Publié par Jean-Patrick Grumberg le 29 mars 2019

Il y a deux ans, je couvrais comme chaque année la conférence mondiale annuelle sur le contre-terrorisme, qui se tient à Herzlya en Israël. Un des intervenants était le Dr Sebastien Gorka, chef stratégique du président Trump. Il a fait une introduction qui est restée gravée dans ma mémoire…

“En matière de lutte contre le terrorisme et le danger extérieur, expliqua Gorka, les Etats-Unis sont un pays tellement puissant, que ses erreurs de stratégie n’ont pratiquement aucune conséquence. Il a une puissance militaire supérieure à celle des quatre autres plus grandes puissances mondiales réunies.

Israël en revanche, est un tout petit pays, il n’a pas droit à l’erreur. La moindre erreur d’évaluation lui coûterait très cher.”

J’ai souvent expliqué à mes lecteurs que je n’aime pas la politique, et que je n’ai aucune opinion politique. Je m’apprête à vous le démontrer car je ne vais pas vous parler politique mais bon sens. Je prends les propositions des politiciens telles qu’elles viennent, et les examine avec mon raisonnement. Qu’elles viennent de droite ou de gauche, il n’y a rien qui m’indiffère plus : une bonne idée est une bonne idée, et une proposition calamiteuse sera toujours calamiteuse.

Il y a autre chose que j’ai retenu dans ma vie : la plupart des politiciens ne tiennent pas leurs promesses.

Ces points importants établis, laissez-moi vous expliquer pourquoi je ne pense pas que Benny Gantz soit le bon candidat pour Israël.

“On sait ce qu’on perd mais on ne sait pas ce qu’on trouve”

Des dirigeants israéliens qui ont fait des erreurs dramatiques, il n’en manque pas, en Israël.

  • Je pense évidemment à Moshe Dayan qui a confié au Waqf le soin de gérer les lieux saints de Jérusalem alors que rien ne l’y forçait (Israël avait gagné la guerre de 67) : on le paye tous les jours.
  • Ariel Sharon, qui en 2005 a décidé de quitter Gaza. On voit également les conséquences à peu près tous les jours : le Hamas est monté en puissance, il s’est armé, a construit des bases de lancement de missiles, et il bombarde les citoyens du sud depuis des années.
  • Yitzhak Rabin qui a – j’ai encore du mal à comprendre – reconnu la légitimité d’une organisation dont le nom disait : “nous allons vous expulser d’Israël” : l’OLP, Organisation de libération de la Palestine de la présence juive. Imaginez s’il n’avait pas fait cette erreur, et avait au contraire déclaré l’OLP organisation terroriste : les Arabes ne nous emmerderaient pas dans les instances internationales.
  • Et Ehud Barak qui en 2000 a offert la moitié de Jérusalem aux Arabes, et leur a concédé 97% des territoires de Judée Samarie.

Dieu merci, les Arabes, cette fois, nous ont sauvés : ils ont refusé l’offre d’Ehud Barak !

Mais nous pourrions ne pas être aussi chanceux la prochaine fois qu’un dirigeant qui est à 40% dans les sondages prend le pouvoir.

Si Gantz est élu, pouvez-vous être sûr, sûr et certain, à 1000% certain qu’il ne fera pas une grosse erreur stratégique, une erreur qui nous coûtera très cher, une erreur dont nos enfants auront à payer le prix pendant longtemps ?

Evidemment non.

Et comme expliquait Sébastien Gorka, Israël n’a pas le droit à l’erreur. La moindre erreur coûte très cher.

Bibi par ci Bibi par là

Voyez-vous, je ne sais pas si Netanyahou est coupable des crimes qui lui sont reprochés : la justice le dira.

Mais je sais une chose : depuis qu’il est au pouvoir, il n’a fait aucune erreur majeure qui mette Israël en danger. Et il a eu à affronter le président le plus redoutable qu’Israël ait connu : Barack Obama. Pire que Jimmy Carter et c’est pas peu dire.

  • Netanyahou a évité chaque coup bas, déjoué chaque piège, et bloqué toutes les tentatives perverses du président Obama.
  • Il a même réussi à se faire réélire alors qu’Obama a envoyé et financé (à hauteur de 300 000 dollars) ses équipes (V15) pour le faire battre lors des dernières élections.

Bibibama

Je sais que les gens ne se rendent pas tous bien compte de ce que représentait le défi Obama pour Bibi.

  • Il a été contraint de faire l’inverse de ce que la sagesse politique lui dictait : surtout ne pas se mettre à dos l’homme le plus puissant du monde, celui du pays le plus puissant au monde, alors que ce pays est supposé être le premier allié d’Israël.
  • Et il l’a fait, et l’histoire a démontré qu’il avait raison.
  • Il a refusé de rencontrer Obama lors de son dernier voyage aux Etats-Unis, et il a été acclamé pendant de longues minutes par le Congrès debout (à part le juif socialiste de service, Bernie Sanders, qui est resté assis).

Comprenez-moi bien : Netanyahou n’est pas parfait. Des erreurs il en fait et il en fera

De sa mollesse avec le Hamas à sa passivité face aux monopoles qui maintiennent les prix artificiellement élevés, en passant par la bureaucratie étouffante qu’il n’a toujours pas matée et l’immobilier qui a explosé à cause de la corruption des Kiboutz (chut, secret d’Etat), je pourrais facilement vous faire la liste des erreurs de Netanyahou.

Mais dans la poudrière prête à exploser, je préfère de loin un Premier ministre qui a fait ses preuves qu’un inconnu.

Je préfère un ami de longue date de Trump qu’un nouveau venu.

Je préfère un type qui a (peut-être) détourné du champagne et des cigares, a essayé de tordre le bras d’un média pour qu’il arrête de le harceler, qu’un nouveau venu qui n’a pas fait ses preuves, dont je ne sais même pas s’il ne sera pas corrompu (hein Ehud Barack!), et qui pourrait prendre des décisions que je regretterai toute ma vie.

Je ne bénis pas Benny

Je ne veux même pas à ce stade analyser les promesses de Gantz : que valent-elles ? Bien stupide celui qui peut dire qu’il les tiendrait.

Face au danger, je ne joue pas à la roulette. Pas avec la vie de nos enfants. Une erreur, et nos gilets, ils ne seront pas jaunes, mais rouges de sang.

Je n’ai même pas besoin de vous barber avec la politique, avec les programmes, la situation économique et sociale du pays : je garde ça pour une autre fois. Je peux dire que Gantz sait conduire Tsahal, mais on n’a pas construit de table de négociation assez grande pour asseoir toute l’armée israélienne autour de lui.

Je n’ai pas besoin de vous citer les deux interviews catastrophiques de Benny à Washington, où il a refusé de répondre aux questions et s’est pris les pieds dans le tapis. Ni de vous dire que l’indiscutable patriotisme, l’amour du pays et l’autorité de Gantz, ça ne fait pas un grand politicien – souvenez-vous de Dayan. Ni qu’un autre grand général patriote qui avait de l’autorité et aimait son pays a trahi son peuple en Algérie, les Français connaissent.

Non je n’ai pas besoin. Car dans cette partie du monde, les mots et les promesses ne valent pas l’expérience de celui qui a fait ses preuves.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info.

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