
Certains d’entre vous, les plus anciens, se souviendront de ce qui avait été appelée à l’époque « L’affaire Saint-Aubin ».
Une affaire criminelle qui s’est déroulée dans notre XXe siècle et qui, pour certains, est demeurée une énigme. J’ai décidé à présent d’en relater tous les détails, dont certains inconnus jusqu’à présent, car elle m’a atteint personnellement, disons en « dommages collatéraux ».
Je l’ai décrite plus confidentiellement dans mon livre « Un temps ce fut l’Algérie Française»* (Pages 342,343 et 344).
Le 5 juillet 1964, au lieu dit « Les Esclapes », sur la Nationale 7, entre les villes de Puget-sur-Argens et Fréjus, dans le département du Var, un véhicule de marque « Volvo », de couleur noire et blanche, immatriculé en Suisse, dérape et s’écrase contre un arbre.
Ca c’est la version officielle du rapport de la gendarmerie.
A l’intérieur de cette voiture, Jean-Claude Saint-Aubin, 23 ans, et son amie, Dominique Kaydash, fils et fille de commerçants dijonnais, sont tués.
Malgré le témoignage d’un harki, Mohamed Moualkia, qui a assisté à « l’accident » et déclare qu’il a vu un camion militaire non identifié se jeter sur la Volvo puis prendre la fuite, suivi par une « 203 » sur la plaque d’immatriculation de laquelle figure une flamme tricolore, le procureur de la République de Draguignan classe, dix jours plus tard, le dossier « sans suite ».
Mohamed Moualkia décédera d’une manière on ne peut plus suspecte quelque années plus tard, alors qu’il allait témoigner dans une émission produite par TF1 sur ce même sujet.
Qu’en est-il réellement de cette « affaire Saint-Aubin » ?
La guerre d’Algérie est terminée depuis 1962, mais pas en Métropole, où, dans l’ombre de l’état-major du pouvoir gaulliste, constitué d’ex « barbouzes » du SAC et des services secrets, on prépare l’avenir, les prochaines élections et l’élimination d’ex ennemis de l’OAS.
C’est également le cas dans le camp viscéralement opposé à de Gaulle.
C’est la tâche à laquelle s’était attelé le capitaine Sergent, ex responsable de l’OAS-Métro, alors qu’à l’extérieur, en Belgique ou en Italie, Georges Bidault, le colonel Argoud et Jacques Soustelle, remuent la Presse internationale.
L’ex capitaine Pierre Sergent est toujours recherché par toutes les polices, même et surtout les “parallèles”.
Ce 5 juillet 1964, Pierre Sergent se trouve en compagnie de Maître Jean Meningaud, avocat de l’OAS, originaire de Philippeville, et qui fut le speaker des insurgés, lors des “barricades” d’Alger, en janvier 1960, alors que je me trouvais à ses cotés.
Tous deux roulent vers Fréjus à bord d’une voiture de marque Volvo, de couleur noire et blanche et immatriculée en Suisse. (totalement identique à celle du fils Saint-Aubin).
Dès leur arrivée à destination, ils apprennent l’accident et, pour eux, cela ne fait aucun doute : c’était bien leur Volvo qui était visée et qu’il fallait éliminer. Il s’agit plus que certainement d’une « bavure ».
Dès le lendemain, le capitaine Sergent me contacte par téléphone au siège du quotidien « L’Aurore »
Il doit absolument rencontrer un certain ministre, celui qui renseignait si parfaitement l’OAS, afin qu’il intervienne pour que cesse cette « mise à mort » programmée, qui n’a plus lieu d’être.
- Il m’indique comment contacter ce ministre. (Je n’indique pas son nom car il est toujours en vie).
- J’organise cette entrevue lors d’une réunion sur l’hippodrome de Saint-Cloud avec l’aide d’un autre ministre, ami personnel de Madame Léon Volterra, propriétaire d’une écurie renommée, qui sert d’intermédiaire : Ce ministre invite son collègue à assister aux courses.
- Je vais, enfin, savoir qui était notre “taupe” au cours de ces dernières années, l’homme qui nous a si parfaitement renseignés, l’homme qui assistait aux conseils des Ministres.
- Bien entendu, je m’empresse de communiquer ces renseignements à la famille Saint-Aubin, anonymement bien sûr, ce genre de révélations ne se signe pas.
Elles auront permis aux parents Saint-Aubin de diriger leur recherche de la vérité dans la bonne direction.
- Pierre Sergent arrive, je l’introduis dans l’enceinte du pesage, où se trouvent les propriétaires, et la conversation s’engage dans le rond de présentation des chevaux.
- Je n’y assiste pas, mon rôle s’arrête là, mais je sais que Pierre Sergent exige des garanties pour mettre fin à son activité clandestine.
Et bien non, mon rôle ne s’est pas arrêté là.
