Publié par Jean-Patrick Grumberg le 6 mai 2023

J’ai décidé de vous livrer un de mes petits secrets : je suis très distrait et j’ai une très mauvaise mémoire, une mémoire de poisson rouge*, et pour ne rien arranger, je suis étourdi.

J’ai commencé cette série en 2012. Je la mets régulièrement à jour. Voici un nouvel épisode.

Pour remédier aux conséquences et fonctionner normalement dans ma vie de tous les jours, je suis devenu extrêmement organisé. Je compense mon manque de mémoire par des petits trucs et des réflexes conditionnés : je pose toujours mes clefs à un seul endroit, toujours le même, ainsi que mes lunettes. Mes cartes de crédit sont toujours dans la même poche. J’utilise des traqueurs Bluetooth Tile pour mes clefs, parce que lorsque je ne suis pas chez moi, il m’arrive souvent de les laisser sur le tableau de bord et de partir. Le calendrier de mon iPhone, où je note absolument tous mes rendez-vous et mes choses à faire, a des dizaines de notes et rappels.

Mais ça ne suffit pas…

Voici quelques-uns des tours que me joue mon cerveau distrait :

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Montant libre







Episode 21 : l’expresso

Etant grand amateur de café expresso (très serré, ristretto), j’ai passé des années à goûter les différentes marques de capsules (parce que je suis trop fainéant pour moudre et préparer mon café façon puriste). Bref, le meilleur café en capsule étant Illy, à mon goût et celui de nombreux experts, j’ai une machine Illy.

Ça ne règle pas les problèmes pour autant.

Pour faire un café, il faut : une tasse, une capsule, mettre la capsule dans la machine, appuyer sur le bouton, et savourer le résultat.

Sauf que pour moi, qui suis étourdi, c’est un peu plus compliqué :

  • Je prends une tasse, je mets la capsule dans la machine, j’appuie sur le bouton, le café coule… mais j’ai oublié de mettre la tasse en dessous.
  • Je prends une tasse, je la mets sur la machine, bien sous la buse, j’appuie sur le bouton : c’est de l’eau qui sort – j’ai oublié de mettre la capsule dans la machine
  • Je prend une tasse, je mets la capsule dans la machine, je pose la tasse au bon endroit… et rien : je suis là, devant la machine, à penser à je ne sais pas quoi, et j’ai oublié d’appuyer sur le bouton.
  • Evidemment, il m’est arrivé, bien que rarement, d’appuyer sur le bouton alors que je n’ai mis ni tasse, ni capsule de café dans l’appareil.
  • Et aussi, d’appuyer sur le mauvais bouton, vapeur d’eau.
  • Le meilleur, c’est ce qui m’est arrivé aujourd’hui :

    Je prends une tasse, je mets la capsule dans la machine, je pose la tasse au bon endroit, j’appuie sur le bouton… et je m’en vais. En oubliant mon café sur la machine. Que je venais de préparer.

Episode 20 : Goldnadel TV

Depuis environ deux ans, j’interviens chaque semaine sur la chaîne de télévision de l’avocat Gilles-William Goldnadel. J’utilise un fond de couleur unie, placé derrière moi, qui permet d’insérer le logo de la chaîne lors du montage. Le fond que j’utilise a une face verte et l’autre bleue. Chaque semaine de l’année, je dois redemander quelle est la couleur que je dois utiliser : je ne m’en souviens plus d’une semaine sur l’autre.

La seule fois où je n’avais personne autour de moi à qui poser la question et que j’ai dû m’enregistrer seul, je me suis trompé de couleur.


Episode 19 : au restaurant

Suite à la publication de l’épisode 18, j’ai reçu un coup de fil de l’écrivain et journaliste de guerre Pierre Rehov, que j’ai le plaisir de rencontrer quand je suis en Israël.

“Jean-Patrick, j’ai un épisode pour ta série, » me dit-il.

