Parmi les catholiques de sensibilités différentes, la question des rites liturgiques revient souvent, et celle de l’opportunité de l’œcuménisme est fréquemment posée à la suite de célébrations communes entre catholiques et protestants.
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La publication romaine du motu proprio de Benoît XVI en 2007 sur la messe en latin, avait été suivie, quatre jours plus tard, par celle d’un document de la Congrégation de la Doctrine de la Foi sur des aspects fondamentaux de l’Eglise du Christ.
Est-ce, comme certains l’ont ressenti, un nouveau pavé dans la vitrine de l’œcuménisme, lancé par une Eglise catholique arrogante?
Rappelons tout de même le contenu des deux textes.
1/ la messe en latin, patrimoine de l’Eglise :
On a accusé Benoît XVI de retour en arrière par concession aux intégristes. Pourtant, il ne faisait que réactualiser ce que le Concile Vatican II avait déjà énoncé : le rite latin issu des premiers siècles reste valable à côté du rituel conciliaire promulgué par Paul VI en 1969. Mais l’apport de Vatican II est aussi réaffirmé, et la messe en langue moderne reste la forme habituelle de la célébration eucharistique. Avec le rappel de repères précis à observer dans le déroulement des célébrations pour éviter les dérives fantaisistes.
Après la promulgation des textes du magistère, des associations juives se sont inquiétées d’un retour possible à l’ancien rituel préconciliaire où les juifs étaient injustement maltraités dans la liturgie. Or en 1962 déjà, Jean XXIII avait définitivement aboli les malencontreuses expressions « perfidis judaeis », et l’autorisation du rite latin ne permet aucunement d’y revenir.
La prière pour les juifs, datée de 1969 dit désormais ceci : « prions pour les juifs à qui Dieu a parlé en premier ; qu’ils progressent dans l’amour de son Nom et la fidélité à son Alliance : Dieu éternel et tout-puissant, toi qui as choisi Abraham et sa descendance pour en faire les fils de ta promesse, conduis à la plénitude de ta rédemption le premier peuple del’Alliance…» Rien ici d’insultant pour les fils d’Israël. Dans le fait de prier pour la teshuva – le retour vers Dieu – des enfants du peuple porteur de la Parole, il ne faut voir aucun prosélytisme chrétien. Ces prières demandent pacifiquement la conversion, le changement d’état d’esprit et de comportement, de tous ceux qui croient en l’alliance. Tournant définitivement la page des formulations antérieures empreintes d’antijudaïsme, il n’y a en réalité aucune intention récupératrice derrière ces expressions de foi bibliques familières aux prophètes d’Israël. Le souhait d’une plénitude finale dans la marche vers le monde à venir est une espérance commune à tous les croyants.
2/ L’Eglise voulue par le Christ « subsiste » dans l’Eglise catholique :
C’est du côté protestant que sont venues les réactions critiques les plus radicales sur cette affirmation théologique, (subsistit) qui cependant n’est pas nouvelle puisqu’elle figure déjà dans Lumen gentium (1964). Du fait qu’aujourd’hui, au nom de la tolérance, le postulat le plus répandu est que toutes les croyances se valent, ce serait donc un crime de lèse-majesté sociologique que d’affirmer son identité et son affiliation à une tradition bimillénaire ? Exprimer la conviction que l’Eglise voulue par le Christ se retrouve de façon essentielle dans l’Eglise catholique, équivaut-il à disqualifier les autres ? Le document ne dit pourtant pas que l’Eglise du Christ se réduirait à l’Eglise romaine !
L’Eglise catholique romaine doit-elle solliciter un regard approbateur des autres confessions chrétiennes pour oser se définir dans ce qu’elle croit être fondamentalement, en lien avec ses origines? Si les Eglises de la Réforme ont fait le choix de se distinguer de l’Eglise romaine, sur des bases théologiques alternatives, qu’elles assument leur décision, pourquoi s’offusquent-elles de la différence qui en a résulté en matière d’ecclésiologie, de ministère, et d’éthique ? Sont-elles aussi sourcilleuses envers les positions de l’Eglise orthodoxe, membre avec elles du Conseil œcuménique des Eglises, lorsque celle-ci proclame dans sa charte qu’elle est la seule Eglise véritable ?
