékin et a exigé de lui une dénucléarisation, qui sera l’objet de la rencontre qu’il aura bientôt avec Trump lui-même (les auteurs des articles disant que Trump allait “provoquer une guerre” menée par le tout puissant Kim Jong-un devraient apparaître comme ce qu’ils sont : des imposteurs).
  • Xi Jinping vient par ailleurs de céder à la plupart des exigences de Trump en matière de commerce et de propriété intellectuelle.
  • Trump entend endiguer et asphyxier le régime iranien et sortir de l’accord de juillet 2015, qui est quasiment un feu vert pour l’acquisition de l’arme nucléaire par les mollahs et pour la sanctuarisation du régime, et il sait ce qu’oublient délibérément les propagandistes pro-iraniens en France : que l’Iran des mollahs est plus que jamais le principal soutien au terrorisme islamique. “L’émergence régionale” de l’Iran est une émergence djihadiste, le rôle “sociétal, culturel, technologique et commercial” de l’Iran est au service du djihad, et ceux qui l’approuvent sont au service du djihad et, puisque c’est le but ultime de l’Iran au Proche-Orient, au service de la volonté de destruction d’Israël.
  • Trump met en place une alliance d’endiguement de l’Iran en s’appuyant sur un rapprochement entre Israël et une Arabie Saoudite que Mohammed ben Salman s’efforce de changer pour en faire davantage un allié du monde libre. 
  • La guerre que Mohammed ben Salman mène au Yémen contre les milices Houthi sert le monde libre en empêchant la prise du Bab el Mandeb par l’Iran. 
  • La gestion de la Turquie est délicate et la Turquie islamiste est l’un des cadeaux les plus empoisonnés laissés par Obama : la Turquie est dans l’OTAN et l’en exclure est difficile dans l’immédiat car les bases américaines, Incirlik en particulier, sont importantes pour la présence américaine dans la région. Erdogan a soutenu l’Etat Islamique, puis s’est rapproché de la Russie et de Poutine, et semble prêt à s’allier tactiquement à l’Iran au nom du djihad, tout en espérant supplanter l’Iran en tant que leader islamique régional.

Parler de “résilience populaire syrienne” est absolument répugnant

La Russie ne cherche pas la paix en Syrie et ne l’organise pas “pragmatiquement”. Elle contribue à permettre a Assad de reprendre le contrôle du pays, en contribuant à des crimes de guerre (500 000 morts, 10 millions de Syriens réfugiés hors du pays). Elle organise avec l’Iran la mainmise iranienne sur le pays et y contribue à des transferts de population destinés à faire du pays une colonie iranienne. 

Parler de “résilience populaire syrienne” est absolument répugnant dans le contexte de ce que je viens de décrire. 

  • Assad règne sur un immense cimetière où gisent les victimes de ses crimes, sur un pays vidé de la moitié de sa population et sur des décombres. Il a utilisé des armes chimiques dans le passé (c’est en Syrie que les armes chimiques irakiennes ont été transférées en 2002). Il en a utilisé à nouveau. Les services américains et israéliens savent tout des mouvements de l’armée syrienne, des Iraniens en Syrie, des troupes russes dans le pays, et des actions du Hezbollah. 
  • Les islamistes qui viennent de se rendre après l’attaque chimique sont aussi criminels qu’Assad, que l’Iran des mollahs, la Russie de Poutine et le Hezbollah, ce qui ne justifie rien. 
  • L’utilisation d’armes chimiques par Assad lui a permis de faire céder les islamistes plus vite. Elle obéit à une logique cynique et a constitué un défi. Assad sait qu’il a l’appui de l’Iran et la Russie. Relever le défi était, et reste, dangereux : l’Iran et la Russie sont plus que jamais dans une logique d’intimidation. Ne pas relever le défi aurait été renouer avec l’apaisement des années Obama, et transmettre, au-delà d’Assad, à la Russie, à l’Iran, et plus loin à la Chine et à la Corée du Nord un message que seuls des suppôts du totalitarisme peuvent vouloir envoyer.

Ce qui menace le monde n’est pas le monde libre, l’administration Trump, Israël, l’Arabie Saoudite. C’est l’axe Moscou-Téhéran-Pékin.

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© Guy Millière pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

Macron tente de tracer des cercles carrés

PS J’ai laissé de côté la position de Macron. Il veut tout à la fois signer des contrats avec l’Iran, ne pas fâcher le Hezbollah, vendre quelque chose à l’Arabie Saoudite, ne pas fâcher non plus Erdogan, et punir Assad. Il veut aussi ne pas paraître inamical envers Israël. Il tente de tracer des cercles carrés. Cela montre un opportunisme et une navigation politiques sans principes. 

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