“A chaque fois que nous avons rendez-vous dans un restaurant où nous sommes déjà allés, tu me demandes toujours mon aide pour te souvenir quels plats tu as aimés. Tu ne te souviens jamais quels plats tu as déjà commandés, et si je te conseille un plat que j’aime bien et que je te t’ai déjà fait goûté, tu me réponds systématiquement que tu ne t’en souviens pas et tu me demandes à quoi ça ressemble. »

  • La conversation m’a fait prendre conscience d’une chose que je n’avais jamais réalisée : je viens de m’apercevoir que toute ma vie, lorsque je vais au restaurant, et une fois qu’on m’a apporté la carte, je garde mes doigts sur les plats que j’ai choisis, en attendant que le serveur vienne prendre notre commande. Si je ne fais pas cela, et cela se produit quelquefois si je suis engagé dans une conversation et n’y pense pas, lorsqu’il arrive, j’ai déjà oublié ce que je viens de choisir : impossible de m’en souvenir, je suis obligé de relire toute la carte.

Episode 18 : en voiture

En voiture avec un ami, il s’arrête pour faire le plein. Deux souvenirs me reviennent, sortis de nulle part.

J’ai eu la même voiture pendant 7 ans. Je l’adorais. Pendant 7 ans, chaque fois que j’allais faire le plein, j’ai été obligé de m’arrêter, de regarder sur la jauge à essence du tableau de bord la petite flèche qui indique de quel côté se trouve la trappe à essence, afin de me ranger du bon côté de la pompe. Vous vous rendez compte ? En 7 ans, je n’ai pas été capable de mémoriser si la trappe était à droite ou à gauche !

Episode 18 bis : en voiture

Mon ex-ex ne supportait pas ça (ça remonte à avant le GPS) : en voiture, je ne demande jamais mon chemin. Jamais. Ca peut ressembler à de l’entêtement, de l’orgueil de mâle mal placé : il n’en est rien. La raison est beaucoup plus simple : dans mon cas, ça ne sert à rien, strictement à rien.

Je m’arrête à la hauteur d’un passant et je lui demande mon chemin. Il me donne ses indications, avec courtoisie : « vous allez tout droit, vous tournez là-bas au coin à gauche, et ce sera sur votre droite, la deuxième ou la troisième rue, à 500 mètres environ ». Je le remercie, je remonte ma vitre, je démarre… et j’ai tout oublié.

Je n’ai jamais de toute ma vie été capable de me souvenir des indications qu’on me donnait. Dès que je remontais la fenêtre, mon cerveau avait tout effacé sauf la toute première information.

Episode 17 : ma carte de presse

Chaque année au mois de décembre, je suis invité à renouveler ma carte de presse et à payer ma cotisation annuelle. Ma femme m’ayant fait remarquer que la photo est affreuse, je leur ai demandé s’ils pouvaient la changer, ce qu’ils m’ont confirmé. Aujourd’hui, je reçois la nouvelle carte, et que vois-je, la même photo.

Etonné, je recherche mon échange d’emails où le secrétariat me confirmait que je pouvais bien entendu changer la photo et me demandait de lui en envoyer une autre.

Je retrouve l’email, et m’apprête à réclamer qu’ils n’ont pas fait leur travail, et que vois-je : je leur ai envoyé la même photo que celle que je voulais supprimer. Je suis irrécupérable…

Épisode 16 : où est mon iPhone ?

Je suis au téléphone avec un ami, et je dois partir à un rendez-vous.

Pendant que je lui parle, je réunis mes affaires : mes clefs, mon chapeau, ma veste, mon ordinateur, mon iPhone. Mais je ne trouve pas mon iPhone.

Je commence à chercher partout, je suis toujours au téléphone. Je ne le trouve pas. Je commence la pénible épreuve de retracer ce que j’ai fait ce matin, pour me souvenir où j’ai pu l’oublier.

Je suis toujours au téléphone avec mon ami, l’oreille collée à cet iPhone que je cherche partout. Au bout d’un moment, je songe même à interrompre la conversation pour me concentrer sur mes recherches.

