Publié par Jean-Patrick Grumberg le 15 décembre 2018

Les conspirationnistes accusent le Mossad d’être derrière l’élimination du terroriste de Strasbourg. Voici pourquoi cela n’est pas possible.

On sait maintenant que Chérif Chekatt s’est radicalisé en prison. Il avait une affiche de Ben Laden dans sa cellule. Il était surveillé par les services de renseignement. La police devait l’arrêter à son domicile le matin de l’attentat. Par deux fois, les policiers ont raté leur cible et l’ont légèrement blessé avant qu’il ne s’échappe.

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27 condamnations

Comme l’a révélé le procureur de la République de Paris lors d’une conférence de presse, Chekatt a été condamné 27 fois. Vols, violences, outrages, refus de prélèvement ADN… Selon les informations du Parisien, il aurait été incarcéré à Bâle en 2013, puis en Allemagne pour vol. En 2017, à la moitié de sa peine, il est expulsé en France. Il est incarcéré à deux reprises au moins, à Mulhouse et Strasbourg.

Là, selon une source proche de l’enquête, Chekatt devient très pratiquant, très religieux. « Dès 2008, il avait une affiche de Ben Laden dans sa cellule ». Puis il attire l’attention des autorités pour son prosélytisme.

Enfin, la DGSI le repère à sa sortie de prison en septembre 2015. (1)

Fiché S et repéré par la DGSI

Chekatt est fiché S en mai 2016. Selon une source au sein du ministère de l’Intérieur, citée par Le Parisien, il a été surveillé par la police « pendant 18 mois », « avec des techniques classiques allant des filatures à la surveillance de son téléphone »

  • Chérif Chekatt a été incarcéré un peu plus d’un an en Allemagne avant d’être expulsé en France.
  • Il a été signalé par la DGSI au cours d’un séjour en prison de 2013 à 2015 pour violences, radicalisation de sa pratique religieuse de l’islam, et son prosélytisme avaient éveillé les soupçons.
  • A ce titre, il était suivi de «manière assez sérieuse» depuis sa sortie de prison, a expliqué le secrétaire d’État à l’Intérieur, Laurent Nuñez, sur France Inter.
  • En détention, Chekatt «incitait à la pratique de la religion sous une forme radicale, mais rien ne permettait de détecter un passage à l’acte dans sa vie courante», a-t-il précisé (3).
  • Deux des frères de Cherif Chekatt sont également inscrits au Fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT).

Un texte faisant référence au djihad a été trouvé au domicile de Cherif Chekatt mardi matin lors de la perquisition des gendarmes, selon des informations de RMC (7). Il s’agit d’un texte religieux, recopié à la main qui parle “de cavaliers, de laisser place à ceux qui combattent”.

Arrestation (manquée) en décembre pour une tentative de meurtre qui remonte au mois d’août

  • En août 2018, nouvelle affaire judiciaire pour Chekatt. Il participe, avec trois amis, à une expédition punitive meurtrière. La bande veut soutirer de l’argent à un homme et l’a grièvement blessé pendant la tentative de meurtre.
  • Une information judiciaire est ouverte par le parquet de Strasbourg pour « tentative d’homicide » et « association de malfaiteurs ».
  • Lorsque les gendarmes enquêtent sur la tentative d’assassinat pour laquelle il est impliqué, les policiers de la DGSI ne leur communiquent pas la bonne adresse du suspect.
  • Le matin de l’attentat, soit 5 mois après les faits, les gendarmes interpellent les trois individus, dont deux sont connus des services de renseignement pour leur radicalisation à l’islam, mais ratent Chekatt.

De nombreux loupés qui ont tourné au drame

Mohammed Merah, les frères Kouachi, Redouane Lakdim, Mehdi Nemmouche, l’assassinat du père Jacques Hamel à Saint-Etienne-du-Rouvray, autant d’attaques meurtrières qui auraient pu être évitées sans les ratés des services de renseignement français.

Malgré la surveillance, aucun service n’a été capable de détecter les projets d’attentat de Chekatt.

La filière strasbourgeoise (4)

