Publié par Guy Millière le 6 avril 2022

Je dois y revenir une fois encore, car les atrocités mises au jour en Ukraine s’accumulent.

La guerre menée par l’armée russe en Ukraine est une guerre absolument ignoble. Elle ressemble à la manière russe de faire la guerre sous Poutine : car Poutine est un multirécidiviste. Avant que la ville de Marioupol soit rasée et couverte de cadavres, il y a eu Grozny en Tchétchénie il y a vingt ans, et Alep en Syrie plus récemment.  Des scènes d’horreur telles celles laissées à Bucha, dans la banlieue de Kiev ont été très nombreuses partout où l’armée russe est passée : exécutions sommaires, viols collectifs, tortures perpétrées sur des civils, sévices sur des enfants tués ensuite. L’armée russe a une sinistre tradition de barbarie et d’ignominie.

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La différence est que, pour ce qui se passe en Ukraine, les images sont plus nombreuses. Il y a des images satellite. Des journalistes sont sur place et observent, quand bien même les soldats russes n’hésitent pas à leur tirer dessus, pour les tuer, même quand ils portent un brassard ou un dossard “presse” (et plusieurs journalistes sont morts ou ont été gravement blessés). La différence est aussi que cela se passe en Europe. 

La différence avec les conflits qui ont marqué la décomposition de l’ex-Yougoslavie est qu’il s’agit d’une guerre d’agression délibérée menée par une dictature contre un pays démocratique qui n’a, lui, ni agressé ni menacé personne et veut seulement être souverain et libre. (La propagande russe et ses divers relais s’efforcent de dépeindre la guerre comme une guerre provoquée par l’OTAN et par l’Ukraine, je sais, et décrivent l’Ukraine comme n’étant pas une démocratie, je sais aussi: et je vois que la propagande russe est aussi efficace sur les esprits faibles que l’était la propagande soviétique, la différence étant que la propagande soviétique trouvait ses relais chez les communistes, alors que la propagande russe trouve ses relais aujourd’hui dans les membres de la droite nationaliste et soi-disant “souverainiste”: soi-disant parce qu’ils défendent la souveraineté chez eux, et l’invasion chez les autres).

Les dirigeants des pays occidentaux n’ont pas réagi immédiatement quand la Russie a attaqué. La plupart d’entre eux pensaient que l’agression russe n’aurait pas lieu, et lorsqu’elle s’est enclenchée, quasiment tous s’attendaient à ce qu’elle soit brève, conduise à une victoire rapide de la Russie et à un changement de régime à Kiev, qu’ils auraient accepté.

Ce qui les a conduits à changer d’attitude a été l’échec de l’armée russe qui est apparue comme une armée très défectueuse et très déficiente (la victoire que Poutine comptait obtenir en trois ou quatre jours n’a pas eu lieu, et l’armée russe est en train de reculer). Ce qui les a conduit à changer d’attitude a été la résistance du peuple ukrainien, la détermination et l’opiniâtreté de l’armée ukrainienne, et le courage et la détermination du Président Volodymyr Zelensky, ainsi que sa capacité à mobiliser tous les êtres humains épris de liberté (la Russie a compris l’importance de Zelensky, et c’est pour quoi elle a tenté plusieurs fois de le faire éliminer physiquement: c’est pourquoi aussi-elle lancé des opérations de diffamation et de dénigrement à son égard, avec un certain succès  au sein de la droite nationaliste et soi-disant “souverainiste”).

Ce qui les a conduit à changer d’attitude aussi a été le flot ininterrompu de réfugiés décrivant des scènes pathétiques, puis  les crimes de guerre commis par l’armée russe: la destruction de Marioupol n’a pas apporté beaucoup d’images de cadavres parce que très peu de journalistes sont restés dans la ville (les deux derniers journalistes qui s’y trouvaient encore sont partis peu de temps après la destruction de la maternité de la ville par les forces russes: ils ont témoigné sur des chaines américaines, mais en France, on a préféré sur le sujet la propagande russe), les scènes d’horreur à Bucha ont pu être l’objet de reportages des journalistes présents à Kiev.

Les dirigeants des pays occidentaux ont vu les scènes d’horreur, et celles-ci se sont ajoutées au flot ininterrompu de réfugiés décrivant des scènes pathétiques et aux images venues de Marioupol.

Elles ont suscité des paroles plus fortes. Il est devenu impossible de ne pas dire que l’armée russe commet des crimes de guerre répugnants (il est encore trop peu dit que Poutine a, face aux déficiences de son armée, appelé à la rescousse les milices tchétchènes de Ramzan Kadyrov, et des mercenaires islamiques syrien, très satisfaits d’être rémunérés pour tuer du Chrétien). Il est devenu impossible de ne pas dire que Vladimir Poutine est un criminel de guerre (ce qu’il est depuis longtemps). Des commentateurs américains tels Sean Hannity disent qu’il est désormais très proche de ce qui permettrait de le définir comme un criminel contre l’humanité. 