Il m’aura bien fallu 3 minutes et des sueurs froides pour me rendre compte que je téléphonais avec l’iPhone que je cherchais partout.

Épisode 15 : désolé, je n’arrive pas à m’en souvenir.

Épisode 14 : Encore la machine à café

Ma machine à café a deux boutons : café long et café court. Un qui montre une tasse pleine, l’autre une tasse à moitié pleine.

Ca tombe bien, je bois mon café serré, ma femme le boit long.

Mais depuis plusieurs jours, je peste contre cette machine, elle est déréglée. Quand je fais un café pour ma femme, je suis obligé d’appuyer deux fois sur le bouton, car son café est trop court. Quant au mien, je suis obligé d’arrêter avant la fin, ça n’arrête pas de couler.

Je suis en train de me préparer un café. Ma femme passe à côté de moi et me dit (elle me parle en anglais, mais je vous traduis) : “tiens, pourquoi tu appuies sur long, tu bois plus ton café serré ? »

Cela fait une semaine que j’appuie sur le bouton café court pour lui faire un café long, et sur le bouton café long pour me faire un café court. Et que je peste parce que la machine est déréglée.

Épisode 13 : La moustache de mon père

Je suis en train de me raser – je porte une barbe de trois jours que je taille avec une tondeuse électrique – et pourquoi, je ne sais pas, je repense en rigolant à ce jour où mon père est rentré à la maison sans sa moustache.

Mon père portait une moustache comme Brassens, mais très grosse. Elle était si proéminente que c’était devenu son surnom. Tout le monde l’appelait « Moustache ».

Un jour, je dois avoir 11 ou 12 ans, mon père arrive à la maison, et gros choc : il n’a plus de moustache. Son visage n’était plus le même. Sans sa moustache, il ne ressemblait presque plus à mon père. Il m’expliqua qu’en se rasant, il fit un geste malheureux, et coupa une partie de sa moustache, l’obligeant à la raser complètement.

Et pendant que ma mémoire revient sur ce jour-là, je réalise soudain que je viens de me raser la moitié du crâne avec la tondeuse à barbe…

Épisode 12 : Le réveil

En se couchant, comme elle travaille sur un dossier compliqué qui va l’emmener jusqu’à tard dans la nuit, ma femme me demande de la réveiller le lendemain “vers 8h30 – pas plus tard que 9h”.

Le lendemain matin, je me réveille vers 6h45, je me tourne vers ma femme, je l’embrasse et la réveille tout doucement. Elle ouvre un œil, me demande l’heure et me dit à moitié endormie : “je t’ai dit vers 8h30-9h ! »

Je m’excuse, me lève, et je me prépare un expresso. Il est 7h00.

Je retourne dans la chambre, je m’approche de ma femme et je lui dis : “chérie, réveille-toi c’est l’heure ! »

Elle ouvre un œil et me dit : “eight-thirty, nine!!! I told you eight-thirty, nine!!!” (8h30-9h !!!! Je t’ai dit 8h30-9h !). J’ai oublié qu’il y a un quart d’heure, elle m’a demandé de la laisser dormir.

Épisode 11 : Le vélo

Habituellement, j’attache mon vélo sur le rack à vélo de la copropriété, à l’extérieur, devant lequel je passe pour rentrer chez moi. Mais comme la météo annonçait de la pluie, j’ai décidé de le mettre dans le garage, à l’abri.

Je détache mon vélo, je l’emmène dans le garage, je l’attache à un poteau, puis je pars faire des courses, à pied. Lorsque je rentre à la maison, je passe devant le rack à vélo, et là, j’ai un coup au cœur : mon vélo a disparu, on m’a volé mon vélo !

J’ai oublié que 15 minutes plus tôt, je l’ai mis dans le garage. Il m’a fallu une bonne minute d’angoisse pour refaire l’historique dans ma tête et me souvenir qu’il était dans le garage.