  • Le 26 décembre 2000, une cellule d’Al-Qaida avait projeté un attentat contre la cathédrale, au cœur du marché de Noël.
  • Début décembre 2000, place de la Cathédrale, Mohamed Bensakhria, 34 ans, prépare une attaque terroriste. Son équipe, basée en Allemagne, a mis la main sur des composants chimiques permettant de fabriquer des bombes.
  • Mohamed Bensakhria, ressortissant algérien, délinquant de droit commun classique, s’est radicalisé à la religion islamique en 1994 avant de passer, à la fin des années 90, par les camps d’entraînement afghans. Il est membre du Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat.
  • L’artificier du groupe s’appelle Djillali Benali. Algérien, membre du Front islamique du salut (FIS), cambrioleur et trafiquant de drogue, il est passé lui aussi par l’Afghanistan.
  • Ils attendent (probablement) le feu vert de Londres, où Rachid Boukhalfa, alias Abou Doha, alias “Le Docteur”, un lieutenant d’Oussama Ben Laden, supervise le soutien financier et logistique de l’équipe.
  • Le 23 décembre, Fouhad Sabour, un ancien du GIA radicalisé à l’islam à Londres en 1995, loue une voiture avec Salim Boukhari, un autre Algérien et se rend à Strasbourg.
  • Le 24 décembre, le Mi5, qui écoutait leurs conversations, prévient la police allemande. Boukhari, Sabour, Benali et Lamine Maroni, sont arrêtés. Bensakhria arrive à s’enfuir et se cacher pendant trois jours chez un complice à Strasbourg, dans le quartier de Hautepierre.
  • Un an et demi plus tard, dix autres personnes impliquées dans la préparation de l’attentat écopent de peines allant d’une à dix années d’emprisonnement.
  • 6 octobre 2012, Jérémy Louis-Sidney est abattu dans son appartement du quartier strasbourgeois de l’Esplanade, après avoir ouvert le feu sur les policiers de la brigade de recherche et d’intervention (BRI) venus l’interpeller. Ce musulman converti et pratiquant était à la tête de la cellule Cannes-Torcy à l’origine d’une attaque à la grenade contre une épicerie casher de Sarcelles (Val-d’Oise) en septembre 2012. Il projetait de commettre d’autres attentats en France.
  • De multiples cellules coexistantes et connectées mènent alors jusqu’à l’attentat du Bataclan du 13 novembre 2015. Foued Mohamed-Aggad —l’un des trois terroristes de l’attaque du Bataclan qui a fait 90 morts le 13 novembre 2015 —, était originaire de Wissembourg, au nord du département, à la frontière allemande.
  • Le terme “filière de Strasbourg” a été utilisé au printemps 2016, lors du procès parisien des sept Bas-Rhinois qui, aux côtés de Foued Mohamed-Aggad, étaient passés en Syrie en 2013 et rentrés en France en 2014. Leur “cellule” comptait à l’époque dix jeunes musulmans : en plus du terroriste du Bataclan, décédé sur place, deux éléments du groupe ont péri en Syrie.
  • En novembre 2017, Les dernières nouvelles d’Alsace publient un dossier (5) détaillant la vague de départs en Syrie de plusieurs dizaines de Bas-Rhinois, hommes, femmes et même enfants. Sur les trente-six parcours retracés par DNA, certains avaient projeté de commettre des attentats.
  • Décembre 2015, Oumar Diaw, un djihadiste de Schiltigheim (au nord de Strasbourg), projetait de commettre un attentat à Strasbourg au marché de Noël, au moment de la messe de minuit.
  • Dans le Figaro du 13 décembre (6), Jean Chichizola rapporte que “le Bas-Rhin compte plus de 200 personnes, pour environ 11 000 au niveau national, visées par des fiches actives inscrites au Fichier de traitement des signalements pour la prévient de la radiation à caractère terroriste (FSPRT)”.

Les mosquées de Strasbourg, racine du mal, toujours ouvertes

Tous les médias l’ont dit et répété : Chekatt fréquentait des milieux religieux intégristes de Strasbourg. Pourtant, affirme le site Islamisation.fr (2), “Les mosquées ‘rigoristes’ de Strasbourg [sont] toujours ouvertes, même les plus radicales”. Ils sont la racine du mal, le lieu ou le pratiquant est encouragé à respecter à la lettre les préceptes de l’islam et faire applique la charia.

L’affaiblissement des services de renseignement au cœur de la stratégie de l’Etat islamique

Dans un livre intitulé The Complete Infidel’s Guide to ISIS*, et publié en 2015, Robert Spencer détaillait la stratégie de l’Etat islamique pour conquérir l’Europe. Il explique comment, à mesure que la population musulmane européenne grandit, les services de renseignement collectent d’énormes quantités de données, mais ne peuvent rien en faire :

“À mesure que les pays occidentaux s’appauvriront, leurs agences de collecte de renseignements continueront d’exister, mais elles n’auront tout simplement pas assez de main-d’œuvre (moins d’emplois) pour tout analyser. Avec moins d’attaques de groupes organisés en réseau, et un nombre croissant d’attaques de loups solitaires, il sera plus difficile pour les agences de renseignement d’empêcher une quantité croissante de violence et de chaos de se propager en Occident.”

Chekatt, sa radicalisation islamique était écrite sur son front

A part De Telegraaf (8) premier quotidien des Pays-Bas, aucun grand média à ma connaissance n’a relevé la marque noire située sur le front de Chekatt, et encore moins sa signification.

Voici ce qu’écrit le quotidien hollandais :

“L’histoire derrière la marque [sur le front] est au moins aussi frappante. Un tel endroit est appelé zebibah en arabe et signifie littéralement raisin sec. En réalité, il s’agit d’une marque de prière sombre, qui est considérée comme un “don de Dieu” et qui ne se rencontre que chez les musulmans les plus pieux. La tache est causée par les musulmans qui prient cinq fois par jour, ce qui fait que le front touche le sol au moins 34 fois et crée une tache ou une masse.

Ce spot semble confirmer le ‘comportement de conversion excessif’ de Chekatt, terme qui a peu été mentionné après la fusillade en plein cœur de Strasbourg, mardi soir.”

Pourquoi le Mossad n’a rien à voir dans cette affaire

Je suppose que vous avez compris par vous-même pourquoi il est ridicule de penser que le Mossad soit assez défectueux pour avoir loupé les signes avant-coureurs de cet attentat.

Pour les rares qui n’ont pas déduit que 2+2=4, je détaille.

Vous croyez vraiment que le Mossad aurait pu faire un tel désastre ?

Qu’il aurait relâché une seule seconde ses yeux d’un type qui a été condamné 27 fois, qui avait une affiche de Ben Laden dans sa cellule, qui fréquentait les milieux islamistes, qui faisait du prosélytisme en prison, avait deux frères islamistes, et que les Israéliens ne l’auraient pas suspecté d’être capable de passer à l’acte ?!

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info.

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