Dans ces communautés réformées séparées de Rome, il y a bien entendu des éléments de salut authentique reliés à l’Eglise-mère originelle, mais dans le protestantisme, la succession apostolique a été interrompue et la validité des ministères ordonnés a été abolie. Si messe et sainte cène, prêtres et pasteurs, étaient interchangeables, il n’y aurait déjà plus qu’une seule Eglise. Affirmer que l’unité est déjà faite, sous des prétextes prétendument prophétiques, ne fait que développer la confusion, c’est une posture déloyale envers les membres des différentes Eglises concernées.
En résumé, deux conceptions de l’œcuménisme se révèlent inappropriées : la première qui consisterait à imaginer l’unité comme un retour mécanique de tous dans l’Eglise romaine. La seconde, qui concevrait l’unité comme une confédération passive de multiples communautés ecclésiales aux positions théologiques objectivement contradictoires.
Pour maintenir l’avenir ouvert, il est urgent que les chrétiens se respectent dans leurs affirmations de foi spécifiques, qu’ils renforcent les liens d’amitié, tout en progressant mutuellement, par un dialogue sincère, vers l’unité qui sera donnée d’en haut le jour venu. « Que tous soient un, afin que le monde croie ! » (Evangile de Jean).
Le ressourcement des chrétiens aux racines communes toujours vivantes au cœur du judaïsme est en mesure de leur éviter de s’égarer sur des chemins divergents.
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Abbé Alain René Arbez, prêtre catholique, commission judéo-catholique de la conférence des évêques suisses et de la fédération suisse des communautés israélites, pour Dreuz.info.
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Amen car oui Jésus est le seul chemin d’unité qui mène à la VIE 👍 à la vie éternelle…
Vaste autant que les océans est son amour.
Nos différences en tant que disciple ne sont pas un obstacle mais à y regarder de plus près des complémentarités.
Ton témoignage comme le mien édifie.
Bonne route sur Son chemin
Les premiers chrétiens, tous juifs, étaient appelés talmidim haderekh, les disciples de la Voie…
// appelés talmidim haderekh, les disciples de la Voie…//
Oui merci de cette précision qui va dans le sens de faire des disciples plutôt que des chrétiens (sens péjoratif comme petit caporal…)
Le Saint-Esprit (consolateur hors dénominations) aide toutes brebis -disciples en formation de sanctification jusqu’à sa mort terrestre à rester sur le Chemin du Véritable qui conduit à la Vie éternelle.
Le salut est gratuit…
A contrario des infrastructures immobilières parfois très très coûteuses…!
Sont-elles représentatives de la foi exprimée ?
En tous cas culturellement 😉 cela donne de magnifiques photos 👍
« Que tous soient un, afin que le monde croie ! » (Evangile de Jean).
la référence exacte, sans raccourci:
Jean 17. 21:
21afin que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et comme je suis en toi, afin qu’eux aussi soient un en nous, pour que le monde croie que tu m’as envoyé.
On peut constater ici la forte proximité entre le Père et le Fils.
Ce texte de Jean 17, n’ est applicable que dans la soumission au Fils, par le Saint Esprit, et non par les argumentations / convictions plus ou moins hasardeuses des hommes, quelque soit leurs niveau d’instruction. ( Dieu n’appel pas des hommes ayant une formation pour les placer à l’un ou l’autre “poste” correspondant, il va chercher un berger et le forme “sur le tas” pour devenir roi, c’est un exemple parmi d’autres ).
Jean 15. 26, 27:
26Quand sera venu le consolateur, que je vous enverrai de la part du Père, l’Esprit de vérité, qui vient du Père, il rendra témoignage de moi;27et vous aussi, vous rendrez témoignage, parce que vous êtes avec moi dès le commencement.
Tout ce à quoi nous sommes “obligés”, est voué à l’échec, si ce n’est pas conduit par le Saint Esprit, encore faut il le lui demander.
Luc 11. 13:
13Si donc, méchants comme vous l’êtes, vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison le Père céleste donnera-t-il le Saint-Esprit à ceux qui le lui demandent.