Épisode 10 : Le parcmètre

Vendredi soir. Je vais récupérer un manteau en cuir que ma femme a donné à réparer, avant de me rendre chez des amis pour dîner. Il est tard, il y a beaucoup de circulation, ils habitent à Tarzana, c’est à 1h10 de voiture de Beverly Hills où se trouve l’atelier du retoucheur.

Coup de chance, je trouve une place presque devant pour me garer. Je mets de l’argent dans le parcmètre et je marche vers son atelier, qui est en étage. Je sors ma carte bleue pour payer. Le propriétaire, un vrai artiste qui fait des miracles, me dit qu’il ne prend pas la carte, et précise qu’il me l’avait dit au téléphone. C’est vrai, il me l’avait dit, mais j’avais oublié. Il m’indique le distributeur de billets le plus proche.

Je descends, je tourne à gauche, je passe devant ma voiture, je vois que je n’ai plus que 3 minutes sur le parcmètre, et me dis qu’en revenant, je dois remettre de l’argent. J’arrive à la banque, je sors 150 dollars, et je retourne à sa boutique. Je passe devant ma voiture, et je m’apprête à recharger le parcmètre.

Machinalement, je regarde l’écran, il reste 2 heures de stationnement. Bizarre, j’avais lu 3 minutes.

Je regarde mieux parce que les voitures sont garées en épi : en fait, par distraction, je regardais la voiture à côté. Je mets de l’argent dans le bon parcmètre, et je retourne chez le réparateur. Je sors les dollars, et là je m’aperçois qu’en fait, j’avais assez d’argent sur moi, je n’avais pas besoin de descendre à la banque. Mais je n’avais pas pensé à fouiller dans ma poche.

Je récupère le manteau de ma femme, je retourne à ma voiture, je prends l’autoroute. Je m’arrête pour acheter une bouteille de vin. Et là je m’aperçois que j’ai oublié ma carte de crédit à Beverly Hills dans le distributeur de billets…

Épisode 9 : Le café

Manquant de café, je décide d’aller rendre visite à un petit magasin Segafredo de Tel-Aviv que j’ai repéré depuis longtemps.

Manque de chance, c’était une veille de fête, le magasin est fermé. Deux jours plus tard, j’y retourne, nouveau manque de chance, il n’ouvre qu’à 13 heures — étrange, mais en Israël, ils sont fantaisistes avec les horaires.

Le lendemain après-midi, certain de mon coup, je refais le trajet. J’arrive devant le magasin : youpi il est ouvert !

Je descends de ma Vespa, j’enlève mon casque, je range mon casque dans le coffre sous la selle, je ferme le scooter à clef, je n’oublie pas mes clefs, et je marche vers le magasin…

Là, je m’arrête brusquement et je fais demi-tour : je viens de me souvenir que j’ai une machine à café Lavazza qui n’accepte que les capsules de la marque.

Épisode 8 : L’aéroport

Cela se passe il y a une trentaine d’années. À ce moment, je vivais en France, et ma mère, qui vivait en Israël, nous rendait visite. J’allais la chercher à l’aéroport de Roissy.

Je suis en voiture, et je me dirige vers Roissy Charles de Gaulle. Bd des Maréchaux — dans ma tête, je répète : « Roissy » —porte de Paris —”Roissy » —Bd Périphérique —”Roissy » —Autoroute — « Roissy » : je répète Roissy dans ma tête et je fais attention à mon chemin, car je suis étourdi et je le sais.

Sortie de l’autoroute — « Roissy » — bretelle de sortie — terminal. Terminal ?

J’arrive devant le bâtiment : je le regarde, je suis à Orly.

J’ai tout ce temps suivi la route et les panneaux pour aller à Orly, tout en pensant Roissy. Je ne m’en suis rendu compte que devant le bâtiment tout plat, dont je ne reconnaissais pas la rondeur de celui de Roissy.

Ma mère m’appelle d’une cabine, je lui explique, elle grogne un peu, mais elle me connaît : j’ai commencé tôt…

Épisode 7 : Le citron

J’ai 6 ans. Ma mère me confie une lourde responsabilité, une forte marque de confiance : aller acheter un citron. C’est la première fois que je vais seul faire des courses. Elle me donne des sous, et je descends. L’épicier est sur le même trottoir.

