Publié par Guy Millière le 17 février 2020

Comme nul ne l’ignore, le politicien de la gauche macronienne Benjamin Griveaux a renoncé à sa candidature à la mairie de Paris après qu’une vidéo pornographique qu’il avait envoyé à une personne sur les “réseaux sociaux” ait été divulguée bien au-delà de son (sa) destinataire.

Aussitôt, la quasi-totalité des journalistes et des hommes politiques français se sont indignés. Il a été question de lynchage, d’atteinte à la vie privée, de remise en question de la démocratie, et j’en passe.

Griveaux a dit avoir pris sa décision de renoncer à sa candidature pour “protéger sa famille”, et la quasi-totalité des journalistes et des hommes politiques français ont entériné ses propos, et ont dit qu’il avait eu raison de vouloir “protéger sa famille”. Certains ont dit qu’il fallait éviter une “américanisation” des mœurs françaises et ont parlé de “puritanisme” et d’ordre moral. L’artiste russe qui a divulgué la vidéo a été insulté : on lui a même prête des idées sombres, très sombres. Il a été rapidement placé en état d’arrestation.

J’aurais aimé voir ceux qui s’indignent de ce qui arrive à Benjamin Griveaux ne pas se faire les relais des accusations, en général gratuites, infondées et diffamatoires, portées par la gauche américaine et les médias américains “démocrates” contre Donald Trump depuis trois ans, or ces accusations ont été reprises à satiété dans les médias français. Sans doute parce que, dès lors qu’il s’agit d’un homme que l’on doit obligatoirement détester en France, tous les coups sont permis et admis. Je n’ai vu sur le sujet en France aucune réserve, aucun propos disant que les façons de faire de la gauche américaine et des médias américains “démocrates” relevaient du lynchage, “portaient atteinte à la vie privée”, et remettaient en question la démocratie, aucun propos parlant de la famille de Donald Trump, aucune dénonciation du “puritanisme” et de l’ordre moral, strictement aucune. Je n’ai pas vu ceux qui ont prêté foi aux allégations d’une actrice pornographique manipulée par un avocat véreux aujourd’hui en prison s’interroger sur ces allégations. Quand une vidéo dans laquelle Trump tenait des propos lestes, mais qui n’était aucunement une vidéo pornographique, et qui était ancienne, a été diffusée aux Etats-Unis, j’ai constaté qu’elle avait été reprise en France et que des journalistes s’en sont donné à cœur joie pour la commenter. J’aurais tendance à penser (mais j’ai mauvais esprit), que si Benjamin Griveaux avait été de droite les réactions auraient été très différentes. 

Pour ce qui concerne ce qui est arrivé à Benjamin Griveaux, je dirai que ne pas imaginer qu’une vidéo de ce genre envoyée sur les réseaux sociaux peut se trouver divulguée, il faut être complètement idiot (même Serge July et Christophe Barbier en conviennent désormais), ce qui devrait disqualifier quelqu’un qui entend mener une carrière politique. J’ajouterai que réaliser une vidéo de ce genre et la mettre en circulation, même en l’adressant à une seule personne, implique d’avoir une dimension perverse, ce qui devrait aussi disqualifier quelqu’un qui entend mener une carrière politique : et si les mœurs françaises s’américanisaient sur ce point, ce serait très positif. Aux Etats-Unis, on considère encore très largement que quelqu’un qui se conduit de manière perverse dans sa vie privée doit quitter la vie politique, car on pense qu’une conduite perverse dans un domaine peut entrainer une conduite perverse dans d’autres domaines. On considère aussi encore très largement qu’une conduite perverse dont des parties extérieures auraient connaissance peut permettre d’exercer des chantages délétères, et qu’un dirigeant politique doit être aussi impeccable que possible. Ces principes, malheureusement, se délitent un peu. Bill Clinton a subi une procédure de destitution pour parjure dans l’affaire Lewinsky, mais n’a pas été destitué. Comme la gauche français, la gauche américaine a des principes à géométrie très variable et peut excuser Bill Clinton pour des faits avérés, mais condamner Donald Trump pour des propos lestes anciens et des allégations fabriquées

En France, Dominique Strauss-Kahn avait des pratiques perverses et lubriques depuis des années, de nombreuses personnes savaient et se taisaient, et c’est parce qu’il a été pris sur le fait à New York qu’il a dû renoncer à la présidence. Et grâce à la justice américaine, la France a peut-être échappé au risque d’avoir un président qui aurait transformé l’Elysée en lupanar et qui aurait pu être tenu par des puissance étrangères disposant de renseignements compromettants sur le monsieur. A la place de Dominique Strauss-Kahn, les Français ont eu un homme qui faisait du scooter rue du Cirque, je sais…

Benjamin Griveaux n’a subi aucun lynchage. Il s’est mis lui-même dans la situation où il est. Il n’y a aucune remise en question de la démocratie. La transparence que certains incriminent est au contraire une valeur éminemment démocratique, et les discours disant qu’on peut prôner des valeurs dans sa vie publique et se conduire de manière radicalement différente dans sa vie privée sont répugnants et constituent une forme d’éloge de l’hypocrisie et du mensonge. C’est en raison de l’omniprésence de l’hypocrisie et du mensonge qu’un dégout pour la politique s’est installé en France et que la confiance en les journalistes est tombée très bas. Quand on a une vie publique qu’on prétend très nette et une vie privée frelatée, il faut s’attendre, à l’heure des réseaux sociaux, à ce que la vie privée frelatée soit révélée. Et il est très sain qu’elle le soit.

Si Benjamin Griveaux voulait “protéger sa famille” et tenait à celle-ci, il n’aurait pas fait ce qu’il a fait, sauf si sa famille est elle-même une famille décadente. 

Les réactions de la quasi-totalité des journalistes et des hommes politiques français (à l’exception notable de ceux que j’ai cité plus haut) sont bien davantage que consternantes et sont une preuve supplémentaire que la France est très malade.

Malgré le délitement qui s’opère, les Etats Unis restent un pays plus sain que la France. Et oui :  si les mœurs françaises s’américanisaient sur ce dont je traite ici, ce serait très positif. Il ne s’agit pas de puritanisme et d’ordre moral, mais simplement de morale, une notion, semble-t-il, très obsolète en France aujourd’hui. 

Benjamin Griveaux est idiot. (il n’est pas le seul dans l’entourage de Macron, où les idiots prolifèrent). Il devait être disqualifié. Il l’est.

Il a une dimension perverse, ce qui est plus grave que l’idiotie. Il devait être disqualifié pour cette raison aussi.

 Il est décadent et immoral, et le microcosme dans lequel il évolue vient de montrer qu’à quelques exceptions près, il avait en commun avec Benjamin Griveaux la décadence et l’immoralité.

C’est sans doute parce qu’il est décadent et immoral que Benjamin Griveaux se pensait tout permis.

Benjamin Griveaux avait fait preuve d’une odieuse arrogance pendant le soulèvement des gilets jaunes, ce qui le rend profondément antipathique. 

C’était un politicien médiocre aux propositions débiles (créer un grand espace vert à Paris à la place de la gare de l’Est, entre autres). Cela ne signifie pas, hélas, que sa carrière politique en France est totalement achevée.

J’observe la France de très loin. Avec une immense consternation. 

© Guy Millière pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

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