Ces paroles fortes, qui se multiplient, placent de plus en plus nettement les dirigeants occidentaux face à la nécessité de choisir quelle voie ils doivent emprunter, et le choix qui se présente à eux est celui dont j’ai déjà parlé dans un article précédent.

Les jours à venir vont faire qu’il sera difficile pour eux de ne pas faire un choix éthique.

D’autres scènes d’horreur vont inéluctablement se trouver mises au jour.  Des documents obtenus par les services de renseignement américains montrent que Poutine, discernant qu’il ne pourra pas s’emparer de l’Ukraine et installer à Kiev un gouvernement à sa solde, a décidé de tout faire pour s’emparer pleinement et entièrement du Donbass (au-delà des territoires où il a installé par la force des milices russes en 2014), de la bande côtière qui relie celui-ci à la Crimée, et si c’est possible, de la rive de la mer Noire qui s’étend jusqu’à la frontière de la Roumanie, ce qui impliquerait de faire tomber Odessa. Faute de s’emparer du reste du pays, Poutine entend vider celui-ci de sa population, et détruire au maximum les villes, les usines, quasiment tout ce qui permet une activité économique en Ukraine. Et si la ville de Kharkiv est pour l’heure moins détruite que Marioupol (détruite à 90 pour cent), les destructions y sont néanmoins très importantes (la ville semble détruite à cinquante pour cent, ce qui est déjà considérable), Kiev est très étendue, mais détruite à trente pour cent (réserver à Kiev le sort réservé à Marioupol serait difficile pour Poutine, d’une part parce que Kiev est bien défendue, d’autre part parce que la ville abrite des lieux historiques censés être précieux pour la Russie). Le sort d’Odessa est incertain : des généraux américains disent que les grandes villes d’Ukraine sont “rasables”, mais pas prenables pour la Russie, ce qui signifie que la seule possibilité pour la Russie qu’elles ne fassent plus obstacle est de les raser, et donc d’y multiplier les crimes de guerre.

Faute de s’emparer du reste du pays, Poutine entend y mener une politique de la terre brûlée, et rendre le pays exsangue, non viable. C’est ce qui explique que Volodymyr Zelensky parle d’une volonté génocidaire chez Vladimir Poutine, et les chaines d’information conservatrices américaines emploient désormais elles-mêmes le mot génocide pour décrire ce que fait Poutine.

Donner à l’Ukraine tous les moyens de gagner sera facile pour les Etats-Unis et va se faire, tant mieux ! L’administration Biden a été réticente au début, et pensait que Poutine allait obtenir une victoire rapide (Biden a des liens de corruption avec les oligarques ukrainiens proches de la Russie, ceux qui ont perdu le pouvoir en 2014 -ainsi Mykola Zlochevsky, et est fondamentalement hostile aux oligarques qui ont porté Zelensky au pouvoir, Igor Kolomoysky surtout). Elle a dû changer d’attitude et soutenir Zelensky : elle a refusé le transfert de certaines armes que la Pologne et la Slovaquie voulaient donner à l’Ukraine, mais pourrait changer d’attitude. Elle transmet maintenant à l’Ukraine davantage de missiles sol-air Stinger et Javelin, et ajoute des drones Switchblade, recommandés par le Général Petraeus. Les principaux responsables du parti républicain disent explicitement qu’il faut donner strictement tous les moyens de la victoire à l’Ukraine, chasser intégralement l’armée russe hors du territoire ukrainien, arrêter les campagnes de bombardement russes, demander à Poutine un accord de paix garantissant la souveraineté de l’Ukraine. Ils disent que Poutine, s’il est acculé, peut être tenté par le recours à des armes chimiques et à des armes nucléaires tactiques, et reprochent à l’administration Biden de ne pas tenir un discours plus ferme et plus dissuasif à Poutine, ajoutant que Poutine est un tueur cruel et sans scrupule, et ne comprend que la force. Ils ajoutent que Poutine est prêt à aller jusqu’au bout.

Donner à l’Ukraine tous les moyens de gagner est plus difficile pour les pays d’Europe occidentale, et c’est un fait : l’Europe occidentale est présentement, davantage encore que la Chine, le principal financier de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine. Nombre de pays d’Europe occidentale continuent à acheter du pétrole et du gaz russe. Poutine demande à être payé en roubles, et cela commence à se faire : en devant acheter des roubles pour payer la Russie, les pays concernés font remonter le cours du rouble, et amoindrissent l’effet des sanctions qui pèsent sur la Russie. Cesser d’acheter du pétrole et du gaz russe provoquerait un effondrement économique en Europe occidentale, et Biden, ayant, par écologisme gauchiste, restreint fortement la production de pétrole et de gaz aux Etats-Unis, ne peut proposer du pétrole et du gaz américain à l’Europe occidentale, ce qu’aurait fait Trump immédiatement s’il était encore au pouvoir.

