Publié par Gaia - Dreuz le 8 juin 2019

Source : Infoequitable

Contrairement à ce que montre cette carte, un grand classique de la propagande palestinienne dont de nombreuses versions circulent sur internet, les premiers « Territoires palestiniens » autonomes ne remontent pas à 1945 mais à 1994…

Sur internet, on trouve de nombreuses versions d’une carte dite de la « perte de territoires palestiniens ». C’est un grand classique de la propagande palestinienne qui aime à dépeindre une terre palestinienne, d’abord arabe, puis grignotée et morcelée par l’implacable colonisation israélienne.

L’infographie de « l’évolution des frontières » israélo-palestiniennes présentée par Le Parisien dans un tweet du 16 mai 2018 puis réutilisée tout récemment dans un article du 4 juin 2019 s’inscrit dans cette lignée.

En vert, on y trouve les « Territoires palestiniens » depuis avant 1945.

En jaune, les « Territoires israéliens » depuis avant 1945.

Le message ? L’Etat juif grignoterait inexorablement depuis plus de 70 ans des territoires possédés au départ par les Palestiniens, réduits aujourd’hui à une peau de chagrin.

Problèmes :

  • Aucun « territoire palestinien » n’a existé avant les accords d’Oslo de 1993 ; les zones sous contrôle de l’Autorité palestinienne mises en place à partir de 1994 marquent d’ailleurs la toute première apparition d’une entité palestinienne autonome.
  • Il n’y avait pas non plus de « territoire israélien » avant 1948.

Avant 1948, il y avait uniquement des Juifs et des Arabes qui vivaient sur le territoire de la Palestine sous mandat britannique. Ni palestinien, ni israélien : tout le territoire était britannique.

Autres remarques :

  • La carte donne l’impression d’un peuple juif qui supplante soudainement en le « colonisant » un peuple palestinien « autochtone ». Mais l’histoire ne commence pas arbitrairement en 1945. Si la population juive était à cette époque concentrée dans des secteurs restreints du territoire, sa présence ancestrale y est attestée. Il y a 3000 ans déjà, cette région s’appelait la Judée. Le peuple juif (lié à la Judée par la géographie et par l’étymologie) y est né et connut déjà des périodes de souveraineté. Voulant effacer la trace des Juifs qu’ils avaient vaincus, les Romains renommèrent la Judée « Palestine » en référence à un ancien peuple disparu, les Philistins – des ennemis des Juifs qui avaient autrefois occupé une partie de la région. Que la Grande-Bretagne ait choisi ce nom pour désigner le territoire sous son mandat presque 2000 ans plus tard ne signifie pas qu’il se soit agit d’un « territoire palestinien », au sens « arabe ». Après d’autres peuples, notamment donc les Romains, les Arabes envahirent à leur tour ce territoire au VIIe siècle.
  • L’évolution entre les limites représentées en 1947 et celles de 1967 est due au refus par les Arabes du plan de partition de l’ONU, que les Juifs avaient accepté. Les frontières de 1947 restèrent un plan, elles n’existèrent jamais puisque les Arabes déclarèrent la guerre au nouvel Etat juif dès le lendemain de son indépendance – et la perdirent. A l’issue des combats en 1949, la bande de Gaza fut occupée par l’Egypte, la Cisjordanie nouvellement créée fut occupée par la Transjordanie (actuelle Jordanie), et les lignes d’armistice de 1949 donnèrent les limites géographiques montrées sur l’image de 1967. Cette année-là, Gaza et la Cisjordanie furent perdues par l’Egypte et la Jordanie et passèrent sous contrôle israélien. L’Etat d’Israël a donc été créé par l’ONU et ses frontières modifiées suite à des guerres lancées contre lui.
  • En 1967, le Sinaï Egyptien (en bas à gauche sur la carte) fut perdu par l’Egypte et occupé par Israël. Celui-ci le rendit à l’Egypte après les accords de paix de 1979 – un retrait territorial israélien que ne reflète pas la carte tout entière vouée à créer la perception d’un Israël expansionniste.
  • Il convient de noter qu’Israël n’est pas un Etat peuplé uniquement de Juifs et qu’il y existe toujours des zones à population arabe que cette carte ne représente pas. A contrario, aucun Juif n’est admis dans les zones sous contrôle palestinien.
  • Le gruyère vert représenté sur la carte de 2010 est en réalité la trace d’une extension inédite de l’autonomie des Arabes palestiniens, avec pour la toute première fois des zones entièrement administrées par l’Autorité palestinienne.

