Le récit de la pêche miraculeuse nous fait retrouver les apôtres dans leur milieu de vie, ce sont des professionnels de la pêche sur le lac de Galilée. Ils ont peiné toute la nuit sans rien prendre, et c’est pourquoi ils rentrent résignés devant l’échec.
Ce récit johannique est un message qui s’adresse à l’Eglise des premiers temps, mais aussi à celle d’aujourd’hui. Les disciples dans la barque qui peinent dans la nuit obscure sans rien prendre, c’est une image de la communauté de foi qui rame dans des conditions d’adversité, sans résultat visible dans l’immédiat. Pourtant, dit le texte, Jésus est sur le rivage, il interpelle familièrement, mais personne ne le reconnaît. Quand sur l’indication du Maître les pêcheurs lancent les filets dans une nouvelle direction, voici que ceux-ci se remplissent de 153 poissons. St Jérôme nous dit que dans l’antiquité, on estimait à ce nombre la variété des espèces comestibles. Mais ce chiffre symbolique a surtout pour but d’illustrer la diversité de provenance des membres des communautés adhérant au Christ. Dans cette pêche, il y a beaucoup de poissons de sortes diverses, sans que le filet ne se rompe. Cette absence de déchirement du filet est sans doute un avertissement qui vaut pour aujourd’hui : la diversité ne doit jamais conduire à des ruptures d’unité, c’est-à-dire à un schisme, entre le leadership de ceux qui sont fidèles à la tradition et ceux qui désirent s’adapter à l’évolution de la société. Car pour savoir où l’on va, il faut savoir d’où l’on vient !
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Malgré leur expérience de vie itinérante en compagnie de Jésus, les apôtres ont été confrontés à un échec sur leur propre terrain professionnel. Leur amitié avec le Christ n’a pas opéré de façon magique puisque leur effort n’a rien donné dans un premier temps! Cela nous arrive sans doute de la même façon. Nous sommes baptisés, nous avons la foi, nous nous efforçons de la pratiquer intelligemment. Or, nous connaissons dans notre vie des moments décevants et même des périodes infructueuses. Nous aussi, souvent, nos filets sont vides.
Dans le langage biblique, c’est le symbole de la nuit et de la mer, qu’on retrouve ici, qui sont très significatifs, ils décrivent un environnement hostile et représentent les multiples dangers qui menacent l’être humain. Comment les surmonter ? Or, la foi ne nous arrache pas artificiellement aux conditions d’existence de tout un chacun, mais elle nous permet d’aborder les situations avec une force intérieure et une approche différente.
Nous le voyons dans le texte de Jean, puisque c’est précisément le « disciple que Jésus aimait » qui reconnaît le premier le Christ ressuscité venu à leur rencontre. Ce personnage représente tout croyant uni au Christ par une relation personnelle de confiance. Puis c’est le repas au bord du lac qui décrit une scène typiquement eucharistique pour toute l’équipe des apôtres.
L’événement de cette pêche miraculeuse s’est donc produit, non pas comme dans un conte de fées, mais d’une autre manière, où le libre choix de ces hommes a été sollicité: plutôt que de refuser un effort apparemment inutile, ils acceptent, sur l’invitation de Jésus, de lancer les filets dans la nouvelle direction indiquée: et, surprise, les poissons sont là en grand nombre…Le miracle s’est produit non pas de manière mécanique, dans le filet, mais avant tout dans leur esprit et dans leur cœur. Contre toute vraisemblance, à l’écoute du Ressuscité, ils ont tenté l’impossible et ont réussi.
Devant cette abondance typiquement messianique, Jean a effectivement été le premier à reconnaître Jésus présent par-delà sa mort, qui ne les a pas abandonnés. Jean a donc été le premier en amour, comme il l’était lors de son entrée dans le tombeau où il était arrivé avant Pierre.
Dans la nuit, Pierre a aussitôt plongé dans le lac pour aller au-devant de Jésus: le plongeon dans la foi donne la force de traverser tous les risques, toutes les menaces, et c’est le signe du baptême que nous retrouvons ici. Par amour du Christ, dans certaines circonstances, il faut savoir se jeter à l’eau ! Puis Jésus va demander à Pierre par 3 fois d’être le berger de ses brebis, une responsabilité majeure pour la suite. Nous avons donc ici deux primautés parallèles : Pierre est le premier dans l’équipe avec la mission de gouvernance qu’il reçoit, mais il y aussi Jean qui a été le premier dans la confiance et l’amour.
De même, à côté de Pierre et de ses successeurs, le pape, les évêques et les prêtres, il y a les témoins, les saints, les baptisés engagés, aussi indispensables que la hiérarchie. Ces deux composantes de l’Eglise ont pour tâche d’accompagner le peuple de Dieu vers les réalités de son Royaume…
Les apôtres ont été institués “pêcheurs d’êtres humains” par Jésus, c’est pourquoi nous retrouvons dans ce récit le symbole habituel de la barque qui représente l’Eglise. Les filets sont l’image des liens communautaires pour l’annonce de la bonne nouvelle aux hommes et aux femmes en recherche de vérité. Tous ensemble, pêcheurs d’hommes dans la pastorale, pour tendre la main à ceux et celles qui risquent de se noyer dans les difficultés et les épreuves de l’existence. Dans le récit, Jésus ressuscité est présent sur la rive, c’est à dire sur cette limite qui relie le temps et l’éternité, car tout en étant dans la dimension de la vie éternelle, il est aussi présent à ses amis qui peinent en ce monde. C’est avec lui qu’ils sont dans la continuation de leur mission qui est de rendre gloire au Dieu de l’Alliance.
