Publié par Guy Millière le 31 janvier 2019

En France, la démocratie a depuis longtemps un statut précaire. Et l’état de droit au sens lockéen du terme (rule of law) n’a lui-même jamais vraiment existé.

J’avais, il y a quelques années, publié avec des amis juristes un livre collectif appelé  Avancer vers l’état de droit, qui traitait du sujet.

La démocratie en France a été suspendue lorsque la France est devenue un État autoritaire en 1940, et il n’y a plus eu même le spectre d’un état de droit dans le pays pendant cinq ans.

En 1958, le Général de Gaulle aurait pu créer un régime autoritaire, mais a dit qu’il n’entendait pas commencer une carrière de dictateur.

La Ve République s’est mise en place et, quoi que je puisse reprocher par ailleurs au Général de Gaulle (abandon de l’Algérie au FLN en particulier, posture anti-israélienne et antisémite en 1967), il s’est conduit sur le territoire français de manière assez démocratique.

Sa légitimité ayant été remise en cause par mai 1968, il a provoqué des élections législatives anticipées, puis, lorsqu’il a organisé un référendum un an plus tard et l’a perdu, il est parti.

Après lui, une dérive a pris forme peu à peu.

Les années Mitterrand ont été sordides et immorales.

Les années Chirac n’ont pas valu mieux, et l’élection présidentielle de 2002 a vu s’affronter au deuxième tour un homme corrompu jusqu’à la moelle et un autre totalement diabolisé, ce qui a permis l’élection du corrompu.

Un référendum a eu lieu en 2005, dont le corrompu n’a tenu aucun compte.

Les deux successeurs de Chirac ont été indignes d’une démocratie, chacun dans son style, et ont contribué à ce que se poursuive la déliquescence enclenchée.

Les élections de 2017 ont été une forme de summum dans la dérive.

Un candidat donné favori a été éliminé par une campagne de démolition juridico-médiatique massive.

Un candidat quasiment sans programme et clairement préfabriqué a été vendu à la population par des médias aux ordres comme un baril de lessive et a été élu grâce à l’invocation d’un inexistant « péril fasciste ».

Une assemblée nationale dotée d’une majorité ne représentant pas le peuple a été élue dans un contexte d’autodestruction de plusieurs partis politiques.

Dix-huit mois plus tard, le candidat préfabriqué devenu Président, à force de mépris envers la population, de propos arrogants, de décisions ineptes et de provocations, s’est trouvé face à une révolte.

Plutôt que de prendre en compte celle-ci et d’y répondre de manière humble, aux fins de trouver une solution, il a choisi d’insulter les révoltés et de les écraser par la force.

Et, plutôt que de tenter de se relégitimer en décidant d’organiser des élections anticipées, il a décidé de suivre obstinément sa trajectoire en organisant un simulacre de « grand débat » sous protection policière massive.

Ce simulacre lui permet de mener aujourd’hui campagne pour les élections européennes en disposant d’un avantage absolument écrasant (et illégal), puisqu’il peut mobiliser à son service tout l’appareil d’État et disposer des médias (toujours aux ordres) de façon peu ou prou illimitée, ce qui pourrait lui permettre une victoire aussi frelatée que celle qu’il a obtenue en 2017.

Ce qui se profilerait alors pour 2022 serait une réédition de ce qui s’est passé en 2017, avec une réélection du candidat préfabriqué devenu Président, quand bien même il serait rejeté par la population autant qu’il l’est aujourd’hui.

J’ai parlé voici peu ici de glissement vers un totalitarisme soft.

Je pense que l’expression est pertinente.

Ce qui est en place en France constitue désormais un tel dévoiement de la démocratie qu’il reste des apparences démocratiques, mais seulement des apparences.

En parallèle, tout ce qui pourrait ressembler encore à un état de droit s’estompe.

La police est utilisée d’une manière ignoble et abusive. Son rôle est de maintenir l’ordre, pas de s’en prendre à des manifestants pour blesser et mutiler.

Des émeutes importantes ont eu lieu en France en 2005 (il y en a eu d’autres depuis) : il n’y a pas eu, quelle que soit l’émeute, le nombre de blessés et de mutilés qu’il y a eu en France ces dernières semaines.

L’utilisation de la police est non seulement ignoble et abusive : elle est scandaleuse.

D’autant plus scandaleuse que les bandes de banlieue qui cassent et pillent sont traitées avec bien plus de mansuétude que des retraités portant un gilet jaune, tout comme les anarchistes dits « black blocks ».

Les déplacements et réunions de Macron impliquent de placer des villes en état de siège, comme si la France était en dictature.

Une loi devrait être votée bientôt qui porte gravement atteinte au droit de manifester. Et le spectre d’une loi permettant de s’en prendre pénalement à ce qui sera défini comme de fausses nouvelles continue à planer. 

Ce qui se passe est très grave, honteux, préoccupant. Ce doit être dit.

C’est dit.

Ce devrait être clamé plus largement avant qu’il soit trop tard.

Est-il trop tard ?

 Guy Millière

Adapte d’un article publié  sur les4verites.com

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