Publié par Magali Marc le 24 juin 2019

Depuis quelques mois, les Conservateurs d’Andrew Scheer mènent dans les sondages et semblent sur la voie de former le prochain gouvernement canadien avec une confortable majorité, le 21 octobre prochain. À moins de cinq mois des prochaines élections fédérales, les Libéraux ne peuvent rien tenir pour acquis, même au Québec.

À l’échelle nationale, le Parti conservateur arrive en tête avec 37% des intentions de vote et détient ainsi une avance de 11 points de pourcentage sur le Parti libéral (26%). Le NPD est bon troisième avec 15% et il se fait de plus en plus chauffer par le Parti vert, qui récolte 12% des appuis à l’échelle du pays.

Au Québec, le Parti conservateur arrive au premier rang avec 28% des appuis tandis que le Parti libéral est bon deuxième avec 26%. Le Bloc québécois obtient pour sa part 20% des intentions de vote alors que le NPD glisse au quatrième rang avec 13% des appuis. Le Parti vert voit ses appuis s’établir à 9%.

Selon un sondage de la firme Angus Reid, les Libéraux de Justin Trudeau détiennent une large avance dans la grande région de Montréal, où ils récoltent 37% des intentions de vote contre 17% au NPD, 16% au Parti conservateur et 16% au Bloc québécois. Le Parti vert obtient quant à lui 10%. La grande région de Montréal est l’endroit où se concentre le vote anglophone et ethnique acquis aux Libéraux.Mais dans le reste de la province, les appuis aux troupes d’Andrew Scheer bondissent à 32%, soit 10 points de pourcentage de plus que les Libéraux et le Bloc québécois, ex aequo à 22%. Le NPD n’est plus l’ombre de lui-même en région, ne recueillant que 11% des appuis contre 8% au Parti vert.

Le Parti conservateur mène désormais dans toutes les régions du pays, également en Ontario, une province hautement courtisée par l’ensemble des formations politiques en raison du nombre de sièges qu’elle compte à la Chambre des communes (121). Mais en Ontario, la situation est délicate. L’écart entre le Parti conservateur et le Parti libéral est mince, soit 2 points de pourcentage (34% contre 32%). Cet écart est toutefois dans la marge d’erreur (plus ou moins 2%, 19 fois sur 20).

Pour les lecteurs de Dreuz, j’ai traduit la chronique d’Anthony Furey, publiée le 23 juin dans le Toronto Sun.


Soudain, Trudeau semble avoir réussi à coincer les Conservateurs d’Andrew Scheer

Tout au long de la première moitié de l’année, le premier ministre Justin Trudeau s’est battu contre vents et marées. Il a été d’abord martelé presque tous les jours par les retombées de l’Affaire Huawei ( NdT: l’arrestation à Vancouver le 1er décembre 2018 de Meng Wanzhou, directrice financière de Huawei, à la demande des États-Unis) et le conflit diplomatique avec la Chine, puis avec l’Affaire SNC-Lavalin. Il a même semblé – pendant quelques jours – que sa fin politique était imminente.

Tout cela semble terminé maintenant. Certes, les sondages indiquent une chute catastrophique de sa popularité et ils ne semblent pas près de changer. Oui, il pourrait encore perdre les prochaines élections. Mais il n’est plus dans une position défensive. Il parvient même à contrôler les termes du débat électoral.

Prenons un exemple : Andrew Scheer devait-il vraiment publier son plan sur les changements climatiques la semaine dernière ? Bien sûr, il a longtemps parlé de supprimer la taxe carbone. Mais la rédaction de ce plan de 60 pages sur l’imposition d’un plafond aux grands émetteurs et la réduction des émissions mondiales était-elle l’un de ses principaux enjeux, l’une des raisons qui l’ont poussé à se porter candidat à la direction en premier lieu ? C’est peu probable. Il est davantage probable que les Conservateurs l’ont publié parce que les Libéraux les ont poussés à le faire.
Catherine McKenna (NdT: la ministre de l’Environnement et du Changement climatique) et Trudeau n’arrêtaient pas de dire que Scheer et son équipe n’avaient «aucun plan» concernant notre – quels termes suis-je suis censé utiliser ? – « urgence climatique ».

