Publié par Dreuz Info le 15 novembre 2018

Une lettre anonyme, récemment découverte dans les archives de la Bibliothèque nationale, offre un aperçu d’une période de crise où les habitants de Tel-Aviv étaient prisonniers dans leurs propres maisons.

Le contexte :

Nous sommes en 1945. Une rébellion est en cours.

Les rues de Tel-Aviv sont presque vides mais elles ne sont pas tranquilles. Le bruit de l’acier sur l’asphalte brise l’immobilité de la nuit, alors que les chars roulent dans les quartiers résidentiels. Tous les deux ou trois pâtés de maisons, des soldats britanniques se positionnent au coin des rues, armés de mitrailleuses. Un couvre-feu a été fixé. Ceux qui s’aventurent à l’extérieur sont, au mieux, arrêtés. Les habitants de la première ville hébraïque se retrouvent sous le regard méfiant de leurs supposés protecteurs.

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Aux hommes de la 6e Division aéroportée

Je vous écris en tant que simple citoyen de Tel-Aviv pour vous dire ce que la plupart d’entre nous ressentons en ces jours de déchirement et d’amertume.

Vous occupez notre ville depuis près d’une semaine. Vous nous avez enfermés dans nos maisons de jour comme de nuit parce qu’une foule de voyous a fait des choses qui, lorsqu’elles se produisent à Liverpool ou à Glasgow, sont traitées par la police en quelques heures, sinon quelques minutes. Vos chars roulent dans nos rues, vos avions bourdonnent au dessus de nos toits, vos roquettes illuminent nos cieux. C’est une belle petite guerre des nerfs contre les citoyens pacifiques d’une ville moderne.

Pensez-vous nous avoir fait peur ?

Parmi les 200 000 Juifs de Tel-Aviv, il n’y a pas une seule famille qui n’ait perdu un parent dans les camps de la mort et les chambres à gaz d’Hitler. Pensez-vous que les gens qui ont vécu ces agonies vont être effrayés par la vue des chars d’assaut ou les traces lumineuses des roquettes ?

Je suis sûr qu’un bon nombre d’entre vous détestent toute cette horrible affaire. Vous n’êtes pas des soldats engagés. Vous êtes les citoyens libres d’un pays libre qui se sont unis pour combattre la pire tyrannie du monde. Vous avez fait votre travail et vous l’avez fait avec bravoure. Vous occupez maintenant un emploi très différent. On vous a envoyé dans ce pays, on vous a dit de “combattre les Juifs”, c’est-à-dire de briser la résistance d’un peuple désespéré contre une trahison des plus horribles.

Cela fait près de trente ans qu’un gouvernement britannique, avec le soutien de toutes les nations alliées, s’est engagé à aider les Juifs à reconstruire leur maison nationale en Palestine.

Vous pouvez voir de vos propres yeux l’évolution de cette politique dans ce pays. Elle a produit rien de moins qu’une nouvelle civilisation. Un esprit nouveau a ressuscité cette terre ancienne, dont vous voyez la preuve dans cette ville de Tel-Aviv, dans les colonies agricoles juives, dans la nouvelle Jérusalem et Haïfa, dans l’Université hébraïque et dans les innombrables collèges et institutions publiques, dans les nouvelles conditions de vie tant des Juifs que des Arabes. Pour la première fois, après des siècles de dispersion et de dégradation, les Juifs marchent à nouveau debout sur le sol ancien de leur race. Ils n’ont qu’un seul but et qu’un seul désir : ramener dans ce pays le reste des Juifs persécutés et torturés d’autres pays pour leur donner un foyer entre eux.

Le gouvernement britannique a décidé que ce ne sera pas le cas.

Les Juifs, dit M. Bevin*, doivent rester en Europe et aider à “reconstruire sa civilisation”. Peu importe qu’ils veuillent fuir aussi vite que possible les pays qui sont couverts des cimetières de leurs proches. Peu importe que toute l’Europe soit pleine de leurs ennemis et que six mois après la chute des nazis, les Juifs soient encore tués et persécutés dans les pays libérés du joug nazi. Jamais auparavant les Juifs n’avaient eu autant besoin de ce foyer national et jamais auparavant ses portes n’avaient été aussi efficacement verrouillées sur leur visage.