4e étage — dans ma tête, je me répète : « acheter un citron » — 2e étage – « acheter un citron » – rez-de-chaussée, je sors de l’immeuble, je tourne à droite — « acheter un citron » — je longe le trottoir, je marche dans la rue et je me répète encore « acheter un citron ». J’arrive au magasin. J’ai sans doute répété 20 fois « acheter un citron » pour ne pas oublier.

« Bonjour, monsieur, je voudrais une pomme s’il vous plaît »

Je paye la pomme, il me rend la monnaie, je prends la pomme, je rebrousse chemin, je rentre dans l’immeuble, 1er étage, 2e, 4e… ma tête est vide, je suis content.

J’arrive à la maison, je tends la pomme à ma mère. Elle regarde la pomme, elle me regarde en souriant, et reste muette, impuissante…

Épisode 6 : La pharmacie

Ma femme me demande de l’arrêter à la pharmacie CVS, au coin de la 3rd Avenue et Fairfax, à West Hollywood. Je me gare, elle descend.

Le temps passe, mais je suis dans mes pensées, je ne fais pas trop attention.

Tout de même, le temps me semble un peu long, « qu’est-ce qu’elle fait ? » me traverse l’esprit, mais je suis tellement absorbé dans mes pensées que je n’ai pas le temps de m’arrêter pour répondre à la question.

Coup de fil. C’est ma femme : « où tu es, qu’est ce que tu fais ? »

« Ben je t’attends ! Tu m’as dit que tu allais à la pharmacie, alors j’attends que tu reviennes ».

« Je t’ai dit que je vais à la pharmacie et ensuite que je prends ma voiture que j’avais laissée devant, et que je rentre à la maison. Ca fait quatre heures que je suis rentrée ! »

« Quatre heures ? Incrédule je regarde l’heure au tableau de bord, et en effet, je suis là depuis quatre heures à attendre (il faut dire que j’ai une énorme patience)

» Ah c’est pour ça que ça m’a paru long ! », lui dis-je.

Épisode 5 : Les lunettes, le casque, les lunettes, les clefs…

Je sors d’un rendez-vous. J’arrive à mon scooter. Je retire mes lunettes de vision de près, j’ouvre le coffre arrière de la Vespa, je range les lunettes, je monte sur le scooter, je démarre. Je fais 300 mètres, je m’arrête, j’ai oublié quelque chose, je le sens, mais je ne sais pas quoi.

Ah si, j’ai oublié de mettre mes lunettes pour voir de loin !

Je cherche dans ma poche, elles n’y sont pas. Je descends du scooter, je soulève le siège, elles n’y sont pas. Je cherche mes clefs pour ouvrir le coffre arrière, je ne trouve pas mes clefs.

Je fais le tour : les clefs pendent dans la serrure du coffre. Je les ai oubliées dessus quand j’ai rangé mes lunettes — un miracle qu’elles ne soient pas tombées. J’ouvre, je trouve les lunettes pour voir de loin. Je les mets, je ferme le coffre, je reprends les clefs, je les range dans ma poche, je monte sur le scooter, et je m’apprête à démarrer.

Non, je ne démarre pas : j’ai encore oublié quelque chose, je le sens, mais je ne sais pas quoi.

J’ai mes lunettes, j’ai mes clefs… je trouve : mon casque. J’ai oublié de mettre mon casque, j’ai roulé jusque là sans casque ! Je soulève le siège, je sors mon casque, je remets mes lunettes.

Mais je ne démarre pas : il me faut encore 2 minutes pour me souvenir où je dois aller…

Épisode 4 : L’imprimante

Hier, je devais acheter une cartouche d’encre noire pour mon imprimante HP. Le modèle est 655.

Je me rends au magasin de fournitures, je cherche la bonne référence, et prends deux cartouches sur le présentoir. Je paye, je rentre à la maison, je sors les cartouches.

