On ne saura sans doute jamais exactement qui a détruit les gazoducs Nord Stream 1 et 2. Un politicien polonais, Radek Sikorski, a remercié les Etats-Unis de manière hâtive et, tout en étant un ennemi de la Russie, a repris le discours russe, tout comme l’ensemble de ceux qui idolâtrent aveuglement le dictateur criminel russe en Europe. Les commentateurs américains, très minoritaires (Tucker Carlson, Douglas McGregor, Steve Turley), qui penchent eux aussi du côté du dictateur criminel russe accusant eux aussi les Etats-Unis, ce qui leur vaut d’être cités élogieusement sur la télévision d’Etat russe.
Je ne partage pas du tout cette position. La destruction des gazoducs va nettement accentuer les problèmes énergétiques de l’Europe occidentale au cours de l’hiver qui vient et tout particulièrement ceux de l’Allemagne. Un régime et un seul a intérêt à accentuer les problèmes énergétiques de l’Europe occidentale, et tout particulièrement ceux de l’Allemagne, la Russie de Vladimir Poutine.
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Vladimir Poutine est dans une situation désespérée. L’un des seuls fragments d’espoir qui lui restent est que l’Europe fléchisse, et quel meilleur moyen de faire fléchir l’Europe que de la plonger dans une crise très grave ?
L’administration Biden, elle, n’a aucun intérêt à ce que l’Europe fléchisse et soit dans une crise très grave, strictement aucun. Ceux qui disent que la Russie ne détruirait pas ses propres gazoducs et aurait pu espérer les réouvrir ultérieurement refusent de voir que Poutine mène une politique de la terre brûlée et semble aujourd’hui prêt à tout. Ils refusent de voir aussi que les gazoducs sont, à hauteur de cinquante pour cent, la propriété d’entreprises occidentales.
La fuite en avant dans laquelle Poutine s’est lancé le conduit à envoyer sur le front ukrainien des hommes souvent âgés, réduits au statut de chair à canon: des gens qui n’ont aucune formation militaire, savent à peine tenir un fusil et à qui on donne des armes rouillées et inutilisables parce qu’il n’y en a pas d’autres à leur donner, des gens qui ne veulent pas du tout aller à la guerre et qui savent tout à la fois que la guerre est perdue et que c’est une guerre menée sur la base des mensonges de Poutine et qui savent qu’il n’y a aucun “nazi” en Ukraine. Environ 300.000 hommes russes ont réussi à quitter la Russie pour éviter d’aller à la guerre, et sont allés partout où cela leur a été possible, par avion vers Istanbul et Dubaï, en voiture vers la Géorgie, la Finlande, le Kazakhstan et même vers la Mongolie.
L’armée russe continue à reculer dans une atmosphère de débâcle et vient d’abandonner Lyman, dans l’oblast de Donesk, abandon qui coupe de manière quasiment totale l’approvisionnement des troupes russes encore présentes dans l’oblast. Les crimes de guerre découverts s’ajoutent aux crimes de guerre découverts. Le père Patrick Desbois, qui a fait un travail remarquable et important sur la shoah par balles, recourt à des volontaires pour recueillir des données sur les crimes de guerre commis par l’armée russe.
Les pseudo référendums d’annexion ont eu lieu et ont donné des résultats dignes de ceux des élections en Union soviétique sous Brejnev, n’ont été en aucun cas des référendums et ne seront reconnus par personne, sauf, peut-être par la Corée du Nord, la Syrie, l’Iran des mollahs et le Zimbabwe. Poutine, comme dans les temps soviétiques a organisé une grande cérémonie au Kremlin pour rendre les annexions officielles et tous les dignitaires du régime ont été convoqués pour remplir la salle et applaudir. Ils ont fait ce qu’on leur demandait de faire, mais ils avaient des mines d’enterrement : aucun d’eux n’ignore la réalité de la situation. Des Russes ont été amenés par autocars entiers sur la place Rouge et ont choisi librement : la place Rouge ou la prison. Ils ont choisi la place Rouge.
