Publié par Thierry Ferjeux Michaud-Nérard le 20 avril 2020

Maurice Druon, dans son livre La France aux ordres d’un cadavre, décrit l’indifférence totale de l’opinion lorsque l’ouverture des archives soviétiques laissa apparaître le montant des sommes fournies par l’U.R.S.S. au Parti communiste et à son relais syndical, la Confédération générale du travail. Cette révélation et sa confirmation chiffrée ne provoquèrent dans la presse pas la moindre indignation ni réprobation !

Pourtant des preuves patentes, officielles, portaient inscription de dizaines de millions de dollars ! Une presse soi-disant attachée à sa dignité et à son indépendance, une République soucieuse de l’honnêteté de ses parlementaires, un État veillant à interdire les irrégularités et les trafics auraient dû, en bonne morale, dissoudre le Parti communiste et la C.G.T., au motif d’intelligences avec une puissance étrangère.

En vérité, pareille décision ne pouvait être prise qu’au sommet de l’État. Mais comment attendre rien de tel d’un Mitterrand politicien lui-même menteur qui s’était fait élire sur un programme commun élaboré avec les communistes et qui comblait tous leurs souhaits ? Comment l’attendre d’un gouvernement, issu d’un Parti socialiste qui jamais ne put accéder à la majorité parlementaire sans l’appoint du Parti communiste ?

Hélas, ce n’est pas seulement le Parti socialiste qui fut et reste otage des marxistes soviétisés.

La France, l’administration, l’enseignement, la justice et tous les organismes publics sont soumis à l’influence et continuent d’appliquer les consignes des marxistes soviétisés, le plus souvent à leur insu.

Le nombre des communistes dûment inscrits au parti, allant sans cesse s’amenuisant, on ne voudrait plus croire qu’ils puissent avoir une action révolutionnaire déterminante aujourd’hui contre le pays, alors qu‘ils en altèrent sans cesse le fonctionnement et en sapent les structures. Les marxistes d’obédience soviétique se sont toujours inspirés des méthodes employées par Lénine pour se saisir du pouvoir et le conserver.

La minorité marxiste organisée et déterminée s’impose toujours à une majorité molle, en la terrorisant, physiquement par le passé, et moralement aujourd’hui. La méthode continue d’être utilisée à l’intérieur des professions et de la presse par les syndicats communistes. L’utopie de la Révolution universelle ayant fait long feu dès l’aube du léninisme, l’idéologie, sous Staline, devint l’outil d’une entreprise révolutionnaire d’hégémonie planétaire. Elle appliqua les recettes de Sun-Tsu, le stratège chinois presque contemporain de Bouddha et de Périclès, dont les écrits étaient une sorte de catéchisme pour les services secrets soviétiques.

L’art suprême de la guerre, selon Sun-Tsu, est de conquérir des pays sans devoir livrer bataille, en les affaiblissant de l’intérieur, en réduisant leurs ressources et en les minant moralement jusqu’à ce qu’ils soient dans l’incapacité de se défendre. Et tous les moyens sont bons : la propagation de fausses nouvelles, la désinformation, l’incitation de rivalités intérieures, le discrédit jeté sur les chefs par de fausses accusations, l’infiltration des administrations par des agents de propagande, la chute des rendements, la paralysie du travail. Après 2500 ans, si les procédés sont différents, les principes et les objectifs restent les mêmes.

Moscou et le P.C.F. s’appuyaient, tacitement, sur les trotskistes, les anarchistes et les gauchistes, tous ces gens qui, en cas de victoire du camp totalitaire, eussent été les premiers éliminés ! Voir Staline !

L’idéologie communiste leur faisait un devoir de nuire à leur propre pays. C’est surtout dans la presse, qui conditionne journellement l’opinion, que les trotskistes et les gauchistes étaient utiles aux Moscovites. Pour nombre de journalistes, qui confondent volontiers liberté et impunité, l’indépendance ne se prouve qu’en s’opposant. Les attaques systématiques, les insinuations, les mises en cause, la présentation orientée ou faussée des événements, la mauvaise foi, étaient et demeurent procédés habituels des marxistes.

Jean François Revel, dans son livre Le voleur dans la maison vide, reparle de L’affaire Marchais :

L’affaire Marchais éclata en mars 1980 quand L’Express découvrit la fiche de travailleur volontaire en Allemagne nazie du secrétaire général du Parti communiste dans les archives de la ville d’Augsbourg. Ce moment de notre mythe national mit en lumière, une fois de plus, la prude aversion pour la vérité que ressent la classe politique et journalistique française, dès que l’on touche à la nomenklatura de gauche qui voulait pouvoir continuer à feindre de l’ignorer tout en connaissant le fructueux coup de main de collabo que Georges Marchais, sous l’Occupation, avait donné à l’industrie de guerre nazie contre la France en guerre. Dans le milieu politico-journalistique de connivence de gauche, on tolérait ces informations pourvu qu’on permît à Marchais de les repousser avec dédain et de les imputer, sans y répondre, à une croisade de dénigrement.

