Publié par Ftouh Souhail le 20 avril 2020

Cette plaie est toujours ouverte pour les Arabes ahwazis qui commémorent aujourd’hui le 95e anniversaire de leur pays occupé par les Perses, mais cela n’intéresse pas les médias. Certes, les victimes ne sont pas des Palestiniens et il n’y a pas mieux que les juifs pour blâmer.

Aussi surprenant que cela puisse paraître, aucun pays arabe, aucune ONG islamique, aucun de ces pseudo-intellectuels arabes ne commémorent avec les ahwazis cette catastrophe qui les a frappé depuis 95 ans, les exactions commises par l’armée iranienne en 1925 et l’épuration ethnique dont furent victimes les arabes ahwazis.

Le 20 avril de cette année, les Ahwazi commémorent l’occupation des forces iraniennes de la région arabe d’Al-Ahwaz en 1925 (1). Elle sera la plus grande expansion territoriale du projet perse au Proche-Orient. La superficie occupée est grande comme l’Italie.

Al Ahwaz, c’est une province du Khouzistan, située au sud-ouest de l’Iran. Sa particularité est qu’elle est majoritairement composée d’Arabes et non de Perses, dont une partie est d’obédience sunnite.

Dans les pays arabes, aucune des organisations de défense des droits de l’Homme, qui pointent du doigt jour et nuit Israël, ne répond aux appels pour dénoncer les injustices et violences diverses que subissent les populations autochtones dans ces territoires arabes occupés par le régime iranien.

Spoliation systématique des ressources de cette région arabe d’Al-Ahwaz

La région regorge d’eau, de minéraux, de pétrole (plus de 85% du pétrole “iranien”) et de gaz naturel (2ème plus gros gisement après la Russie). 

Malgré ces ressources, la pauvreté y est manifeste et le chômage exponentiel (40%), pour cause, les Arabes y sont tout simplement évincés.

Le niveau de pauvreté dans toute la province occupée reste parmi les plus élevés de toutes les provinces du pays et ce, malgré l’existence de pétrole, de gaz et d’autres ressources nationales lucratives. Pour les ahwazis, ce n’est là qu’un aspect de ce qu’ils décrivent comme du racisme répandu. Ils deviennent dès lors des étrangers chez eux.

Bien qu’ils soient majoritaires dans la province, ils sont souvent dans l’incapacité d’obtenir un emploi dans le domaine du pétrole, les produits pétrochimiques et les autres industries majeures de la région car victimes de discrimination. La priorité est attribuée pour les nouveaux arrivants perses et leurs milices .

L’idée sous-jacente à cette politique raciste remonte à la période de Mohammad Reza Chah, mais elle a pu être complètement mise en œuvre avec l’émergence de la révolution islamique. Elle a finalement été intensifiée depuis 1988 par de hauts responsables politiques du régime comme Ali Akbar Hachemi Rafsandjani, l’ancien président.

Ainsi, aux yeux des Ahwazis, la découverte du pétrole et de ces autres ressources n’a été pas moins qu’un fléau et qu’un malheur qui a entraîné l’occupation (2). Le gouvernement iranien semble se concentrer uniquement sur le processus d’extraction du pétrole pour générer des revenus.

C’est en 1908 que du pétrole a été découvert dans la région. En 1925, Reza Khan, le chah d’Iran, a envahi ce qu’on appelait alors l’émirat d’Ahvaz, avant de renverser le souverain arabe de la région et d’annexer ses 330 000 kilomètres carrés en 1934. Les terres ont été confisquées par l’État à leurs propriétaires arabes puis transférées au gouvernement.

Depuis la fin de ce qui était alors un Émirat et l’exécution de leur émir Khaazal al Kaabi (1), c’est une véritable éradication de l’arabité des habitants qui est mise en pratique. La langue arabe y est interdite tant dans l’éducation que les institutions, les villes et lieux ont d’ailleurs été dès lors persianisés, et tout activisme arabo-centré est passible de lourdes peines de prison.  (Ici c’est pas l’Etat d’Israël de 1948 qui reconnait automatiquement la langue arabe et qui ouvre ses grandes universités pour accueillir toutes les minorités).

Désireux d’obtenir l’indépendance, de nombreux mouvements politiques existaient avant la Révolution islamique de 1979. Tentant le dialogue, ils avaient fait nombre de demandes qui furent tout bonnement rejetées dès le renversement du Shah. Quelques mois après, la province tomba même sous le joug de miliciens armés, qui s’appuyant sur une fatwa de l’ayatollah Khomeney, tuèrent en un “Black Wednesday“, le 29 mai 1979, des centaines d’Arabes ahwazis.

Depuis, la situation n’a fait qu’empirer, divers groupes armés se sont d’ailleurs constitués. Ils sont inaudibles politiquement et invisibles aux yeux de la communauté internationale.

Participant à l’intensification des tensions entre iraniens et arabo-saoudiens, le gouvernement chiite des mollah dit avoir de lourds soupçons quant à l’implication de l’Arabie Saoudite dans le financement des groupes séparationistes sunnites locaux. 

