Publié par Pierre Lurçat le 16 novembre 2018

La question la plus préoccupante que soulèvent les événements des dernières semaines à la frontière de Gaza – au-delà même des capacités offensives grandissantes du Hamas, qui se sont manifestées lors du dernier round d’affrontements, trop vite avorté – est celle de savoir si le gouvernement de Binyamin Nétanyahou n’est pas tombé dans le piège du Hamas, consistant à vouloir monnayer une paix illusoire en “achetant” la tranquillité, selon le modèle de la “pax islamica” et du statut de la dhimma.

1 – Cessez-le-feu ou guerre unilatérale ?

Selon ce modèle, Israël aurait “payé” un cessez-le-feu temporaire, en renonçant une fois de plus à mener l’opération militaire qu’il ne cesse de repousser depuis des mois, et en laissant de nouveau entrer à Gaza des matières premières et l’argent du Qatar, dans ce qui ressemble de plus en plus à une forme de chantage, conforme à la conception musulmane des relations avec les dhimmis, c’est-à-dire avec les protégés de l’islam.

Une guerre unilatérale

En réalité, la récente opération contre un chef militaire du Hamas n’a pas mis le fin au cessez-le-feu, comme se sont empressés de l’affirmer les médias en Israël et ailleurs. Car ce qu’ils qualifient hâtivement de cessez-le-feu est en réalité une situation de guerre intolérable, dans laquelle le Hamas attaque et incendie les champs avoisinants de la frontière de manière incessante depuis des mois. C’est une guerre unilatérale, dans laquelle l’ennemi nous attaque sans cesse, tandis que nous faisons semblant que tout va bien et que la vie continue normalement (“business as usual”).

Les habitants du sud d’Israël ont eu raison de protester, depuis plusieurs semaines, contre cette situation inacceptable, et aussi contre le comble de l’absurde : à savoir l’approvisionnement quasiment ininterrompu (à de rares exceptions) de Gaza en électricité, en carburant et en autres denrées de première nécessité, alors même que les attaques incendiaires et autres se poursuivent contre Israël.

2 – Approvisionner Gaza ou acheter un semblant de tranquillité ?

Cette situation absurde est une insulte au bon sens que rien ne saurait justifier. Aucun impératif, moral ou juridique, ne nous oblige en effet à approvisionner nos ennemis, pendant qu’ils nous attaquent. Il y a là une perversion de la morale, en vertu de laquelle Israël laisse le Hamas bombarder et incendier les localités avoisinantes de Gaza, tout en veillant au bien-être des habitants de Gaza.

J’ai décrit, dans mon livre La trahison des clercs d’Israël, les racines intellectuelles de cette morale dévoyée, qui veut que nous appliquions des normes supérieures à celles de toutes les nations civilisées, à l’endroit d’ennemis qui, eux, ne respectent aucune des normes les plus élémentaires, y compris envers leurs propres citoyens. Il est grand temps de repenser entièrement les normes éthiques de Tsahal, pour lui insuffler une morale juive authentique.

3 – Kippat Barzel ou Kir Habarzel ?

Le système de défense antimissiles “Kippat Barzel” développé par Tsahal depuis quelques années représente certes une prouesse technologique. Mais il représente aussi une défaite, sur le plan militaire et psychologique. Comme l’a reconnu cette semaine une journaliste de Galei Tsahal, la radio de l’armée, ce système a en effet, en fin de compte – au-delà de sa réussite partielle pour intercepter les roquettes tirées depuis Gaza – la conséquence néfaste de nous empêcher de riposter, et de porter ainsi atteinte à notre capacité de dissuasion. Intercepter des roquettes avant leur point de chute est certes appréciable, mais une dissuasion véritable exigerait de mettre l’ennemi hors d’état de les lancer.

A cet égard, Kippat Barzel ressemble à un immense parapluie troué, qui constitue une arme défensive très insuffisante et comporte des effets pervers, en nous dispensant d’une contre-attaque indispensable, comme l’a montré l’amère expérience des dernières années. Kippat Barzel est en réalité la négation du Kir Habarzel – la muraille d’acier – concept développé par Jabotinsky dans son fameux article de 1923, qui est au fondement de la doctrine stratégique de Tsahal. Ce dernier signifie en effet qu’il faut dissuader l’ennemi de nous attaquer, et pas seulement se défendre contre ses attaques incessantes.

Selon cette conception, la paix et la sécurité ne viendront pas en élaborant des systèmes de défense de plus en plus perfectionnés pour intercepter les missiles du Hamas, du Hezbollah et de l’Iran, en faisant comme si Israël était un territoire neutre, placé sous la protection d’un immense parapluie de verre. Elles ne viendront qu’en ripostant avec toute la force nécessaire et en attaquant les ennemis qui nous menacent, portant la guerre sur leur territoire – comme l’a fait Tsahal lors des guerres victorieuses de 1956, 1967 et 1973, jusqu’à ce qu’ils demandent grâce et renoncent à leurs intentions belliqueuses.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Pierre Lurçat pour Dreuz.info.

PS : Mon dernier livre, Israël, le rêve inachevé(éditions de Paris/Max Chaleil), sortira en librairie la semaine prochaine.

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