Publié par Guy Millière le 9 septembre 2022
Gorbatchev, gérant impuissant de l’effondrement et de la défaite de l’empire soviétique

Le décès de Mikhail Gorbatchev a suscité de nombreux commentaires qui, pour la plupart, n’ont guère de pertinence. On ne peut comprendre le rôle qui fut celui de Gorbatchev qu’en rappelant le contexte de l’époque, et cela implique de parler des Etats-Unis.

En Janvier 1981 prennent fin les années Carter. Elles ont vu la plus grande avancée de l’Union soviétique sur la planète depuis les années 1945-1950. L’Union soviétique s’est implantée en Afrique et en Amérique centrale. Elle a consolidé son emprise sur le Vietnam et envahi l’Afghanistan. En supplément, Carter a abandonné l’Iran aux islamistes menés par Khomeiny et au parti Toudeh (communiste), qui espère faire basculer le pays dans l’orbite soviétique (les ayatollahs élimineront le parti Toudeh en 1982). Les diplomates de l’ambassade des Etats-Unis à Téhéran ont été pris en otage.

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Ronald Reagan fait campagne en 1980 en parlant de la paix par la puissance. Il énonce dans le discours inaugural de sa présidence en Janvier 1981 que les dernières années de l’Union Soviétique commencent et que l’empire soviétique aura disparu en 1991. Il somme les dirigeants iraniens de libérer les diplomates américains otages à Téhéran, qui sont libérés immédiatement.  

Une fois à la Maison Blanche, s’appuyant sur les travaux de Richard Pipes, il met en place une stratégie destinée à provoquer l’effondrement de l’Union Soviétique. Il procède à un réarmement militaire des Etats-Unis qui va de pair avec une politique de baisse des impôts et de déréglementation destinée à susciter une forte croissance. Il tient en parallèle des propos destinés à invalider moralement l’Union Soviétique, qu’il appelle “l’empire du mal”, et il met en place l’Initiative de Défense stratégique (IDS) destinée à créer un bouclier anti-missile à même d’arrêter tout missile envoyé par une puissance ennemie des Etats Unis.

L’Union Soviétique tente de suivre le rythme du réarmement américain, sans y parvenir, et y consacre une part croissante de son budget, ce qui exacerbe ses difficultés économiques. Elle décrit l’IDS comme un projet belliciste : Ronald Reagan lui répond qu’avec l’IDS, les armes nucléaires soviétiques deviendront inutiles, car les Etats-Unis auront les moyens de les intercepter, mais que, dès que l’IDS sera au point, les Etats-Unis prendront la décision de se défaire de leurs propres armes nucléaires tout en demandant à toutes les autres puissances nucléaires de faire de même et de se doter de l’IDS.

Le parti communiste soviétique se trouve en très grande difficulté. Il décide de placer à sa tête un dirigeant à même de séduire le monde occidental et de l’amadouer. Il choisit en 1982 Yuri Andropov et le présente comme un amateur de jazz et de whisky très américanophile, mais les Occidentaux découvrent vite qu’Andropov a dirigé l’écrasement du printemps de Prague en 1968. Il connait dès lors une mort prématurée, et est remplacé par Konstantin Chernenko, qui ne fait pas l’affaire, et est éliminé au bout de treize mois. Gorbatchev vient ensuite, en 1985.

Il est chargé de réussir là où ses deux prédécesseurs ont échoué et d’attirer des capitaux occidentaux pour sauver l’économie soviétique. Il met en place un programme appelé перестройка (reconstruction), censé décentraliser l’économie soviétique, mais il n’accorde pas la possibilité que se créent des entreprises privées, et un autre programme appelé гласность(transparence), qui permet un peu de liberté de parole (je dis un peu car le goulag n’avait pas disparu sous Gorbatchev).

Il ne parvient pas à attirer les capitaux escomptés et les difficultés économiques soviétiques s’accroissent. La liberté de parole permet aux citoyens soviétiques d’exprimer leur mécontentement face à une situation de plus en plus difficile. L’Union Soviétique ne peut assez vite plus tenir en main l’empire qu’elle avait constitué. Celui-ci commence à s’effondrer avec la chute du mur de Berlin et du régime d’Allemagne de l’Est en 1989. L’Union Soviétique s’effondre deux ans plus tard, à la date prévue par Ronald Reagan. La guerre froide s’achève par la défaite de l‘empire soviétique.

L’effondrement de l’Union Soviétique, et la défaite de l’empire soviétique ont été provoqués par la stratégie mise en place et utilisée par Ronald Reagan. Mikhail Gorbatchev a tout juste été le gérant impuissant d’un effondrement et d’une défaite qu’il a subis, mais n’a en aucun cas voulus ou conçus.

Il est très important de rappeler cela : un régime totalitaire ne s’effondre jamais grâce à la bienveillance d’un de ses dirigeants. Un empire totalitaire ne tombe que s’il est vaincu. Seule la force, la détermination et la vigilance constante permettent de faire reculer le totalitarisme et les dictatures menaçantes.

Les dirigeants européens ne l’ont pas compris à l’époque, ont été séduits par Gorbatchev et ont méprisé Reagan. N’ayant pas compris, ils n’ont tiré aucune leçon de ce qui s’est passé à l’époque et ont imaginé pouvoir tirer les dividendes de la paix.

Ils n’ont pas compris jusqu’à ce jour, ce qui explique qu’ils se soient trouvés fort dépourvus quand Poutine est passé à l’offensive.

Il y eut à l’époque une gorbymania. C’était idiot, mais ce n’était pas très grave : Gorbatchev n’entendait pas déclarer une guerre et ne l’aurait pu qu’en conduisant son pays à la destruction. Gorbatchev était un dictateur communiste dépourvu de bellicisme et largement paralysé.  

Il y a aujourd’hui chez certains une putinmania, et c’est bien plus grave, car Poutine, lui, est en guerre.  Poutine est un dictateur post-communiste criminel et imprégné de bellicisme et de cruauté.

Quand, ce qui était un accompagnement de l’IDS, Reagan a décidé de l’installation de missiles Pershing en Europe, pour annihiler la menace constituée par les SS 20 soviétiques, des Européens à l’esprit soumis ont défilé en criant : “plutôt rouges que morts”.

Les adeptes de la putinmania aujourd’hui incarnent l’esprit soumis de 2022.

L’esprit soumis de 2022 est plus ridicule encore que l’esprit soumis des années Reagan. La Russie n’est pas l’Union Soviétique. C’est un pays sous-développé, rongé par la corruption, soumis à un dictateur qui a dépensé des sommes immenses dans le secteur de l’armement, et qui s’est lancé dans une guerre qu’il ne peut pas gagner et qui va accélérer le déclin russe, déjà enclenché. Comme d’autres pays sous-développés, la Russie produit que des matières premières. Son armée est en lambeaux et est très défectueuse, dépourvue désormais d’armement moderne, et dotée d’armes nucléaires qu’elle ne peut utiliser sans subir les conséquences de la destruction mutuelle assurée.

Si Poutine pensait au peuple russe, il aurait agi depuis vingt ans pour le développement économique de la Russie, mais c’est un dictateur, oui, et les dictateurs n’ont que faire de leurs peuples et les considèrent comme des outils au service de leur volonté de puissance. 

Les adeptes de la putimania ne sont pas “pro-russes”, et je n’utilise jamais ce terme : ils soutiennent un dictateur qui envoie des milliers de jeunes Russes vers la mort, et qui a enlisé son pays dans le sous-développement.

© Guy Millière pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

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