Publié par Magali Marc le 6 avril 2019

Mardi 2 avril, Justin Trudeau a annoncé l’expulsion du caucus libéral de l’ex-ministre de la Justice, l’autochtone Jody Wilson-Raybould et de sa collègue démissionnaire, l’ex-présidente du Conseil du Trésor, Jane Philpott.

Têtue comme un âne et dotée d’un ego qui ne passe pas la porte, Jody Wilson-Raybould qui ne digérait pas d’avoir été mutée dans un autre ministère, s’est soudainement souvenue qu’elle avait été victime de soi disant «pressions inappropriées» exercées sur elle l’automne dernier afin d’obtenir un accord de réparation avec la firme SNC-Lavalin. Pendant les semaines qui ont suivi le coulage de ces pressions dans le Globe and Mail, elle a démissionné et exercé un chantage sur le premier ministre.

Depuis le début de cette histoire, Josée Legault n’a pas été dupe de l’ex-ministre de la Justice. Elle a écrit dans le Journal de Montréal (3 avril) que « (d)epuis le début de l’« affaire » SNC-Lavalin, les médias anglo-canadiens, les conservateurs et les néo-démocrates ont déifié l’ex-ministre de la Justice Jody Wilson-Raybould et diabolisé le premier ministre Justin Trudeau. Le récit manichéen était celui de Mme Wilson-Raybould. Au Canada anglais, il est devenu parole d’évangile. »

Loin de moi, et de Josée Legault, l’idée de défendre Justin Trudeau qui, depuis le début de l’Affaire SNC Lavalin, s’est montré faible et incompétent tant il craignait de s’aliéner les Amérindiens qui lui tiennent tant à cœur.
C’est d’autant plus vrai quand on apprend que jusqu’au lundi 1er avril, Trudeau espérait une réconciliation avec Jody Wilson-Raybould.

Elle en a profité pour poser ses conditions.

Les cinq conditions de Jody Wilson-Raybould

En effet, on appris d’après des sources citées par la Canadian Broadcasting Corporation (CBC), faisant écho à certaines informations déjà relayées par le Toronto Star, le 3 avril dernier, que Jody Wilson-Raybould avait posé cinq conditions pour mettre fin à la crise politique provoquée par l’affaire SNC-Lavalin:

  1. Elle a a demandé au premier ministre de congédier son secrétaire principal et ami, Gerald Butts;
  2. de se défaire de son conseiller principal , Mathieu Bouchard;
  3. de congédier le greffier du Conseil privé, Michael Wernick. (Des trois, seul M. Bouchard est toujours au cabinet du premier ministre. M.Butts a remis sa démission, tandis que M. Wernick a annoncé qu’il prenait sa retraite).
  4. Elle a exigé que son successeur au poste de procureur général, David Lametti, n’oblige pas la directrice des poursuites pénales à offrir un accord de réparation à SNC-Lavalin.
  5. Enfin, elle a demandé que le premier ministre Trudeau reconnaisse publiquement que son cabinet avait agi de manière inappropriée dans cette affaire et qu’il lui fasse des excuses.

Ce sont ces demandes formulées lors de négociations et consultations tenues secrètes qui expliqueraient pourquoi il aura fallu 54 jours, depuis le premier reportage du Globe and Mail, le 7 février, avant que Trudeau ne se décide à expulser du caucus Mme Wilson-Raybould et de sa collègue députée Jane Philpott.

Le seul fait qu’elle ait voulu continuer à exercer une influence sur l’Affaire SNC Lavalin est bien la preuve qu’elle s’est rendue coupable de pressions inappropriées sur son remplaçant!

Mais ce n’est pas tout.

L’enregistrement secret d’un haut-fonctionnaire

Érigée au rang de martyre par les médias anglo-canadiens, Mme Wilson-Raybould se disait victime d’une grave ingérence politique de la part de M. Trudeau qui souhaitait sauver la méchante firme québécoise SNC-Lavalin d’un procès criminel.

Profitant de la sympathie des médias à son égard, dans une dernière tentative pour déstabiliser Trudeau et les Libéraux, Jody Wilson-Raybould a rendu public, le 29 mars, un enregistrement audio et une transcription de la conversation téléphonique qu’elle a eu avec Michael Wernick, l’ex-greffier du Conseil privé du Canada, enregistré à son insu.

Ainsi pour les Libéraux, il est devenu clair que Jody Wilson-Raybould était une redoutable adversaire dont le « récit » plombait son parti dans les sondages. Son comportement ne tenait pas d’une simple dissidence, c’était une fronde.

Son expulsion du caucus libéral était la seule réponse possible à ce faux scandale concocté par elle et qui, depuis 54 jours, a monopolisé l’attention du gouvernement.