À cette sournoise convention de ménagement réciproque, applicable à tous les partis, s’ajoutait le traitement de faveur dont jouissait le Parti communiste. Les documents, recoupements et raisonnements, qui amenaient à démasquer le Marchais collabo de l’Occupation, avaient été jusque-là rayés et refoulés par la grâce d’un accord de connivence entre tous les partis pour rejeter les deux livraisons de L’Express qui avaient raconté « La vraie vie de Georges Marchais« , en juillet 1978. Elles étaient occupées sérieusement à exhumer et à récapituler les informations qui avaient traîné sur tous les marbres au cours de la décennie écoulée, mais qui avaient été balayées avec soin par nos confrères et expédiées à l’incinérateur de salut public.

Les anciens résistants communistes avaient flairé les antécédents suspects de Marchais dès son adhésion. Ils avaient décidé en 1970 de les porter sur la place publique. Le Kremlin venait d’écarter Waldeck-Rochet, qui avait désapprouvé l’intervention soviétique de 1968 en Tchécoslovaquie, pour imposer Marchais comme successeur de Waldeck au secrétariat général. Pour les résistants, subir la grossièreté de ce braillard médiocre et vaniteux, ancien collabo, c’était trop d’humiliation. Ils retrouvèrent dans des archives ministérielles françaises le Certificat d’embauche de Georges Marchais, en date du 12 décembre 1942, avec départ prévu pour le 17, comme travailleur volontaire en Allemagne. Volontariat attesté par deux mentions sans équivoque.

D’abord la rubrique : Durée du contrat : 12 monate (12 mois), il s’agissait d’un contrat de travail, pas d’une réquisition. Ensuite l’indication : A touché la prime d’équipement, avantage réservé aux volontaires et pour lequel Marchais a signé un reçu, joint au certificat. Noir sur blanc y figurait l’affectation de l’embauché : les usines Messerschmitt, fleuron de l’industrie aéronautique de guerre des ennemis de la France en guerre.

Ces documents parurent en octobre 1971 dans La Nation socialiste. Marchais improvisa une tactique de défense pour reconnaître qu’il avait été en 1942 travailler en Allemagne dans des usines d’armement.

Mais à prétendre mensongèrement qu’il s’y était rendu sous la contrainte comme « déporté du travail », au titre du STO (Service du travail obligatoire), qu’il s’était ensuite évadé, en janvier 1943, mais avait été repris au cours d’un contrôle à Stuttgart. Le menteur collabo qualifiait enfin les documents de faux grossiers, selon le vocabulaire rituel et invariable du Parti. Marchais montrait le toupet et la sottise de ses mensonges.

Ainsi, le STO, créé par Vichy en février 1943, ne pouvait pas concerner Marchais, lui qui était parti en décembre 1942. Aussi, le STO ne mobilisait que la main d’œuvre qui n’était pas déjà dans les usines, à savoir les étudiants et les jeunes paysans. Quant à l’authenticité du certificat d’embauche, Marchais, en commettant l’étourderie de la nier, n’obtint que de la faire confirmer par la justice française.

En 1975, il porte plainte pour faux et usage de faux. Démarche inconsidérée puisque deux jugements le déboutent et vont déclencher une plainte de l’Association nationale des déportés du travail qui le fait condamner, en première instance, en appel et en cassation pour « utilisation abusive de la qualité de déporté« .

Deux jugements, en première instance et en appel, sur plainte en diffamation contre L’Humanité, la condamnent aux dommages, dépens et publication du jugement. Mais en vertu du traitement de faveur ou de la crainte lâche qui protégeaient le PC, la presse communiste n’exécutait jamais les publications judiciaires, au mépris impuni de la loi. Un dernier jugement, rendu le 16 janvier 1980, donnait tort au secrétaire général et officialisait devant les tribunaux l’imposture de Marchais au sujet de sa biographie sous l’Occupation.

