Depuis la nuit des temps, les religions païennes manifestent le besoin archaïque de l’humanité de rejoindre le divin par ses propres forces, dans le but de se le concilier ou de se l’approprier.
La beauté originale de la foi judéo-chrétienne est de nous offrir une démarche inverse : c’est Dieu qui prend l’initiative de se révéler à l’homme et qui l’invite à se laisser aimer et libérer, dans une relation d’alliance fondée sur la gratuité.
Cet éclairage rédempteur de la condition humaine dévoile en même temps les terribles limites de l’autosuffisance des hommes. Notre vie n’est pas à elle-même sa propre origine, il y a en nous du don, de la gratuité reçue, et c’est pourquoi notre aspiration profonde transcende l’horizon purement terrestre de notre existence.
C’est donc en prenant conscience du fait que nous sommes mystérieusement donnés à nous-mêmes que nous nous reconnaîtrons disposés à donner à notre tour. Le fait de nous découvrir aimés de Dieu devrait encourager en nous la motivation à aimer les autres.
L’histoire du salut en est l’illustration fondamentale. Dieu s’est choisi un peuple, et c’est à partir de cette relation fidèle avec son premier-né qu’il veut attirer toutes les nations du monde à sa lumière bienfaisante. L’élection d’Israël et de l’Eglise qui en est née n’est pas autre chose que l’enracinement de l’amour de Dieu en terre humaine afin de métamorphoser par étapes tout l’univers.
Aménager le monde intelligemment est indispensable à tous, et l’éthique est là pour nous rappeler certaines valeurs absolument vitales. Ainsi la gratuité ouvre une dimension essentielle : il n’y pas que ce qui est utile qui compte !
A quoi cela sert-il d’aimer telle personne ? Qu’est-ce que cela rapporte de rendre service ? Quelle est l’utilité de contempler un coucher de soleil ou d’écouter un choral de Bach ?
De la même manière, il n’y aurait rien de pire que d’adorer Dieu par intérêt, ou de se préoccuper des autres qu’en fonction du bénéfice retiré. La tradition juive dit que le plus bel acte est celui qui est effectué sans rien attendre en retour, thème oblatif repris par Jésus lorsqu’il encourage à ce que la main gauche ignore ce qu’a donné la main droite.
Le Dieu d’Abraham, de Moïse, des prophètes d’Israël et de Jésus est vraiment le Dieu du gratuit, ou le Dieu de la grâce (même étymologie). Il nous aime malgré nos fautes et au-delà de nos mérites. Ce qu’il nous invite à réaliser en nous donnant pour repères les dix commandements, puis les béatitudes, c’est un monde où règne l’amour, donc la gratuité et le respect de l’autre. Sans cette base vitale, pas de dignité humaine, ce serait la loi de la jungle ou l’instrumentalisation du prochain.
Le Christ de l’évangile a donné pour consigne à ses disciples envoyés en mission : « Vous avez reçu gratuitement, donnez gratuitement ! » (Mt 10.8). C’est dans le même esprit que l’apôtre Paul pose à chacun cette question : « Disposes-tu d’un quelconque bien que tu n’aies pas reçu ? »1 Co 4.7).
Et la « récompense finale » ? La question de la rétribution dans l’au-delà est surtout, dans l’Ecriture, une manière de nous rappeler que nous récolterons finalement ce que nous avons semé, et que Dieu, s’il est amour, ne peut pas rester indifférent aux injustices et au sort contrasté des uns et des autres.
Si donc nous mettons le plus possible de l’amour désintéressé dans ce que nous vivons, celui-ci ne pourra que s’éterniser en heureuse et sereine communion avec Dieu.
Le fait que nous soyons importants pour Dieu, ce n’est pas seulement par ce que nous faisons, mais c’est avant tout par ce que nous sommes : notre personnalité s’exprime à travers nos paroles et nos actes !
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Abbé Alain René Arbez, prêtre catholique, commission judéo-catholique de la conférence des évêques suisses et de la fédération suisse des communautés israélites, pour Dreuz.info.
@Abbé A.A.
“Mais à tous ceux qui l’ont reçu, à tous ceux qui croient en son nom, Il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu”!
Ne serait-ce pas la conclusion exacte et biblique de ce bel article?
Dieu nous aime de cette façon si bien dite et en réponse à notre démarche de foi, nous fait participer à son amour dans le salut en Jésus-Christ!
Très bel article non dénué de belles profondeurs. Notre bouffée d’air du matin. Merci.
Avec Dieu, tout est gratuit, les bénédictions accordées et surtout le salut gratuit obtenu par la foi. (gratuit pour nous mais pas gratuit pour Son Fils qui a payé à la croix!) Il n’en est pas de même avec les hommes qui font payer, entre autres, pour les enterrements et ensuite pour faire dire des messes. Le pire a été de vendre des indulgences pour faire gagner un ciel pas à vendre. Pour rester dans le positif, celui qui donne, c’est Dieu.
