Publié par H16 le 20 mai 2020

Ce n’est pas parce qu’il y a une crise économique monumentale dans le monde et catastrophique en France qu’on peut se permettre d’oublier la petite politique politicienne : ainsi, même lorsqu’on est ministre de cette économie qui va prendre très cher dans les prochaines semaines, il n’est pas inutile de faire le fanfaron. Après tout, cela peut permettre de se vendre comme remplaçant naturel d’un Premier ministre qu’on chuchote sur le départ…

Et pour se vendre, il suffira de faire parler de soi, d’apparaître dans un maximum de journaux et de disperser ses bonnes paroles à tous les journalistes alentours qui, trop heureux de venir se faire asperger des gouttes de savoir quintessentiel qu’on distribue, iront les diffuser à foison dans leurs articulets finement ouvragés.

De surcroît, la crise offre un espace particulièrement vaste à cet auguste épandage de science économique raffinée dont Bruno Le Maire ne sera pas avare : tous les travers qu’elle aura mise en exergue sur l’économie française seront subtilement analysés ; des solutions seront minutieusement proposées puis mises en place avec la maestria qui sied à un ministre de ce calibre.

Ainsi, la mondialisation, dont on sait pertinemment qu’elle apporte la misère et la dévastation dans nos campagnes, a évidemment joué un rôle immense dans la propagation du virus. Si certains démagogues se sont bien évidemment empressés de relier ce phénomène aux malheurs qui nous touchent et proposent donc d’y mettre un frein définitif (parce que, forcément, ça va améliorer les choses), il n’en va pas de même pour notre sémillant ministre qui, lui, a bien compris que le problème était plus subtil : le problème de la mondialisation tient évidemment dans la délocalisation de nos industries vers des pays de forbans, de pirates et de mangeurs d’enfants sans foi ni loi (les pays, pas les enfants, enfin, voyons. Suivez un peu !).

Pour le Bruno de Bercy (un Bruno un peu sec réputé pour faciliter le transit fiscal), parlant de la France, il dit ainsi que « Nous sommes l’un des pays développés qui a le plus délocalisé son industrie. C’était une faute majeure. »

Eh oui : tant et tant d’objets, de produits et de biens sont maintenant manufacturés à l’étranger que la souveraineté nationale en est atteinte. Sapristi, quelle idée avons-nous eu d’ainsi placer entre les mains d’étrangers (qui sont toujours fourbes, souvenez-vous en !), quelle triste lubie que de faire faire par les autres ce que nous aurions dû faire nous-mêmes, pour plus cher et moins bien !

En effet, à écouter Bruno, tout se déroule exactement comme si la France, entité monolithique parlant d’une seule voix et agissant d’une seule volonté, avait un jour décidé d’un commun accord avec elle-même qu’elle délocaliserait sa production, pour moitié dans le but de réaliser de petites économies bassement matérialistes, et pour moitié afin d’emmerder le petit peuple qui mérite amplement chômage et pénibleries administratives.

Dès lors, il suffira de réclamer l’arrêt de ces délocalisations, parfaitement déraisonnables, pour que les industries reviennent gentiment au bercail. Il suffisait d’y penser. Heureusement que Bruno est là !

La raison intrinsèque de ces délocalisations massives françaises et de l’évaporation de notre industrie du sol national vers l’étranger ne semblent pas devoir mobiliser beaucoup du temps précieux de notre Bruno de Bercy : peu importent les coûts consternants qu’imposent la fiscalité délirante du pays, son système social que le reste du monde ne nous envie vraiment pas ; peu importent les normes, contraintes bureaucratiques, parcours du combattant fiscal, administratif et citoyen que doivent se cogner les entrepreneurs français et dont les innombrables côtés ubuesques furent illustrés à foison pendant cette crise. Peu importe tout cela puisqu’en définitive, il suffira d’une décision de l’État pour que tout le monde revienne en France, sourire aux lèvres…

Le constat de l’enfer fiscal, de l’enfer administratif, de l’enfer social français n’est absolument pas fait ; il n’est même pas envisagé, ni par Bruno le rigolo ni par la brochette de clowns tristes qui papillonnent au gouvernement. Il n’existe en fait aucune volonté d’enfin simplifier, éclaircir, alléger les fardeaux que toutes les entreprises supportent en France. Il n’est jamais question de dégraisser le mammouth étatique français à 1100 milliards d’euros de prélèvement annuel : si la question de l’obésité morbide de l’État est abordée, on trouvera toujours un crétin pontifiant pour expliquer qu’il ne faut pas moins d’État mais mieux d’État, comme si ce genre de pirouettes rhétoriques permettait de camoufler les montagnes de pognon des autres qu’on crame dans un désastre chaque jour plus visible…

Il suffit de voir les idées qui traversent les crânes de nos dirigeants, en y faisant un écho révélateur, pour comprendre qu’absolument aucune solution réelle n’est en vue : le pays qui a choisi de tabasser le plus ses forces vives semble résolu à racketter encore plus les entreprises qui y travaillent malgré tout, sous prétexte de « taxer les GAFA », cache-misère populiste d’une politique d’extorsion ininterrompue.

Et quand ce n’est pas une nouvelle idée débile de vexation fiscale, c’est une nouvelle torture administrative qui se met en place avec zèle ; ainsi, comme pour Air France qu’on va aider à condition qu’ils arrêtent de faire voler des avions, les mêmes ignares destructeurs de richesses entendent maintenant aider les constructeurs automobile français, à condition bien sûr qu’ils cessent de faire des voitures.

Comme pour les concurrents d’Air France qui seront ravis que la compagnie nationale soit consciencieusement sabotée par l’Occupant Intérieur et sa maladie normative qui métastase gravement, la compétition automobile étrangère ne pourra que se réjouir des épais bâtons que Bruno et toute sa fine équipe de branquignoles entendent jeter dans les roues de nos constructeurs hexagonaux.

Autrement dit : la crise a mis en exergue tous les défauts de notre trop plein-d’État, de notre fiscalité délirante et de la normativité maladive de toute l’énarchie débridée. La conclusion qu’en tirent Bruno et le gouvernement c’est qu’il va nous falloir davantage d’État, de normes et de taxes.

parabole de l'aspirine (c) Maître Du Monde

En tant que Français, si à la sortie de ce confinement, vous êtes déprimé, que vous avez une mauvaise estime de vous, dites-vous que cela pourrait être pire puisque vous pourriez être Bruno Le Maire : être nul, proposer des solutions idiotes, et n’en avoir absolument aucune idée.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © H16. Publié avec l’aimable autorisation de l’auteur (son site)

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