Passeport sanitaire : les craintes

Publié par Jean-Patrick Grumberg le 2 avril 2021

Certains affirment que les passeports sont nécessaires au retour à la « normale ». Israël, précurseur à proposer la vaccination, retrouve déjà sa normalité. Mais d’autres mettent en garde contre l’empiètement sur les droits individuels, explique le journaliste du Federalist Daniel Payne.

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Les efforts visant à instaurer des « passeports vaccinaux » permettant d’identifier les personnes vaccinées contre le COVID-19 suscitent des inquiétudes quant à la violation des libertés civiles et de la vie privée des Américains qui se trouvent de l’autre côté de la pandémie, tandis que les campagnes commerciales visant à inciter les employés et les clients à se faire vacciner suscitent des inquiétudes quant à la discrimination, explique Payne.

Le développement et le déploiement des vaccins ont coïncidé avec des demandes croissantes pour que les personnes vaccinées puissent s’identifier lorsqu’elles prennent part à la vie publique, les dirigeants de l’industrie et les politiciens proposant divers systèmes pour vérifier le statut vaccinal d’une personne de manière rapide et fiable.

Ces demandes se sont regroupées autour de ce que l’on appelle les « passeports vaccinaux », « passeports Verts » ou « passeports sanitaires ». En Israël, le programme est déjà en place a permis la réouverture de l’économie, de l’éducation, du tourisme et des loisirs. Le gouvernement parlant maintenant de supprimer l’obligation de porter le masque, il ne restera bientôt plus de signes visibles de l’existence du virus communiste.

De nombreuses entreprises et industries, quant à elles, offrent des avantages aux personnes vaccinées. Une des raisons est de faire disparaître les inquiétudes de leurs employés, l’autre est l’obligation légale d’apporter un environnement professionnel sûr, le risque de procès en responsabilité étant agité par tous les DRH du pays.

Inquiétudes concernant la vie privée et le stockage des données

Certains commentateurs et experts s’élèvent contre les propositions de passeport, affirmant qu’elles pourraient constituer une menace pour le tissu civil des États-Unis en raison des problèmes de confidentialité et potentiellement du fait qu’un nombre important de personnes qui renoncent au vaccin sont de plus en plus exclues de la vie publique.

Albert Fox Cahn, directeur exécutif du Surveillance Technology Oversight Project, a déclaré le mois dernier sur la chaîne WBUR de l’université de Boston qu’un système de passeport vaccinal pourrait « créer à l’avenir une implication vraiment effrayante pour la vie privée ».

“Vous savez, cela crée ce qui pourrait se transformer en une couche permanente d’infrastructure de surveillance à l’échelle de ce que nous n’avons jamais vu depuis le 11 septembre », a-t-il déclaré à la chaîne.
Il a critiqué « l’idée que vous avez une application gouvernementale qui peut suivre chaque endroit où vous allez, qui peut dire si oui ou non vous allez au supermarché, ou à l’église, la mosquée ou dans un certain nombre d’autres espaces bondés. »

L’analogie avec le 11 septembre est intéressante du fait que dans les deux cas, la protection des personnes est au cœur des préoccupations, avec son corollaire, le danger potentiel d’empiètement sur la vie privée. Et soyons réalistes : à moins de laisser notre téléphone chez nous, même s’il est éteint, n’importe quelle agence gouvernementale peut savoir exactement où nous nous trouvons, et les caméras de surveillance des rues et des commerces savent ce que nous faisons.

Passeport privé ou public

Face aux inquiétudes, il n’est pas certain que le passeport vaccinal soit en fin de compte géré par le gouvernement.

Robby Soave, rédacteur en chef du magazine libertaire Reason, fait remarquer que le secteur privé pourrait finalement prendre le relais. Soyons réalistes : pour Google, je ne suis pas certain qu’ils aient besoin du moindre développement, voire même d’appuyer sur un bouton : tout est déjà en place, rôdé, productif, efficace actif, et personne ne trouve rien à y redire – sauf les personnes qui ont tourné le dos à leur Android et utilisent des téléphones Nokia première génération.

Robby Soave :

“En ce qui concerne le gouvernement, les citoyens devraient résister à tous les efforts visant à faire des passeports vaccinaux un élément obligatoire des voyages, de l’enseignement public, etc. Mais si des entités privées veulent expérimenter en exigeant que leurs clients et leurs employés soient vaccinés, je ne pense pas que le gouvernement doive l’interdire. De manière générale, nous devons nous éloigner de l’idée que tout doit être soit imposé, soit interdit. »

A l’inverse, Patrick Eddington, chargé de recherche sur les libertés civiles à l’institut libertaire Cato, a déclaré que le risque de violation de la vie privée est toujours présent si des parties privées administrent le système de passeport.

