Publié par Gaia - Dreuz le 14 septembre 2019

Source : Lepoint

La désorganisation du TGI de Vannes a conduit la Cour de cassation à prendre une décision radicale. Et à tirer la sonnette d’alarme.

Damien* a à peine 20 ans, mais il est, selon la police, le chef d’un vaste trafic de drogue dans le quartier de Kermesquel, à Vannes, dans le Morbihan. Huit mois après avoir été placé en détention provisoire, le voilà pourtant remis en liberté à cause… de la désorganisation du tribunal de grande instance (TGI) de Vannes. L’histoire est tellement symbolique du manque de moyens dans les juridictions que la Cour de cassation a tout fait pour donner un maximum de publicité à l’arrêt, de nombreux autres tribunaux risquant de se trouver dans le même cas.

Tout commence le 16 avril 2019. La prolongation de la détention provisoire de Damien, qui a été interpellé quelques mois plus tôt et qui a été mis en examen aux côtés de 20 autres personnes, doit être examinée. Seul le juge d’instruction chargé de l’affaire a le pouvoir de prendre une ordonnance de saisine du juge des libertés et de la détention (JLD), qui décidera de la prolongation ou non du séjour en prison.

Un seul juge d’instruction à Vannes

Problème : il n’y a qu’un seul juge d’instruction au TGI de Vannes et celui-ci est en vacances pour la semaine. Normalement, dans pareil cas, un remplaçant doit avoir été prévu et désigné par l’assemblée générale des magistrats du siège. Sauf que cela n’a pas été fait. Le président du tribunal a donc allégué l’urgence de la situation et a désigné une collègue magistrate pour prendre cette ordonnance. Laquelle s’est exécutée « en faisant un copier-coller, à la virgule près, des réquisitions du parquet », s’agace Me Sami Khankan, le conseil du prévenu.

À l’audience du JLD, l’avocat a essayé de faire valoir ses arguments et d’obtenir un renvoi, mais il n’a pas été entendu, son client ayant déjà été extrait de sa cellule… Et aussitôt renvoyé. Me Khankan a alors porté l’affaire devant la chambre d’instruction de la cour d’appel de Rennes, qui a estimé que le président du tribunal était dans son bon droit en désignant une juge remplaçante, la situation présentant un caractère d’urgence.

La Cour de cassation tire la sonnette d’alarme

L’avocat n’a pas désarmé et s’est attaché les services de Me Claire Waquet pour porter l’affaire devant la Cour de cassation. Laquelle a considéré, dans un arrêt rendu le 11 septembre, que les vacances d’un juge n’étaient pas une urgence et qu’un remplaçant au juge d’instruction aurait dû être désigné par l’assemblée générale des magistrats du siège, et non au débotté par le président du tribunal. Damien a donc été libéré le soir même.

« Que des magistrats prennent des vacances, c’est bien sûr légitime, mais il faut s’organiser ! » remarque Me Waquet. L’arrêt a aussitôt été publié au bulletin afin que le plus de magistrats possible en prennent connaissance. Les moyens des juridictions étant insuffisants, nombreux sont les tribunaux à avoir recours à des « ficelles » pour assurer la continuité du service public. Parfois, donc, au risque de libérer involontairement un suspect.

Inscrivez-vous gratuitement pour recevoir chaque jour notre newsletter dans votre boîte de réception

Si vous êtes chez Orange, Wanadoo, Free etc, ils bloquent notre newsletter. Prenez un compte chez Protonmail, qui protège votre anonymat

Dreuz ne spam pas ! Votre adresse email n'est ni vendue, louée ou confiée à quiconque. L'inscription est gratuite et ouverte à tous

En savoir plus sur Dreuz.info

Abonnez-vous pour poursuivre la lecture et avoir accès à l’ensemble des archives.

Continue reading