Publié par Jean-Patrick Grumberg le 19 mai 2019

Dans un article publié avec la complicité de la rédaction de La Tribune, le journaliste Pierre Manière (ce n’est plus du journalisme mais du militantisme) s’en prend aux Etats-Unis, et bien entendu à Trump, concernant l’interdiction de la marque chinoise de téléphone Huawei.

Est-il besoin de rappeler à La Tribune que la fonction première du journalisme est de rapporter les faits ? Je doute, s’ils ne l’ont toujours pas compris à ce stade. C’est pourtant simple : qu’ils prennent exemple sur Dreuz : les opinions n’y sont pas présentées comme des faits, et inversement.

Mais Pierre Manière n’a pas de bonnes manières. Il évoque l’interdiction d’Huawei aux Etats-Unis, en prenant bien soin de ne pas en donner les vraies raisons. Cela s’appelle de la propagande. Il écrit :

Ken Hu, le président de Huawei, était l’un des invités de marque du salon Vivatech, consacré aux nouvelles technologies. Le dirigeant du géant chinois des équipements télécoms, leader incontesté dans la 5G, la prochaine génération de communication mobile, est intervenu dans un contexte particulièrement difficile.

La veille, Donald Trump a signé un décret interdisant aux opérateurs américains de recourir aux produits du groupe de Shenzhen pour leurs réseaux. Un sacré revers pour Huawei.

Même si cette décision n’est guère surprenante : l’équipementier fait l’objet, depuis des mois et dans un contexte de guerre commerciale sino-américaine, d’attaques du pays de l’Oncle Sam.

Protectionnisme, vous avez dit protectionnisme ?

Pour commencer, Manière aurait dû révéler aux lecteurs – mais un militant ne dit jamais la vérité – que “la guerre commerciale” comme ils l’appellent, déclenchée par Trump, n’est pas protectionniste.

Sur les 70 milliards de dollars dépensés par Huawei pour l’achat de composants en 2018, environ 11 milliards de dollars sont allés à des entreprises américaines comme Qualcomm, Intel Corp et Micron Technology Inc. Pour faire de nouvelles affaires avec Huawei, les fournisseurs américains auront besoin désormais de licences, ce qui sera extrêmement difficile à obtenir.

Composants espions

Rappelons-le avec force : la Chine est un Etat totalitaire. Communiste. Et pour cela, exige qu’on s’en méfie comme de la peste, car le communisme, c’est la peste.

Depuis des années, les services de renseignement américains réclament des mesures contre Huawei en s’appuyant en partie sur ses liens avec l’Armée populaire de libération du peuple.

Huawei pose un risque grave pour la sécurité du Royaume-Uni, et le gouvernement ne doit pas lui permettre de jouer un rôle même limité dans la construction de réseaux 5G, a déclaré jeudi l’ancien chef du service d’espionnage britannique, le MI6.

“J’espère sincèrement que le gouvernement britannique aura le temps de reconsidérer la décision Huawei et qu’il y aura probablement un nouveau premier ministre à l’heure où j’écris ces lignes”, a déclaré Richard Dearlove, qui a été chef des services secrets de renseignements de 1996 à 2004.

La capacité de contrôler les communications et les données qui circulent dans ses tuyaux sera le moyen d’exercer un pouvoir sur les sociétés et les autres nations”, détaille Dearlove dans le préambule d’un rapport sur Huawei de la Henry Jackson Society.

Huawei a été fondée en 1987 par un ancien ingénieur de l’Armée populaire de libération de la Chine, et sa montée fulgurante, dans un univers couvert par les géants Samsung et Apple, a toujours suscité de grosses interrogations parmi les spécialistes du secteur.

5G, nouveau nom du Cheval de Troie

Les opérateurs de téléphonie mobile en sont aux premiers stades de la mise en place des réseaux 5G qui fourniront la bande passante nécessaire non seulement pour des smartphones plus rapides, mais aussi, à l’avenir, une série de nouveaux services allant des villes intelligentes à l’Internet, aux voitures sans conducteur, explique ZD Net.