Quelques minutes plus tard, Pierre Sergent me fait appeler par l’appariteur, qui se trouve à l’entrée de la salle de Presse de l’hippodrome de Saint-Cloud :
- Un photographe vient de les prendre en photo. Bien entendu ce photographe connaît les deux ministres mais ignore qui est l’homme qui s’entretenait avec eux, ignore qu’il s’agit de l’un des hommes les plus recherchés de France, Pierre Sergent.
- Il faut absolument que ces photos disparaissent, qu’elles soient détruites de suite, ce serait un scandale si elles étaient publiées.
- Il me fait une brève description du photographe et je reconnais aisément le fils Recoupé (lui et son père sont, depuis des années, des photographes accrédités des Sociétés de courses de chevaux).
- Je sais que tous deux ont des affinités profondes avec le parti communiste, ils ne le cachent d’ailleurs pas.
Inutile donc d’essayer de les persuader de me remettre ces photos.
- Je retourne dans la salle de Presse juste à temps pour voir Recoupé disparaître dans les toilettes.
- L’appareil de photo est là, posé sur la grande table centrale. Il n’y a personne, je n’hésite pas deux secondes. Je le saisis, passe la courroie autour de mon cou et quitte la salle, en passant par les “balances”.
- Dans le parking réservé à la Presse, se trouve ma voiture, à l’intérieur de laquelle je m’empresse de retirer la pellicule et de la dissimuler.
- Je reviens rapidement vers la salle de presse dans le but de remettre l’appareil à sa place.
- Hélas! La Presse est en effervescence. Recoupé s’est, évidemment, aperçu de la disparition de son matériel et tout le monde le recherche.
- En toute hâte je le dissimule dans le premier endroit qui se présente à mes yeux, un placard à incendie, derrière la lance d’arrosage.
- Manque de pot, en traversant les balances, un employé de la Société des Courses m’a vu avec l’appareil suspendu à mon cou. Il n’est pas sûr que ce soit le même mais presque.
Quarante-huit heures plus tard, je suis convoqué au commissariat de Saint-Cloud.
A l’inspecteur qui m’interroge, j’explique qu’il ne s’agit que d’une simple farce, que l’appareil n’a jamais quitté l’hippodrome.
La preuve, nous partons ensemble et je lui montre le lieu où il se trouve caché : L’appareil est bien là.
Il est rendu à Recoupé, qui ne constate aucune détérioration, uniquement la disparition de la pellicule. Il ne porte pas plainte mais n’en pense pas moins d’un « Pied-Noir » suppôt de l’OAS.
L’affaire n’ira pas plus loin, mais je suis dans l’obligation de remettre ma carte d’accréditation à la Société des Courses.
Pour moi, c’est terrible, car les chevaux sont une partie très importante de ma vie. Je suis rédacteur à « Paris-Turf » et responsable notamment de la rubrique hippique des quotidiens « L’Aurore » et « Le Méridional » de Marseille, et je ne pourrai plus exercer ma profession dans ce milieu, du moins officiellement.
Je conserve tout de même la confiance totale de mon patron, Robert Lazurick.
Mais que faire ? Il me fallait bien préserver le bel avenir politique du ministre en question (Il sera d’ailleurs des plus brillants, puisqu’il deviendra président de la République) ne serait-ce qu’en remerciement pour les services rendus à l’OAS.
- En 1990, le président François Mitterrand et son ministre de la Justice, Robert Badinter, alloueront un dédommagement de 500.000 francs aux parents des malheureuses victimes de cette « bavure d’Etat », pour « mauvais fonctionnement de l’institution judiciaire », découverte de faux documents, disparition de dossiers, reconstitution officielle sur les lieux de la bavure mais secrètement et à huis-clos, révélations d’un colonel, etc.
Il fallait que cela soit dit, mais il y en a tant à dire sur de Gaulle et ses « hommes de mains » et tout est dit dans mon livre « J’accuse De Gaulle* », sans que cela ait été contesté, du moins officiellement !
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Manuel Gomez pour Dreuz.info.
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“Il m’indique comment contacter ce ministre. (Je n’indique pas son nom car il est toujours en vie)”. “Il me fallait bien préserver le bel avenir politique du ministre en question (Il sera d’ailleurs des plus brillants, puisqu’il deviendra président de la République) ne serait-ce qu’en remerciement pour les services rendus à l’OAS”.
Hum…compliqué de voir qui c’est ! Un scoop surprenant!
Chris
Un grand brun ?
Ou un accordéoniste ?
Pas si compliqué que ça… Dans le livre “La défense et la justice” (publié chez Flammarion, 1965), qui relate le procès fait à Maître Jacques Isorni sur plainte du Ministre des Finances de l’époque, Me Isorni déclare avoir eu à sa disposition la quasi totalité des archives de l’OAS constituées par le général Salan à Alger.
