Publié par Dreuz Info le 22 avril 2023

Gouvernement du peuple ou gouvernement des juges ?” De Pierre Lurçat, avocat, écrivain

Dans ce petit livre très dense et très pédagogique, Pierre Lurçat nous éclaire sur la crise que traverse Israël : les rapports entre le gouvernement du peuple (élu par le peuple) et le gouvernement des juges. L’étude du cas Barak est particulièrement éclairante sur les dérives d’une Cour suprême qui outrepasse ses droits et les infléchit dans une direction politique et idéologique qui excède son rôle.

On sait que la décision de la réforme judiciaire portée par le Premier Ministre B. Netanyahu a suscité une tempête de la gauche israélienne : manifestations, appels à démission, « révolution », « renversement de régime » etc. Il s’agit donc de comprendre les enjeux de cette réforme et pourquoi elle suscite l’ire d’une partie de la population, certes minoritaire, mais qui occupe bruyamment la sphère médiatique.

Après nous avoir donné un aperçu du système judiciaire en vigueur en 1948, date de la création de l’État d’Israël, celui-ci reposant sur l’héritage du Mandat Britannique, nous comprenons que la Cour suprême exerçait alors sa fonction   dans « la conception classique du droit ». Or, en 1992, avec l’arrivée du Juge Aharon Barak à la tête de la Cour suprême, un changement drastique va s’opérer, à savoir l’irruption des « Droits de l’homme » au sein même de cette cour, avec le changement de nature concernant la justice, que cela a entraîné.

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Ce changement n’est pas étranger à ce qu’il se passe en France, même si nous avons une Constitution, comme dans les instances européennes : « la Cour européenne des Droits de l’homme », qui est fortement influencée par la dérive de ces droits de l’homme qui s’imposent en Occident.

La Cour de Justice israélienne a été polluée par cette idéologie, en faisant passer les « droits de l’homme » au premier plan, droits qui seraient mis en danger par le pouvoir politique de la Knesset. En France on appelle ça « le pouvoir des juges », même si tous les juges ne versent pas dans cette idéologie. On comprend bien que c’est l’interprétation de la loi qui est en question.

A cet égard, Pierre Lurçat analyse minutieusement la personnalité du juge Barak et sa vision très particulière de la justice. Celui-ci explique : « En tant que juristes, nous ne sommes pas limités à l’interprétation et à l’application du droit existant… Nous sommes les architectes du changement social. Nous avons les aptitudes nécessaires pour construire un système juridique meilleur et plus juste. Nous ne voyons pas notre rôle comme se limitant à la technique juridique, mais comme incluant celui de politique juridique ».

On ne peut être plus clair ! C’est toujours au nom du Bien que la vocation du juge n’est pas seulement de rendre la justice, mais d’en faire une arme politique, au service d’une idéologie de gauche.

Les « Droits de l’homme » seraient donc une nouvelle religion. Et Pierre Lurçat de commenter la vision du juge Barak concernant la démocratie : « Dans la vision d’Aharon Barak, la démocratie n’est pas seulement une forme de régime politique, elle possède un contenu « substantiel », à savoir un ensemble de droits qui sont au-dessus de l’ensemble des lois et qu’il appartient au juge de protéger (qu’il désigne par l’expression de « notions fondamentales du système. »)

Ainsi les « droits » seraient au-dessus des lois ? Tout cela à la discrétion du juge… C’est une perversion totale de la justice qui introduit le sentiment, l’humanisme, la prise en compte de la condition sociale et familiale du prévenu, toutes choses qui relèvent de l’appréciation des jurés. Nous connaissons ça en France à l’égard des « étrangers » par exemple, qui ne connaissent pas les codes de la société d’accueil ! De ce fait, peut-on les punir pour un crime, un viol ? Nous assistons à une perversion du droit. Pour un peu, le criminel devient une victime. C’est exactement la thèse de Victor Hugo lorsqu’il écrit : « Le dernier jour d’un condamné »[1]. La victime l’est doublement : de son bourreau et de la justice qui ne pense qu’à la rédemption du criminel.

On ne sera donc pas surpris d’apprendre que le juge Barak est un homme de gauche. Et, pour faire passer sa conception tendancieuse de la justice, il fallait aussi s’entourer de juges d’origine ashkénaze, laïcs et de gauche.

Une vision bien particulière de la démocratie.

Selon « L’esprit des Lois » de Montesquieu, la démocratie est définie comme un régime de séparation des pouvoirs. Pour Barak, « le juge exerce un pouvoir qui excède et supplante celui des deux autres pouvoirs, le législatif et l’exécutif, en vertu de son droit de regard et de censure sur l’ensemble des actes et décisions pris par ces deux derniers. Il n’existe en fait, aux yeux de Barak, aucun « domaine réservé » ni au législatif, ni à l’exécutif. »

Ainsi, le droit est omniprésent et envahissant ; il occupe pour ainsi dire tout l’espace public et privé. Il dit : « Tout comportement humain est soumis à une norme juridique… » ou encore : « Le monde est empli de droit ».

