Publié par Magali Marc le 28 août 2019

Tandis que les rescapés de l’Open Arms se reposent à Pozzallo en Sicile (voir l’article de Rosaly), certains s’interrogent sur les motivations du capitaine qui a refusé l’offre de l’Espagne d’accoster en Espagne plutôt qu’en Italie.

Les soupçons portent sur les raisons financières et politiques derrière les sauvetages des migrants par l’Open Arms et d’autres ONG qui cherchent à promouvoir des frontières ouvertes et à discréditer les politiques de Salvini sur l’immigration.

Pour les lecteurs de Dreuz, j’ai traduit l’article de Soeren Kern*, paru le 27 août, sur le site du Gatestone Institute.

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Europe : des «Taxis méditerranéens» pour les trafiquants d’êtres humains

Les autorités italiennes ont saisi un navire de sauvetage de migrants espagnols après une impasse de trois semaines entre le gouvernement italien et l’organisation caritative espagnole qui exploite le navire.

Le ministre de l’Intérieur Matteo Salvini avait refusé que le navire de sauvetage Open Arms, transportant plus de 80 migrants africains pour la plupart, accoste en Italie. Ce refus s’inscrivait dans le cadre de la lutte contre le trafic illicite de migrants qui, depuis juin 2018, a effectivement fermé les ports italiens aux bateaux de sauvetage des migrants.

Salvini a accusé les organisations non gouvernementales (ONG) européennes d’assurer la coordination avec les mafias qui s’occupent du trafic d’êtres humains pour prendre les migrants au large des côtes libyennes et les transporter vers les ports italiens. Les autorités italiennes ont qualifié les bateaux de sauvetage caritatifs de «taxis méditerranéens» pour les passeurs de clandestins.

Le procureur sicilien Luigi Patronaggio a ordonné le 20 août dernier que l’Open Arms, ancré à un kilomètre au large de l’île de Lampedusa, la plus au sud de l’Italie, accoste en Sicile pour que ses passagers puissent y débarquer. Il a pris cette décision, contre l’avis de Salvini, après qu’une douzaine de migrants aient sauté par-dessus bord et tenté de nager jusqu’au rivage. Des séquences vidéo ultérieures ont montré que l’Open Arms a mis en scène les sauts pour manipuler l’opinion publique.

L’Open Arms, une ONG espagnole, a pris 147 migrants au large des côtes libyennes le 1er août dernier. Le gouvernement italien a autorisé les personnes ayant besoin de soins médicaux et tous les enfants non accompagnés à débarquer au large de la Libye le 17 août.
Cinq pays de l’UE – l’Espagne, la France, l’Allemagne, le Luxembourg et le Portugal – ont accepté de prendre en charge le reste, bien que les détails de l’accord restent encore à finaliser.

Le 18 août, le gouvernement espagnol a annoncé que les Open Arms seraient autorisés à accoster au port espagnol d’Algésiras à Cadix et à Mahón à Minorque dans les îles Baléares.

Le capitaine de l’Open Arms, cependant, a rejeté l’offre. Il a fait valoir qu’il était «impossible» de tenter le voyage de quatre à six jours étant donné les conditions à bord : « Nous ne pouvons pas mettre en danger la sécurité et l’intégrité physique des migrants et de l’équipage. Nous devons accoster maintenant.»

Le refus du capitaine d’accepter l’offre de l’Espagne a alimenté la méfiance quant aux motivations financières et politiques derrière les sauvetages des migrants – y compris les efforts déployés par Open Arms et d’autres ONG pour promouvoir l’ouverture des frontières en discréditant les politiques fermes de Salvini sur l’immigration.

Nous sommes confrontés à la énième mascarade de l’Open Arms espagnole, qui erre depuis des jours dans la Méditerranée dans le seul but de rassembler le plus de gens possible pour les amener toujours et seulement en Italie », a twitté Salvini. « Pendant tout ce temps, ils auraient déjà pu aller et venir trois fois dans un port espagnol. Ces ONG ne sont motivées que par la politique. Ils utilisent les immigrants contre notre pays. Je n’abandonnerai pas. »

La vice-première ministre par intérim de l’Espagne, Carmen Calvo, a exprimé sa perplexité à l’Open Arms. Dans une interview accordée à la radio espagnole Cadena SER, elle a indiqué que le navire aurait pu facilement accoster en Tunisie ou à Malte, mais a refusé de le faire :