Segond, L. (1996). La Sainte Bible (Lc 11.12–13). Oak Harbor, WA: Logos Research Systems, Inc.
Pourtant Paul, l’apôtre des nations, avait reçu une sacrée formation à la meilleure yeshiva de Jérusalem: celle de rabbi Gamaliel, c’est à dire l’excellence même…
d’où sans doute la grande qualité scripturaire et théologique de ses épîtres, premiers écrits chronologiques du Nouveau testament dans les années 44…
C’est vrai, mais cela n’interdit pas la conduite par le Saint Esprit, qui me semble-t’il est absent des facs de théologie, parce que aussi absent des enseignements.
Non, vous ne pouvez pas dire que l’Esprit Saint est absent des facs de théologie! Il y a l’émetteur et le récepteur… L’Esprit m’a toujours accompagné durant ma formation en théologie et tout autant après, car la formation est permanente. Cette position anti-intellect ne rime à rien. Les dérives libérales de certains courants, c’est autre chose.
“Jean 17. 21:
21afin que tous soient un, comme toi, Père, tu es en moi, et comme je suis en toi, afin qu’eux aussi soient un en nous, pour que le monde croie que tu m’as envoyé.”
Pas simple, cela demande une consécration et une recherche de LA VERITE sans failles, et sans compromis.
Père Arbez,
1/ l’expression “perfidis judaeis” n’est pas étymologiquement incorrecte : en effet, “perfidus” en latin se traduit par “sans foi” en français (cf. Gaffiot):
En ce sens les Juifs qui refusent Jésus-Christ peuvent légitimement être qualifiés de “sans foi” par les chrétiens se référant àn la foi chrétienne.
2/ Le terme “subsistit in” appliqué par Lumen Gentium à l’Eglise catholique est extrêmement ambigü, comme l’ont démontré maints théologiens depuis 1963.
Dans sa forme transitive “Subsisto,is,ere” veut dire “résister”: Exemple : “feras subsistere”, résister aux bêtes sauvages (cf. Gaffiot).
On voit ici l’imprudence des rédacteurs de Lumen Gentium car vous conviendrez qu’il est bien faible de définir l’Eglise du Christ comme “résistant” dans l’Eglise catholique.
Cela veut-il dire qu’elle résiste aussi ailleurs ? Ou bien qu’elle résisterait plus ou moins bien selon qu’il s’agit de l’Eglise catholique ou d’une autre communauté ecclésiale ?
Ambigü et dangereux.
Par contre votre formulation est bien meilleure : “l’Eglise du Christ se retrouve de façon essentielle dans l’Eglise catholique”:
Dommage que vous n’ayez pas été rédacteur de cette partie fondamentale de Lumen Gentium…..
je pense que le subsistit rappelle que en effet l’essentiel “subsiste” malgré les innombrables déformations et trahisons des membres de l’Eglise au cours du temps, l’Eglise est sainte mais ses membres sont pécheurs pardonnés en cours de sanctification.
à propos de “perfidis”: la bonne traduction n’est pas “sans foi”.
Per-ficere, parfaire, faire au-delà de ce qui se fait
donc: Per-fidis, croyants au-delà de ce qu’on croit.
C’est l’idée d’une limite qui fait la différence, mais ce n’est pas un jugement négatif au départ. Le sens du mot a évolué et s’est chargé de considérations malencontreuses.
D’accord avec vous pour l’évolution malencontreuse du sens du mot mais il demeure que le terme employé par l’Eglise depuis des siècles et jusqu’à la novation conciliaire (et encore aujourd’hui par une partie de ceux qu’on nomme les “Tradis”) est adéquat.
On trouve aussi dans certains textes “transgresseurs de la foi”, ce qui rejoint en partie votre proposition en ce qu’elle se réfère bien à une limite, sans aller jusqu’à votre idée “d’aller au-delà”, peu appropriée dans le cas du judaïsme religieux qui se situe plutôt “en-deça” qu'”au-delà” puisque recevant l’Ancien Testament mais rejetant celui qui le couronne, le Nouveau Testament.