Il s’agit bien d’une pensée totalisante, donc totalitaire qui était celle des communistes soviétiques ou des maoïstes qui décidaient que tout est politique, même la vie privée !

C’est ce que Pierre Lurçat a fort bien vu en écrivant à propos du juge Barak qu’il a : « Une conception totalitaire et quasi-religieuse du droit ».

Il est important, pour comprendre la situation actuelle, de mieux connaître le juge par qui le scandale est arrivé, mais qui a des adeptes, bien sûr. La lutte qui se mène aujourd’hui au sujet de la reprise en main du politique, face à une dérive inquiétante des droits de l’homme, est celle d’un combat contre la nouvelle religion « millénariste ».[2] Elle vient supplanter le politique en mettant en péril la séparation des pouvoirs. Or, comme l’explique très bien Jean-Louis Harouel[3] dans son livre « Les droits de l’homme contre le peuple », dans ce monde où le religieux est en berne, du côté occidental, il faut trouver une religion de remplacement qui assurera le bonheur sur terre et non dans l’au-delà, promesse du christianisme. Or, concernant Israël, la religion des droits de l’homme adoptée par le juge Barak et la gauche israélienne, refuse de considérer le danger mortel qui guette le pays des Juifs. L’ennemi d’Israël, à savoir le Hamas et l’Autorité palestinienne qui joue sur les deux tableaux, devra, comme le souhaitait Vladimir Jabotinsky dans son livre « Les Arabes et nous, le mur de fer », « accepter le sionisme, une fois pour toutes ». Or les Palestiniens sont présentés en Occident et chez des Israéliens de gauche, comme un peuple brutalisé, privé d’une terre qui leur appartiendrait en droit. C’est évidemment oublier que les Arabes ont eu la possibilité en 1948 de partager cette terre mais qu’ils ont refusé ce partage et sont entrés en guerre contre le nouvel État Juif. Cette inversion des droits est soutenue par l’Europe et l’ONU, ce qui fait d’Israël un état paria.

Le livre de Pierre Lurçat fourmille d’exemples qui soulignent l’aberration d’une Cour suprême qui s’arroge des pouvoirs qui reviennent de fait à la Knesset, c’est-à-dire au politique. Du coup, ce ne sont plus les intérêts vitaux d’Israël qui sont défendus mais ceux des « Palestiniens ».

Cette maladie des droits de l’homme, ronge aussi l’Europe et la France en particulier. Harouel écrit : « La très vertueuse religion des droits de l’homme trace aux Européens le devoir de disparaître en souriant pour faire place à d’autres peuples et d’autres civilisations. C’est une invitation implicite à une euthanasie collective, à un suicide forcément heureux puisque conformes aux exigences de la vertu. »

Le peuple Juif sait ce que disparaître veut dire ! Aujourd’hui, pour la première fois de son histoire, et depuis la Shoah, les mêmes qui croient encore que la tolérance (toujours du même côté), à l’égard de l’ennemi les grandit, se refusent à voir que ce dernier est toujours en embuscade et prend pour de la faiblesse la moindre concession qui lui est offerte. Or, c’est cette vision suicidaire que la Cour Suprême, entend défendre, laissant ainsi le loup entrer dans la bergerie. C’est pourquoi, il était grand temps de mettre fin à cette aberration d’une Cour suprême dictant la politique à mener en Israël. C’est la démocratie qui est en jeu. Mais la lutte entre le gouvernement, la Knesset et la Cour suprême, n’est pas terminée. On ne peut qu’espérer que le bon sens l’emportera, d’autant plus que la majorité des Israéliens soutient la position du gouvernement.

Pierre Lurçat doit être remercié pour cette formidable analyse, un travail minutieux d’information et d’explication, notamment en livrant des exemples concrets des domaines abusivement détournés par la Cour suprême, alors qu’ils reviennent de facto au politique. Ce travail qui n’avait pas été fait jusqu’ici contribuera, nous l’espérons, à ouvrir les yeux de ceux qui croient encore aux lendemains qui chantent.  Lisez ce texte et faites-le lire, car le temps presse.

Pierre Lurçat, Quelle démocratie pour Israël ? Gouvernement du peuple ou gouvernement des juges ?* ditions l’éléphant 2023, 128 pages.

Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Evelyne Tschirhart pour Dreuz.info.


[1] Victor Hugo « Le dernier jour d’un condamné » roman 1829

[2] Le Millénarisme : « L’autre grande source de la religion de l’humanité est le millénarisme, d’où vient l’idée du paradis sur la terre, de l’avenir radieux. »

[3] Jean-Louis Harouel : « Les droits de l’homme contre le peuple » Desclée de Brouwer 2016

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