
Lors de son discours d’ouverture à la cinquième consultation de dialogue entre le Judaïsme et Orthodoxie qui s’est tenue à Thessalonique en 2003, Sa Sainteté le patriarche œcuménique Bartholomaios 1er a souligné que « le judaïsme et le christianisme vivaient dans un état de dialogue depuis deux mille ans ».
Afin de continuer à vivre cet état de dialogue aujourd’hui, nous sommes interpelés par l’apôtre Paul qui proclame aux fidèles de Corinthe : « Soyez mes imitateurs » (I Co 4,16). Imiter le Christ et les apôtres constitue le modèle suprême pour la mission spirituelle et la responsabilité pastorale non seulement des chefs ecclésiastiques, mais aussi la responsabilité spirituelle des laïcs.
C’est le regretté métropolite Damaskinos qui m’a transmis le savoir et l’expérience de dialogue entre nos traditions respectives. En tant que jeune laïc et doctorant en théologie, je me suis engagé au dialogue avec les représentants du judaïsme. J’ai eu la bénédiction et l’honneur de rencontrer Gerhart M. Riegner et Jean Halpérin lors de l’organisation de la troisième consultation académique entre le Judaïsme et l’Orthodoxie intitulée Continuité et Renouveau qui a lieu à Athènes en mars 1993. Je me souviens avec émotion du travail que nous avons fait dans la force de leur engagement et de leur activité pour préparer ensemble les actes de la consultation. J’étais en charge de préparer une liste de la bibliographie sur le dialogue qui a été publiée dans le périodique « Immanuel ». Cette étroite collaboration m’a permis de découvrir la riche et longue tradition historique de Judaïsme. Nous avons continué à collaborer pour les consultations successives qui m’ont ensuite m’a permis de rencontrer le Grand Rabbin René-Samuel Sirat de France à qui me lie une profonde amitié jusqu’aujourd’hui. Il continue de m’inspirer pour mon engagement dans le dialogue.
Dans ce contexte, j’ai été témoin de ce dialogue qui symbolise la concorde et l’amitié entre Mgr Damaskinos, le Grand Rabbin Sirat, J.Halpérin et G. Riegner qui allaient être à la base de toute démarche positive, mais qui encouragent aussi les uns et les autres à réfléchir et à agir ensemble dans le but du mieux-être d’une communauté mondiale très éprouvée. Je suis convaincu que les relations et les amitiés que j’ai avec mes amis de la tradition juive découlent en fait du lien indiscutable d’amitié de nos prédécesseurs. Je les garde dans mon cœur comme des personnes qui ont vraiment donné leur leurs communautés respectives, pour le dialogue interreligieux, particulièrement, mais aussi bien au-delà, pour l’humanité.
C’est grâce à cette amitié, qui m’a permis d’acquérir cet esprit d’engagement dans le dialogue interreligieux, que je m’efforce de continuer et de témoigner au niveau local dans le cadre du Groupe de dialogue juifs-chrétiens, où Jean Halpérin était également engagé, et désormais co-organisé par Mme la professeure Esther Starobinski.
Nous sommes tous appelés à assumer la responsabilité historique, Mémoire oblige, en citant le titre du livre du professeur Jean Halpérin, pour que notre dialogue fasse fructifier la continuité et le renouveau de l’état d’esprit sur les rapports des deux religions et de leurs fidèles.
Dans cet esprit, j’ai appris aussi que nous devrons renouveler notre propre fidélité à nos sources, ce qui nous permettra de nous redécouvrir, comme fils d’Abraham, engagés dans la solidarité fraternelle et appelés à transmettre ensemble le plus véritable et le plus profond de tout ce que nous avons à transmettre. Nous avons confiance en la force de primauté de la personne et l’amitié. Nous maintenons intact ce qu’ils nous ont appris : la valeur de l’amitié et sa force, la suprématie d’humain, un humanisme humain, au-delà du temps et de l’espace, deux dimensions que le Grand Rabbin a longuement approfondies dans ses écrits.
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Abbé Alain René Arbez, prêtre catholique, commission judéo-catholique de la conférence des évêques suisses et de la fédération suisse des communautés israélites, pour Dreuz.info.