Scheer et son équipe ont dû se sentir menacés d’être ainsi définis par leurs adversaires. Alors ils ont publié leur plan sur le climat, en faisant l’un de leurs principaux éléments de politique pour apaiser ceux parmi les électeurs indécis qui se disent préoccupés par les questions climatiques.

Scheer est entouré de conseillers intelligents qui savent compter, alors il peut-être vrai qu’il y a assez d’électeurs indécis répartis dans des circonscriptions instables pour faire en sorte que le fait de proposer ce plan pourrait servir à battre les Libéraux en octobre.

Même si c’était vrai, il y a des limites au temps que vous pouvez passer à calmer vos critiques et vos ennemis. Ils se feront un plaisir de vous faire jouer le jeu selon leurs règles si vous les laissez faire.

Il y a un risque que cela devienne une tendance chez Scheer.

Concernant la situation du premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, c’est pire. La victoire à la direction de Ford, puis sa victoire écrasante aux élections comme premier ministre, ont donné l’impression qu’il allait, tel un boulet de démolition imparable et impitoyable , réduire le déficit, réduire la taille du gouvernement et renverser les aspects les plus troublants de l’ère libérale précédente, à travers vents et marées.

Au lieu de cela, un an après le début de son premier mandat, nous avons un premier ministre qui semble maintenant avoir peur de son ombre – n’ouvrant pas la route vers un budget équilibré pour tout le mandat et annonçant à maintes reprises des politiques et des nominations mal conçues pour ensuite les réviser à la suite d’un tollé public généralement légitime.

Depuis des années, le mouvement conservateur de l’Ontario souhaite ardemment avoir la chance de gouverner la province. Des idées visant à réformer le gouvernement de l’Ontario, provenant de diverses conférences, d’universitaires, de groupes de réflexion et de groupes de revendication ont été présentées sous la forme d’une liste de propositions de politiques. Ford avance peu de ces idées et quand il s’agit des choses qu’il fait, il n’y a pas de principes directeurs discernables qui les sous-tendent. Beaucoup d’entre elles semblent être aléatoires.

Mais ils ont une excuse pour cette performance décevante, et c’est un sujet casse-cou.

Lorsque le premier budget a été annoncé récemment et qu’il n’était pas prévu d’équilibrer les comptes avant la cinquième année, j’ai fait remarquer qu’il s’agissait d’une escroquerie, étant donné que Ford a un mandat de quatre ans seulement. Mais des initiés du Parti Progressiste-Conservateur de l’Ontario m’ont dit que c’était une brillante stratégie parce qu’elle signifiait que Ford ne prévoyait pas de coupures importantes et donc Justin Trudeau ne pourrait pas s’en prendre à Andrew Scheer et dire que ce dernier allait faire la même chose au niveau fédéral.

Alors, d’accord, je suppose qu’une bonne façon de neutraliser l’attrait de Trudeau est de gouverner comme il le ferait. Mais c’est embarrassant. D’ailleurs ça n’a pas marché. Les militants avaient déjà imprimé leurs pancartes de protestation contre les compressions budgétaires avant même que le budget de l’Ontario ne soit publié. Les gens qui sont déterminés à vous haïr trouveront un moyen de le faire quoi qu’il arrive.

Scheer et Ford pourraient tout aussi bien faire ce qu’ils veulent vraiment et, si les choses se compliquent pour eux, ils devraient travailler à convaincre le public et à attirer les votes des électeurs en défendant leur cause. C’est ce que la politique est censée être.

Pour l’instant, ils semblent jouer le jeu de leur adversaire. D’après ce que nous venons de voir, il semble que Trudeau a réussi à les piéger.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Traduction de Magali Marc (@magalimarc15) pour Dreuz.info.

Sources :

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