@ Laclau. Les services payants de l’Eglise sont une “spécialité” catholique. A ma connaissance et sauf erreur de ma part, l’Eglise protestante fournit la gratuité de ses services (mariage, baptême, funérailles etc …). Ici, en Italie du sud, si deux personnes veulent faire annuler leur mariage catholique, c’est tout-à-fait possible, c’est 30 000€.
ceci est de la désinformation!
les catholiques cupides et les protestants gratuits ce sera pour une autre fois…
@ Abbé Alain René. Il n’y a chez moi aucune volonté de désinformation. Et j’ai aussi pris la précaution de dire “sauf erreur de ma part”. Et il y a des protestants et catholiques cupides et d’autres non, c’est évident. J’évoquais les situations dont j’ai eu connaissance. Mais lorsque votre Eglise réclame 30 000€ pour faire annuler leur mariage catholique à des personnes en divorce, ne trouvez-vous pas qu’il s’agit d’une escroquerie? D’autant plus qu’un divorce est toujours une situation dramatique puisque les revenus du couple sont divisés en deux et leurs frais multipliés par deux! Une escroquerie doublée d’un abus de faiblesse! Je voulais juste souligner que, d’une façon générale, les services de vos Eglises sont toujours payants tandis que ceux des Eglises protestantes sont généralement gratuits. De mon point de vue, un service spirituel se doit d’être gratuit en droite ligne avec votre bel article. Nous avons reçu gratuitement, nous devons donner gratuitement. C’était le mode de fonctionnement des Eglises qui est en cause ici, pas les situations particulières. Il y a un fond de vérité dans le commentaire de Laclau. Des hommes font payer par d’autres hommes ce qu’ils reçoivent gratuitement de Dieu. Notre mission consiste à appeler des âmes à Dieu, pas à remplir les coffres des banques de nos Eglises.
je ne crois pas aux 30000 euros à payer “pour faire annuler leur mariage”.
Pourquoi? parce que je suis moi-même juge au Tribunal diocésain pour ce genre de situation (et pas seulement) et je connais par coreur les procédures qui – dans l’Eglise catholique – bénéficient d’un droit canonique universel, partout identique. Faire payer 30000 euros en échange d’une annulation de mariage est un pur fake new!
tous les services protestants à Genève sont payants, arrêtez de faire croire au Père Noël huguenot, il n’existe pas…
@ Abbé Alain René. Sans vouloir me faire l’avocat du diable, je tiens mon info d’un haut fonctionnaire de police (qui ne sont pas toujours au courant de ce que savent les juges …). Si la parole est d’argent, vous conviendrai aussi avec moi que le silence est d’or. On croise souvent deux types de personnes: soit des gens tordus qui disent des vérités, soit des gens sincères qui disent des bêtises. Toute la difficulté consiste à savoir redresser les uns et corriger les autres.
un haut fonctionnaire de police franc mac, par hasard?
il y a des siècles, des religieux faisaient payer des indulgences pour obtenir le ciel,
aujourd’hui des pasteurs évangéliques exigent des sommes énormes de fidèles modestes pour qu’ils aient droit de faire partie de la congrégation…
@ Abbé Alain René. Vous parlez de certaines situations aux USA? Selon mon expérience en Belgique et maintenant en Italie je n’ai jamais entendu parler de telles situations en milieux protestants. Il y a des églises ou les fidèles payent la dîme mais uniquement sur base volontaire et par conviction (cas de votre serviteur). A propos d’indulgences, j’en ai encore vues dans des églises catholiques en Belgique. Mais c’est vrai que cela remonte dans mon souvenir à la fin du siècle dernier … Faire payer ses services est quand-même pratique courante au sein de vos églises. Ce n’est pas le cas au sein du protestantisme “lambda”.
Oui aux USA, mais pas seulement. Avec un ami pasteur, à Genève nous avons obligé des groupes évangéliques étrangers à rembourser des émoluements excessifs imposés à des gens modestes.
Oui, mais un vent nouveau se lève, et beaucoup de protestants fuient ces pasteurs qui culpabilisent les “fidèles” qui ne donnent pas leurs dîmes ou leurs offrandes.
Beaucoup de “pasteurs ou de prètres”, le sont par l’obtention de la maîtrise de théologie,( savoir et intelligence ) et non par l’ appel de Dieu pour le “service”( disciples ) , la bible est claire à ce sujet, elle les qualifie de “loups ravisseurs”.
De plus en plus d’ “églises de maison” voient le jour.
je suis prêtre par appel de Dieu, ratification de l’Eglise qui appelle au ministère, et avec maîtrise de théologie, ce qui ne gâche rien.
le retour aux églises de maison du 1er siècle est une régression, les communautés sont des lieux de fraternité intergénérationnelle et interculturelle dans la même foi, et l’Eglise a vocation à être une famille de familles, pas un petit clan bien au chaud.
