Publié par Magali Marc le 22 février 2020

Bernie Sanders, un homme qui a pu être si facilement trompé par le KGB et par une tournée de type «village Potemkine» en URSS, ne devrait jamais devenir président des États-Unis.

Pour les lecteurs de Dreuz, j’ai traduit l’article de Katya Sedgwick*, paru sur le site de The Federalist, le 21 février.

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Je vivais en URSS quand Bernie Sanders y est allé en lune de miel, il a été dupé par les Communistes

Le candidat démocrate à la présidence, Bernie Sanders, aime se présenter comme un vieil homme sage qui a une chevelure clownesque mais qui a toujours raison, comme en ce qui a trait à la guerre en Irak.

Pourtant, son opposition à la guerre en Irak n’était pas dictée par un fin calcul géopolitique, mais plutôt par l’habitude de toute une vie de se lier d’amitié avec les ennemis des Américains – comme le font toujours les partisans communistes.

La conférence de presse que Sanders a donnée à son retour de sa lune de miel à Yaroslavl, en URSS, en 1988, et qui a refait surface récemment, est un bel exemple de la naïveté des gauchistes à l’égard des régimes totalitaires.
Le fait que Bernie ait vanté les mérites de la culture soviétique comme il l’a fait, indique un manque stupéfiant de jugement.

Je n’avais que 15 ans et j’ai grandi à Kharkiv, aujourd’hui en Ukraine, lorsque le couple Sanders a visité l’URSS, et je n’apprécie pas du tout de voir Sanders chanter les louanges de Moscou.

Le métro

Commençons par le métro.
Sanders a dit à l’époque :

« Les stations elles-mêmes sont très belles, avec de nombreuses œuvres d’art, des lustres magnifiques. C’est un système très, très efficace ».

Il est un peu effrayant que Joseph Staline ait initié la tradition de construire des palais chthoniens sous les villes soviétiques. Les stations étaient belles, sans doute, mais leur efficacité est une toute autre affaire.

L’étendue des lignes laissait à désirer et les heures de pointe étaient cauchemardesques.

La description des stations par M. Sanders comme étant «efficaces» est donc déroutante. Les gens étaient entassés comme des sardines dans les trains.

Plus important encore, les métros n’étaient construits que dans les villes de plus d’un million d’habitants. Investir de l’argent dans des projets extravagants est logique si le but est d’éblouir les étrangers, mais c’est aussi très imprudent si l’on considère que l’état des routes à travers la Russie a toujours été atroce.

En voyageant en URSS, en particulier dans les villes de province comme Yaroslavl, on peut penser que Bernie Sanders, un Américain ayant un permis de conduire, prendrait note de l’état des infrastructures.

Des théâtres gratuits que personne ne voulait visiter

Bernie poursuivait sa description éblouie:

« Leurs palais de la culture pour les jeunes, toute une variété de programmes pour les jeunes, et les programmes culturels vont bien au-delà de ce que nous faisons dans ce pays. Nous sommes allés dans un théâtre à Yaroslavl qui était absolument magnifique, avec trois scènes distinctes. Leurs programmes culturels étaient élaborés par des acteurs et des actrices professionnels, y compris un espace pour les marionnettistes. Et le coût, le prix le plus élevé du billet que vous pouvez obtenir était l’équivalent de 1,50 $.»

Il est vrai que l’Union soviétique subventionnait toutes sortes de programmes culturels pour les enfants, tels que les théâtres et les palais de la culture pour les jeunes avec des programmes d’enrichissement après l’école. Malheureusement, dans une économie socialiste, ce type d’institution existait sans qu’aucune information sur les marchés visés et atteints ne soit disponible.

Je faisais partie de la génération qui faisait des sorties annuelles au Théâtre du Jeune Spectateur. Mis à part le prix des billets, il n’y avait qu’une seule scène de ce type dans la ville, plus le Théâtre de marionnettes pour les plus jeunes, et la demande pour les spectacles n’était pas très forte. Je ne pense pas que la programmation culturelle américaine soit inférieure, même si le coût pour le consommateur peut être plus élevé.

Quand j’avais 10 ans, j’ai commencé à prendre le métro à travers la ville pour me rendre dans un palais des enfants où les activités extrascolaires étaient proposées. Le palais, une belle structure pré-révolutionnaire, a été nommé d’après l’homme de main de Staline, Pavel Postyshev. Postyshev a présidé à la Terreur rouge, aux purges et à l’Holodomor **, avant d’être lui-même victime des répressions staliniennes.

