Publié par Dreuz Info le 9 mars 2019

Alain Minc est verrouillé à double tour. Sur lui tout seul, les conspirationnistes auraient de quoi écrire des milliers de pages. Tout ce qu’il cache, il le fait dire aux autres, aux puissants de ce monde sous influence.

Source : Valeursactuelles

Intellectuel touche-à-tout, homme d’affaires et de médias, essayiste, textoteur du soir d’Emmanuel Macron, Alain Minc fait commerce de ses conseils depuis quarante ans. Un homme d’influence, avec des hauts et “débats”.

Pourquoi vous me regardez comme cela ? Il s’interrompt en plein vol. Au milieu d’une phrase qu’il ne terminera pas. Alain Minc n’aime pas qu’on l’ausculte. Un regard trop insistant, comme si l’on cherchait à lire dans les tréfonds de son âme et voilà que notre homme se braque et se rétracte comme une bernique dans sa coquille. Il s’enfonce dans son fauteuil. S’agrippe aux accoudoirs. Croise les bras, l’air soudainement chagrin, puis se martyrise les phalanges. « Je ne suis pas un gibier de psychanalyste », prévient-il.

Tous ceux qui ont cherché à le faire parler de lui se sont heurtés à cette même impossibilité. Lui si affable, si bavard, capable de deviser aussi savamment d’économie, de finance, de politique, de littérature ou de philosophie, habile à rendre accessible les sciences les plus indigestes, prompt à brosser le portrait des puissants qu’il côtoie et conseille, se raidit instantanément lorsqu’il s’agit de livrer la moindre parcelle de lui-même.

« Je ne m’intéresse pas », dit-il encore, comme pour s’excuser de nous faire perdre notre temps. Alain Minc préfère ériger une barrière « aussi épaisse qu’un mur de centrale nucléaire », selon ses mots, plutôt que de prendre le risque de se mettre à nu une fraction de seconde. « Pudique à l’extrême, il ne fend pas facilement l’armure » , admet Franz-Olivier Giesbert, l’ancien directeur du Point, qui le pratique depuis des années.

Nous voilà prévenus.

Pour percer le coffre-fort Minc, il faut l’attaquer au burin et s’armer de patience. Depuis quarante ans qu’il gravite dans les allées du pouvoir, Alain Minc s’emploie à conserver le plus grand mystère sur lui-même autant qu’il s’applique à faire la publicité de ses idées. Il goûte avec délectation l’analyse prospective. Beaucoup moins l’introspection, un exercice contre nature. Le mieux est encore de s’en remettre au jugement de ses amis. Sa « garde prétorienne », comme il dit drôlement. Pas sûr qu’ils nous soient de quelque secours, mais puisque Alain Minc nous suggère ce détour, on s’exécute au pas de course.

Philippe Labro compte parmi eux.

Chaque dimanche, le romancier retrouve dans un café de la rue Cler Alain Minc, il apprécie jusqu’à plus soif « la curiosité sans borne et le savoir encyclopédique de cet intellectuel tout- terrain ». Entre eux, c’est un dialogue ininterrompu qui dure depuis près de vingt ans, au point que l’essayiste délègue volontiers au journaliste de C8 le soin de « réfléchir sur son compte ».

« Vous défroquez », le tance Michel Pébereau

« Il serait vain de vouloir l’enfermer dans une définition », avertit Philippe Labro, qui préfère insister sur son « goût irrépressible pour l’indépendance et la liberté ». Un début de piste que nous tâchons de vérifier auprès de l’intéressé. « Ce n’est pas faux », élude-t-il. Élève brillant, habitué aux prix d’excellence, Alain Minc suit d’abord la voie royale que le système français prévoit pour ses meilleurs éléments. Il fait ses classes prépas à Louis-le-Grand, intègre les Mines, sort diplômé de Sciences Po, avant de pulvériser le record de points à l’entrée de l’Ena. Il en sort major pour la voie d’administration économique, intègre l’inspection générale des Finances, et le rapport sur l’informatisation de la société qu’il publie avec Simon Nora lui vaut en 1978 un premier best- seller et un début de réputation.

Mais plutôt que de faire carrière dans la haute fonction publique, Alain Minc bifurque pour le privé et rejoint Saint-Gobain, après être tombé sous le charme de Roger Fauroux, son premier patron, un inspecteur des Finances, comme lui. « Vous défroquez », le tance Michel Pébereau, alors directeur de cabinet du ministre de l’Économie. Quand il évoque l’anecdote, Alain Minc en frémit encore d’aise. C’est le début d’une trajectoire protéiforme. L’école de la liberté….

Inscrivez-vous gratuitement pour recevoir chaque jour notre newsletter dans votre boîte de réception

Si vous êtes chez Orange, Wanadoo, Free etc, ils bloquent notre newsletter. Prenez un compte chez Protonmail, qui protège votre anonymat

Dreuz ne spam pas ! Votre adresse email n'est ni vendue, louée ou confiée à quiconque. L'inscription est gratuite et ouverte à tous