C’est à cause de ces nouveaux services que la sécurité est soudainement devenue un facteur critique.

Le problème n’est pas seulement que des puissances hostiles puissent fouiner dans les données qui circulent sur ces réseaux, mais qu’elles puissent même empêcher le bon fonctionnement des services qui s’y trouvent.”

Sur le site Lawfare, consacré à la cyber sécurité et la technologie, le chercheur Nicholas Weaver, spécialisé en sécurité informatique à l’International Computer Science Institute de Berkeley, en Californie, ne pourra pas être accusé de soutenir le président Trump. Weaver est un gauchiste assumé, un anti-Trump forcené.

Voici ce qu’il écrit :

Récemment, le Huawei Cyber Security Evaluation Centre Oversight Board du Royaume-Uni a publié un nouveau rapport – son cinquième – qui indique clairement qu’il est impossible d’atténuer techniquement les risques [d’Huawei].

Selon le conseil, le code qu’utilise Huawei, comme tant d’autres codes qui gèrent le monde, est tout simplement un cauchemar : il est complexe, écrit d’une manière “peu sûre”, utilisant des langages “peu sûrs”.

L’échelle et la complexité rendent impossible l’analyse du code pour rechercher de nouveaux bugs, sans parler des efforts de sabotage.

Le sabotage peut être particulièrement sournois et très difficile à détecter même lorsqu’on a du code source, et même s’il est découvert, il peut aussi être presque impossible de le distinguer d’une “erreur”.

Nicholas Weaver poursuit :

Le risque est d’autant plus grand que Huawei est en fait une entreprise d’État

Même si le Royaume-Uni pouvait inspecter entièrement le code et savoir qu’il n’est pas saboté, le processus de compilation – les étapes qui transforment le code source en quelque chose que l’ordinateur exécute réellement – est “non déterministe”. Chaque fois que le code est construit, il produit quelque chose de différent, il n’y a donc aucun moyen d’être sûr que le code final s’exécutant sur un périphérique est le même code qui a passé l’inspection.

Et même si les constructions étaient déterministes, cela ne pourrait pas empêcher le sabotage dans le processus de fabrication ou empêcher qu’un correctif non validé n’inclue quelque chose de plus.

Je ne crois pas que ces risques soient propres à Huawei – le secret, c’est que la majeure partie de l’infrastructure informatique mondiale est un cauchemar similaire. Mais cela signifie que personne ne peut fournir l’assurance technique que l’équipement de réseau Huawei particulier est exempt de sabotage.

Ainsi, les risques liés à l’équipement Huawei ne peuvent être gérés qu’en comprenant les risques politiques : Combien un pays est-il prêt à parier que Huawei résistera aux pressions du gouvernement chinois ?

Le risque est d’autant plus grand que Huawei est en fait une entreprise d’État.

Il reste donc trois options pour les pays qui envisagent la 5G, explique Weaver.

1 – Premièrement, un pays peut décider d’acheter de l’équipement Huawei et ainsi économiser une somme considérable d’argent.

Le risque est simplement que toutes les personnalités politiques et tous les dirigeants de haut niveau feront surveiller leurs appels par les services de renseignements chinois.

Après tout, les dommages causés par les espions chinois devraient être mis en balance avec les milliards de dollars potentiellement économisés grâce à l’achat d’équipement Huawei. Il suffit d’accepter ce compromis au moment de prendre une décision d’achat.

2 – La deuxième option consiste à acheter de l’équipement aux concurrents européens de Huawei, Ericsson ou Nokia. Ces fabricants sont plus chers que les Huawei mais offrent la plus grande assurance politique : Aucune des grandes nations espionnes ne peut exercer la même pression sur Nokia (finlandaise) ou Ericsson (suédoise) que sur les entreprises nationales.

3 – La dernière option est simplement d’éviter le battage publicitaire et de laisser tomber les 5G.

Voilà ce qu’on aurait apprécié que La Tribune rapporte, ce n’est pas si difficile ! Mais ils sont trop occupés à cracher sur Trump pour pouvoir rapporter les faits et publier des informations intéressantes, de qualité, et importantes.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info.

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