Vers la fin de sa vie, le bourreau, alors alcoolique, présentait des symptômes de paranoïa. Il a un jour décidé que la flamme dessinée sur la boîte d’allumettes ressemblait au profil de Léon Trotsky et que les saucisses, une fois coupées, présentaient des tourbillons semblables à des croix gammées. Il a ordonné la confiscation de toutes les allumettes et une purge des épiceries.

Ma génération de Soviétiques est arrivée à maturité en sachant que l’URSS était bâtie sur la tyrannie et le mensonge. Nous sommes la génération la plus cynique de l’histoire russe. Une fois que le pays s’est effondré, nos vies sont devenues incontrôlables. En conséquence, les russophones de mon âge ont souffert d’un taux élevé de toxicomanie, d’une faible espérance de vie et d’un taux de natalité élevé. Le bon côté des choses, c’est que nous avons grandi avec des lustres de couleurs vives dans les lieux publics.

Le manque de curiosité de Bernie et Jane

L’épouse de Bernie, Jane, a repris là où son mari s’était arrêté :

« Nous avons été stupéfaits par l’ouverture, l’optimisme, l’enthousiasme de la nation. … Ce qui m’a le plus frappé, c’est la façon dont ils s’occupaient des enfants, et de la vie culturelle de leur communauté. Comme Howard [un autre homme du voyage] l’a mentionné, ils investissent l’argent dans des installations publiques, et ils ont des palais de la culture qui sont payés uniquement par les cotisations syndicales, et ils ont des films et des danses, et ils ont beaucoup de débouchés artistiques pour les gens – par exemple, ils peuvent devenir membres d’un orchestre et étudier pour jouer d’un instrument et se produire, et lorsqu’ils partent en représentation, cela ne semble pas être quelque chose qu’ils font seuls, et ils ont besoin de prendre des vacances, mais c’est considéré comme un moyen de fournir et de contribuer à la vie de la communauté, donc cela devient une partie de leur travail au lieu de compartimenter leur vie en travail et en loisirs. Tout cela est lié, et c’est sous la bannière de l’engagement communautaire.»

Le problème du Premier Monde que Jane essayait de résoudre ici s’appelle «l’homme moderne fracturé», et vous ne sauriez pas qu’il s’agit d’un problème avant d’avoir suivi un bon nombre de cours à l’université.

Est-ce vraiment si pénible d’avoir à la fois un travail et un passe-temps ?
Son discours sur «l’engagement communautaire» était plutôt ridicule, étant donné qu’elle venait de visiter un pays où le niveau de confiance était très faible, où il n’y avait pas de culture civique significative et où l’alcoolisme était très répandu.

Une fois la journée de travail terminée, la plupart des Soviétiques ne se rendaient pas dans des palais de la culture qu’ils considéraient comme une extension de leur vie professionnelle. Ils ne pratiquaient pas le violon. Ils travaillaient au noir, gagnaient de l’argent pour arrondir leurs fins de mois, faisaient des courses, ce qui prenait beaucoup de temps, ou s’occupaient de leur famille.

Ils buvaient aussi ou regardaient peut-être un film étranger au cinéma – l’URSS en a acheté un nombre limité, mais la boisson était leur passe-temps favori. La consommation d’alcool a doublé entre 1955 et 1979.

Personne ne sait ce qui a payé la construction et l’entretien des palais de la culture soviétique. Dans une économie planifiée avec son tissu de subventions et de pots-de-vin, de telles choses ne sont pas transparentes.

Les cotisations syndicales étaient cependant prélevées sur tous ceux qui étaient inscrits dans un syndicat, c’est-à-dire sur tous les travailleurs, car tous ceux qui étaient employés par le gouvernement y étaient automatiquement inscrits, et tous travaillaient pour le gouvernement – ou du moins le prétendaient. Comme le disait la blague soviétique, « Nous faisons semblant de travailler et ils font semblant de nous payer ».

Pour être émerveillé par ces palais de la culture à la fin des années 80, un visiteur devait être vraiment, vraiment – je veux dire vraiment – borné.

Les Sanders, en lune de miel étaient entourés par des gardiens du KGB.
Les jeunes mariés ont eu droit à des spectacles, mais ont-ils fait un effort pour rencontrer un artiste ? Leur tournée était littéralement une excursion de Village Potemkine à travers l’Union soviétique : le meilleur de l’architecture, aucune vraie personne rencontrée.