Charles Tillon, ancien commandant en chef du Commandement militaire national des francs-tireurs et partisans, ancien ministre, et ancien membre du bureau politique, dévoila que Marchais avait collaboré dès juillet 1940. Il avait sollicité et obtenu son embauche dans l’usine AGO à Bièvres, pure entreprise allemande opérant sous le contrôle direct de la Luftwaffe. Les salariés de l’AGO jouissaient d’un statut privilégié et s’engageaient à ne commettre aucune indiscrétion, puisqu’ils travaillaient sur un prototype secret : l’avion de chasse Focke Wulf 190. Obligée de fermer ses portes à la fin de 1942 à cause des bombardements alliés, l’AGO transféra chez Messerschmitt, près d’Augsbourg, des éléments de son personnel français.

Le 24 mars 1980, alors qu’une partie de la presse hypocrite voulait feindre de croire à l’innocence de Marchais, Charles Tillon informait que Marchais a été un collaborateur de la première heure : En juillet 1940, voilà un homme qui, alors même que la majorité des travailleurs de la région parisienne n’étaient pas encore revenus d’exode, a choisi de se faire embaucher dans la meilleure usine de l’époque. Celle où les salaires étaient les plus élevés. Celle où la police était assurée par la Gestapo. Celle qui permettait d’obtenir des Ausweis au jouisseur qu’il était. Cette usine d’AGO, à 100 % allemande, servait à entretenir les avions de la Luftwaffe qui avaient commencé à bombarder l’Angleterre en vue d’un débarquement qui n’eut pas lieu.

On voit que la question de savoir si, dès 1942, Georges Marchais collaborait en Allemagne chez Messerschmitt, est confirmée puisqu’il est prouvé que Marchais collaborait déjà en France dès juillet 1940.

II va de soi qu’ayant accepté les privilèges d’une situation avantageuse à l’AGO, Marchais en avait aussi, dès l’origine, accepté les conditions, qui pouvaient inclure un dépaysement en Allemagne.

Il a bénéficié d’un Ausweis, ces papiers d’identité allemands, délivrés par les autorités d’Occupation aux Français travaillant dans leurs services, qui permettaient de circuler librement, en particulier pendant les heures de couvre-feu. Aucun menteur n’a jamais montré autant d’empressement à se faire prendre en flagrant délit dans la minute même de son imposture. Le mensonge était indispensable à Marchais pour l’aider à se maintenir là où il l’avait porté. Mais l’art du menteur exige que l’on n’en ait point la tête. Or, loin de posséder le talent que loue Homère d’inventer « force mensonges semblables à la vérité » (Odyssée, XIX, 203), le pauvre Marchais respirait la tromperie, même quand il lui arrivait de dire la vérité, incartade conjecturale dont, au demeurant, aucun historien n’a jamais pu le soupçonner. Et surtout pas dans la suite de l’affaire Marchais !

Quand L’Express verse une pièce inédite au dossier, personne en France, parmi les professionnels qui traitent de la politique ou qui en vivent, n’ignore les services rendus par Marchais à l’Allemagne comme collabo volontaire sous l’Occupation. S’ajoutant au certificat d’embauche à Paris tiré des archives françaises, la fiche de séjour à Augsbourg, issue des archives allemandes, fournissait la contre-épreuve rêvée. Mais les réactions de la société politique française voulaient engloutir L’affaire Marchais sous la bonne conscience du conformisme et de la complicité des endormeurs pour qui : « Au fond l’affaire Marchais n’a rien prouvé ».

Ces faiseurs d’opinion, qui ne sont que des faiseurs tout court, font penser à ce personnage de Proust à qui, quand il s’apprête à partir pour un bal, on vient annoncer la mort d’un proche parent, et qui, décidé à ne pas renoncer à sa soirée, lance : « Est-ce bien sûr ? Vous savez, dans ces cas-là on exagère toujours ! »

La fiche d’Augsbourg attestait que Marchais s’était présenté à ses nouveaux employeurs dès le 19 décembre 1942. On y voyait en outre, inscrite à la main, la date du 10 mai 1943, barrée d’un trait de crayon. À cette date, Marchais avait obtenu un congé pour se rendre en France, en raison, disait-il, d’un deuil familial. La même date, un an plus tard, le 10 mai 1944, était aussi barrée. On pouvait en induire qu’elle correspondait à une deuxième permission, indication qui impliquait la présence de Marchais en Allemagne à la veille du débarquement allié en Normandie. La fiche contribuait à ruiner la légende de la déportation et le bobard de l’évasion avec mention de l’adresse de Marchais à Augsbourg, adresse privée, Zum blauen Bock, (Au Bélier bleu), auberge où logeaient des travailleurs libres, étrangers et allemands. Par définition, ces derniers ne pouvaient pas être des déportés. Cette résidence révélait le volontariat et démasquait le menteur. Ce gênant bélier bleu donnait à la fable de la réquisition et de l’évasion l’allure d’un mouton à cinq pattes.

