Publié par Gaia - Dreuz le 11 avril 2019

Source : Lacroix

Le président de la Fondation de l’islam de France, Ghaleb Bencheikh, réagit aux critiques suscitées par un spectacle musical offert au pape lors de sa visite au Maroc les 30 et 31 mars.

Le concert mêlait les voix du muezzin Smahi El Harati – psalmodiant un appel à la prière – à celles de Caroline Casadesus et Françoise Atlan interprétant l’Ave Maria de Caccini.

La Croix : Samedi 30 mars, à Rabat, l’Institut Mohammed VI de formation des imams a offert un concert original à l’occasion de la visite au Maroc du pape François, mêlant des voix juive, chrétienne et musulmane. Par la voix de son président, marocain, Ahmed Raïssouni, l’Union internationale des oulémas musulmans a dénoncé un « mélange (des) grands rites islamiques et (des) chants ecclésiastiques qui contredisent notre foi et nos rituels ». Comment comprenez-vous cette réaction ?

Ghaleb Bencheikh : Ce concert était d’une grande beauté et a touché tous ceux qui y ont assisté. Ce qui a hérissé quelques idiots, c’est qu’à côté de la partition de l’Ave Maria de Caccini, un muezzin a cantillé l’appel à la prière. L’adhan est cet appel qui résonne cinq fois par jour depuis le minaret dans le monde musulman. Pour ces quelques personnes, l’adhan est « sacré » et ne doit pas être mêlé à d’autres chants ou musiques émanant d’autres religions. Au lieu de se réjouir de ce moment de grâce permis par l’intrication de différentes traditions musicales, ils ont préféré dénoncer « une fabrication inacceptable ». Cela ne traduit que leur repli, leur crispation et leur rejet d’autrui.

Un autre prédicateur musulman, français celui-là, dénonce un acte « sacrilège ». Pourquoi cette peur du syncrétisme ?

G.B. : Cette crainte est dénuée de fondement : il ne s’agit en aucun cas d’une prière commune, mais simplement d’un moment unique devant le pape François et le roi du Maroc et commandeur des croyants, Mohamed VI. Ces oulémas et autres prédicateurs entendent-ils par là que ce dernier, par son attitude exemplaire d’accueil et d’ouverture, aurait cautionné un acte blasphématoire ?

Des choses très fortes ont été dites pendant ces deux jours, par le pape François sur le rejet du prosélytisme, par le roi du Maroc sur la nécessité de l’éducation et du dialogue interreligieux pour faire face aux radicalismes. Et voilà que nous entrons déjà dans des polémiques stériles. « Ce sont les conceptions binaires et la méconnaissance qui menacent nos civilisations », a rappelé Mohamed VI. Les réactions de certains ne font, hélas, que le confirmer…

Quelle peut et quelle doit être la réaction des musulmans qui ne partagent pas ces critiques ?

G.B. : Il se trouve, et heureusement que ces avis religieux n’engagent que ceux qui les émettent et ceux qu’ils séduisent. Pour les autres, ce sont des paroles en l’air. Les réactions qu’expriment déjà d’autres Marocains sur le spectacle musical, et plus largement sur l’accueil du pape François dans leur pays, sont saines et pleines de bon sens et de responsabilité. Elles montrent aussi l’isolement des oulémas conservateurs.

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