Publié par Eduardo Mackenzie le 22 décembre 2021

Sur l’élection présidentielle au Chili dimanche dernier, ma première observation –l’analyse proprement dite de cet événement sera faite plus tard par des centaines d’observateurs de toutes tendances– concerne les chiffres les plus élémentaires de ce vote et ce qu’ils révèlent.

Je constate que le candidat communiste Gabriel Boric, 35 ans, a battu son rival conservateur, José Antonio Kast, en obtenant 4,6 millions de voix, contre 3,6 millions de voix pour son rival au second tour de l’élection.

Même si la presse chilienne souligne que le second tour constitue « le plus gros vote de l’histoire du vote volontaire au Chili », il est essentiel de noter, en même temps, qu’il y a eu, malgré cette indéniable mobilisation, un facteur négatif : le fort taux d’abstention.

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D’après les listes électorales, quelque 15 millions de Chiliens étaient habilités à voter. Cependant, le dimanche 19 décembre, seuls 54,2 % d’entre eux l’ont fait, soit 8,2 millions d’électeurs. En conclusion, 45,8% des électeurs se sont abstenus de participer à ce second tour, pour diverses raisons, selon le journal El Mercurio. La population du Chili est de 19 436 613 habitants.

Boric, le candidat du pacte « J’approuve la dignité », a ainsi été choisi par 30% des électeurs. Il a été élu par une minorité, peut-être la plus grande minorité de ce tour mais, après tout, par une minorité de l’électorat chilien en général.

La majorité de l’électorat, 70 % des personnes ayant le droit de vote, était partagée ce jour-là entre les électeurs de Kast et les abstentionnistes.

La première question est : pourquoi 45,8% des votants n’ont pas voulu participer au vote ?

Kast, le candidat du Front chrétien-social, avait remporté le premier tour (27,9 % contre 25,8 % pour Boric). La question évidente est : qu’est-ce qui explique ce changement d’opinion drastique entre le premier et le deuxième tour ?

Je risque ici quelques premiers constats provisoires, qui peuvent être utiles surtout aux Colombiens face à l’élection présidentielle de 2022, où la rivalité idéologique entre les deux camps politiques ressemble à la situation chilienne.

1.- Le triomphe électoral de Gabriel Boric confirme l’émergence d’une constante dans les récentes élections présidentielles latino-américaines auxquelles participent des candidats soutenus par le philo-madurismo international : les candidats d’extrême gauche n’aspirent pas à convaincre ou à conquérir les majorités nationales. Car ils ne sont pas des démocrates. Ils veulent seulement gagner des partisans et des voix pour constituer et mobiliser d’importantes minorités le jour des élections.

2.- Comme ils sont minoritaires, du point de vue idéologique et social, ils cherchent et parviennent à gagner les élections en encourageant l’abstention et en annulant ou en désorganisant la participation des majorités pendant la campagne et, surtout, le jour du scrutin.

3.- L’instrument privilégié pour atteindre ces objectifs est psychologique : détruire par toute sorte d’actions, notamment médiatiques –mensonges, calomnies, demi-vérités, accusations invraisemblables– la véritable image de l’adversaire libéral-démocrate.

4.- La destruction de l’image de l’adversaire est le résultat de campagnes systématiques et répétitives, sur les réseaux sociaux et dans la sphère audiovisuelle. La besogne consiste à montrer le candidat rival comme un extrémiste dangereux. Pendant la campagne électorale chilienne, Kast a subi une cascade d’épithètes : « extrême droite », « ultraconservateur », « nostalgique de Pinochet », « disciple de Trump et Bolsonaro », « fasciste ». Toute tentative de discussion équilibrée doit être rejetée afin de vaincre l’adversaire libéral-démocrate.

5.- La promotion de l’abstentionnisme et de la dissidence au sein du camp rival doit aller de pair pour obtenir les effets recherchés.

6. La campagne de diabolisation de l’adversaire vise non seulement la démobilisation de son électorat mais aussi le déplacement ou l’éloignement des modérés ou des centristes du champ démocratique. Il cherche même à inverser une tendance avérée de l’opinion. C’est ce qui s’est passé dimanche dernier au Chili : les partis et groupes du centre, qui avaient remporté le premier tour, « se sont penchés tout à fait vers le député de gauche », au second tour, selon le journal espagnol ABC.

7. Le déplacement du centre vers la gauche est également le résultat du traitement bienveillant des médias envers Boric. Ils ont contourné toute critique du chavisme de Boric, son militantisme au sein du PC chilien et ont fréquemment évité de mentionner les liens des membres de la coalition de Boric avec les récentes et massives violences urbaines au Chili. Ils ont évité de discuter de la question de la technique chaviste consistant à convoquer, après l’élection, une Assemblée constituante pour démanteler la démocratie, bien que le système démocratique soit l’architecte des avancées économiques notables du Chili.

© Eduardo Mackenzie (@eduardomackenz1) pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

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