Je vois les choses différemment sur en deçà et au-delà…Car les deux communautés soeurs judaïsme et christianisme sont nées du même tronc commun hébraïque, avec des interprétations différentes. Les deux sont au-delà d’un certain corpus vétéro-testamentaire, avec l’impatience messianique du olam haba pour le judaïsme rabbinique né en 90 ap. JC, et pour la personnalisation de cette attente messianique en la personne de Jésus de Nazareth, dès les années 35 avec les communautés post-résurrection. La foi du judaïsme 1er siècle est une foi pleine et entière, la foi du christianisme également, mais sur deux trajectoires parallèles qui vont diverger par la suite.
Je vais un peu sortir de la discussion pour redire que la religion quelle quelle soit doit être un rempart contre la barbarie et que tuer au nom de la religion est un acte barbare et non un un acte religieux.
En tout cas ,je voudrais avoir le nom du village photographié pour pouvoir le visiter.
Nous savons vous et moi que “la religion”, c’est l’homme qui l’a créée, elle est donc faillible.
Ne serai-ce pas plus approprié de parler RELATION avec le Dieu d’Abraham, d’ Isaac et de Jacob ?
Toute religion passe par la créativité et la médiation humaines.
Dire le contraire est hors-sol.
“Relation” dans le sens de “relier”,la religion relie le croyant à la personne divine en laquelle il se fie et qu’il invoque.
Dans notre cas il s’agit d’une relation au Dieu qui s’est incarné,ce Dieu qui prend l’initiative de rejoindre sa créature aimée en ce faisant Lui-même créature, tout en demeurant créateur aimant.
Il me semble que c’est en cela que le christianisme est révolutionnaire.
Il importe également de différencier le contenu de la religion et les rites,et de savoir dans quelle mesure ces rites sont divinement inspirés ou non.
Le village est St Martin d’Oydes, dans l’Ariège. La religion prétexte à tuer a été fortement dénoncée par le pape Benoît XVI, en particulier mais pas seulement, dans sa conférence de Ratisbonne.
Abbé Alain Arbez, merci pour le commentaire et merci pour le renseignement. Pour moi, l’Ariège est le plus beau département de France mais je ne connaissais pas ce village extraordinaire de St Martin d’Oydes.Je le note. Merci encore.
“L’Eglise voulue par le Christ « subsiste » dans l’Eglise catholique” – Impeccable. Il fallait le dire. Ce n’est pas que l’Eglise catholique soit une institution parfaite devant laquelle s’aplatir. Là n’est pas la question et si c’était le cas, il faudrait alors se poser des questions. Mais le fait de croire au Christ et de l’accueillir n’a rien à voir avec l’une ou l’autre chapelle. C’est que l’Eglise catholique a su garder et préserver à travers les siècles le Message du Christ tel qu’il est. Cela ne veut pas dire que je suis d’accord avec l’interprétation économique du Message du Christ par l’Eglise catholique. Mais sans l’Eglise catholique et son rayonnement, les autres églises seraient tout simplement au regard de l’Histoire, et cela en fera hurler certains mais tant pis, des imposteurs. Il fallait le dire aussi.
Qu’appelez-vous “interprétation économique du message du Christ”, ce serait intéressant de développer…
Et donc, si ça ne tenait qu’à vous, que préconiseriez-vous pour régler le problème des imposteur ?
Si l’on en croit l’auteur de l’ouvrage”Le Rhin se jette dans le Tibre” ,le journal du concile Vatican II publié en 1967 , qui a reçu l’approbation des autorités ecclésiastiques,un certain nombre de pères conciliaires,( et pas uniquement la tendance traditionnelle), se sont plaint de l’importance accordée à l’oecumenisme,et de l’obsession d’être constamment en accord avec les Réformés,de ne pas les heurter.
Nous connaissons l’influence de la Conférence épiscopale Allemande de Fulda,et de son maître à penser ,karl Rhaner,l’apôtre inconditionnel du dialogue avec les protestants ,dans le déroulement du dernier concile!
L’oecuménisme est une bonne chose. Tout dépend cependant dans quel esprit il est mené, et les Allemands ont souvent été dans la confusion, encore aujourd’hui…Le pape Benoît XVI est un excellent connaisseur du protestantisme, mais il a beaucoup de discernement.