Poutine a prononcé un discours disant que les régions d’Ukraine qu’il prend avoir annexées seront russes “pour toujours” : il ne peut ignorer lui-même que le “toujours” en question durera tout au plus quelques mois. Il a ajouté des diatribes contre l’Occident, qu’il a décrit comme “satanique”, contre “l’impérialisme américain”, contre le colonialisme occidental : il veut tenter de trouver des soutiens dans le tiers-monde anti-occidental et au sein des extrêmes droites européennes. Il ne trouvera de soutien dans aucun des pays du tiers monde qui comptent et qui auraient les moyens de l’aider. La Chine continue de le soutenir comme la corde soutient le pendu, et l’Inde garde ses distances et achète des ressources énergétiques russes à bas prix. Certaines extrêmes droites européennes le soutiendront verbalement, ce qui ne changera rien à la situation. Il a montré qu’il se considérait en guerre contre le monde occidental : cela lui permettra de dire quand il sera vaincu qu’il n’a pas été vaincu par l’Ukraine, mais par le monde occidental entier et par l’OTAN. Il niera jusqu’au bout les qualités, immenses, de l’armée ukrainienne et le rôle, majeur, de Volodymyr Zelensky.
L’économie russe subit de plus en plus nettement l’effet des sanctions occidentales. Le contrat politique que Poutine avait passé avec la population russe est désormais rompu : il prétendait protéger les Russes et accroitre leur niveau de vie pourvu qu’ils se taisent. Envoyer des Russes à la mort pour rien est le contraire d’une protection. Le niveau de vie russe baisse. Le faux tsar Poutine est nu. Les Russes voient sa nudité. Les propagandistes de la télévision russe commencent à critiquer le régime et parlent de défaite, ce qui montre qu’ils n’obéissent plus à leur maitre. Et ce n’est pas bon signe pour celui-ci.
Poutine a parlé de cessez le feu et a demandé à négocier. Zelensky a refusé un cessez le feu qui figerait la situation : l’armée ukrainienne est en train de l’emporter, et Zelensky n’offrira aucun répit à Poutine. Zelensky n’acceptera aucune négociation, et veut juste une reddition de Poutine : la restitution à l’Ukraine de tous les territoires ukrainiens occupés par la Russie, le paiement de dommages de guerre à l’Ukraine par la Russie, et l’addition dépasse 700 milliards de dollars. Il demande aussi une punition de Poutine à l’échelle internationale pour les crimes de guerre commis. Il vient de demander une adhésion accélérée de l’Ukraine à l’OTAN. Il ne l’obtiendra pas dans l’immédiat, et pas avant que la guerre soit achevée, mais ensuite, il l’obtiendra sans doute, et l’Ukraine a toute sa place dans l’OTAN et dans le monde libre.
Nul ne peut savoir comment la guerre s’achèvera, mais il sera difficile pour Poutine de survivre à la défaite. Je l’ai déjà dit, un dictateur vaincu finit, en général, très mal. Poutine le sait. Il lui reste à faire peur aux Européens et à espérer qu’ils auront très froid lors de l’hiver qui vient et que, disais-je, les dirigeants européens fléchissent. C’est un mince espoir.
Poutine, comme tant de dictateurs avant lui, a commis l’erreur de trop. Il comptait sur la faiblesse complice de Biden et ne s’attendait pas à ce que l’Ukraine résiste, a ce que Zelensky se conduise en homme d’Etat, et à ce que Biden fasse un virage a cent quatre-vingts degrés. Il se rêvait successeur de Pierre le Grand et de Joseph Staline. Il pourrait finir comme Lavrentiy Pavlovich Beria. Il imaginait redonner de la grandeur à la Russie. Il pourrait être son fossoyeur.
Il a largement détruit l’armée russe et il l’a conduite vers l’humiliation et l’ignominie. Qui pourra encore imaginer qu’elle est la deuxième armée du monde ? Qui pourra oublier les atrocités commises à Bucha et ailleurs en Ukraine ?
Il a gravement détérioré l’économie russe et lui a fait perdre les marchés occidentaux. Il est devenu infréquentable pour la quasi-totalité des dirigeants du monde civilisé, et meme pour nombre d’autres dictateurs.
Il lui reste Kim Jong-un, Ebrahim Raissi, Bachar al-Assad, Emmerson Mnangagwa.