La question palestinienne mobilisant depuis 1967 les attentions, les ahwazis eux peuvent aussi et encore attendre, tant ils ne semblent intéresser que peu de monde. Aucun pays voisins ne souhaite s’exprimer pour défendre les ahwazis. Aucun soutien venant des nations arabes et de la communauté internationale.

L’occupation iranienne détient injustement plus que 2000 militants ahwazis

Les prisonniers ahwazis oubliées, pas un mot dans les médias arabes

Les ahwazis subissent un régime qui ne leur autorise aucune forme de protestation.

La « Journée du prisonnier ahwazi » constitue une occasion pour parler des détenus dans les prisons d’occupation iraniennes et faire connaître leur cause davantage dans un contexte exceptionnel marqué par la propagation du coronavirus qui menace la santé voire la vie d’environ 2000 hommes et femmes.

Le peuple arabe Ahwazi commémore le 20 avril de chaque année, la « Journée des prisonniers d’Al-Ahwaz », en tant que journée nationale pour soutenir les prisonniers dans les prisons et les camps de détention iraniens.

Al-Ahwaz a commencé à célébrer cette occasion, depuis 2018, et a été choisie le 20 avril, en raison de l’anniversaire de l’occupation de cet territoire pour souligner le lien étroit entre le peuple et les familles des prisonniers de l’occupation.

Encore surprenant aucun pays arabe, aucune ONG islamique, aucun de ces pseudo-intellectuels arabes ne commémore le 20 avril pour les ahwazis.

Pourtant lorsque il s’agit des Palestiniens, tu trouveras que la Ligue arabe avait décidé, depuis 2008, d’adopter la date du 17 avril comme journée de solidarité avec les prisonniers palestiniens et arabes détenus en Israël, afin que cette mémoire soit célébrée à travers tous les pays membres.

L’occupation iranienne détient injustement plus que 2000 militants ahwazis qui se trouvent dans les sombres centres de détention de Sbidar et Shaiban.

L’Iran est le pays le plus oppressif du Moyen-Orient. Les prisons y sont d’ailleurs bondées, et si l’Iran est mondialement le second pays exécutant le plus de prisonniers, la province d’al Ahwaz est elle la première du pays en ce sens. 

Ici régulièrement, des arrestations ont lieu, assorties de pendaisons publiques, la tendance semblant ces dernières années s’accélérer :plus que pendaisons sous le mandat d’Hassan Rohani dont 105 femmes !

Cette occasion du 20 avril de la « Journée du prisonnier ahwazi » survient, cette année, après trois semaines de soulèvement dans la prison d’Ahwaz occupé, où des manifestations ont éclaté dans la prison de Sbidar au centre d’Al-Ahwaz, et dans la prison centrale de la ville de Shaiban, dans la banlieue d’Ahwaz, et à la prison d’Abadan, après que les autorités d’occupation aient ignoré leurs demandes de libération provisoire, en raison de l’épidémie du coronavirus, du manque de séparation des prisonniers contaminés, de la fourniture d’un traitement médical approprié pour eux, au milieu des craintes d’une liquidation physique délibérée ou en les exposant délibérément à cette grave épidémie.

Des centaines de prisonniers sont morts peu après avoir quitté la prison, en raison des maladies qu’ils ont contractées pendant leur détention, ceci en sus des centaines d’autres présentant d’handicaps durables en raison des conditions d’incarcération assez éprouvantes des geôles perses.

La question des prisonniers est l’une des questions de consensus national entre tous les ahwazis, quelles que soient leurs appartenance et leurs orientations, car elle est un élément essentiel du combat du mouvement de libération et l’un des piliers les plus essentiels de la cause de ce peuple autochtone.

Si les ahwazis célèbrent cette journée et pendant que le monde a les yeux rivés sur le coronavirus, l’occupant iranien en profite et continue ses arrestations massives en violation du droit international.

En l’absence de lois pour protéger les civils en Iran et sous un système autocratique, la plupart des groupes ethniques du pays sont exposés à une discrimination et une persécution systématiques.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Ftouh Souhail pour Dreuz.info.

  • (1) Khaazal al Kaabi est le dernier souverain arabe ( Juin 1897 – avril 1925 ) de cette région connue aussi par nom d’Arabistan. Cheikh Khaazal était un franc-maçon actif et un récipiendaire de nombreux honneurs maçonniques élevés. Jusqu’à sa mort, Sheikh Khaz’al était le plus influent de tous les maçons du Moyen-Orient. On ne sait pas exactement quand Sheikh Khaazal a rejoint la franc-maçonnerie. Ce que l’on sait, c’est qu’il fut le premier franc-maçon parmi les habitants du golfe arabe, et qu’il devint le grand maître de la franc-maçonnerie dans toute la Mésopotamie.
  • (2) En vertu de la loi iranienne, l’État est autorisé à prendre possession des terres si des ressources sont découvertes. Les propriétaires reçoivent un préavis de deux semaines pour se rendre au bureau d’état civil et remettre leur acte de propriété. L’État affirme qu’il achète les terres selon leur valeur marchande, mais cela arrive rarement. Quiconque s’oppose à ce processus est considéré comme opposé au gouvernement et lourdement pénalisé.

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