“Si nous envisageons une violation potentielle de la vie privée ou des libertés civiles, explique Eddington, elle se présente vraiment sous la forme d’un stockage de données – électronique ou papier – par des entreprises soumises à des obligations potentielles de sécurité nationale. »

Eddington a rejeté la probabilité d’une telle menace, affirmant en outre que le secteur privé adoptera probablement une approche disparate des passeports, certains types d’entreprises les exigeant et d’autres non.

“Je pense que la plupart des entreprises veulent reprendre leurs activités », a-t-il déclaré. « Elles ne seront probablement pas aussi préoccupées que d’autres par cette question. »

C’est à se demander si Eddington a entendu parler du comportement des utilisateurs de Facebook et des autres réseaux sociaux, sans parler des possesseurs d’enceintes connectées, comme l’Echo d’Amazon. Tout le monde est bien informé que Facebook, Instagram, etc. stockent, gèrent, utilisent et commercialisent nos données, combien se sont déconnectés ?

“Nous ne sommes pas opposés en principe à l’idée d’exiger une preuve de vaccination dans certains contextes », a déclaré Jay Stanley de l’ACLU, l’Union américaine des libertés civiles qui défend les droits à la liberté d’expression tout en militant pour la censure des conservateurs. « Mais le diable est dans les détails, et toute proposition de “passeport vaccinal” ne doit pas être exclusivement numérique, doit être décentralisée et open source, et ne doit pas permettre le suivi ou la création de nouvelles bases de données avec des informations médicales personnelles. Tout le monde n’a pas accès à un smartphone, en particulier les personnes issues de certaines de nos communautés les plus vulnérables. »

Le passeport sanitaire perturbe l’immigration illégale

La vraie inquiétude des organisations de gauche qui construisent un monde sans frontière et militent pour faire disparaître l’Etat-nation est l’entrave que le passeport sanitaire représente pour l’immigration illégale.

“Il existe également une réelle inquiétude quant au fait que la création de titres de vaccination pourrait conduire à une utilisation excessive, ou avoir un effet dissuasif sur les communautés d’immigrés qui sont déjà soumises à un contrôle excessif », explique Jay Stanley.
“Il existe des circonstances légitimes dans lesquelles on peut demander aux gens une preuve de vaccination, mais à l’heure actuelle, tout le monde ne peut pas se faire vacciner. »

Avantages, primes pour les personnes qui se sont fait vacciner

En plus d’exiger une preuve de vaccination pour accéder aux services, certaines entreprises ont encouragé la vaccination en promettant des avantages supplémentaires aux consommateurs et aux employés qui se font vacciner.

La chaîne Krispy Kreme a annoncé le mois dernier qu’elle offrirait un donut gratuit tous les jours jusqu’en 2021 à toute personne présentant une carte de vaccination dans l’un de ses établissements.
Des commerces locaux dans des États allant du Minnesota au Wisconsin, en passant par le Michigan et le Massachusetts, ont annoncé des réductions pour les clients pouvant prouver leur vaccination.
Le mois dernier, le Miami Heat de la NBA a annoncé la création de nouvelles « sections pour supporters vaccinés ». Les fans pourront contourner certaines procédures de sécurité et seront assis dans des sections du stade situées au bord du terrain.
Et des employeurs du pays ont offert divers avantages à leurs employés pour qu’ils se fassent vacciner, notamment des congés payés, des primes et d’autres avantages.
Apple offre des congés payés à ses employés pour qu’ils se fassent vacciner.
Trader Joe’s, Dollar General et Aldi payent leurs employés pour se faire vacciner.

Pourquoi les entreprises poussent-elles à se faire vacciner ?

Sauf erreur de ma part – corrigez-moi si je me trompe, aucun médicament dans l’histoire récente n’a été poussé avec tant d’insistance que le vaccin COVID-19.

Et les conséquences juridiques de ces efforts, dans un sens ou dans l’autre – peut-être pas chez vous en Europe, mais dans un pays libre comme les Etats-Unis – ne sont cependant pas claires.

Les analystes se posent des questions, comme je le montre ci-dessus, mais ils ne posent pas les bonnes questions. Ils sont encore trop partisans, ils sont au stade émotionnel et ont du mal à éviter les réactions manichéennes. Comme je suis un homme simple, je me pose des questions simples, comme celle-ci : à qui profite le crime ? Je veux dire par là, quel avantage la NBA ou Krispy Kreme retirent-ils à inciter les consommateurs à se vacciner ?

