Publié par Eduardo Mackenzie le 10 octobre 2022

Gustavo Petro croyait qu’il allait être félicité par Washington, que son plan de « paix totale » allait être accepté par Antony Blinken.

Lundi dernier, dans son entretien à Bogotá avec le Secrétaire d’État, Petro a découvert que le gouvernement américain n’était pas tout à fait d’accord avec ses intentions. L’ancien guérillero du M-19, devenu le nouveau président de Colombie, a été surpris : son programme de transformation narco-socialiste de la société colombienne et sa demande de « mettre fin à la guerre irrationnelle contre la drogue » sont loin de plaire à l’administration américaine. En plus, Petro avait mal commencé : il a raté l’occasion qu’il avait de saluer  Joe Biden à New York en arrivant avec une heure de retard à la réception offerte par le président américain à plus de 100 chefs d’Etat lors de l’Assemblée générale de Nations Unies.

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Blinken n’a pas épilogué et a ratifié, au contraire, au Palacio de Nariño, la validité des pactes entre les deux pays sur l’extradition des trafiquants de drogue : cela doit continuer, a souligné Blinken, car ce mécanisme « vise à profiter à la justice des deux pays, aux victimes et aux sociétés ». Kristina Rosales Kostrukova, porte-parole du Département d’État, a insisté devant la presse : « Nous maintenons toujours notre processus d’extradition, il n’a pas changé du tout. C’est un outil important pour démanteler les plus grandes organisations criminelles transnationales ». Lors de la réunion, la demande de Petro de retirer Cuba de la liste américaine des pays qui exportent le terrorisme a également été rejeté, ainsi que son idée surprenante de mettre fin à l’éradication des cultures illicites de coca en Colombie.

La Colombie était la première étape de la tournée de Blinken en Amérique latine (il s’est rendu ensuite au Chili et au Pérou). Le risque géopolitique que représente l’arrivée au pouvoir colombien d’un ancien guérillero marxiste non repenti, avec des liens avec la  dictature de Maduro et avec le camp international que Poutine entend diriger, explique sans doute cette visite à Bogotá.

Bien que la délégation américaine ait déclaré que Washington soutiendrait les plans de Petro visant à parvenir à une « paix totale », Kristina Rosales a clairement indiqué que les États-Unis continuaient à caractériser le mouvement narco-terroriste ELN, principal bénéficiaire d’éventuels accords de « paix » avec Petro à La Havane, comme « une organisation terroriste étrangère ». Blinken avait prévenu Petro que cette « paix » ne pouvait consister en une amnistie supplémentaire pour des terroristes puisque « la paix doit être inclusive, car l’équité doit être au premier plan de tout le processus ». Cela aurait pu être une réponse de Blinken à la menace contre les producteurs agricoles colombiens que Petro accuse d’être les coupables du « trafic de drogue » pour ne pas produire assez : « La Colombie, dit Petro, est un pays trafiquant de drogue car qu’elle ne produit pas d’agriculture » (1).

Au sujet d’une éventuelle libération d’Alex Saab (2), la porte-parole de Blinken a laissé l’affaire dans les limbes : « Nous n’avons aucun commentaire ni aucune information sur l’affaire Alex Saab. C’est le ministère [américain] de la Justice qui s’en occupe. »

Derrière les interventions bien calibrées d’Antony Blinken, qui mêlait subtilement des revendications acceptables de Petro – comme « sauver la jungle », « lutter contre le changement climatique », « générer des énergies renouvelables et alternatives » -, avec des rejets de ses revendications centrales, on peut percevoir l’intention de Washington de maintenir les relations bilatérales en bon état et d’établir des domaines de coopération qui empêchent les pires débordements en Colombie.

Les gesticulations de Petro devant l’Assemblée générale de l’ONU à New York ont ​​évidemment attiré l’attention de la Maison Blanche. Le gouvernement démocrate semble avoir enfin compris que tout le continent américain est infecté, de manière inégale, par la désastreuse idéologie castro-chaviste et que l’élection de Gustavo Petro en Colombie, et un éventuel retour de Lula au Brésil le 30 octobre, aggravera cette maladie et créera une situation très déstabilisante dans le monde libre.

C’est pourquoi il n’est pas surprenant que Gustavo Petro ait été contraint de signer, quelques heures après la rencontre avec Blinken, une déclaration dans laquelle 44 pays condamnent sans équivoque l’agression de la Russie contre l’Ukraine et les crimes de guerre que Poutine a commis en Ukraine (massacre de civils, torture et assassinat de soldats capturés, déplacement forcé et disparition de civils). Le document, qui a été remis au Conseil de sécurité de l’ONU, ajoute : « Nous condamnons dans les termes les plus forts les faux ‘référendums’ illégaux de la Russie en Ukraine et la tentative d’annexion illégale annoncée de Donetsk, Kherson, Lougansk et Zaporijia en Ukraine. Nous exhortons la communauté internationale à condamner la tentative d’annexion et à se joindre à nous pour soutenir l’indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues. »

Gustavo Petro avait reçu il y a des mois un salut effusif de Poutine. Rien d’étrange à cela : le chef du parti Colombia Humana avait renoncé à critiquer l’agression de Moscou contre l’Ukraine : «Ne faites pas pression sur nous pour nous aligner sur les champs de bataille (…) Laissons les peuples slaves se parler », avait-il répondu aux journalistes. Par contre, la Colombie avait signé à l’Assemblée générale des Nations Unies, sous le gouvernement d’Ivan Duque, avec 141 pays, le 2 mars 2022, la résolution condamnant l’invasion russe de l’Ukraine.

Lors de sa campagne présidentielle, Gustavo Petro a affiché sa sympathie pour Vladimir Poutine, celui qui proclame que « la Russie n’a pas de frontières ». Au lieu de dénoncer l’invasion de l’Ukraine, le Colombien a récité la propagande russe en attribuant la responsabilité de cette guerre aux États-Unis et à l’Union européenne. Petro a montré le mépris que lui inspire l’Ukraine en criant à un journaliste : « Au diable l’Ukraine ! Nous devons nous consacrer ici à la Colombie, à comment pouvons-nous nous sauver ! ».

Dans son discours devant l’ONU, en plus de lancer ses habituelles sottises solennelles (3), Petro a récidivé : il a continué à défendre Poutine et a accusé les pays capitalistes, et non la Russie, d’« envahir » l’Ukraine « au nom du pétrole et du gaz ». La signature de la déclaration des 44 pays qui disent la vérité sur ce qui se passe en Ukraine montre la reculade honteuse que Gustavo Petro a dû faire pour ne pas aggraver son cas devant la Maison Blanche, l’Union européenne et l’OTAN.

© Eduardo Mackenzie (@eduardomackenz1) pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

  • 1).- https://www.kienyke.com/politica/antony-blinken-gustavo-petro-drogas-estados-unidos-refugiados-venezolanos
  • (2).- Alex Saab, 49 ans, est considéré comme «l’homme de paille» de Nicolas Maduro. Saab fut arrêté en juin 2020 au Cap-Vert lors d’une escale de son avion privé en route vers Téhéran. Il a été extradé le 16 octobre 2021 vers les Etats-Unis. Le régime de Caracas le présente comme un « diplomate vénézuélien » et demande sa libération.
  • (3).- Comme, par exemple, cette phrase extravagante digne de Zarathushtra : « Nous aussi, nous sommes en guerre contre la planète. Sans paix avec la planète, il n’y aura pas de paix entre les nations. »

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