Publié par Eduardo Mackenzie le 2 août 2022

Les conséquences pratiques de cet accord prétendument protecteur de l’environnement, lancé en 2018 dans la ville costaricienne du même nom, sont si graves pour l’économie et la paix sociale que ce débat ne peut être laissé seulement aux parlementaires (1).

La Colombie devrait suivre l’exemple du Pérou en ce qui concerne la ratification éventuelle de l’Accord d’Escazú. Le Congrès colombien devrait inviter la société civile à s’impliquer et à s’approprier cette question, comme l’ont fait les Péruviens, et à dire ce qu’ils en pensent. Ce que le Pérou a fait à propos d’Escazú est un acte de sagesse des institutions de ce pays et une leçon de démocratie pour le continent que la Colombie ne doit pas sous-estimer.

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Le 5 août 2019, en effet, le président du Pérou, Martí Vizcarra, a renvoyé la question de l’Accord d’Escazú au Congrès pour les délibérations. Au lieu de se conformer à l’exigence d’une discussion entre parlementaires, le législateur est allé plus loin et a également ouvert la discussion à la société civile : il a invité des universitaires, des entrepreneurs, des économistes, des sociologues et des écologistes à examiner les détails de cet affaire et à se prononcer.

Le 23 octobre 2020, la Commission des relations extérieures du Congrès a signalé qu’une large majorité avait rejeté l’Accord d’Escazú et que sa ratification était suspendue. La Commission a estimé que cet accord pourrait « affecter le modèle de développement durable du Pérou et le principe même de la souveraineté de l’État sur les ressources naturelles du pays ». Le 11 juillet suivant, le dossier fut définitivement archivé.

La discussion avait été animée, pluraliste et de haut niveau. Dans un total de 26 séances de débat (13 virtuelles), 49 spécialistes invités avaient pris la parole.

Deux secteurs étaient pour la ratification: les députés du Frente  Amplio et du Partido Morado, tandis que les députés de sept autres partis –Acción Popular, Frepap, Alianza para el Progreso, Podemos Perú, Somos Perú, Fuerza Popular et UPP–, étaient contre.

Gilmer Trujillo, président de la Commission, a souligné que la non-ratification ne générera pas de pertes environnementales car le Pérou « est l’un des pays leaders dans la protection environnementale ». L’opinion majoritaire était qu’Escazú, par contre, porterait atteinte à la souveraineté nationale car l’État péruvien finirait par dépendre des décisions d’une justice supranationale « qui est écologiste et droit-hommiste d’une manière extrême et pourrait paralyser les investissements ».

Concernant l’ingérence excessive des organes de la « justice supranationale », Trujillo a insisté : « Une autorité telle que la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) pourrait décider d’un investissement au Pérou. Par exemple, une ONG située à Lima, si elle veut s’opposer à une autoroute à Loreto, dira que cela affecterait l’environnement. Ensuite, elle active la justice extérieure et paralyse le projet. Et lorsque le dossier parvient à la CIDH, la messe est dite car, comme l’ont dit plusieurs participants, la CIDH a un parti pris idéologique : elle est environnementaliste et droits-hommiste extrême et non pas de manière équilibrée ».

Le 21 juin 2021, le Congrès colombien n’a pas réussi non plus à former une majorité disposée à voter en faveur de la ratification de l’accord d’Escazú. Les opposants à la ratification ont fait valoir que l’accord violait la souveraineté nationale en permettant à des juges étrangers, non élus, de prononcer des peines qui prévaudraient sur les autorités élues du pays, sur le pouvoir législatif et sur les nombreuses lois colombiennes garantissant la protection de l’environnement.

Quelques mois plus tard, le Chili est arrivé à la même conclusion. Conscient des dangers que comporte Escazu, il a agi en conséquence : le 9 septembre 2021, le président Sebastian Piñera a annoncé qu’il ne signerait pas l’accord d’Escazu. « Tel qu’il est rédigé, cet accord présente un désavantage pour le Chili », déclara Andrés Allamand, le ministre des Relations extérieures. Le journal El Mercurio a ajouté que le gouvernement « étudie le contenu des changements que la mise en œuvre de cette initiative impliquerait pour la législation environnementale chilienne et la portée interprétative de certains principes du pacte ». Ce n’est qu’après l’arrivée au pouvoir  d’un président d’extrême gauche, Gabriel Boric, 35 ans, le 11 mars 2022, que le Congrès chilien a ratifié cet accord.

