Publié par Abbé Alain René Arbez le 5 février 2022

En écoutant l’évangile de Luc, nous nous retrouvons dans l’ambiance de travail et de foi des premiers apôtres, mais ce saut dans le passé peut – étonnamment – nous aider à mieux comprendre les enjeux de notre vie d’aujourd’hui ! Car nous allons ainsi mieux discerner les réalités de notre temps à partir des conditions dans lesquelles Jésus a appelé des hommes à partager son annonce du monde à venir.

Ces pêcheurs du lac, ce sont des hommes courageux. Et Jésus en fait ses disciples, afin qu’ils deviennent ensuite apôtres. Ce sont des professionnels de la pêche sur le grand lac de Galilée, le Kinnereth, un lac aux humeurs imprévisibles et périlleuses. On sait que dans la tradition biblique, ces eaux profondes et agitées symbolisent les dangers qui nous menacent dans la vie courante. On trouvera donc des récits d’après Pâques qui présentent le Ressuscité comme celui qui marche sur les eaux, une façon symbolique de dire que par sa victoire sur le mal, les plus graves dangers sont maîtrisés.

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Les pêcheurs du lac en question, ce sont des connaisseurs expérimentés de ce lieu qui fournit des poissons à la région mais surtout à Rome : à l’époque de Jésus, les poissons tirés du lac sont séchés et acheminés en grandes quantités. Mais cette fois, nous dit l’évangile, les pêcheurs ont peiné toute la nuit sans rien prendre, alors ils rentrent, fatigués et résignés face à l’échec de leur travail.

Mais ce récit d’évangile est à lire à 2 niveaux, comme souvent. N’oublions pas que c’est une catéchèse, donc un récit de foi rédigé par Luc à partir d’un événement réel, mais ensuite recomposé après la résurrection du Christ pour devenir un enseignement à la lumière des promesses de Dieu. Cela, précisément au moment où se développent les premières communautés, d’où l’importance des nombreux symboles que nous y trouvons.

La résurrection de Jésus a en effet inauguré une ère nouvelle, et sa puissance de vie peut changer beaucoup de nos attitudes et de nos situations. On doit cependant constater que rien ne se passe de manière magique : la preuve, ici, les pêcheurs du lac, bien qu’ils soient les amis proches de Jésus, n’ont pas réussi leur expédition de toute une nuit, le résultat de leurs efforts a été nul!

Cela peut nous arriver de la même façon. Nous sommes baptisés, nous avons la foi, nous nous efforçons de la pratiquer intelligemment. Or, nous connaissons tous dans notre vie des moments difficiles, décevants et même des périodes infructueuses. A nous aussi, il arrive que les filets de nos vies soient vides et que le découragement nous immobilise.

Le récit nous présente Jésus assis dans la barque de Pierre, d’où il enseigne la Parole de Dieu. Manière imagée pour Luc de nous dire que Jésus est présent dans la barque de l’Eglise conduite par Pierre (ou son successeur) quoi qu’il arrive.

Que dit Jésus à Simon et aux apôtres déçus par leur nuit de pêche ratée : avance au large ! Aller au large, c’est s’éloigner des rivages familiers, c’est surtout porter plus loin l’appel et reconnaître combien l’évangile nous aide à dépasser nos blocages. Le résultat final est mis en lumière : après la nouvelle tentative, les filets sont remplis de poissons et n’arrivent plus à tout contenir…

Les filets sont à l’image des communautés en plein essor qui tissent des liens entre les personnes, et les poissons représentent les membres des communautés, sortis des eaux et appelés à la vie…

L’abondance messianique qui résulte de cette pêche miraculeuse est la réponse aux nombreux efforts humains restés sans résultats. Si la pêche a été nulle pendant la nuit, voici qu’elle est maintenant surabondante dans la lumière en compagnie de Jésus : une belle image pascale qui insiste sur la présence du Ressuscité au cœur des communautés porteuses de la bonne nouvelle. Car la nuit représente l’impasse liée au paganisme, car ses fausses valeurs sont nuisibles pour l’humanité.

Jésus dit à Simon : « Désormais tu seras pêcheur d’hommes », ce sont des êtres humains que tu prendras, ce sont des hommes et des femmes que tu tireras des abimes menaçants pour les faire renaître à la vraie vie. Il s’agira de tendre la main à ceux et celles qui se noient dans les multiples difficultés de l’existence.

Quand soudain les filets regorgent de poissons, le miracle se produit non pas comme dans un film, de façon magique. La Parole de Dieu agit d’une autre manière, car le libre choix de ces hommes a été sollicité : Jésus propose d’aller au large pour tenter un nouvel essai. Logiquement les hommes du métier réagissent sans doute avec réticence à cet effort apparemment inutile. Mais grâce à la confiance en la Parole de Jésus, ils acceptent de dépasser leur découragement et, pour répondre au défi exprimé par le Maître, ils lancent les filets : alors, subitement le miracle s’est produit – non pas d’abord dans le filet, de manière mécanique, mais avant tout dans leur esprit et dans leur cœur. Contre toute vraisemblance, ils ont tenté l’impossible et ils ont réussi. La même chose peut donc nous arriver dans nos situations de vie d’aujourd’hui! La fatalité peut être vaincue.

Nous avons peut-être remarqué que Simon s’est adressé à Jésus en l’appelant « Maître », et il lui fait état du problème ; ensuite le miracle a lieu, c’est un dévoilement de la mission de Jésus, et celui qui devient « Simon Pierre » s’incline en disant « Seigneur », titre divin qui sera réservé au Ressuscité… L’évangile veut ainsi nous dire qu’avec la force de la résurrection tout devient possible, et il évoque la marche vers une humanité où les ressources, devenues surabondantes dans l’amour de Dieu, seront utilisées pour que la fraternité soit réellement le signe du Royaume.

« Laissant tout, ils suivirent Jésus ». Ce terme de suivre est un mot chargé de sens. Jésus n’est plus simplement celui qui enseigne, mais il est celui qui appelle à la vie. Et c’est là un écho du premier commandement du décalogue, au cœur de l’alliance : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu par-dessus tout, et tu ne SUIVRAS que lui seul »… Suivre Jésus prend ici tout son sens : c’est à travers sa personne entièrement donnée que l’on suit la loi d’amour de Dieu.

Mais cette grande aventure des disciples du Christ, commencée sur les rivages du lac de Tibériade, c’est aussi la nôtre aujourd’hui dans des conditions très différentes. Rappelons-nous que le Ressuscité se laisse reconnaître aujourd’hui encore dans des gestes de partage fraternel, qui sont des jalons constructifs pour l’avenir.

Jésus le Vivant se tient toujours sur les rivages de nos vies, et il nous lance encore ses appels à avancer au large, il nous invite à ne pas nous décourager dans les moments difficiles, mais à réintégrer nos forces, notre créativité, dans la puissance de la Parole de Dieu…Laissons-nous transfigurer et transformer par cette présence régénérante.

Amen

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Abbé Alain René Arbez, prêtre catholique, commission judéo-catholique de la conférence des évêques suisses et de la fédération suisse des communautés israélites, pour Dreuz.info.

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