Les dirigeants de l’Europe occidentale vont sans doute rester dans une position ambivalente : se dire hostiles à la guerre d’agression et hostiles aux crimes de Poutine, soutenir verbalement l’Ukraine, lui transmettre de l’aide humanitaire et quelques armes, et laisser les Etats-Unis faire ce qui est éthiquement juste : apporter l’aide réellement efficace à l’Ukraine. Les dirigeants de l’Europe occidentale se diront favorables aux négociations, tout en sachant que Poutine ne cèdera sur rien tant qu’il pensera pouvoir gagner et continuer à détruire et tuer. Ils critiqueront les Etats-Unis parce qu’ils craindront qu’en aidant davantage l’Ukraine à gagner, les Etats Unis pourraient inciter Poutine à couper l’arrivée de pétrole et de gaz en Europe. Ils diront “maintenir le dialogue”, comme le fait Macron (le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki a pleinement raison de critiquer le Président français). Il est difficile de faire ce qui est éthiquement juste quand on dépend d’un dictateur criminel.

Quoi qu’il se passe, l’Europe est face à une crise humanitaire majeure, la plus grave crise humanitaire qu’elle ait connu depuis 1945 : quatre millions d’Ukrainiens sont réfugiés hors du pays, six à sept millions d’autres sont toujours en Ukraine, mais ont tout perdu, à commencer par leur domicile. Ces chiffres s’accroissent chaque jour. Tous ces gens doivent être secourus et le seront pendant des mois encore. Les destructions infligées à l’Ukraine par Poutine sont évaluées pour l’heure à un minimum de 500 milliards de dollars. Et plus la guerre durera encore, plus le chiffre montera. L’Ukraine devra être reconstruite, sans quoi le pays se videra totalement de sa population. Poutine a provoqué une catastrophe humanitaire absolue.

Quoi qu’il se passe aussi, l’Europe est face à une crise économique très grave, et qui va devenir plus grave encore. La hausse du prix de l’énergie provoquée par les décisions de Biden en matière de production de gaz et de pétrole s’est accentuée avec la guerre d’agression lancée par Poutine, et l’Europe va connaitre tout à la fois une forte inflation et une stagnation économique qui tournera sans doute à la récession. Elle va connaitre donc ce que les économistes appellent une stagflation, puis une slumpflation. 

S’ajoutera une crise alimentaire : l’Ukraine était l’un des plus importants producteurs de céréales du monde, et sa production est arrêtée. Le prix des céréales va fortement monter, et il va y avoir pénurie de céréales. Des risques de famines dans des pays pauvres prennent forme, et les famines peuvent conduire à des émeutes de la faim et a des vagues importantes d’immigration clandestine vers les pays plus riche, et l’Europe est une fois de plus aux premières loges.

L’Europe va souffrir beaucoup, et aurait intérêt à une victoire rapide de l’Ukraine. L’alternative à une victoire rapide de l’Ukraine est une guerre prolongée et une destruction plus vaste de l’Ukraine, à même d’accroitre considérablement la crise humanitaire, la crise économique et la crise migratoire qui vont commencer à frapper l’Europe.

Rien de tout cela ne serait arrivé si Donald Trump était encore à la Maison Blanche, mais la plupart des Européens, politiciens, journalistes, autres, ont accueilli avec joie et soulagement l’installation de Joe Biden à la place de Donald Trump. Je ne sais ce qui reste chez les personnes concernées de la joie et du soulagement qu’elles ont ressenti il y a quelques mois. 

Lorsqu’on déteste que l’Amérique soit forte et qu’on préfère qu’elle soit faible et gouvernée par des gauchistes et aie à sa tête un homme sénile et corrompu, on doit assumer ce qui découle de ses préférences.

L’administration Biden ravage présentement les Etats-Unis et nuit aux Américains les plus pauvres (une famille qui a des revenus annuels de 70.000 dollars devra dépenser cette année 5.000 dollars de plus que l’an dernier pour maintenir son train de vie). En ravageant les Etats-Unis, l’administration Biden provoque aussi des catastrophes dans le reste du monde : après la coupure dans la production d‘énergie aux Etats-Unis, est venue la débâcle en Afghanistan, et maintenant la guerre en Ukraine, et la liste risque fort de s’allonger.  Tout se passe comme je l’avais prévu. Hélas.

Un dernier mot : Volodymyr Zelensky demande un tribunal du type du tribunal de Nuremberg pour Poutine. Sa demande est légitime. Le grand dissident russe Vladimir Boukovsky demandait un tribunal de Nuremberg pour les crimes du communisme soviétique. Le régime Poutine découle directement de l’ignominie communiste soviétique et la prolonge. Le tribunal de Nuremberg avait mis le monde face à l’atrocité innommable du nazisme. Les poutinolâtres devront être placés face à l’atrocité absolue du communisme soviétique et de son descendant bâtard, le poutinisme. Si les crimes du communisme chinois et du régime iranien étaient évoqués en supplément, ce serait très utile. Les régimes du nouvel axe du mal doivent être dénoncés, isolés, défaits, vaincus. Quand les Etats-Unis retrouveront un Président digne de ce nom, la nécessité de faire avancer la liberté et le respect des droits humains sur terre retrouveront leur place.

© Guy Millière pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

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