Aucune commission d’enquête, comme l’a promis M. Bevin, n’est nécessaire pour établir le fait que les survivants juifs de la terreur nazie veulent secouer la poussière de l’Europe tachée de sang et trouver un refuge et un foyer parmi leur propre peuple dans ce pays. Aucune commission d’enquête n’est nécessaire pour prouver que la Palestine peut absorber ces survivants mieux et plus rapidement que n’importe quel autre pays sur terre et transformer des épaves en membres utiles de la société. Aucun homme qui connaît les faits ne doute que la commission de M. Bevin ne représente rien d’autre qu’un vieux stratagème de faillite pour gagner du temps afin de trouver quelque chose d’autre.

Nous ne nous faisons pas d’illusions sur ce qui nous attend. Nous savons que vos avions et vos chars d’assaut peuvent transformer Tel-Aviv, en quelques heures, en un désert de sable, comme c’était le cas avant que nous commencions à le construire il y a trente ans.

Ils veulent que vous finissiez le travail qu’Hitler et Himmler ont commencé – écraser les Juifs

Nous savons que vous pouvez transformer en poussière toute la Palestine juive, nos villes et nos colonies, nos écoles et nos collèges. La force est de votre côté, mais la vôtre n’est plus une bonne cause. Vous vous battez pour les Pashas arabes qui veulent voir la Palestine réduite à nouveau à l’état de désolation et de stagnation dans lequel nos pionniers l’ont trouvée il y a cinquante ans. Vous vous battez pour les magnats du pétrole qui, au nom de leurs profits, sont prêts à sacrifier aux Pashas et aux Effendis tout ce que nous avons construit dans ce pays avec notre sueur et nos larmes. Se soucient-ils du progrès et du développement ? Ils veulent que vous finissiez le travail qu’Hitler et Himmler ont commencé – écraser les Juifs. Cette jeune ville prospère qui a donné refuge à des milliers de personnes qui, autrement, seraient mortes dans les chambres à gaz nazies, doit-elle être détruite par vos bombes et tanks ? Nos colonies agricoles dont on a tant parlé et écrit et où tant de vos camarades ont trouvé le repos et la détente dans les heures les plus sombres de la guerre, seront-elles transformées en marécages et en déserts rocheux comme au bon vieux temps de la mauvaise gestion arabe ?

Vous êtes assez bien armé pour faire ce sale travail, même si vous risquez de rencontrer la résistance désespérée d’un peuple qui n’a plus rien à perdre.

Mais ni vos chars ni vos avions ne briseront notre détermination à reconstruire ce pays qui reste notre foyer national, quoi qu’en disent M. Attlee et M. Bevin. Vous pouvez détruire tout ce que nous avons construit et dans le sillage de vos chars et de vos batteries, le Pacha et les Bédouins vont rétablir leur règne dévastateur. Ce ne sera pas notre fin, mais ce sera certainement la fin du règne et de la gloire britanniques dans ce pays. D’autres viendront des quatre coins de la terre et reconstruiront ce que vous avez détruit.

Aucune force sur terre ne peut nous empêcher de retourner à la terre où l’histoire a jeté notre destin.

Tel-Aviv, novembre 1945

Citoyen de Tel-Aviv

* Le ministre des Affaires étrangères Ernest Bevin a mis fin à l’optimisme des juifs le 13 novembre 1945. Il a déclaré au Parlement que les restrictions à l’émigration continueraient, ajoutant que la grande majorité des survivants de l’Holocauste devraient plutôt contribuer à “reconstruire la prospérité de l’Europe”.

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Source : https://www.jpost.com/Israel-News/Newly-discovered-1945-letter-reveals-how-Tel-Aviv-survived-a-British-siege-571886

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