Publié par Jean-Patrick Grumberg le 4 décembre 2018

Cela fait des années que j’entends, depuis l’autre bout de l’Atlantique, que “ça va péter”. Cela fait des années que je réponds, persifleur : “ah bon ? Il y a une promo ‘deux déguisements de Superman pour le prix d’un’ à Auchan” ?

Je n’ai jamais imaginé les Français faire leur “printemps arabe”. Je ne les imagine pas abattre leur mur de Berlin fiscal. Ils vivent dans un enfer fiscal et ne réagissent pas. Aucun de leurs partis politiques, aucun politicien ne milite pour créer un paradis (fiscal, car l’argent ne fait pas le bonheur, mais il y contribue) où les gens seraient heureux comme le peuple suisse.

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Mais il vient résolument de se passer quelque chose de nouveau, du jamais vu, qui m’oblige à faire une pause et regarder ce que les journalistes ne voient pas :

  1. La première chose, sans doute la plus importante, est que les violents activistes, identifiés à l’extrême gauche et à l’extrême droite, se sont ligués contre les élites.
  2. La seconde est que je n’ai jamais entendu des militants d’extrême droite réclamer moins de taxes, j’ai toujours entendu les activistes d’extrême gauche exiger qu’on taxe plus, et ces deux groupes sèment le chaos avec ceux qui protestent contre une taxe de trop, celle qui a fait déborder les citernes.
  3. Depuis le début de ce mouvement, je n’ai ni vu ni entendu les islamistes et les activistes musulmans. Et pourtant, ce sont de grandes gueules. Ils savent faire entendre et imposer leurs revendications religieuses. Sauf erreur, ils sont aux abonnés absents. D’ailleurs les terroristes n’ont – et c’est heureux – pas profité de la chienlit pour commettre le moindre attentat. Aucun policier n’a été égorgé. Allo Allahou Akbar ?
  4. Le mouvement a – pour de vrai cette fois – démarré sans aucune coordination : on ne trouve nulle part l’intervention insidieuse de George Soros, qui est dans tous les mauvais coups, toutes les manifestations “spontanées” dont on constate ensuite qu’il finance la plupart des groupes d’activistes.
  5. Les politiques qui soutiennent le mouvement devraient avoir honte d’eux-mêmes (oui je sais, c’est spéculatif, un politique n’a jamais honte de rien, car il n’est redevable de rien) : aucun d’entre eux n’a jamais ouvert la bouche contre la situation qui tue les Français à petit feu. Aucune n’a jamais réclamé une baisse générale massive des dépenses de l’appareil d’État et des taxes – façon Trump. Et surtout pas le Front national. Quand ils paradent à la télé pour défendre les Gilets jaunes contre le gouvernement, c’est contre leur propre aveuglement et déficience d’idées neuves qu’ils parlent.
  6. Les syndicats – les seuls à pouvoir faire descendre des dizaines de milliers de lycéens de 14-15 ans contre la baisse des retraites qu’ils toucheront 50 ans plus tard en faisant croire que c’est leur préoccupation numéro un (interdit de rire) – ces syndicats n’ont pas réussi à récupérer le mouvement. Les politiques non plus. Personne ne contrôle personne.
  7. Les revendications des Gilets jaunes veulent tout dire et son contraire. Il est impossible d’appréhender la moindre cohérence. Car il n’y en a aucune. Certains disent que c’est la copie carbone du programme des Insoumis. Si c’est le cas, c’est dix fois plus d’impôts et taxes à l’arrivée – pas exactement l’esprit des revendications ! Si c’était le cas, 84% des Français ne soutiendraient pas le mouvement : le programme  des Insoumis n’a pas hissé son dirigeant au pouvoir, ou alors j’ai raté un épisode.
  8. 84% des Français soutiennent les Gilets jaunes, c’est du jamais vu. Voilà des dirigeants politiques qui paniquent en fouillant frénétiquement dans leurs cours à l’ENA comment appréhender ce qui se passe et ce que cela signifie. Mais leurs têtes d’œufs de profs n’ont pas prévu que les beaufs se rebiffent. Ils sont dans la panade totale – il n’y a pas encore de doctrine anti-Gilets jaunes.

Macron tombe de Jupiter et découvre la Terre

Vous avez un président Macron – il n’est pas pire, mais pas mieux que les précédents – qui est arrivé au pouvoir avec la grosse tête parce qu’il n’avait que 38 ans, et parce qu’il a fait campagne en se moquant des électeurs en affirmant constamment une chose et son contraire.