Les chefs militaires russes ont toutes les raisons de lui en vouloir, tout au moins ceux qui n’ont pas été tués en Ukraine. Jusqu’à quand lui resteront-ils fidèles ? De nombreux oligarques ont aussi toutes les raisons de s’éloigner de lui. Pourront-ils tous finir “suicidés” ? Les mois à venir pourraient être dangereux pour lui. Il a tant détruit et tué que s’il lui arrivait malheur, très peu de gens le pleureraient. Vraiment très peu de gens.
Le pape supplie Poutine d’arrêter. Si Poutine s’arrête, il tombe immédiatement. Il ne s’arrêtera que s’il est renversé. Le pape demande à Zelensky d’être ouvert à des propositions de paix. Zelensky a énoncé ses propositions de paix. Elles sont inacceptables pour Poutine, et seront peut-être acceptables par son successeur, si Poutine est renversé.
Poutine est sur un siège éjectable et sera vraisemblablement éjecté. Il veut tenir jusqu’à l’hiver et voudrait reprendre l’offensive au printemps. Mais il n’aura, au printemps, pas d’armes modernes et pas de soldats prêts à combattre. Il n’utilisera pas d’arme atomique stratégique, et s’il utilise une arme nucléaire tactique, toute la flotte russe de la mer Noire sera détruite par les forces de l’OTAN quelques minutes plus tard. Poutine veut-il que toute la flotte russe de la mer Noire soit détruite ? On le saura bientôt.
L’Ukraine est en train de gagner la guerre, et Poutine a commencé à la perdre dès le 24 février 2022. L’armée ukrainienne était prête. Zelensky aussi.
© Guy Millière pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.
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Épique !
En tout cas, chapeau les Ukrainiens. Je n’ose pas imaginer ce qui se passerait si on nous envahissait de la même façon.
Poutine a découvert à ses dépens qu’il existe un patriotisme ukrainien. Les Ukrainiens gardent le souvenir de l’Holodomor, le génocide par la faim perpétré contre eux par Joseph Staline dans les années 1930. Poutine a réveillé en eux le souvenir de Joseph Staline.
Bonjour Mr Millière,
Il me revient en tête une question à laquelle je n’ai jamais lu de réponse : quelle était d’après vous l’idée des responsables de l’OTAN en souhaitant faire entrer l’Ukraine dans l’organisation ( contrairement à ce qu’avait promis Bush père )? Y avait t-il une vision à long terme derrière cela et si oui, laquelle ?
L’entreée d’un pays dans l’OTAN se fait sur la base de la demande formulée par le pays qui formule la demande. Les. pays membres de l’OTAN doivent ensuite décider à l’unanimité si le pays demandeur peut entrer dans l’OTAN. Ce que peuvent souhaiter ou non les dirigeants des pays membres de l’OTAN s’exprime par leur décision d’accepter ou de refuser. Considérant que l’Ukraine a toute sa place dans l’OTAN, toutes les administrations américaines depuis 1991, démocrates ou républicaines, ont dit qu’elles ne refuseraient pas. La dernière fois que l’Ukraine a depose une demande, c’était en 2008, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy ont refusé, et l’Ukraine n’est pas entrée. Si l’Ukraine était dans l’OTAN, Poutine n’aurait pas envahi l’Ukraine et Merkel et Sarkozy ont donc une lourde responsabilité dans ce qui se passe. Une promesse verbale de James Baker (pas George Herbert Walker Bush), n’a aucune valeur de contrat, et Poutine le sait. Il tient un discours de propagande que ses agents d’influence colportent dans le monde occidental. L’OTAN est une organisation défensive qui protège ses membres et ne menace personne. Les dirigeants de l’Ukraine en 1994 ont cru les dirigeants russes et ont accepté de se défaire de leurs armes nucléaires en échange de la garantie de l’inviolabilité de leurs frontières. Trois pays se sont portés garants de cette inviolabilité, les Etats-Unis, le Royaume Uni et la Russie. Cela a fait l’objet d’un traité, qui a valeur de contrat: le Memorandum de Budapest. Poutine a violé le contrat en 2014 et en 2022. L’Ukraine a le droit de demander à entrer dans l’OTAN. Cela se fera quand Poutine sera vaincu.
Merci beaucoup pour cette longue et complète réponse !
Une fois Poutine disparu de la scène internationale, serait-il envisageable que la Russie demande à entrer à son tour dans l’OTAN ?