Les mensonges de la carte propagandiste bien connue reprise par Le Parisien ont été dénoncés à de multiples reprises, donnant lieu à des déconstructions factuelles qui circulent sur internet.

Voici une carte qui montre le contrôle acquis pour la première fois par les Arabes palestiniens en Cisjordanie (Autorité palestinienne – à partir de 1994 suite aux accords d’Oslo) et à Gaza (aujourd’hui le Hamas, qui a pris le pouvoir en 2007 dans la foulée du retrait israélien unilatéral de 2005).

En 2015, MSNBC s’est excusée pour une variante de la même carte

Cette carte trompeuse n’est pas nouvelle. En 2015, elle avait fait son apparition sous une forme très proche à l’antenne de la chaîne américaine MSNBC.

Sur cette infographie, tout le territoire d’avant 1947 avait été labellisé « Palestine »; on le voyait ensuite céder la place à Israël à partir du plan de partition de 1947. Des légendes trompeuses puisqu’il n’y avait aucun pays dénommé « Palestine » en 1946.

La chaîne avait ensuite eu le courage de reconnaître son erreur, en expliquant avoir utilisé des cartes qui n’étaient « pas factuellement exactes ».

Le correspondant de MSNBC au Moyen-Orient, Martin Fletcher, qui avait utilisé cette carte, reconnut que « en fin de compte c’était complètement faux ; il n’y avait pas d’Etat appelé Palestine en 1946 ».

La carte du Parisien est légèrement différente puisqu’elle reconnaît bien qu’avant 1945 (en fait jusqu’à 1948…), la région était « sous mandat britannique ». Elle ne va pas jusqu’à l’appeler Palestine. Mais elle commet un gros anachronisme en parlant de territoires palestiniens et israéliens avant 1945 (au moins y a-t-il une certaine cohérence dans les anachronismes avec la désignation des pays limitrophes en 1945 par leurs noms actuels – Liban et Syrie qui étaient sous mandat français, Jordanie qui était alors la Transjordanie sous mandat britannique…).

La distorsion de l’histoire et ses conséquences

Cette carten’est pas seulement fausse : elle est un outil de propagande qui diabolise les Juifs à travers une distorsion totale de l’histoire de leur Etat les faisant passer pour des voleurs de terres. Elle invite à imaginer une suite logique où Israël aurait complètement éliminé la présence palestinienne, alors que la véritable volonté génocidaire dans la région est du côté des Palestiniens dont certains mouvements (le Hamas et d’autres) ne font pas mystère de leur volonté d’éliminer l’Etat juif et ses habitants.

Même si la rédaction du Parisien a pu reprendre cette représentation répandue sans nécessairement avoir de mauvaises intentions, le message diffusé risque d’alimenter l’antisémitisme en créant du ressentiment injustifié contre les Juifs.

MSNBC a reconnu sa méprise dans un cas similaire.Le Parisien, qui a donc représenté sur son infographie des « Territoires palestiniens » un demi-siècle avant leur première apparition dans l’Histoire, saura-t-il faire preuve des mêmes qualités ?

InfoEquitable a écrit à la rédaction pour suggérer de retirer la carte ou de la modifier pour y faire apparaître, au minimum, les noms réels des populations d’origine (zones de peuplement arabes / juives et non Territoires palestiniens / israéliens), l’inaccomplissement du plan de partition de 1947 dont les frontières n’ont jamais existé suite à leur refus par les Arabes, les occupations jordaniennes et égyptiennes de 1949 à 1967 sans lesquelles les frontières de Cisjordanie et Gaza sont incompréhensibles, et l’avènement des zones sous contrôle de l’Autorité palestinienne (1994) et du Hamas (Gaza dès 2007) qui représentent une extension inédite de la souveraineté des Palestiniens ; la mention de « Territoires palestiniens » ne pouvant s’appliquer qu’à partir de 1994.

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