L’œil vigilant du censeur

La fin des années 80 a été une période difficile, lorsque l’économie a souffert du fait que le pays luttait pour concurrencer les dépenses militaires américaines. Mais c’était aussi une période incroyablement passionnante car la Glasnost de Mikhaïl Gorbatchev a permis de découvrir le passé du pays et de discuter de tout un univers d’idées nouvelles.

Jane Sanders avait raison de dire qu’il y avait beaucoup d’enthousiasme et d’ouverture dans le pays, et que les gens ordinaires étaient impatients de rencontrer des Américains. Les Sanders les ont laissés tomber en restant avec leurs «guides».

Et les palais de la culture ? Pendant la plus grande partie de l’histoire soviétique, ils ont été les sanctuaires de la culture soviétique de second rang – amateur et produite sous l’œil attentif de la censure. Les artistes soviétiques de haut niveau ne commençaient pas leur éducation dans les classes pour adultes en province ; ils étaient formés dans les grandes villes dès leur plus jeune âge.

Le type de divertissement que les Soviétiques souhaitaient le plus n’était pas non plus créé par de jeunes marionnettistes. Une poignée de stars russophones officiellement produites restaient populaires parmi les gens de tous âges. Beaucoup de ceux qui sont nés après la Seconde Guerre mondiale ont développé une préférence pour les artistes occidentaux et les artistes underground locaux.

Les enregistrements d’artistes interdits faisaient l’objet de contrebande d’un ami à l’autre et étaient parfois pressés sur un film vinyle radiographique – «na kostyah» ou «on the bones».

Quelques artistes occidentaux, notamment David Bowie, ont été autorisés à se produire en URSS. Les groupes soviétiques donnaient généralement des concerts dans des appartements.

Après qu’un enregistrement clandestin de rock underground soviétique ait été diffusé à l’Ouest, Gorbatchev aurait dit : « Pourquoi ne pouvons-nous pas le faire ici ? » Peu de temps après, les artistes figurant sur l’enregistrement ont obtenu des contrats avec la seule compagnie d’enregistrement soviétique, Melodia. Des stades et d’autres lieux de représentation officiels ont été ouverts pour les musiciens qui avaient subi des années de poursuites, le licenciement, l’expulsion des organisations officielles de jeunesse et des peines de prison.

Bernie Sanders, désespérément naïf

C’est ce qui se passait tandis que Bernie visitait l’URSS.

Pourtant, avec toute son excitation pour les lustres, les marionnettistes et les salles de répétition sanctionnées par le KGB, il est passé complètement à côté de l’esprit du temps.

L’amateur du communisme du Vermont était plus proche de la libération qu’il pouvait l’imaginer, mais il a choisi de croire ses surveillants. Et les branchés du millénaire le trouvent cool.

C’est un touriste d’un genre particulier, bien connu des Russes.

Le touriste qui demande : « dites-moi quelque chose de sympa sur votre pays », le touriste qui pense que « les mauvaises choses que j’ai entendues sont sûrement toutes de la propagande de la CIA », ce qui est une coche en dessous du touriste qui dit « soyons nuancés sur votre situation ».

Cela dit, l’attitude envers ce type de personnes était généralement positive. Ils étaient américains, toujours en blue-jeans, et ils pouvaient nous dire une chose ou deux sur la musique. Nous pensions qu’ils étaient fondamentalement bien intentionnés mais désespérément naïfs.

Après avoir déménagé aux États-Unis, je ne crois plus que les types du même genre que Bernie soient réellement bien intentionnés.
Quoi qu’il en soit, un homme qui peut aussi facilement être dupé ne devrait jamais devenir président des États-Unis.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Traduction de Magali Marc (@magalimarc15) pour Dreuz.info.

* Katya Rapoport Sedgwick est un écrivain de la baie de San Francisco.

** Le terme Holodomor ( en ukrainien : littéralement « extermination par la faim ») désigne la grande famine qui eut lieu en Ukraine et dans le Kouban en 1932 et 1933 et qui fit, selon les estimations des historiens, entre 2,6 et 5 millions de victimes.

Sources:

  • https://thefederalist.com/2020/02/21/i-lived-in-soviet-russia-when-bernie-sanders-visited-and-hes-a-communist-dupe/
  • https://reinformation.tv/bernie-sanders-lune-de-miel-urss-jallais-45153-2/

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