Nous ne comprenons pas la position de Open Arms. Nous avons offert tous les types de soutien : soins médicaux, fournitures. Nous comprenons que la situation est critique en raison de l’incertitude et du désespoir, mais une fois qu’on leur dit qu’ils ont un port sûr, les migrants savent qu’ils vont arriver, et n’importe qui peut comprendre qu’il n’y a aucun problème. »

Le 20 août, le gouvernement espagnol a envoyé un navire de guerre, l’Audaz, de la base navale de Rota pour récupérer les migrants et les emmener sur l’île espagnole de Majorque. Le voyage aller-retour, cependant, a été estimé à au moins une semaine et Patronaggio a agi après les informations selon lesquelles certains migrants étaient suicidaires.

Le gouvernement italien a ensuite saisi l’Open Arms après que les gardes-côtes italiens, lors d’une inspection, eurent découvert de « graves anomalies de sécurité ». Le ministère italien des transports a déclaré que le navire ne serait pas autorisé à quitter la Sicile tant que les problèmes n’auraient pas été résolus.

Le ministre italien des Transports, Danilo Toninelli, a appelé le gouvernement espagnol à réprimer les activités de l’Open Arms en retirant l’immatriculation du navire et son pavillon espagnol. « J’espère que l’Espagne répondra à notre appel et s’engagera à arrêter l’Open Arms à l’avenir avec les moyens et de la manière qu’elle jugera appropriés », a-t-il déclaré. Un navire sans pavillon ne pourrait légalement pas continuer à prendre en charge les migrants.

Le gouvernement espagnol, confronté à des critiques croissantes quant à sa gestion de l’impasse, a depuis lors exprimé une position plus ferme à l’encontre de l’ONG Open Arms. Le 21 août, Calvo a déclaré à la radio Cadena SER que l’Open Arms n’avait pas de permis de transport de migrants et pourrait se voir infliger une amende de 900 000 € (1 000 000 $) pour avoir violé une interdiction expresse de naviguer vers la mer au large de la Libye : « L’Open Arms n’a pas de permis de sauvetage, comme le capitaine du navire le sait. C’est un État de droit. Nous sommes tous soumis à la loi.»

Par le passé, cependant, le gouvernement espagnol a travaillé en étroite collaboration avec l’ONG Open Arms. En août 2018, l’ONG a annoncé qu’elle avait conclu un accord avec le gouvernement pour coordonner le sauvetage des migrants dans le détroit de Gibraltar et la mer Méditerranée. Ce même mois, le ministre espagnol du Développement, José Luis Ábalos, a fait l’éloge d’Open Arms pour avoir sauvé « des dizaines de milliers de personnes depuis 2015 ». On ne sait toujours pas si l’ONG reçoit de l’argent du gouvernement pour ses activités.

Le parti anti-immigration espagnol Vox a intenté une action en justice contre l’Open Arms et demandé l’arrestation du capitaine du navire, Óscar Camps. Déguisant ses activités en « travaux de secours », cette « ONG est complice de la contrebande des réseaux mafieux internationaux », a ajouté Santiago Abascal, le dirigeant de Vox, sur Twitter :

L’Open Arms ne sauve pas les naufragés. Si c’était le cas, il les emmènerait au port le plus proche. Ce qu’il fait, c’est utiliser les immigrants comme un outil d’extorsion contre les pays qui choisissent de défendre leur souveraineté.»

« Ces fausses organisations humanitaires, au nom de la solidarité, exploitent la bonne volonté de nombreuses personnes. Leur travail, cependant, est promu par ceux qui veulent détruire les frontières de l’Europe, et ne profite qu’aux trafiquants d’êtres humains.»

«Pour toutes ces raisons, nous agirons fermement et énergiquement contre toute ONG, gouvernement, association ou groupe qui a l’intention de continuer à promouvoir l’immigration illégale et massive et de nous soumettre aux intérêts des mafias internationales de la traite des personnes. Cette activité illégale et criminelle met en danger notre État-providence, notre souveraineté, la sécurité des Espagnols et même les vies qu’ils veulent sauver. Ils devront répondre devant les tribunaux le plus tôt possible.»

