Publié par Dreuz Info le 7 novembre 2021

Lors d’une scène très particulière dans l’ancienne Jérusalem commençant et se finissant sur une tentative de lapidation, on peut voir, dans la première partie du chapitre, les scribes et pharisiens placer le Christ face à une situation embarrassante : une femme « surprise en situation d’adultère ».

Jésus démontre alors les préjugés des accusateurs à l’encontre de la femme, lesquels se croient moralement supèrieurs à elle alors qu’ils manquent d’empathie et de cette capacité à s’imaginer eux-memes dans une sitution similaire pour mieux juger (par ailleurs,il n’est pas certain que cette accusation ne soit pas inventée).

« Que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre », leur lancera Jésus.

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Par ce propos désarçonnant, Il obtient la miséricorde en faveur de la femme.

Il rappelle donc à ceux qui la jugent qu’ils ne sont pas plus innocents qu’elle, et ce, faisant, qu’ils appartiennent à la même humanité même si leurs titres leurs donnent une position supérieure à d’autres citoyens dans la cité. Le dialogue entre Jésus et ses adversaires, est ce qui va permettre l’acquittement de la femme en obligeant les juges à reconnaître qu’ils doivent eux-mêmes d’abord reconnaître la vérité (ils sont eux-mêmes imparfaits ou en langage religieux et dans ce contexte « pêcheurs ») pour être des hommes libres (ici au sens similaire du mot employé dans la Grèce ancienne, au sens de « responsables ») et être ainsi aptes à porter un jugement lui-même libre, fondé sur des faits constatés, vérifiés (rappel: 2 témoins sont obligatoires selon la loi juive d’alors, et ce, dès l’époque de la réception de la Tora) et des principes justes, non pas sur des pré-jugés ou des logiques sacrificielles par lesquelles un groupe cherche à se sentir plus uni en excluant ou condamnant la figure la plus faible du groupe (ici, la femme). Sur ce dernier point, des logiques sacrificielles et leur fonctionnement, on relira avec intérêt « La violence et le sacré » du fameux anthropologue René Girard.

En disant « Si vous demeurez dans ma parole, vous connaîtrez la vérité et la vérité vous rendra libre ! » (Jean 8 à écouter), Jésus les interpelle sur ce qui les maintient enchaînés (il peut s’agir pour les uns, de leur a-priori et éducation, pour les autres, des biais d’interprétation du réel qui découlent de leur passé/leur histoire, pour d’autres encore, de possibles obsessions ou traumas etc.).

Cela comprend ce que l’on croit au sujet de soi-même et de la pression du groupe à laquelle l’on se soumet souvent trop naturellement.

L’idée forte du passage est qu’en partageant ce qu’est la vérité, cela éclairera chacun sur la manière dont il se ment à lui-même ; cette mauvaise foi nous empêche d’accéder à l’expérience de vie que constitue la parole de Dieu.

Ce faisant, on observe un déplacement sémantique concernant le sens du mot « péché »: ce n’est plus simplement mal faire et/ou faire mal.

C’est rater ce pour quoi l’on a été créé ; la vocation ou mission particulière à laquelle Dieu nous appelle.

Opposé à la notion de « destin » qui nous enferme dans nos limites en les faisant apparaître comme évidentes et définies (et par-là, définitives), la Bible nous invite au contraire à une mise en dialogue – et même un débat, comme on le voit avec Jésus dans les jardins de Ghestemane ou Job se plaignant à Dieu – de l’humanité qui nous habite avec l’inconnu de Dieu qui constitue la quête du croyant.

Et l’objectif en est la transformation de soi vers la vertu et l’amélioration qui en découle pour la société.

Chaque fois que l’on refuse de prendre cette distance avec soi-même pour y laisser exister le droit au questionnement entre soi et la société d’une part, entre soi et Dieu d’autre part, on se retrouve comme psychologiquement « blessé », car l’on se contente de suivre le discours dominant de la société dont l’objectif est plus de réagir que d’agir (préventivement et dans une perspective de bienveillance, cette dernière n’existant par a-priori que dans peu de sociétés) ; et dans tous les cas, d’assigner chaque individu à une simple fonction socio-économique et non pas d’aider la personne à se transformer en accédant à une vie riche en sens par la construction de sa personnalité, en s’inspirant tout justement de ces valeurs de l’Évangile.

Pour finir ; il est important de faire savoir que Jésus se démarque ici de deux autres démarches sur la question de la valeur première, c’est-à-dire celle dont puisse découler naturellement toutes les autres vertus ou qualités possibles.

Pour Aristote, c’est le courage, pour Einstein, c’est l’imagination.

Ces deux perspectives sont très intéressantes aussi.

Mais pourquoi Jésus a-t-il choisi la Vérité comme valeur première ?

Nous pensons pouvoir répondre que seul un rapport premier authentique à la vérité – à son accueil et acceptation – est en mesure de contenir ces deux vertus du courage et de l’imagination qui ouvrent à leurs tours tous les possibles, alors que l’inverse n’est pas si évident. En effet, on peut avoir du courage, mais si par ailleurs, on est hors de la vérité ou si l’on se ment à soi-même pour une raison quelconque, on a peu de chances de construire une vie réussie.

Si par ailleurs, l’on a l’imagination fertile au point de faire passer au second plan – voir de perdre contact avec – le rapport premier à la vérité, on est aussi en danger.

Ainsi donc, le rapport premier au monde, s’il est perçu à travers le prisme de la vérité, peut ensuite laisser la personnalité se développer vers toutes les valeurs et dispositions de l’esprit plus complexes que sont le courage, l’imagination et d’autres encore.

Daniel Frédéric Gandus

Philosophe de la religion et du politique, Ancien Chercheur à La Sorbonne et Conférencier international

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