Selon ces documents et le témoignage du capitaine Ferrandi, il s’agit de M. Giscard d’Estaing, que Me Isorni présente comme “un personnage à double face”, antigaulliste en 1955 mais participant à des “petits déjeuners-complots et gaullistes” animés par Michel Debré, puis gaulliste à partir de 1960, mais dans l’ombre, antigaulliste “facilitant sciemment l’acheminement de renseignement à l’OAS”…
Etant trop jeune pour avoir vécu cette époque, je me contente de rapporter ce témoignage public, puisqu’il s’agit de propos tenus lors d’un procès.
l’affaire boulin, et les autres crapuleries, le nouveau monde avce benalla ou le député qui frappe un collègue avec son casque de moto font pale figure … le monde de la barbouzerie est à l’image des dirigeants
@patphil
vous avez en partie raison ; je pense qu’il s’est trouvé quelqu’un qui a compris que les gens de SAC et de cordes étaient bien utiles pour les basses besognes comme vous débarrasser d’un Plewnel ou autre empêcheur de bonimenter tranquillement le bon peuple et en a soufflé l’idée à choupinet qui n’ arien trouvé de mieux que de charger son grand ami de constituer ce genre d’ équipe à toutes fins utiles ……
Il suffit alors de donner de l’importance à quelques demi-sel pour qu’il vous doivent tout et vous soient dévoués corps et âme mais à l’époque du SAC il y avaient encore les vrais truands et maintenant ce sont de petits loubards de banlieue d’où l’affaire Benalla . Tout fou le camp mon bon monsieur.
Monsieur Gomez vient nous expliquer qui était vraiment de Gaulle, il est pour le moins le responsable de l’arabisation de la France.
Mais revenons plutôt à la deuxième guerre mondiale.
De Gaulle se réfugie en Angleterre, il laisse aux autres le soin de combattre les Allemands.
Après que les Anglais, Les Américains et les Résistants aient fait le travail, il revient en France en libérateur et se met a travailler contre les Américains et Anglais qui l’avaient aidé.
Mais il fait mieux après la guerre des Six Jours, il choisit les Arabes contre Israël, ouvrant les portes à l’islamisation de notre pays.
Beaucoup de politiques ne connaissant rien au machiavélisme de cet homme se disent Gaullistes.
L’ attentat manqué contre Pierre Sergent (OAS ) était une opération du MPC ( Mouvement pour la Communauté ) organisation barbouze de Debré-Roger Frey contre l’OAS ) . La victime en fut M.Saint Aubin . Utile de savoir qu’après avoir utilisé des méthodes criminelles dignes de celle de son ennemi , les cadres du MPC ont pratiqué des affaires juteuses dans la collaboration France-Pays Arabes et dans l’appui total au projet Eurabia . Ironie de l’histoire , celui qui renseignait l’OAS , c’ est a dire Giscard , a appuyé Eurabia avec de multiples services rendus tant a l’invasion musulmane qu’ a l’appui inconditionnel a l’OLP . Comme ” reconversion professionnelle ” c’ est une réussite …..
Bonjour Monsieur Gomez. J’ai aussi été une des victimes collatérales, pas à cette époque bien que j’ai habité l’Algérie durant sept ans et parce que j’ai dix ans de moins que vous. À cette époque -là, je me contentais au Lycée Fromentin, à Alger, de rédiger et distribuer (sans savoir ce que je faisais) des papiers avec écrit “Conspuez Catroux”.
Puis je suis rentrée à Paris, j’ai fini mes études, me suis mariée, et là, c’est mon mari qui a subi des tentatives d’assassinat de l’OAS.
C’est vingt ans plus tard que j’ai été en but au SDEC et autres barbouzes, qui avaient toujours la carte tricolore et se chargeaient des basses oeuvres de la République. Je n’ai pas été assassinée (mais pour une tout autre histoire, qui se trouve dans un des mes livres), parce que j’ai eu la “chance” d’avoir un accident de voiture, grave, en Suisse, au moment où j’aurais du être assassinée “proprement” dans un accident en France.
Mais en Suisse, il a été prouvé que c’était bien un attentat. Comment j’en ai réchappé ? Je peux vraiment parler de miracle …. Mais c’est un bien longue histoire.
Bref, quand vous racontez, j’ai l’impression que tout cela, c’était hier !
Bonjour Michelle d’Astier de la Vigerie
Vous l’avez échappé belle, merci mon D.ieu
Terrible histoire. Une époque des plus mouvementée et dangereuse pour beaucoup de Français. Heureusement que vous avez été épargnée, ainsi que Mr Manuel Gomez et vos familles.
Continuez d’écrire, nous en avons tous besoin
Merci infiniment
L’Affaire Saint-Aubin est toujours d’actualité. Je publie le 24 septembre 2019 aux éditions de La Différence un nouveau livre intitulé tout simplement “L’Affaire Saint-Aubin”. J’y cite d’ailleurs votre article de “Dreuz.Info”. Nous pourrons sans doute en reparler, vous et les fidèles de votre site.