Les navires caritatifs européens ont tenté à plusieurs reprises – avec plus ou moins de succès – d’amener dans les ports italiens des migrants secourus en mer :

  • 22 décembre 2018. Le navire espagnol Open Arms, transportant 311 migrants secourus au large des côtes libyennes, s’est rendu au port espagnol d’Algésiras après que l’Italie et Malte eurent refusé l’entrée du navire. «Les ports italiens sont FERMÉS», a twitté Salvini. « Les trafiquants d’êtres humains et leurs complices savent que nos ports sont fermés, STOP !».
  • 19 mars 2019. Le navire caritatif Mare Jonio, battant pavillon italien, a été saisi après avoir accosté dans un port de Lampedusa et déposé 49 migrants embarqués dans les eaux libyennes. « Le vaisseau des squatteurs anarchistes a été saisi, excellent.» a dit Salvini. « En Italie, il y a maintenant un gouvernement qui défend les frontières et fait respecter les lois, surtout par les trafiquants d’êtres humains. Ceux qui font le mal paieront. » Plus tôt, il avait dit que les migrants ne seraient pas autorisés à entrer en Italie : « Ils peuvent être soignés, habillés et nourris. Nous pouvons leur donner n’importe quel réconfort, mais ils ne mettront pas les pieds en Italie. »
  • Le 10 mai 2019. Le Mare Jonio a de nouveau été saisi après avoir accosté dans un port de Lampedusa et déposé 30 migrants secourus au large des côtes libyennes.
  • Le 29 juin 2019. Les autorités italiennes ont arrêté le capitaine allemand de 31 ans du Sea-Watch 3 sous pavillon néerlandais, exploité par l’organisation caritative allemande Sea-Watch, après qu’elle eut accosté illégalement le navire transportant 40 migrants à Lampedusa. Salvini a écrit sur Twitter : « Une hors-la-loi arrêtée. Un navire pirate saisi. Grosse amende pour une ONG étrangère. Les migrants ont tous été répartis dans d’autres pays européens. Mission accomplie. » Un juge italien l’a ensuite libérée sous prétexte qu’elle avait agi pour sauver des vies. Cette décision a irrité Salvini, qui a déclaré qu’elle encouragerait d’autres navires de «bienfaisance» à défier l’interdiction d’amarrage.
  • Le 6 juillet 2019. Le navire caritatif Alex, battant pavillon italien, défiant Salvini, a amené 41 migrants naufragés dans le port de Lampedusa. Salvini a écrit sur Twitter : « Pour enfreindre la loi, ces chacals mettent en danger la vie des immigrants à bord. Est-ce qu’ils resteront aussi impunis ? Dans un pays sérieux, les arrestations et la saisie du navire seraient immédiates: que feront les juges cette fois-ci ?»

Entre-temps, l’Ocean Viking battant pavillon norvégien, exploité par deux organisations caritatives françaises, a été autorisé à accoster à Malte tard le 23 août, après s’être vu refuser l’entrée en Italie. Le navire, qui transportait 356 migrants, naviguait entre la Sicile et Lampedusa depuis deux semaines en attendant l’autorisation d’accoster en Italie. Les migrants seront réinstallés en France, en Allemagne, en Irlande, au Luxembourg, au Portugal et en Roumanie.

Dans un essai publié par le journal espagnol El Mundo le 24 août, José María Ruiz Soroa, éminent professeur de droit maritime à l’Université du Pays basque, a expliqué que les ONG européennes manipulent les écarts entre les lois nationales, qui limitent la migration, et le droit international, qui exigent d’aider les naufragés, afin d’amener les immigrants illégaux dans l’UE.

Ruiz Soroa a écrit que les ONG abusent des lois maritimes internationales (principalement la Convention internationale sur le sauvetage et la Convention internationale sur la recherche et le sauvetage maritimes) qui obligent les capitaines de navires à secourir les naufragés qu’ils trouvent en mer et à les livrer dans un lieu ou un port sûr. Il a noté que les «ports sécuritaires» tels que définis par ces lois permettraient aux ONG de renvoyer les personnes naufragées en Libye, mais les ONG insistent pour les transporter en Europe :

« Il est tout à fait clair que lorsque les réseaux organisés qui contrôlent les migrants libyens jettent des personnes à la mer dans des navires qui n’ont même pas les conditions de navigabilité les plus élémentaires pour les transporter en toute sécurité vers les ports européens, ce qu’ils font est de les placer délibérément dans le statut légal des personnes naufragées. Il ne s’agit pas de naufrages causés par des accidents maritimes, comme le prévoit le droit international, mais de «naufrages de complaisance». Peu importe combien de migrants le font par désespoir, ils font officiellement naufrage pour obtenir ce statut légal, et une fois sauvés, ils sont autorisés à entrer en Europe, contournant l’interdiction de l’immigration illégale

En dernière analyse, ce à quoi nous assistons dans les eaux méditerranéennes est l’un des cas les plus évidents de fraude juridique imaginables : créer intentionnellement l’apparence d’un fait réglementé d’une certaine manière dans une loi spéciale… pour échapper à l’application inexorable du droit général qui correspond réellement à cette situation factuelle sous-jacente, qui est celle de l’émigration et qui est prohibitive. Contourner une loi basée sur une autre. Le Code civil, et le bon sens, disent qu’une telle ruse est illégale.