@ Abbé Alain René. Tiens? J’ai une toute autre vision des groupes de maison qui favorisent au contraire les relations interpersonnelles hors du cadre rigide de certaines communautés religieuses dans lesquelles les fidèle n’ont aucune occasion de pouvoir exprimer librement ce qu’ils ont au fond des tripes. Dans la messe ou les cultes, les fidèles n’ont jamais l’occasion de pouvoir s’exprimer hors du cadre strict des liturgies imposées. L’Eglise aurait-elle peur que le peuple lui échappe?
A méditer: Les Kibboutz et les Moshav sont des petits clans bien au chaud et cela fonctionne très bien. Bien mieux que les grandes structures étatiques supranationales ou, par exemple, Bruxelles décide arbitrairement de la politique agricole du paysan du fin fond de la Sicile.
@ Abbé Alain René. Je connais un patron pêcheur qui s’appelait Pierre, qui n’a jamais eu aucune maîtrise en théologie, et que votre Eglise aurait nommé Pape? Pourtant il a vécu au temps de la régression que vous évoquez.
non, il n’y avait aucune régression, vous faites du sophisme scolastique(!) il y avait une étape préparatoire à de plus grandes communautés qui se sont organisées par la suite en conséquence!
vous n’allez tout de même pas blâmer ceux qui étudient la Thora ou la théologie pour être compétents au service de tous?.
@ Abbé Alain René. Il faut dire à la décharge de Pierre qu’il a eu la chance de recevoir en direct la formation du Maître Jésus. Et de plus les facultés de théologie chrétienne n’existaient pas, forcément. Aussi, vu le nombre d’erreurs et fausses doctrines qui devaient apparaître par la suite, c’est évident qu’il s’agit d’une bonne chose que de se former solidement. Nous sommes d’accord. Ceci dit, les communautés de multitudes ne sont pas nécessairement plus vivantes que de plus petits groupes. Et l’opinion d’une majorité n’est pas toujours un critère de vérité. Loin de là.
Puisque ” La tradition juive dit que le plus bel acte de est celui qui est effectué sans rien attendre en retour “, alors le seul acte de bonté vraiment désintéressé ne peut venir que d’un athée, puisque sinon ” Dieu le lui rendra”.
le drame d’un athée, c’est qu’il ne sait pas qui remercier lorsque quelque chose de formidable lui arrive!
“le drame d’un athée, c’est qu’il ne sait pas qui remercier lorsque quelque chose de formidable lui arrive!”, P. Arbez
Excellent. Tout enfant, j’avais appris à dire : “Bravo Dieu !” devant quelque chose de beau.
@ Ar-Men. Par contre, il sait fort bien qui engueuler lorsqu’un malheur survient: “Nom de D…”.
1 Jean 4
…18 La crainte n’est pas dans l’amour, mais l’amour parfait bannit la crainte; car la crainte suppose un châtiment, et celui qui craint n’est pas parfait dans l’amour. 19 Pour nous, nous l’aimons, parce quIil nous a aimés le premier. 20 Si quelqu’un dit: J’aime Dieu, et qu’il haïsse son frère, c’est un menteur; car celui qui n’aime pas son frère qu’il voit, comment peut-il aimer Dieu qu’il ne voit pas?
1 Jean 4:10
Et cet amour consiste, non point en ce que nous avons aimé Dieu, mais en ce qu’Il nous a aimés et a envoyé son Fils comme victime expiatoire pour nos péchés.
Jean 3:16
Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu’il ait la vie éternelle. AMEN AMEN AMEN
“nous sommes mystérieusement donnés à nous-mêmes”
Cette phrase m’a particulièrement touchée. Je n’avais jamais réalisé cela. Merci beaucoup, M. l’Abbé.
De belles vérités bien dites :
«…Nous sommes mystérieusement donnés à nous-mêmes… ».
Rafraichissant!
@ Alain Finie. Oui, sauf lorsque nous sommes trahis et mystérieusement donnés aux autres. Jésus est passé par là.
attention à ne pas être trahi dans ce qu’on a de meilleur et de lumineux par l’autre partie de soi-même attirée par l’ombre…
Comme une méditation! Merci, M. l’Abbé.
Il devient de plus en plus difficile d’accepter l’immunité par les regrets aux promoteurs de l’attraction de l’ombre par le sociétal progressiste.
On imagine plutôt une fin terrestre sur la roue de la chance Ravaillac, quoiqu’il n’ait pas eu tort concernant cet ancien promoteur d’une europe pourrie sous son panache blanc poudreux luxurieux ou alors des élongations à la mode gaston phoebus le cathare polygame arriéré fou de couleur chocolat suite à des percussions la mode grecque , avant de laisser leurs ambitions prétentieuses aux mains de leur inspirateur.
Ca rappelle Khalil Gibral qui dans le prophète se demandait ce que méritaient ceux qui font perdre leurs âmes aux autres. Tout le programme contraire des chantres de l’islam et des copains à bhl.