Vous avez un président Macron qui à mon sens, n’a pas fait l’erreur d’augmenter trop les taxes, mais trop vite. La cuisson du homard implique de monter doucement la température pour endormir les Français. Macron y est allé trop vite parce qu’il a l’impression que tout lui réussit. Le homard a viré au jaune.

La classe moyenne est écrasée d’impôts pour financer les migrants illégaux. On leur paye des appartements, on les nourrit et blanchit, on les soigne à l’œil, on assure leur éducation, et ce sont des étrangers, des migrants illégaux, qui ne travailleront pas avant de nombreuses années. Pendant ce temps, des hauts-fonctionnaires sont payés 300 000 euros par mois, et l’argent que gagnent les Français sert à changer la moquette de l’Élysée.

Macron a augmenté les taxes sur les carburants pour lutter contre le réchauffement climatique, il se retrouve à lutter contre les Gilets jaunes. Bonjour l’artiste.

Attention à la casse

Les casseurs de droite et de gauche se sont ligués contre les élites et l’establishment disais-je. Je vais faire un constat qui me peine, car j’ai une sainte horreur de la violence, et je pense que la démocratie est son meilleur antidote, et ce qui se passe est le résultat de sa diminution. S’ils n’avaient pas tout cassé, Macron leur aurait fait un doigt d’honneur. Comme Hollande lorsqu’un million de Français sont descendus dans la rue contre le Mariage pour tous : il a fait voter sa loi. S’ils les casseurs n’avaient pas tout cassé, Macron n’aurait pas réuni son cabinet pour chercher à s’en sortir. Mais l’homme a l’instinct animal, et il sent la faiblesse. C’est pourquoi tout peut péter. Des porte-paroles des Gilets jaunes (étonnant qu’un mouvement sans cohérence et sans organisation ait des porte-paroles), viennent de refuser de rencontrer Macron – c’est le premier geste politique et il est d’une puissance effarante : ils veulent faire reculer Macron et non pas se laisser embobiner avec des paroles creuses et des promesses qui n’engagent que ceux qui les entendent.

Les Gilets jaunes sont le reflet de ma perception de la politique française, et je pense être un des seuls à soutenir cette ingrate position : je dis que les Français sont politiquement immatures car ils refusent d’examiner le bilan passé des politiciens pour qui ils votent. Alors ils se réveillent avec la gueule de bois et des gilets jaunes, tout étonnés de constater que les tocards en qui ils avaient placé tous leurs espoirs ne sont que ce qu’ils ont toujours été.

Les revendications affichées des Gilets jaunes sont incohérentes, contre-productives, suicidaires mêmes disais-je. Macron s’apprête à signer le Pacte de l’ONU sur les migrations qui va imposer de prendre en charge un nombre illimité de migrants venus d’Afrique et du Moyen-Orient. Pour l’instant, pas un mot des Gilets jaunes – alors qu’à votre avis, qui va payer la note ?

Conclusion

Le point le plus dangereux de toute cette affaire est que les Français qui ne soutiennent pas la violence ; les Français qui ne sont ni du bord des casseurs d’extrême gauche, ni de ceux d’extrême droite ; qui n’adhèrent pas au vague programme des gilets jaunes, ont pourtant une vision si claire du mouvement qu’ils lui apportent un soutien historique et massif. Immense. 84%. (Je me demande qui sont les 16% contre. Les débiles et les culs de jatte, sans doute).

La raison de ce soutien presque total est que le message vraiment perceptible du mouvement est : “trop c’est trop”. A 84%, même les plus riches, les plus protégés, les mieux nantis ont de l’empathie pour lui.

Le message central des Gilets jaunes n’est ni rouge ni brun ni noir. Il est “on en a ras le bol”.

Les gens ont trop tiré la langue. Ils se sont trop longtemps serré la ceinture pendant que les élites, les dirigeants, les politiques, les députés et sénateurs augmentaient leurs primes et salaires, les hauts-fonctionnaires s’accordaient des émoluments de riches et vivaient grassement.

Macron s’attend à ce qu’ils rentrent dans le rang, retournent dormir et continuent à se faire plumer en écoutant ses belles promesses. Là est l’enjeu et il est risqué.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info.

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