Cela signifie-t-il que les naufragés trouvés (recherchés?) par l’Open Arms auraient dû être abandonnés à leur sort ? Évidemment non. La vie humaine est bien au-dessus de cette considération, et les fausses personnes naufragées de l’Open Arms devraient être aidées…… Cette situation de fraude juridique généralisée, cependant, fait en sorte que les États concernés interviennent pour arrêter et empêcher les actions des particuliers, des enthousiastes et des bienfaiteurs bien intentionnés qui ne font qu’aggraver le problème. Les sauvetages deviennent une affaire d’État lorsque des aspects pertinents d’intérêt public sont en jeu, comme c’est le cas pour l’environnement et comme cela devrait l’être dans le cas de l’immigration illégale.

Le gouvernement espagnol est intervenu il y a des mois : L’organisation Open Arms s’est vu interdire de secourir les naufragés dans les eaux libyennes. L’interdiction n’a pas été prononcée sur un coup de tête, mais sur la suspicion fondée que la présence de l’Open Arms dans ces eaux encouragerait les migrants potentiels à se mettre en danger dans l’espoir d’être secourus. Les armateurs ont cependant violé l’interdiction lorsqu’ils ont décidé de leur propre chef que la loi peut être violée lorsqu’une humanité souffrante est placée de l’autre côté de l’échelle de la justice……

Il y aura des naufragés de complaisance (et certains mourront pour cela) tant qu’ils auront un espoir confirmé qu’il y aura des sauveteurs qui les attendront là-bas. C’est une boucle insoutenable qui doit être tranchée par quelqu’un, quelque part. »

Un récent sondage Ipsos publié par le journal italien Corriere della Sera a révélé qu’une majorité d’Italiens soutiennent la ligne dure de Salvini sur l’immigration : 59% ont déclaré être d’accord avec sa décision de fermer les ports italiens aux navires de sauvetage des migrants ; 71% ont déclaré que les autres pays européens devraient faire plus pour partager la charge. Le sondage a également révélé qu’une majorité d’Italiens (56%) pensent que les ONG impliquées dans le sauvetage des migrants sont motivées par l’argent ; seulement 22% pensent que leurs motivations sont réellement humanitaires.

Depuis que Salvini a annoncé sa politique d’immigration en juin 2018, le nombre d’arrivées de migrants en Italie – ainsi que le nombre de morts et de disparus – a considérablement diminué. Le nombre d’arrivées par mer est passé de 119 369 en 2017 à 23 370 en 2018, soit une baisse de 80 %, selon le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Au cours de la même période, le nombre de morts et de disparus est passé de 2 873 à 1 311, soit une baisse de plus de 50 %.

Une tendance similaire s’est poursuivie en 2019 : 2 800 migrants sont arrivés en Italie par voie maritime entre janvier et juin 2019, contre 16 600 au cours du même semestre en 2018 et 83 800 en 2017, selon le HCR.
Parmi ceux qui sont arrivés en Italie par voie maritime en 2019, 600 (21%) venaient de Tunisie, 400 (14%) du Pakistan, 300 (10%) d’Algérie, 300 (10%) d’Irak, 300 (10%) d’Irak, 200 (7%) de Côte d’Ivoire, 200 (7%) du Bangladesh, 100 (3,5%) du Soudan, 100 (3,5%) d’Iran, 100 (3,5%) du Maroc, 50 (1,7%) d’Egypte selon le HCR.

Les données indiquent que la plupart des migrants qui sont arrivés en Italie au cours des six premiers mois de 2019 sont des migrants économiques et non des réfugiés fuyant les zones de guerre.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Traduction de Magali Marc (@magalimarc15) pour Dreuz.info.

*Soeren Kern est Senior Fellow au Gatestone Institute.

Source:
https://www.gatestoneinstitute.org/14781/europe-mediterranean-people-smugglers

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