Publié par Magali Marc le 30 janvier 2021

Une ascension soudaine de l’action des magasins de jeux vidéo GameStop a été nourrie par un groupe de boursicoteurs en croisade contre l’Establishment de Wall Street. Depuis Vendredi le 22 janvier, l’action de GameStop (GME au New York Stock Exchange) a décollé de plus de 50%. Face à cette brusque hausse, les gestionnaires de fonds spéculatifs qui avaient parié à la baisse sur GME se sont vus contraints de racheter le titre pour limiter leurs pertes, provoquant une liquidation forcée qui a encore fait davantage grimper l’action. GameStop est ainsi monté de 18% lundi, puis de 93% mardi et a explosé de 135% mercredi.

Pour les lecteurs de Dreuz, j’ai traduit l’article de William Sullivan, paru sur le site d’American Thinker, le 29 janvier.

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La saga GameStop : les petits investisseurs ripostent

Les gestionnaires de fonds spéculatifs (Hedge Funds Managers) vont retenir la dure leçon qu’ils viennent se se faire servir par de petits investisseurs.

Comme l’a rapporté l’agence Reuters, le fonds spéculatif Melvin Capital Management « a subi de lourdes pertes en pariant contre le détaillant de jeux vidéo GameStop ».

Voici comment cela s’est passé.

Le fonds spéculatif Melvin Capital avait ouvert une importante position courte (c’est-à-dire qu’il a vendu des actions empruntées) sur GameStop dans l’espoir que le prix chuterait et qu’il pourrait acheter l’action à un prix plus bas à l’avenir pour profiter de la différence.

Au lieu de cela, le prix de l’action de GameStop a augmenté de façon fulgurante. Face à un risque inconnu et illimité, le fonds spéculatif a dû réduire ses pertes en fermant ses positions courtes, c’est-à-dire en payant un prix du marché beaucoup plus élevé pour l’action qu’il avait empruntée et vendue, absorbant ainsi de lourdes pertes.

Ces pertes étaient si lourdes que Melvin Capital a dû obtenir des milliards de «capitaux de sauvetage» de la part d’autres fonds spéculatifs importants, selon le New York Times.

Ces gestionnaires de fonds spéculatifs sont collectivement des acteurs tellement influents sur le marché boursier que cet événement a eu des répercussions sur l’ensemble du marché, se manifestant par un déclin même si les actions de GameStop ont grimpé en flèche.

Comme l’observe Naeem Aslam du magazine Forbes, la protection de ces positions courtes nécessite la « liquidation des positions longues des fonds spéculatifs », ce qui provoque une « vaste liquidation » sur le marché boursier.

Ce genre de chose n’est pas nouveau, écrit M. Aslam.

En 1902, nous avons également assisté à un épisode de ce genre lorsque le prix des actions de la Northern Pacific a augmenté plusieurs fois alors que le reste du marché s’effondrait.

Des chemins de fer transcontinentaux aux actions des détaillants de jeux vidéo, la vente à découvert* sur le marché boursier n’a pas beaucoup changé, sur le plan conceptuel.

À tort ou à raison, il y a toujours eu une présomption publique d’intention détournée appliquée à quiconque se livre à la vente à découvert. Comme l’a écrit Daniel Defoe dans The Political History of the Devil (l’Histoire politique du diable,1726), « tout dissimulateur, tout faux ami, toute tricherie secrète, tout escroc à la peau d’ours, a un pied fourchu ».

De nos jours, il y a peu d’entités autant détestées par le public que les spéculateurs du marché boursier.

Bien que je sois personnellement convaincu que les ventes à découvert sont une caractéristique normale et durable d’un marché libre, il est facile de comprendre pourquoi notre inclination naturelle est de se méfier de quelqu’un qui a un intérêt économique dans l’échec d’une autre entreprise.

Ce sentiment s’amplifie que lorsque ceux qui cherchent l’échec d’une autre entreprise pour faire des profits sont ceux qui semblent avoir le moins besoin de s’enrichir.

Considérez maintenant tout cela avec la perspective qu’en a l’Américain moyen ou plus précisément avec le point de vue de deux millions de jeunes professionnels entreprenants.

Il existe un ensemble de possibilités et de règles pour les investisseurs disposant de fonds et de pouvoir bien établis, et des règles différentes pour tous les autres.

Comment envisager différemment les fonds spéculatifs ?

Wall Street Bets est un forum de Reddit qui regroupe plus de deux millions de petits investisseurs spéculatifs à qui on attribue le mérite d’avoir poussé le prix des actions de GameStop à de tels sommets. Certains utilisateurs font clairement savoir qu’ils considèrent cela comme l’expression de leur pouvoir.

Un utilisateur de Reddit a écrit sur le compte Twitter du forum :

CECI EST UN MESSAGE POUR TOUS LES P——S DE GESTIONNAIRES DE FONDS SPÉCULATIFS QUI NOUS SURVEILLENT … VOUS ÊTES À NOTRE MERCI… .

Et pourquoi les gestionnaires de fonds spéculatifs ne surveilleraient-ils pas ce qui se passe ?

Pourquoi ne chercheraient-ils pas, avec tout leur pouvoir et leur argent, à se venger par l’intermédiaire des lobbyistes politiques pour fermer le forum Reddit lorsque les escapades des petits investisseurs touchent le portefeuille des Américains les plus riches et les mieux connectés politiquement ?