Il suffit de poser la question…

“Nous voulons tous que le COVID-19 soit derrière nous aussi vite que possible et nous voulons soutenir tous ceux qui font leur part pour rendre le pays sûr en se faisant vacciner dès que le vaccin est à leur disposition », a déclaré Dave Skena, directeur du marketing de Krispy Kreme dans un communiqué.
https://www.businesswire.com/news/home/20210322005159/en/KRISPY-KREME®-Giving-FREE-Doughnuts-to-Everyone-Who-Shows-COVID-19-Vaccination-Card-–-All-Year-Long

En voilà une réponse ! C’est tellement américain ! Tellement conservateur ! Tellement centré sur le rêve américain, le bien-être de sa communauté, et les conditions pour y parvenir !

Un autre exemple, plus édifiant encore : Red Rooster Coffee est une petite entreprise située à Floyd, en Virginie. Son dirigeant a décidé d’offrir à ses employés une incitation à se faire vacciner encore plus généreuse que celle des grandes entreprises nationales comme Mc Donald :

Red Rooster offre une prime de 250 dollars aux employés qui se font vacciner, plus 16 heures – soit deux jours ouvrables complets – de congés payés.

Et je pose la question : pourquoi ?

Fondée en 2010 par Haden Polseno-Hensley et sa femme Rose McCutchan, la petite entreprise de café torréfié de haute qualité provenant du monde entier expliquait dès sa création chercher à obtenir un « impact social positif », tant au niveau national qu’international. Leur programme est totalement bobo, mais qui pourrait bien être hostile à l’idée de chercher à avoir un impact social positif – qu’il soit utopique ou pas ? Certainement pas moi. Et pas vous.

“À une époque de méfiance et de désinformation, nous voulions donner un sentiment à la fois de sécurité et d’enthousiasme autour du vaccin », explique Haden Polseno-Hensley.
“Compte tenu de toutes les restrictions et du stress que nous avons connu dans nos vies au cours de l’année écoulée, le vaccin est vraiment une raison de se réjouir. Et nous voulons que nos employés se sentent enthousiastes et optimistes pour l’avenir. »
https://www.forbes.com/sites/claudiaalarcon/2021/03/31/how-food-and-beverage-companies-are-incentivizing-employees-to-get-vaccinated/?sh=2180f1666f49

Le doute n’est pas permis : Red Rooster sort vraiment 250 dollars de sa poche et assume le coût de 2 jours de congés payés pour que ses employés se fassent vacciner. Pourquoi ? Parce qu’il pense apporter ainsi du bien-être à ses employés. D’un point de vue commercial, l’idée n’est pas idiote non plus : je préfère me rendre dans un café dont les employés sont tous vaccinés !

Mme Polseno-Hensley dit que les mesures d’incitation ont été très bien accueillies par ses employés.

“Actuellement, plus de 85 % de notre personnel a reçu au moins sa première dose de Pfizer/Moderna ou sa dose complète de Johnson &amp ; Johnson.

Elle ne précise pas quel sort ou quelles pressions sont appliqués aux 15 % qui ne veulent pas du vaccin.

D’autres entreprises adoptent un angle tout aussi altruiste.

Pizzeria Uno de Chicago (je vous le recommande, c’est une des meilleures pizzas au monde) vient de lancer un système d’assistance interne qui aidera les employés à obtenir des rendez-vous pour se faire vacciner et à s’y rendre. Le service est bilingue, gratuit, et il est à la disposition de tous les employés d’UNO et de tous les restaurants de l’entreprise.

Il n’y a pas discrimination

Doron Dorfman, professeur associé de droit à l’université de Syracuse, a déclaré qu’en ce qui concerne les incitations, la probabilité d’une plainte pour discrimination est mince.

“Mon sentiment est qu’il n’est pas discriminatoire [d’offrir des incitations à se faire vacciner] », a-t-il déclaré.
“Donner une sorte de prime spéciale ou un traitement spécial aux personnes qui ont reçu le vaccin n’est pas discriminatoire », car ces dernières n’ont « aucun droit à des incitations » en premier lieu.

Dorfman ajoute :

“Si nous considérons qu’il s’agit d’une forme de discrimination, les personnes opposées aux vaccins l’utiliseront à leur avantage ».
Il explique que des personnes ont tenté le même coup avec des masques dans les premiers jours de la pandémie, en invoquant un handicap pour éviter d’en porter un. « Ce type de raisonnement peut en fait être utilisé contre les personnes handicapées », a-t-il déclaré.

Il affirme qu’en revanche,

“Les passeports ou l’obligation de se faire vacciner pour travailler, c’est une tout autre question”.

Non au passeport

Opinion partagée par le gouverneur de Floride, Ron DeSantis qui a pris le taureau par les cornes, et affirme qu’il va prendre des mesures exécutives contre un passeport vaccinal.

Selon le gouverneur, cette mesure s’apparente au renard gardant le poulailler.