Or, lors des premières fuites concernant son passé, Marchais avait affirmé dans L’Express (27 juillet 1970) : Requis à la fin de 1942, je me suis évadé en janvier 1943. J’en garde les preuves. Et  je les fournirai, si j’y suis contraint. Ce qu’il ne fit jamais, car il ne le pouvait pas. L’Express, avec pour titre La preuve du mensonge, provoqua l’affolement au sommet du Parti. La riposte se résuma au subterfuge consistant, comme pour le certificat d’embauche, à crier au faux grossier. L’Humanité Dimanche dénonça L’infâme machination.

Roland Leroy tempêta : « Toute la presse reprend à son compte les calomnies de L’Express ». Au Club de la presse du dimanche 9 mars 1980, Marchais se défendit en niant l’évidence avec un aplomb borné.

Or des éléments nouveaux venaient précisément de le réfuter. Il réitéra qu’il avait été un déporté du travail et que ses calomniateurs avaient forgé un faux certificat d’embauche prétendument trouvé au ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre. La justice lui avait donné raison sur ce point, maintenait-il. Cette invention, une contre-vérité patente, n’importe qui pouvait la contrer en se procurant les jugements.

Pourtant, ce contrôle des faits n’entrait pas dans les méthodes d’un grand nombre de journalistes. Vingt journalistes participaient au Club de la presse du dimanche 9 mars 1980 avec Gérard Carreyrou et Alain Duhamel. Si ce Club de la presse ne fit guère progresser la lumière, c’est que la plupart des journalistes, en majorité non communistes, se montraient peu enclins à creuser le dossier ni très désireux de replonger dans la pénombre ! Le journaliste du Monde de gauche, Thomas Ferenczi, quand vint son tour d’interroger l’invité, préféra se désister de sa question. Cette opiniâtreté de Marchais dans le mensonge flagrant, ce qui aurait déconsidéré n’importe quel autre politicien, fut alors acclamée dans la presse collabo de l’époque comme une formidable prestation. Là réside l’indice le plus révélateur du climat politico-médiatique des années 1980 !

Dès le lendemain, Alain Duhamel, dans son éditorial, au micro d’Europe 1, accréditait le contraire de ce qu’il s’était passé : « On ne peut vraiment pas contester de bonne foi que Georges Marchais ait fait preuve, au Club de la presse, une heure et demie durant, d’un sang-froid, d’un contrôle de lui-même, d’une présence d’esprit et, surtout, d’une habileté impressionnante. » Quant au directeur de l’information de la station, Étienne Mougeotte, il se lançait  dans une envolée que L’Humanité du lendemain reproduisit avec une ferveur zélée :

« Un homme qui affirme droit dans les yeux de vingt journalistes et de millions de téléspectateurs qu’il a été requis pour aller travailler en Allemagne et qu’il n’y est pas retourné après une permission obtenue en mai 1943, cet homme mérite d’être cru, ou alors, c’est que le mot honneur aurait perdu toute signification. »

Moralité, si la presse et les grands médias sont vraiment discrédités aux yeux des Français, c’est que le mot honneur a réellement perdu toute signification pour ces gens-là. Se fier aux mensonges de Marchais, célèbre pour son refus de la vérité, c’était bien priver de toute signification le mot honneur de la presse !

 Étienne Mougeotte, dans un éditorial collabo, aggrava le déshonneur de la presse en proclamant que Marchais était victime d’une odieuse campagne de presse et d’une attaque au-dessous de la ceinture !

Cerise sur le gâteau, Giscard d’Estaing s’élança à la rescousse de Marchais. « Le président de la République, selon le communiqué de l’Élysée, désapprouve les attaques  personnelles dirigées contre les hommes politiques ! » Thèse d’une indigence digne d’un esprit dépourvu de jugement, mais non pas de futilité, d’hypocrisie, ni d’incompétence. Le faux calcul de Giscard accoucha de toutes ses conséquences néfastes pour son auteur ! L’aide à Marchais ne lui servit pas à obtenir l’abstention communiste entre les deux tours de l’élection présidentielle de 1981. Marchais, renforcé par les soutiens présidentiels, pouvait toujours se payer la tête des Français. C’est le tort de Giscard d’avoir souffleté L’Express, sans profit pour lui-même, pensant, avec la presse, qu’il pouvait faire croire n’importe quel boniment à n’importe quel paroissien !

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Thierry-Ferjeux Michaud-Nérard pour Dreuz.info.

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