Publié par Magali Marc le 23 octobre 2019

Comme le prévoyait les sondages, les élections fédérales canadiennes ont été très serrées. Le gouvernement libéral était talonné par les Conservateurs d’Andrew Scheer partout au pays, sauf au Québec où le Bloc Québécois a fait la vie dure aux deux partis. Finalement, le verdict est tombé tard en soirée: les Libéraux, avec 157 sièges vont former un gouvernement minoritaire.

Cela en dépit du fait que les Conservateurs ont réussi une belle performance, passant de 95 sièges à 121 (23 de plus qu’en 2015) avec un pourcentage de voix plus élevé que les Libéraux (34.4% contre 33.1%), Mais comme je l’ai déjà expliqué le nombre de sièges obtenus dépend d’avantage de la répartition des votes que de leur nombre réel.

Les Libéraux pouvaient se permettre de perdre les 23 sièges qu’ils détenaient, passant de 177 (largement majoritaires) à 157 (minoritaires, car il faut au moins 170 sièges à la Chambre des Communes pour former un gouvernement majoritaire). Mais tout n’est pas rose pour Justin Trudeau qui va devoir composer avec une opposition forte des Conservateurs et un appui sporadique du NDP, le parti le plus «progressiste» sur la scène fédérale.

Certes, le NPD s’est écrasé (perdant 15 des 39 sièges obtenus en 2015), surtout au Québec où il ne conserve qu’un seul siège des 15 qu’il détenait depuis la raclée encaissée par Thomas Mulcair lors des élections fédérales de 2015. Malgré tout, le NPD de Jagmeet Singh, avec un total de 24 sièges, détiendra la balance du pouvoir et pourra soutenir les Libéraux sur des questions «progressistes» comme le climat, le multiculturalisme et l’opposition à la Loi sur la Laïcité du Québec.

La situation au Québec

Le Bloc Québécois qui ne détenait que 10 sièges depuis 2015, est passé à 32 sièges.
La vague bleu pâle du Bloc québécois a anéanti les espoirs des Conservateurs de faire des gains dans le Québec francophone qui avait voté pour la Coalition Avenir Québec (CAQ) au provincial, l’an dernier. Ainsi les Conservateurs se retrouvent avec 10 sièges au Québec au lieu des 12 qu’ils avaient remportés en 2015.

Comme ça ne servirait pas à grand-chose de faire la promotion de la souveraineté du Québec à Ottawa, M. Blanchet se contentera de défendre ce qu’il perçoit comme étant les intérêts du Québec : la Loi sur la Laïcité, bien sûr, mais aussi la lutte aux «changements climatiques» et le refus d’un pipeline transcanadien amenant au Québec plus de pétrole de l’Alberta).

D’après Denis Lessard du quotidien, La Presse, on peut estimer que le Bloc Québécois et le gouvernement Legault auraient mieux fonctionné avec un gouvernement conservateur.
Néanmoins, ni le BQ ni le premier ministre québécois n’ont voulu se risquer à appuyer ouvertement Andrew Scheer durant la campagne électorale même si ce dernier était le seul qui pouvait battre Trudeau.
Dès le premier jour de la campagne, François Legault avait exhorté Justin Trudeau à ne pas appuyer les contestations devant les tribunaux déjà lancées à l’endroit de la loi québécoise sur le port de signes religieux. Le chef libéral n’avait pas changé de discours pour autant. De son côté le chef conservateur avait dit qu’il n’interviendrait pas contre la Loi 21.
Le premier ministre Legault a jouer ses cartes en donnant l’impression qu’il croyait à la réélection de Justin Trudeau alors qu’il était clairement dans son intérêt d’appuyer Andrew Scheer.
Sans l’appui explicite de M. Legault, Andrew Scheer a du, tant bien que mal, rassurer les Québécois à l’effet qu’il aurait à cœur leurs intérêts.

Certes M. Scheer, promettait de créer un «corridor énergétique» pancanadien, mais le gouvernement de M. Legault n’y voyait pas de menace immédiate. Ce que voyait surtout Québec, c’est l’ouverture de M. Scheer envers la déclaration de revenus unique à laquelle M. Trudeau avait opposé une fin de non-recevoir. Andrew Scheer promettait aussi de respecter les compétences provinciales.
Lorsqu’il était minoritaire en 2007, le gouvernement Harper avait survécu avec l’appui du Bloc Québécois – le règlement du « déséquilibre fiscal » dénoncé par Québec avait servi de monnaie d’échange.
Andrew Scheer se voyait comme l’allié du Québec à Ottawa, mais les Québécois ont préféré faire davantage confiance à Yves-François Blanchet et au BQ.

Conclusion

Il n’est pas sûr que les Québécois ont eu raison de mettre tous leurs œufs dans le même panier bloquiste.
En votant pour le Bloc, même dans les circonscriptions où le Parti Conservateur avait de bonnes chances de l’emporter, les Québécois ont aidé la réélection de Justin Trudeau.
Les Ontariens auraient pu sauver la mise des Conservateurs. En fait, les Conservateurs ont fait des gains en Ontario dans les zones rurales, tandis que dans les zones urbaines, particulièrement dans la grande région de Toronto, les électeurs sont restés fidèles aux Libéraux.
C’est le paradoxe de cette élection : les Conservateurs ont fait des gains partout, sauf au Québec, tandis que les Libéraux ont perdu des sièges partout, même au Québec et pourtant ce sont les Libéraux qui vont former un gouvernement minoritaire.
La plupart des analystes pensent que le Gouvernement Trudeau tiendra tout au plus 18 mois avant que de nouvelles élections soient nécessaires s’il fait face à un vote de non-confiance.

Andrew Scheer a dit qu’il sera prêt.

Reste à savoir, si cette fois, les Québécois comprendront qu’ils ont intérêt à faire partie d’un éventuel gouvernement conservateur plutôt que d’élire des députés qui vont gémir contre le Gouvernement libéral à partir des bancs de l’opposition !

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Magali Marc (@magalimarc15) pour Dreuz.info.

Sources :

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