“Ne soyons pas ridicules », a-t-il déclaré. « [le passeport sanitaire], c’est quelque chose qui a d’énormes implications sur la vie privée.
Il est totalement inacceptable que le gouvernement ou le secteur privé vous impose de présenter une preuve de vaccination pour pouvoir simplement participer à la société normale ».

Le gouverneur a déclaré que le passeport n’est pas nécessaire, considérant le grand nombre de personnes âgées de l’État qui ont été vaccinées.

“Nous n’allons pas vous demander de fournir une preuve [de vaccination] pour pouvoir vivre votre vie normalement », a-t-il poursuivi avant d’indiquer qu’il allait prendre des mesures exécutives « très prochainement ».

Il entend ensuite demander à l’Assemblée législative de l’État de rédiger un projet de loi interdisant le passeport.

Oui au passeport

Vous êtes sur le point de monter dans un avion. Les autorités ont des raisons de croire que vous cachez une arme. Elles ont le droit de vous interdire de monter dans l’avion. Moi, passager, je les en remercie. Après tout, cela fait 30 ans que je subis des heures d’attente pour contrôle de sécurité avant de monter à bord à cause des terroristes islamiques, et je veux être totalement protégé en échange. Mais les autorités sont obligées de vérifier si vous avez une arme, elles n’ont pas le droit de se contenter de le supposer pour vous retenir. Et si vous ne portez pas d’arme, elles sont obligées de vous permettre d’embarquer. Continuer à vous détenir constituerait une séquestration illégale.

Etre atteint du coronavirus, c’est comme monter dans l’avion avec une arme. Le principal motif de restriction de la liberté des personnes contagieuses est de prévenir le risque de contaminer d’autres personnes : un droit contre un autre. Si les personnes ne représentent aucun risque pour les autres, ils devraient être libres de monter dans l’avion. Comment sais-je si une personne est contagieuse ? Avec le vaccin s’il est confirmé que les personnes vaccinées ne transmettent plus le virus – donc avec un document qui atteste que vous avez été vacciné, ou avec un test au résultat instantané.

Le passeport sanitaire, en fonction depuis 1944

Les passeports vaccinaux font partie des voyages depuis des décennies.

Historiquement, les passeports vaccinaux prenaient la forme d’une « carte jaune ». Intitulé Certificat international de vaccination ou de prophylaxie, ce document se contente de répertorier et de certifier les antécédents vaccinaux d’une personne. Son adoption par la Convention sanitaire internationale remonte à 1944.

L’objectif des cartes jaunes a toujours été double :

Protéger la santé publique tout en harmonisant la norme mondiale de déclaration des vaccinations, ce qui permet aux pays de certifier et de confirmer plus facilement les antécédents sanitaires des voyageurs.
Étant donné que des pans de plus en plus larges de la population sont vaccinés contre le Covid-19, il est tout à fait logique que les cartes jaunes jouent le même rôle, en aidant les pays où le taux de Covid-19 est faible à empêcher l’introduction de nouveaux cas ou de nouvelles souches.

Certes, il est peut-être temps de remplacer ce bout de papier jaune par quelque chose de plus sûr, mais de là à créer une nouvelle couche permanente d’infrastructure de surveillance ?

Une vision très séduisante pour certains pourrait se transformer en un cauchemar dystopique pour des millions de personnes.

Passeport ou pas : serez-vous contraint, libre ou consentant ?

Le passeport sanitaire pourrait, poussé à l’extrême de sa logique, signifier que vous ne pourriez plus travailler, étudier ou même acheter de la nourriture. Soudain, vous pourriez vous voir exclus de presque tous les aspects de la vie publique. Que ferez-vous, en attendant que les procès soient tranchés par la Cour suprême ? Et si, dans 6 mois, après avoir été vacciné une première fois, vous décidiez de renoncer ?

Oui, l’Organisation mondiale de la santé veut mettre à jour les normes du passeport vaccinal pour les voyages à l’étranger et c’est une bonne chose. Mais l’OMS n’avait jamais pensé en faire un outil de suivi ici, chez nous. Et c’est BigTech lui-même qui fait pression. Quelles que soient ses bonnes intentions, le bilan récent des grandes entreprises technologiques pendant la pandémie ne devrait absolument pas nous encourager à leur faire confiance. Et moi, dans mon intégrité individuelle et en pleine possession de ma liberté chérie, je veux fréquenter les commerces qui me protègent contre la contamination de la façon la plus sûre : en limitant l’accès aux personnes vaccinées.

Beaucoup se font vacciner pour rendre visite à leurs grand-parents. Moi c’est pour ne pas les rencontrer. Je me fiche des statistiques truquées ou pas, des co-morbidités ou des faux morts du coronavirus, ou du fait que le coronavirus tue plus ou moins que la grippe : je fais attention car je ne veux pas l’attraper, un point c’est tout !

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