Publié par Magali Marc le 15 août 2018

Justin Trudeau et Omar Alghabra

Les relations diplomatiques entre le Canada et le Royaume sont en crise depuis que la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, a posté un gazouillis sur Twitter exigeant la libération entre autres de Samar Badawi, la sœur de Raif Badawi. Riyad a répliqué en décrétant un gel des nouveaux échanges commerciaux avec le Canada et a rappelé des milliers d’étudiants fréquentant des universités canadiennes.

Chronologie

Vendredi, 3 août

La ministre Freeland publie un message sur Twitter dans lequel il est indiqué que le Canada est gravement préoccupé par les récentes arrestations d’activistes pour les droits des femmes, notamment Samar Badawi, sœur de Raif Badawi dont la famille est réfugiée au Québec.

Lundi, 6 août

Le royaume saoudien crée la surprise en annonçant l’expulsion de l’ambassadeur du Canada, en rappelant son ambassadeur, en gelant tout nouveau commerce ou investissement avec le Canada, et en rappelant des milliers d’étudiants fréquentant des universités canadiennes.

Dreuz a besoin de votre soutien financier. Cliquez sur : Paypal.Dreuz, et indiquez le montant de votre contribution.

Mercredi, 8 août

  • La crise s’amplifie alors que le Premier ministre Justin Trudeau refuse de présenter des excuses à l’Arabie Saoudite.
  • Le royaume saoudien hausse encore le ton, excluant toute possibilité de médiation et envisageant même de nouvelles sanctions contre Ottawa.

Jeudi, 9 août

On apprend par l’AFP que le Canada a discrètement cherché conseil et soutien auprès de certains de ses alliés, dont l’Allemagne et la Suède, pour tenter de résoudre la crise sans précédent dans ses relations avec l’Arabie saoudite. On apprend aussi qu’Ottawa prévoit de contacter les Émirats arabes unis et le Royaume-Uni, qui entretiennent de solides liens historiques avec Ryad.

Selon un haut responsable gouvernemental ayant requis l’anonymat, la ministre canadienne des Affaires étrangères Chrystia Freeland a échangé avec ses homologues allemand et suédois. L’Allemagne et la Suède ont aussi subi ces dernières années les foudres de l’Arabie saoudite pour avoir critiqué son bilan en matière de droits de l’homme.

Mme Freeland a cherché à savoir comment ces pays étaient parvenus à régler leurs différends et leur a aussi demandé leur soutien, a ajouté le haut responsable.

 

L’influence d’Alghabra

Selon certain, Omar Alghabra serait le cerveau de cette crise d’ingérence contre les Saoudiens. Son passé d’activiste communautaire dans les milieux islamistes et le fait qu’il a travaillé sans relâche afin de soutenir des initiatives pour le compte des Frères Musulmans canadiens ne plaident pas en sa faveur.

Lise Ravary, chroniqueuse au Journal de Montréal dont je critique souvent les divagations anti-Trump, a écrit en janvier 2016 un article très sérieux concernant Omar Alghabra , estimant qu’aucun média ne parlait de lui. J’en cite ici quelque passages éclairants.

Ami de longue date de Justin Trudeau, le député de Mississauga Centre, Omar Alghabra est secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères. Monsieur Alghabra est ingénieur mécanique, né en Arabie saoudite de parents syriens. Il est arrivé au Canada à l’âge de 19 ans.

En 2004 et 2005, il a siégé comme président de la Canadian Arab Foundation. Quatre ans plus tard, le gouvernement canadien a cessé de subventionner cet organisme déclaré « radical et antisémite ». Deux tribunaux ont confirmé cette décision. La CAF recevait un million par an pour enseigner l’anglais aux immigrants. Selon le National Post, Alghabra, qui avait déjà quitté la CAF, a condamné le geste du fédéral.

Alghabra s’est dit en faveur des tribunaux islamiques au Canada. Il estime que le Hamas et le Hezbollah ne sont pas nécessairement des groupes terroristes. Il a refusé de condamner les attentats-suicide lors d’une entrevue avec The Jewish Tribune en 2006.

En 2007, Alghabra était invité à prendre la parole lors du 33e congrès de l’Islamic Society of North America Canada, avec Tariq Ramadan. Mais après une visite remarquée de Justin Trudeau, ISNA Development a perdu son statut caritatif pour avoir transféré des fonds à des terroristes au Pakistan.

Pour revenir brièvement aux Frères musulmans, rappelons qu’ils ont été chassés d’Égypte par Nasser dans les années 60, et se sont réfugiés en Arabie saoudite.

Ils ont joué un rôle très important dans la pensée politique salafiste. Une rupture est survenue en 1991, lorsque les Saoud ont demandé aux États-Unis de lutter contre la présence de Saddam Hussein au Koweit. Les Frères Musulmans ont dénoncé cette trahison, c’est-à-dire le fait que la monarchie saoudienne laisse les « impies » rentrer sur la terre sainte de l’islam.

Ne ratez aucun des articles de Dreuz, inscrivez-vous gratuitement à notre Newsletter.

L’Arabie saoudite les a expulsé mais lors des « printemps arabes », partout où des élections ont été organisées, les Frères musulmans les ont remportées. On pense, par exemple à Mohamed Morsi qui a été renversé par un coup d’État organisé par l’armée, le 3 juillet 2013, à la suite d’un vaste mouvement de protestations populaires contre le contrôle de l’État par les Frères Musulmans.

 

Conclusion

Il est intéressant de voir comment le ministre des finances, Bill Morneau, le premier ministre Trudeau et Mme Freeland font tout un plat de la défense des valeurs canadiennes à l’étranger, mais n’ont pas de problème avec les valeurs saoudiennes quand elles sont appliquées au Canada, telles que le port du niqab pendant les cérémonies de citoyenneté et dans les bureaux de vote lors d’élections démocratiques, et la séparation des hommes et des femmes dans les mosquées.

Ils n’ont apparemment aucun problème avec les Frères Musulmans qui prônent l’application de la charia au Canada.

Qui plus est, on peut se demander, pourquoi Mme Freeland n’a pas réagi lorsqu’une femme iranienne, Shaparak Shajarizadeh, a été arrêtée et condamnée à 20 ans de prison pour avoir retiré son foulard islamique lors d’une manifestation. D’après son avocat, Mme Shajarizadeh a été battue et torturée lors de son incarcération.

La ministre Freeland n’a pas non plus twitté lorsqu’une autre Iranienne, Maedeh Hojabri, une gymnaste de 18 ans, a été emprisonnée et fouettée pour s’être prise en vidéo, dansant sur de la musique occidentale et violant le code vestimentaire islamique de l’Iran.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Magali Marc (@magalimarc15) pour Dreuz.info.

Sources:

Inscrivez-vous gratuitement pour recevoir chaque jour notre newsletter dans votre boîte de réception

Si vous êtes chez Orange, Wanadoo, Free etc, ils bloquent notre newsletter. Prenez un compte chez Protonmail, qui protège votre anonymat

Dreuz ne spam pas ! Votre adresse email n'est ni vendue, louée ou confiée à quiconque. L'inscription est gratuite et ouverte à tous