Escazu a échoué

Lancé le 4 mars 2018 dans la ville costaricienne du même nom, cet accord n’a été ratifié que par 13 des 42 pays d’Amérique latine et des Caraïbes. Pire : la majorité de la population d’Amérique latine et des Caraïbes échappe aux faux « avantages » d’Escazú. En effet, sur les 659 millions d’habitants de cette immense zone géographique, qui va du Rio Grande à la Terre de Feu, seuls 244 millions sont liés par Escazú, soit un peu plus du tiers de cette population.

Il est à noter que Cuba et le Venezuela ne veulent rien savoir d’Escazu malgré le fait que leur propagande, et celle des partis communistes du continent, présentent Escazu comme une merveille. Si l’Accord est si bon, pourquoi ni Cuba ni le Venezuela ne s’y embarquent ? Pour une bonne raison : parce que ces dictatures verraient très mal que des activistes puissent s’opposer à la création ou à l’expansion d’infrastructures militaires, fluviales, maritimes, touristiques ou aux investissements étrangers dans ces pays.

Escazu est la plus récente invention de l’extrême gauche et des écologistes pour faire de l’anticapitalisme, réduire la production, ruiner les emplois et promouvoir la haine. L’objectif est de retirer aux autorités élues le pouvoir de décider ce qui peut ou ne peut pas être fait sur le territoire. Escazu a l’intention de transférer ces décisions aux les mains d’activistes ou des ONGs et, en fin de compte, à la justice spéciale de l’ONU, alléguant que les travaux « mettent en danger les communautés » ou la nature, sans en présenter aucune preuve. Victimes d’un tel renversement de la charge de la preuve, ce sont les entreprises, les particuliers et les services publics qui doivent prouver le contraire.

Le 27 juillet dernier, un vice-ministre iranien, Mohsen Kousheshtabar, a révélé que le régime de Nicolas Maduro avait « cédé un million d’hectares de terres agricoles à l’Iran sur vingt ans ». Caracas n’a pas donné de détails sur l’affaire, mais Maduro a indiqué que son gouvernement avait d’autres « fronts de coopération » avec l’Iran en matière de « pétrole, gaz, raffineries, pétrochimie et défense ». Si le Venezuela avait signé l’Accord d’Escazu, ces plans auraient couru le risque d’être mis en question ou entravés par la CIDH. Sans Escazu, les dictatures dépendantes de la Russie, de l’Iran  et de la Chine communiste pourront faire ce qu’elles veulent de leurs territoires et de leurs populations, tandis que les signataires d’Escazu verront bloqués leurs programmes de développement.

Il est évident que la CIDH n’est pas intéressée à embêter le Venezuela et Cuba avec un instrument d’ingérence comme Escazu. L’ingérence est pour les autres, pour les pays qu’il faut noyauter et affaiblir pour que le travail subversif des totalitarismes extracontinentaux soit facilité.

Messieurs du Congrès de Colombie : ouvrez le débat. Il ne suffit pas de discuter d’Escazu à huis clos. Les citoyens ont le droit de savoir pourquoi la plupart des gouvernements du continent rejette cet accord. Suivez l’exemple du Pérou.

© Eduardo Mackenzie (@eduardomackenz1) pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

(1).- C’est un Accord sur l’environnement en Amérique latine et dans les Caraïbes, parrainé par deux personnages socialistes, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, et Michelle Bachelet, Haute-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme. Sur les 24 signataires, l’Accord a été ratifié uniquement par treize: Antigua-et-Barbuda, l’Argentine, la Bolivie, le Chili, l’Équateur, le Guyana, le Mexique, le Nicaragua, le Panama, Saint-Christophe-et-Niévès, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines et l’Uruguay. Il prétend garantir la protection de l’environnement,  les communautés indigènes et les activistes. Antonio Guterres estime qu’Escazu « nous donne de l’espoir (…) pour enrayer le changement climatique, l’effondrement de la biodiversité et la pollution de l’environnement ». Cependant, les critiques d’Escazu y voient un instrument destiné à faciliter la tâche des activistes prétendument écologistes, hostiles au capitalisme et à tout ce qu’ils perçoivent comme des « projets inutiles», et disposés même à défaire des projets dont l’intérêt écologique et social est indéniable, comme le grand barrage d’Hidroituango en Colombie.

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