Et Jésus leur donne le pain et le poisson, c’est un repas d’action de grâce. L’évangile veut donc nous dire qu’avec la force de la résurrection tout devient possible, il y a un avant-goût du banquet de la fin des temps pour évoquer notre marche vers une humanité où les ressources doivent être intelligemment utilisées afin que la fraternité annonce le Royaume à venir.
La grande aventure des disciples du Christ commencée sur les rivages du lac de Tibériade, c’est aussi la nôtre aujourd’hui. Ce qui veut dire que Jésus vivant se tient sur les rivages de nos vies, entre le temps et l’éternité, et il nous lance encore ses appels, il nous communique le pouvoir de ne pas nous décourager dans les moments difficiles, et nous aide à trouver nos forces, notre créativité, dans la puissance de la Parole de Dieu : dans son langage, cet évangile de Jean nous le dit avec conviction : c’est la Parole de Dieu et l’eucharistie la vraie nourriture de nos âmes…
Amen
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Abbé Alain René Arbez, prêtre catholique, commission judéo-catholique de la conférence des évêques suisses et de la fédération suisse des communautés israélites, pour Dreuz.info.
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Merci pour cette explication de texte.
Moi, qui n’ai été élevé dans aucune foi, je prends beaucoup d’intérêt à lire vos exégèses !
Merci. J’étais dans la même situation que vous jusqu’à l’âge de 19 ans…
Vous me surprenez, je pensais que vous aviez eu un minimum d’éducation chrétienne dès le plus jeune âge…
Quant à moi, je viens d’avoir 60 ans…
Moi aussi je viens d’avoir 60 ans, j’aime beaucoup les articles de Mr l’Abbé Arbez… Mais je ne suis toujours pas croyante.
Moi non plus, mais j’estime qu’il y a beaucoup d’enseignements à tirer de ces récits…
Tout à fait d’accord ! C’est bien pour cela que j’apprécie ses articles. De plus je lui suis reconnaissante d’avoir maintes fois répondu à mes messages d’athée indécrottable, avec bonté, bienveillance, tolérance et compréhension.
Absolument !
Ce sont les retrouvailles, et les disciples voient que Jésus les attendait, car leur Maître, agissant une fois de plus comme leur serviteur, leur a préparé le petit déjeuner: pain frais encore chaud et poissons grillés. Combien de temps a-t-il fallu aux disciples pour réaliser ce qui se passait ? Ont-ils vu dans ce petit déjeuner pas comme les autres, car préparé de la main de Jésus lui-même, un signe de la grâce du Christ qui veut nous nourrir tous les jours de notre vie, là où il nous a fait naître car c’est là qu’il nous envoie ? Et il y a plus encore, un autre signe… Jésus dit : Apportez quelques-uns des poissons que vous venez de prendre. Et symboliquement, pendant ce repas de communion entre Jésus et ses disciples au bord du lac, on ne fera plus la différence entre la nourriture de grâce qui vient de la main du Christ, et la nourriture que les disciples ont reçue comme fruit de leur acte de foi, et tous en mangeront ce jour – là…
Je ferai de vous des pêcheurs d’hommes. Les hommes que Jésus a pêchés par son ministère et les hommes que nous pêcherons dans le vaste monde par notre témoignage ne forment plus qu’une seule communauté, une seule Eglise.
Nous n’avons pas ici de cité permanente et la Jérusalem céleste qui nous est promise n’est pas encore fondée. Oserais-je dire que oui, bien sûr c’est dans la communion fraternelle de l’Eglise que le Christ veut nous rencontrer le dimanche matin, mais c’est surtout le lundi matin qu’il nous indiquera où jeter nos filets, qu’il nous aura préparé de quoi vivre, et qu’il partagera sa vie avec nous, et nous avec lui, jour après jour jusque dans l’éternité…
Si nous ramons, fatigués et vidés, encore perdus dans les brumes de notre lac de Galilée, Jésus nous attend sur la rive de notre vie de tous les jours. Un signal, une modeste fumée s’élève au bord du lac et Jésus nous attend. Avant de nous envoyer, il veut partager avec nous le poids de nos vies, nos soucis et nos peines, soigner les blessures de notre âme, pardonner les fautes que nous voudrions tellement lui confesser, restaurer notre relation avec lui. Puis, il nous confiera notre mission avant de renouveler notre force. Peu importent les temps et les circonstances. Peu importe ce que pensent, ce que font les autres, ce qu’ils feront ou ne feront pas.
Et en guise d’envoi il me dit, il vous dit: toi, suis-moi…