Publié par Jean-Patrick Grumberg le 2 juillet 2022

Durant les deux sommets qui ont réuni les pays occidentaux dans la province allemande de Bavière et dans la ville espagnole de Madrid, les dirigeants du G7 ont cherché à montrer leur unité, qui montre ses fragilités, en déclarant leur soutien au président ukrainien Zelensky.

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Des décisions conséquentes ont été prises. Des augmentations significatives de l’aide et du financement militaires ont été annoncées. Des missiles à longue portée ont été promis, tout comme la persistance de la formation aux armes occidentales. Surtout, la décision “historique” d’ouvrir la porte à l’adhésion de la Suède et de la Finlande à l’OTAN, une mesure dont ces deux pays n’ont jamais voulu, a fait les gros titres quand Erdogan a fini par dire oui.

Poutine a tenté de minimiser les implications de cette décision, déclarant qu’il n’avait aucun problème à ce que la Finlande et la Suède prennent la voie qu’elles voulaient, mais il n’a pas convaincu. Il a d’ailleurs prévenu que la construction de bases militaires dans ces pays entraînerait une réaction similaire de la part de la Russie, ce qui imposerait “une menace équivalente aux pays qui viennent nous voir avec ces menaces.”

Poutine face à ses démons

  • Un rapide coup d’œil à la carte montre que la Russie est désormais encerclée par l’Occident.
  • Elle n’a pas de voisins amis en dehors du Belarus.
  • Le président russe, qui se plaignait que l’Occident était “à sa porte” avant l’invasion de l’Ukraine, partagera désormais une frontière de 1 300 kilomètres avec l’OTAN – lorsque la Finlande aura adhéré.
  • Non seulement l’OTAN est à sa porte, mais toute la frontière occidentale de la Russie nécessitera une attention constante pour être “défendue”.
  • Cet état de fait, les dirigeants de Moscou ne l’avaient pas connu durant les pires phases de la guerre froide.

Poutine dispose de plusieurs cartes pour riposter

  • Il procède à une escalade militaire en Ukraine,
  • Il s’empare d’autant de territoires qu’il peut dans le Donbas, dans l’est de l’Ukraine, et commence à les intégrer, administrativement et économiquement dans le système administratif et financier de la Russie.
  • Il joue la carte de l’escalade économique, en restreignant l’approvisionnement mondial en nourriture et en énergie.

    Dans cette tactique, Poutine voit une arme utile pour saper la cohésion de l’Occident, qui commence à s’effriter.
  • Il pousse d’autres régions du monde, notamment l’Inde et les pays africains, à s’élever contre la poursuite de la guerre.
  • Le président russe appuie sur la division politique occidentale : plusieurs pays occidentaux, la France, la Hongrie, et l’Allemagne, semblent dorénavant plus enclins à garder la porte ouverte à la conclusion d’un accord avec Moscou et à la recherche d’une résolution pacifique de la guerre ukrainienne.

    Bien que les dirigeants occidentaux aient tenté d’afficher leur cohésion lors des sommets du G7 et de l’OTAN, de nombreux signes indiquent que les pays ont des points de vue divergents concernant les implications d’une escalade militaire contre la Russie.

    Le Premier ministre britannique Boris Johnson a été explicite en soulignant ces disparités de vue. Il a appelé les autres dirigeants à manifester un soutien clair et solide à l’Ukraine.
  • La carte la plus efficace entre les mains de Poutine est de faire constamment peur à l’Occident avec les menaces d’une confrontation nucléaire.

    Keir Giles, expert des affaires russes au Royal Institute of International Affairs (Chatham House) de Londres, a déclaré que l’escalade des menaces russes influence les décisions de ces pays et les pousse à réfléchir à deux fois avant de fournir aux Ukrainiens l’armement de pointe dont ils ont besoin pour récupérer les territoires qu’ils ont perdus et que le président Zelensky ne cesse de réclamer.

    Les références de Poutine, Medvedev et d’autres à la possession par la Russie d’armes nucléaires et à sa capacité d’atteindre n’importe quelle cible européenne ont été explicites.
  • Enfin, les pays occidentaux sont aux prises avec les ramifications économiques de la guerre, qui a fait monter les prix et affaibli le soutien aux décideurs de ces pays.

    Le président russe, lui n’est pas confronté à ce genre de problèmes, car exprimer son mécontentement conduit à l’emprisonnement, en Russie.

Poutine sait ce qu’il veut, l’Europe… moins

Poutine a une vision claire de ce qu’il veut obtenir dans cette guerre, alors que les points de vue des pays occidentaux sur ce qu’ils considéreraient comme une sortie de crise acceptable sont ambigus, contradictoires et variables.

  • Le président russe veut contrôler totalement l’Est de l’Ukraine.
  • Il veut empêcher l’Ukraine de prendre des décisions souveraines qui vont à l’encontre des intérêts de Moscou, en d’autres termes soumettre Kiev à la volonté du Kremlin.
  • Il veut mettre la main sur les réserves de gaz du sous-sol de l’Est.
  • Quant aux positions des pays occidentaux, elles vont de l’acceptation de solutions de compromis sur la Crimée et le Donbas, au refus de mettre fin à la guerre avant le retrait des troupes russes de tout le territoire qu’elles occupent depuis mars 2014.

Conclusion

Les éléments les plus importants du conflit sont l’arsenal militaire et le temps qui passe.

Cette guerre, comme toutes les guerres, ne se joue pas avec des mots mais avec des armes. Et tant que l’Occident restera réticent à fournir des armes qui pourraient modifier l’équilibre des forces en faveur de l’Ukraine, et pousser Poutine à faire face à la possibilité d’une défaite, la guerre continuera à être en faveur de Moscou.

À terme, Poutine cherche a transformer le conflit en une guerre d’usure pour les Européens, dont les populations sont de moins en moins motivées au fur et à mesure que le temps passe – et que les prix augmentent. Et le président russe ne ressent aucun besoin de s’inquiéter ou de révéler ses pertes.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Jean-Patrick Grumberg pour Dreuz.info.

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