Ma femme, habituée, me dit sur un ton neutre : “tu as pris des 652, il fallait des 655. »

Je retourne au magasin, je rends les mauvaises cartouches en expliquant qu’il me faut des cartouches modèle 655. Je retourne vers le présentoir, je fais attention, je prends deux cartouches 655, je retourne à la caisse pour faire l’échange.

La vendeuse : « vous avez pris rose au lieu de noir »…

Épisode 3 : Le dîner familial

Avant-hier, nous étions invités à dîner chez ma belle famille. Vers 16h, ma femme qui connaît bien ma mémoire de poisson rouge, m’appelle pour que je n’oublie pas.

Vers 18h, ma femme qui connaît bien ma mémoire de poisson rouge, me passe un nouveau coup de fil pour me rappeler que nous allons dîner chez sa mère.

Quand ma femme rentre à la maison vers 18h30, elle commence à se préparer pour partir. Je fais de même…

Et ensuite, je suis allé dans la cuisine et j’ai commencé à préparer le dîner.

Épisode 2 : La housse de l’ordinateur

Le matin, j’installe mes bureaux au café. Si je suis à Los Angeles, je vais à Coffee Bean & Tea Leaf dont l’espresso est bien meilleur que celui de Starbucks. À Tel-Aviv, c’est ArCaffé. Bref.

Hier matin. Je sors mon MacBook de sa housse, et je pose mes clefs, mon casque audio Koss et mon téléphone sur une table, et je vais au comptoir passer ma commande (à Los Angeles comme à Tel-Aviv, les gens laissent leurs iPhone sur les tables, les vols sont plutôt rares).

Je reviens m’asseoir, je commence à travailler, et je regarde machinalement autour de moi : la housse de mon MacBook a disparu.

Je regarde partout. Pas de housse. Je vais au comptoir, demande à la serveuse, on ne lui a rien rapporté. Deux serveurs commencent à s’agiter, je ne sais pas pourquoi, mais ils prennent la chose très au sérieux. La directrice du restaurant prend même l’initiative d’appeler son patron. Elle vient vers moi et me tend le téléphone : il va examiner les caméras de surveillance.

Je me répète en pensée : « Comment quelqu’un a-t-il pu voler la housse d’un ordinateur et laisser l’ordinateur, les clefs, le casque et même mon iPhone ? »

Et puis je suis pris d’un doute. Je vais à la voiture : ma housse est sur le siège.

Je l’ai enlevée sans m’en rendre compte. C’est la première fois que j’enlève la housse de mon ordinateur dans ma voiture. Je n’ai pas le moindre souvenir de l’avoir fait. Je ne sais même pas pourquoi je l’ai fait. Zéro souvenir. Je m’arrête là : c’est le syndrome Grumberg.

Épisode 1 : Le cocktail

Je suis invité à un cocktail pour une inauguration. Je parle avec les gens, je dis bonjour, on me présente untel et untel. Une dame s’approche et me dit :

– j’ai entendu que vous êtes monsieur Grumberg, j’aime beaucoup ce que vous écrivez.

– Merci, c’est très aimable à vous.

– Et je vous lis presque tous les jours. J’aime beaucoup Dreuz. Je n’ai pas encore regardé, de quoi avez-vous parlé aujourd’hui ?

Grand blanc… un ange passe… « madame, je ne me souviens plus »

– Vous ne vous souvenez pas ce que vous avez écrit aujourd’hui ?

Non.

Elle a tourné sèchement les talons et elle est partie. Elle a dû se dire que je la prenais pour une imbécile, ou que j’étais un imposteur.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info.

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* L’expression « mémoire de poisson rouge » vient de cette petite histoire, où un poisson rouge tourne dans son bocal. Il faut un tour, s’arrête et se dit : tiens c’est pas mal par ici, je reviendrais. Puis il fait un autre tour, s’arrête et se dit : tiens c’est pas mal par ici, je reviendrais… et ainsi de suite toute sa vie.

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