Les jeunes petits investisseurs ne semblent pas avoir peur. Un autre a écrit :

Aux attardés de la SEC (la Securities and Exchange Commission chargée de la réglementation et du contrôle des marchés financiers) dans le même bateau: allez vous faire enc—er. Pourquoi ne pas commencer à enquêter sur les raisons pour lesquelles les entreprises peuvent arrêter leurs opérations afin que leurs copains des fonds spéculatifs ne perdent pas d’argent. Mais quand les gens perdent de l’argent, c’est tout à fait normal. Mangez de la m—-e.

Notez la séparation entre les « copains gestionnaires de fonds spéculatifs » des administrateurs du marché boursier et les «gens» ordinaires.

Encore une fois, il est facile de comprendre cette distinction. Lorsqu’un fond spéculatif prend une position courte importante sur GameStop, les investisseurs ne gagnent qu’au détriment de ses actionnaires et des employés à long terme, dont certains perdent leur poste dans l’entreprise ou leur gagne-pain.

Franchement, je ne suis pas sûr de ma position dans cette affaire.

Le prix et la capitalisation boursière massive de GameStop, au moment où j’écris ces lignes, semblent non fondés et même artificiels.

Mais l’envolée scandaleuse du cours de l’action Tesla ne repose sur rien de fondamental non plus, étant donné que l’entreprise a réalisé son premier bénéfice l’année dernière et qu’elle s’est située en dessous des estimations des analystes.

Le prix du marché reflète ce que les gens sont prêts à payer pour quelque chose, et ces jeunes investisseurs ont mis leur argent sur la table. Ils l’ont fait en dépit du fait qu’ils savaient qu’ils n’étaient pas censés le faire.
Ce n’est pas rien. C’est de la conviction, au moins, si ce n’est du courage.

Ce sont des gens qui prennent un risque et jouent à un jeu dont ils espèrent influencer le résultat. Ils ne détruisent pas la propriété d’autrui pour demander des augmentations d’impôts pour les personnes à hauts revenus tout en ne payant pas d’impôts eux-mêmes.

Et rien que pour cela, je ne peux pas me défaire de ce sentiment initial d’espoir. Quelque chose qui ressemble à ce que Mark Cuban a conclu à ce sujet :

Je dois dire que j’AIME ce qui se passe chez #wallstreetbets. Toutes ces années à voir les gestionnaires de transactions à haute fréquence passer avant les petits investisseurs alors que maintenant la vitesse et la densité de l’information et du commerce de détail donnent un avantage au petit gars. Même mon fils de 11 ans a fait des affaires avec eux et a gagné de l’argent.

Nous assistons au début d’une bataille du type David contre Goliath pour une quantité incroyable d’argent et de pouvoir. Naeem Aslam, de Forbes, semble comprendre ce qui se passe vraiment :

Les petits investisseurs sont devenus une partie importante de l’histoire et ils disent effectivement aux gestionnaires de Wall Street qu’ils ne contrôlent plus les prix des actions. D’une manière générale, les opérateurs institutionnels tels que les fonds spéculatifs parient contre les petits investisseurs. La négociation sans commission a commencé à changer la donne et depuis l’année dernière, il ne fait aucun doute que les petits opérateurs ont commencé à avoir beaucoup plus de contrôle.

Les investisseurs institutionnels et accrédités cherchent souvent à faire des bénéfices, alors que les petits investisseurs connaissent des difficultés. Les petits investisseurs, reconnaissant la relation d’opposition qui existe, leur rendent la pareille en exerçant leur pouvoir collectif d’influence des prix du marché.

Il sera intéressant de voir l’escalade juridique de ces questions avec les organismes de réglementation, comme la Securities and Exchange Commission (SEC). Les fonds spéculatifs et leurs substituts politiques crieront à l’injustice, bien sûr. Ils prétendront que des millions de participants au marché boursier de la classe moyenne se dressent contre les acteurs institutionnels en manipulant les prix de manière anormale, ou quelque chose du genre.

Le plus intéressant à observer, cependant, est la façon dont le New York Times, MSNBC et Joe Biden vont tourner casaque et inverser complètement leur position d’il y a dix ans. À l’époque, ils disaient que les milliardaires des entreprises et des fonds spéculatifs étaient le fléau qui décime les classes pauvres et moyennes américaines.

Attendez-vous à ce que ces mêmes voix défendent les milliardaires des entreprises et des fonds spéculatifs en tant que remparts d’un marché stable, tout en soutenant la suppression de millions de petits investisseurs qui cherchent à exercer leur pouvoir sur le marché de la seule manière significative qu’ils peuvent le faire.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Traduction de Magali Marc (@magalimarc15) pour Dreuz.info.

*La vente à découvert consiste à vendre à terme un actif que l’on ne détient pas le jour où cette vente est négociée mais qu’on se met en mesure de détenir le jour où sa livraison est prévue. L’actif vendu à découvert est généralement un titre. Si la valeur de l’actif baisse après la vente à découvert, le vendeur peut le racheter au comptant et dégager une plus-value. Le gain potentiel est limité à la valeur de l’actif. Si, à l’inverse, elle monte, le vendeur s’expose à un risque de perte illimitée, tandis qu’un acheteur ne peut pas perdre plus que sa mise de fonds. Le vendeur à découvert a ce que l’on appelle une position courte, à l’opposé du détenteur d’un titre, qui a une position longue.

Sources :

Sources cités par l’auteur :

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