Publié par Jean-Patrick Grumberg le 1 juin 2020

Un lecteur nous interpelle à propos de la décision de Trump de régulariser le statut de Twitter.

Voici son message, laissé sur le compte Twitter de Dreuz : “Des années que je vous soutiens. Sauf sur un point : TRUMP. … je découvre aujourd’hui [que Trump est] antidémocratique. Suffit de voir sa réaction à propos de Twitter.”

Je trouve stupéfiant que les journalistes aient été capables d’inverser la décision de Trump d’empêcher Twitter de continuer à pratiquer la censure, en une décision de censurer Twitter !

Comme je connais assez bien le dossier, Dreuz m’a transmis le message pour commentaire, et j’ai fait la réponse suivante :

Je ne suis pas choqué qu’il puisse y avoir des points de désaccord avec nos plus fidèles lecteurs. Cela me semble sain et normal.

Concernant Twitter, vous faites erreur : ce n’est pas anti-démocratique que de vouloir supprimer l’article 230 qui protège Twitter en tant que distributeur, alors qu’il est devenu éditeur au moment où il décide de fact-checker des tweets.

Mais je n’étais pas totalement satisfait de ma réponse, car elle passe à côté du problème central : quelle information ce lecteur – et il n’est pas le seul – a-t-il pu lire qui puisse lui faire penser que le président Trump veut restreindre Twitter, et de manière anti-démocratique ?

Parce que les critiques de ce lecteur sont très éloignées de la réalité, il me faut clarifier.

Lorsque vous décrochez votre téléphone et discutez avec un correspondant, vous serez d’accord avec moi qu’Orange ou T-Mobile ne sont pas responsables des propos que vous tenez. Même si vous discutez de faits répréhensibles. Ils ne sont pas responsables, parce que leur rôle se limite à distribuer votre communication.

Si demain, Orange ou T-Mobile décidait d’écouter toutes les communications téléphoniques, de résilier les abonnements de gens dont ils n’aiment pas les propos, censurer les conversations illégales, celles qui appellent à la violence ou au meurtre, et celles qui incitent à la haine, alors ils joueraient un rôle différent : ils ne seraient plus seulement distributeurs, mais éditeurs. En s’immisçant dans les conversations, en opérant un contrôle sur le contenu, ils entreraient dans un espace juridique différent.

C’est ce qui se passe avec Twitter.

Twitter bénéficie de l’immunité totale pour ce qui est publié sur sa plateforme, en vertu d’une loi sur les communications, appelée article 230, par laquelle il est considéré comme distributeur des messages qui sont postés sur Twitter, et n’a aucune responsabilité sur leur contenu.

Si, bénéficiant de la protection totale procurée par cette loi, Twitter décide cependant de fermer les comptes des gens dont il n’aime pas les messages, de censurer certains propos, et de fact checker certains tweets, alors il n’est plus distributeur, mais éditeur.

A cet instant, il ne doit plus pouvoir bénéficier de la loi d’exception qui le protège contre tout abus d’autorité, et toute censure de ceux qu’il décide de censurer, car il a été placé au-dessus des lois à la seule condition qu’il n’intervienne pas dans le contenu qu’il diffuse.

Profiter de l’exemption de rendre des comptes offerte par la neutralité totale conférée par l’article 230, pour agir librement en intervenant dans les messages, voilà l’anomalie que le président Trump souhaite corriger.

Et il n’a pas décidé de manière anti-démocratique de le faire, puisqu’il a chargé la FCC, l’administration de tutelle, de vérifier la conformité de Twitter avec l’article 230.

Si Twitter censure, il devient éditeur. S’il est éditeur, il doit rendre des comptes. S’il rend des comptes, il ne peut plus censurer de manière arbitraire sans risquer des procès. Voilà tout le dossier résumé en une phrase.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info.

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