Conclusion

Selon Mario Dumont (Journal de Montréal, 5 avril):

« Jody Wilson-Raybould n’a ébloui personne en trois ans au ministère de la Justice. Après l’arrêt Jordan de la Cour suprême, c’est elle qui a tardé à nommer des juges pour accélérer le traitement des causes. Les provinces fulminaient alors que les délais maximaux établis permettaient de remettre dans la nature des criminels.

Certaines de ses réformes sont contestées devant les tribunaux ou dénoncées dans le milieu judiciaire. (…) La gestion de son bureau est apparue assez chaotique aussi. Elle a passé plus d’un directeur de cabinet par année. C’est souvent le propre des politiciens qui font plus de sautes d’humeur que de réformes réussies. Sans rien enlever à ses convictions personnelles, sa contribution aux dossiers autochtones semble aussi avoir été plus symbolique que fructueuse.

Son expérience concrète dans le monde du droit est minime. Elle fut procureure de la Couronne durant trois ans, au début des années 2000. Le reste de sa carrière fut consacré à l’action politique au service de la cause autochtone. Jusqu’à son élection comme libérale en 2015. Une bien mince expérience du droit pour occuper les fonctions de ministre de la Justice et procureure générale

Selon Bob Hepburn du Toronto Star (3 avril), Jody Wilson-Raybould « a été recrutée par Justin Trudeau qui lui a demandé de se présenter aux élections libérales de 2015. (…)

Les politiciens de l’opposition et de nombreux commentateurs blâment Trudeau pour l’affaire SNC-Lavalin qui l’a finalement amené mardi soir à se débarrasser de Wilson-Raybould et de Jane Philpott, ancienne ministre du caucus libéral.

Mais en vérité, l’ego de Wilson-Raybould et son acte de tromperie sont tout autant – ou plus – à blâmer pour l’état dans lequel elle se trouve aujourd’hui.

Le meilleur exemple de la façon dont son ego a été blessé est venu lorsqu’elle a pris la mesure extraordinaire de demander à M.Trudeau de rester au Cabinet après que le Globe and Mail a publié son rapport sur les pressions exercées par son bureau sur les procureurs fédéraux en leur offrant une entente de réparation dans la cause criminelle contre SNC-Lavalin.

Son ego semblait aussi en jeu lorsqu’elle a dit avec défi à Trudeau et à ses collègues députés libéraux, dont beaucoup craignent que l’affaire qu’elle avait déclenchée ne leur fasse perdre leur siège aux élections d’octobre, qu’elle avait toujours l’intention de se représenter comme candidate libérale.

Elle semblait inconsciente, ou ne se souciait pas, de tous les dommages politiques qu’elle avait infligés à Trudeau et à ses collègues libéraux.

La goutte d’eau qui a fait déborder le vase pour beaucoup de ceux qui étaient prêts à lui laisser une marge de manœuvre dans cette affaire est venue quand elle a révélé qu’elle avait secrètement enregistré un appel téléphonique avec Wernick, puis l’a rendu public.

Cette tromperie a été sa perte. Comment quelqu’un, y compris Trudeau, qui a mal géré toute l’affaire, peut-il accepter qu’un ministre de la Justice enregistre secrètement le bureaucrate en chef ?
Pour Trudeau, que Wilson-Raybould et Philpott voulaient clairement détrôner en tant que chef libéral, sa décision de les expulser du caucus, aussi tardive soit-elle, lui a peut-être donné une certaine force et pourrait, d’une certaine façon, être un tremplin vers un leadership plus fort

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Traduction de Magali Marc (@magalimarc15) pour Dreuz.info.

Sources :

  • https://www.journaldemontreal.com/2019/04/03/la-martyre-dechue
  • https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1162230/trudeau-desaveu-femmes-chambre-communes-eviction-wilson-raybould-philpott
  • https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1162011/wilson-raybould-philpott-expulsion-caucus-liberal-snc-lavalin
  • https://nationalpost.com/opinion/andrew-coyne-wilson-raybould-recording-brings-snc-lavalin-affair-crashing-back-to-reality?video_autoplay=true#comments-area
  • https://www.cbc.ca/news/politics/wilson-raybould-butts-justice-committee-1.5081454
  • https://www.thestar.com/opinion/star-columnists/2019/04/03/the-rise-and-fall-of-wilson-raybould.html
  • https://nationalpost.com/news/canada/could-the-tories-woo-jane-philpott-and-jody-wilson-raybould-into-crossing-the-floor#comments-area
  • https://www.journaldemontreal.com/2019/04/05/la-realite-parallele-de-la-politique

Inscrivez-vous gratuitement pour recevoir chaque jour notre newsletter dans votre boîte de réception

Si vous êtes chez Orange, Wanadoo, Free etc, ils bloquent notre newsletter. Prenez un compte chez Protonmail, qui protège votre anonymat

Dreuz ne spam pas ! Votre adresse email n'est ni vendue, louée ou confiée à quiconque. L'inscription est gratuite et ouverte à tous

En savoir plus sur Dreuz.info

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading