Publié par Eduardo Mackenzie le 1 mars 2023
Susana Boreal : le poids du mensonge

Je ne sais pas si le travail parlementaire de Susana Gómez Castaño, alias Susana Boreal, est brillant.

Je ne sais pas si elle propose des idées géniales ou simplement raisonnables lors des débats à la Chambre. Ou si, du moins, elle accède à ces instances de délibération en pleine jouissance de ses facultés intellectuelles et en pleine forme physique, comme devrait le faire, en principe, tout représentant élu du peuple colombien.

Depuis que j’ai écouté ses déclarations insolites du 23 février dernier, arborant un timide sourire mais avec le poing levé j’ai des doutes à ce sujet.

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Ce jour-là, elle a déclaré qu’elle était une consommatrice habituelle de marijuana. Plus précisément, qu’elle “aime” se faire un joint tous les jours pour être bien et, surtout, pour montrer que ce geste contribue à la « transformation culturelle dont nous avons besoin dans ce pays ».

C’est la première fois qu’un membre du Congrès colombien prend la parole au Capitole national pour inviter à la consommation massive de cannabis en tant qu’une qu’étape vers le progrès “culturel”.

J’entends ces mots sans surprise, car je sais à quel groupe politique elle appartient, et je vois comment, chaque jour, une volonté de détruire la Colombie tente de s’imposer. Mais j’observe cela avec une grande inquiétude quant à l’état spirituel de certains de nos membres du Congrès et des individus qui croient avoir la charge du gouvernement national. Et je me dis que si la « transformation culturelle » d’un pays consiste à demander à la jeunesse de se vautrer dans le bourbier de la toxicomanie, au motif que cette activité est “ludique” et sans conséquences néfastes, comme l’assume la députée (« rien à voir [cette consommation] avec ce que nous sommes en tant que personnes »), nous sommes confrontés au risque d’une “transformation” très étrange du pays qu’il faudra vaincre avec détermination et à court terme.

« Je n’ai pas peur de le dire : la marijuana n’a vraiment rien à voir avec qui nous sommes en tant que personnes », a lancé la député Susana Gómez.

Face à une telle affirmation définitive, il nous faut aller au-delà du sarcasme facile et apporter la contradiction, sans laisser de telles sornettes faire leur chemin comme s’il s’agissait de vérités ou de conclusions scientifiques.

Mme Gomez, fumer de la marijuana a des conséquences désastreuses pour les gens, en particulier pour les enfants, les adolescents et les jeunes adultes.

Vous le savez, Madame la député et pourtant vous dites le contraire, comme si quelqu’un vous avait chargé de faire cette propagande abjecte.

Le manque de motivation, le manque de concentration, des troubles de la perception, des problèmes de mémoire et de mauvais résultats scolaires apparaissent toujours dans les groupes étudiés par les médecins et les chercheurs. Les professionnels de santé affirment qu’une telle consommation chez les étudiants génère « des syndromes dépressifs transitoires, de la paranoïa, des crises d’angoisse, des difficultés motrices et cognitives », ainsi que « des effets psychotiques et des hallucinations visuelles et auditives ».

Il y a plus de huit ans, l’European Respiratory Journal révélait qu’une dose de tétrahydrocannabinol (THC), à dose égale, est 20 fois plus dangereuse que l’alcool ou la cigarette.

On sait depuis des années que la consommation de cannabis provoque des troubles graves voire des drames dans les foyers, notamment dans les familles pauvres, car celles-ci ont plus de difficultés que les autres pour que leurs enfants dépendants rattrapent leurs retards d’apprentissage.

En France ces faits sont connus, puisque la consommation de cannabis chez les jeunes est une véritable plaie nationale. Les hôpitaux et les psychiatres pour adolescents ont tendance à dénoncer ce fléau, au lieu de se taire et d’alimenter la fausse légende, diffusée par les mafias et les dealers, sur l’innocuité du cannabis.

Et ce que les scientifiques découvrent est grave : chez les adolescents, la consommation de marijuana crée des risques de bouffées délirantes et de psychoses irréversibles, en particulier de schizophrénies.

Le cannabis est de loin le produit illicite (1) le plus connu en France : 46 % de la population adulte, entre 18 et 64 ans, en a consommé. Moins connues sont les études sur les dérivés synthétiques du cannabis et leur impact négatif sur le secteur des jeunes. En revanche, les pays nordiques sont durs avec le cannabis et le nombre d’usagers est relativement faible.

Un spécialiste français, le professeur Giovanni Marsicano (2) révèle : « Les cannabinoïdes sont des analgésiques, mais ils inhibent la capacité du corps à initier le mouvement. Cet effet cataleptique peut être dangereux ! Plus généralement, l’effet du cannabis est fortement dépendant de l’individu. Une proportion faible mais réelle d’usagers adolescents connaîtra des crises psychotiques, soit immédiatement, soit à l’âge adulte. D’autres utilisateurs souffrent de pertes de mémoire à long terme ou de déficits cognitifs. Et entre 10 et 20 % en font une consommation incontrôlée, signe d’une forme d’addiction, même si comparé à la nicotine, à l’alcool ou aux opiacés, le cannabis est l’une des drogues dont l’abus est le moins addictif. « 

Le Dr Marsicano ajoute qu’en fin de compte, l’effet dépend de la dose. « Le THC a presque toujours des effets biphasiques : passé un certain seuil, ses effets s’inversent. Ainsi, il peut augmenter ou inhiber la locomotion, supprimer l’appétit et augmenter l’anxiété, et même conduire au retrait social. » (…) « Nous avons montré qu’un excès de THC affaiblit le métabolisme des astrocytes, les cellules en forme d’étoile du système nerveux central qui transforment alors moins de glucose en lactate, principale source d’énergie des neurones. »

Une nouvelle étude menée en France auprès de jeunes volontaires a montré que « 44% des personnes interrogées avaient essayé le cannabis au moins une fois dans leur vie, avec un âge moyen d’initiation autour de 16 ans » et qu' »une personne sur cinq j’avais déjà vécu un effet psychotique pendant l’une de ces expériences. »

L’ambition des trafiquants est de cacher cette réalité et d’abuser des prétendus avantages « thérapeutiques » de certaines formes de cannabis, notamment chez les patients souffrant d’insomnie et de soulagement de la douleur dans les maladies graves. En réalité, dit Marsicano, « les effets positifs sont souvent compensés par les négatifs ».

Créer par la loi un « cadre réglementaire », comme celui débattu ces jours-ci par le Congrès colombien, pour que l’usage de la marijuana soit autorisé aux “adultes” est inutile. Ce projet de loi est une copie de ce qu’a fait le gouvernement du Canada, en octobre 2018, où il a tenté d’empêcher les mineurs d’avoir accès au cannabis pour « protéger la santé et la sécurité » de ceux-ci.

Toutefois, les échecs ont été si grands que deux ans après cette légalisation, les mêmes jeunes se sont organisés pour alerter « par des jeunes pour des jeunes » sur les dangers qui couraient du fait des faibles barrières d’accès à cette substance.

La loi canadienne imposait théoriquement des « sanctions pénales sévères » à ceux qui vendent ou fournissent du cannabis à des jeunes « ou utilisent des jeunes pour commettre une infraction liée à la marijuana ». Une telle mesure a créé une porosité pour les jeunes et les enfants. En réalité, légaliser pour certains, c’est permettre cela à tous. C’est ce qui se passe dans les pays où on a appliqué une telle approche.

La consommation de drogues chez les adultes est loin d’être une panacée. Ils vivent et provoquent aussi des drames comme celui produit ce 10 février en France : un célèbre membre du show-business a lancé sa voiture contre une autre sur une autoroute : un bébé à naître de 7 mois est décédé, deux autres personnes (dont un enfant de 6 ans) ont été deux semaines entre la vie et la mort. Et hier, le responsable du violent accident, a eu un accident vasculaire cérébral.

Le projet de loi colombien semble vouloir mettre de côté la santé des jeunes et des adultes et plutôt créer des solutions pour les narcotrafiquants : il donne la priorité à la création d’un cadre légal pour faciliter le travail quotidien avec « les semences, les cultures, le transport, le stockage, la transformation, l’exportation, le conditionnement, la publicité, la vente, le transport et la consommation de fleur de cannabis et de ses dérivés à usage adulte ». Et pour consoler la galerie, il inclut des formules rhétoriques sur « les politiques de soins, les droits de l’homme et le bien-être comme composante essentielle de la protection de l’usager ».

Bien sûr, la recherche scientifique sur les composés actifs présents dans le cannabis doit continuer pour trouver de vraies solutions médicales, à condition que la population d’enfants, de jeunes et d’adultes ne soit pas exploitée comme des cobayes.

Ce qui est nouveau, aujourd’hui, c’est que depuis le Capitole national, une députée lance des invocations irresponsables et laxistes sur un grave problème de santé publique qu’elle semble absolument ignorer. Mais puisque le mot d’ordre du nouveau gouvernement de Gustavo Petro est de faire sauter, entre autres, les infrastructures de santé publique colombiennes, les gestes de Mme Gómez/Boreal ne sont pas un hasard et tombent au bon moment exigé par les Petristas et leurs tristes complices parlementaires.

© Eduardo Mackenzie (@eduardomackenz1) pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

(1).- En France, la consommation de cannabis est interdite par la loi du 31 décembre 1970.

(2).- Directeur de l’équipe de neuroadaptation au Neurocentre Magendie de Bordeaux (unité Inserm 1215).

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