Publié par Guy Millière le 30 mai 2023

Quand bien même l’offensive plus vaste contre les forces d’occupation russes n’a pas encore été lancée par l’armée ukrainienne (le terrain reste humide en Ukraine, et l’offensive a besoin d’un terrain sec), les préparatifs vont bon train, et il est possible de considérer qu’en fait, l’offensive, sous une forme préparatoire, a commencé.

En une semaine, plus de neuf cent actions ont été lancées sur le sol russe aux fins de faire dérailler des trains, de saboter des voies ferrées, de faire exploser des dépôts de munition et des réserves de carburant, de détruire des points d’appui logistiques et des postes de commandement. Le but est de désorganiser l’armée russe, de la priver de la possibilité d’acheminer du matériel militaire et des soldats sur le front, et de la priver aussi des moyens de mener la guerre. Le but est, en outre, de montrer à la population russe que la Russie est en guerre.

Une action de forces russes basées en Ukraine a été lancée en direction de Belgorod en territoire russe, à quarante kilomètres de la frontière, avec du matériel américain dont disposait l’armée ukrainienne, et les forces russes anti-Poutine ont pris plusieurs villages, détruit ou capturé des chars, contraint l’armée russe à déménager des armes nucléaires présentes dans la région de Belgorod pour les placer sur le sol du Belarus voisin. Le but, là, est de désorganiser davantage l’armée russe, de la contraindre à envoyer des troupes supplémentaires vers la frontière nord de l’Ukraine, et ces troupes venant du sud de l’Ukraine, de dégarnir le Sud, région vers laquelle l’offensive ukrainienne aura vraisemblablement lieu (l’objectif sera de couper la Crimée de la région de Rostov-sur-le-Don en Russie, et pour cela de rejoindre la mer d’Azov aux fins de faire tomber la Crimée, la chute de l’armée russe en Crimée est l’objectif primordial, et tous les stratèges savent qu’une défaite russe en Crimée entrainera la chute de l’armée russe ailleurs).

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L’Ukraine a décidé d’abandonner au groupe Wagner ce qui reste de la ville de Bakhmut, autrement dit des ruines et des décombres, et c’est ce qui a permis à Prigogine de crier “victoire” et aux journaux occidentaux d’employer le même mot : et ce doit être dit, Bakhmut n’a strictement aucune importance stratégique. C’était tout juste une petite ville de 70.000 habitants avant l’agression russe. Prigogine a voulu faire de la prise de cette petite ville un symbole de “victoire”. L’armée ukrainienne a décidé d’en faire un lieu où infliger de très lourdes pertes à l’armée russe et à Wagner. Elle a infligé de très lourdes pertes à l’armée russe et à Wagner qui ont remporté une “victoire” qui ressemble à celle remportée par le roi Pyrrhus d’Epire à Héraclée de Lucanie en 280 avant notre ère. Et avec des “victoires” de ce genre, la Russie fait de grands pas vers le précipice de la défaite totale. La Russie en est à deux cent mille soldats morts ou hors de combat. Il lui restait des missiles. Elle en a de moins en moins, ce qui explique que les tirs qu’elle opère vers les villes ukrainiennes se font moins nombreux, et ces tirs ont désormais des allures de pétards mouillés, car le système américain Patriot les arrête quasiment tous (taux d’interception de 98 pour cent), et arrête même les missiles hypersoniques russes réputés “impossibles à arrêter”.

L’armée russe n’a plus la capacité de mener la moindre offensive. N’ayant plus assez de chars et de véhicules blindés récents, elle sort des hangars chars et véhicules blindés des années 1950-1960 aux équipements obsolètes, et elle n’utilise ses avions qu’avec une extrême parcimonie, car le système Patriot permet aussi d’abattre des avions de chasse, et plusieurs avions russes ont été abattus ces dernières semaines. Certains ont même été abattus dans l’espace aérien russe sans que la Russie n’énonce la moindre réaction.

L’armée russe se contente de mettre en place des structures défensives qui ont très peu de chances de résister à une offensive ukrainienne bien menée. (L’armée ukrainienne dispose de véhicules blindés permettant de balayer les “dents de dragon” russes).

L’armée russe est profondément désorganisée et a des troupes composées désormais essentiellement de Russes envoyés de force vers le front, et qui savent qu’ils sont essentiellement en position de chair à canon.

L’armée ukrainienne dispose de milliers de soldats entrainés dans le monde occidental, au Royaume Uni, et en Pologne essentiellement. Elle dispose maintenant de chars en nombre supérieur à ceux dont dispose l’armée russe. Elle dispose aussi, quand bien même les Etats-Unis ne lui ont toujours pas fourni d’ATACMS, en supplément des HIMARS, des GLSDB (ground-launched small-diameter bombs) d’une portée de 150 kilomètres et des Storm Shadow britanniques d’une portée de 550 kilomètres. Ce qui signifie que la Crimée est à portée de tir de l’armée ukrainienne. 

Le but de l’Ukraine est la défaite totale de la Russie. Comme je l’ai déjà écrit, la Russie est déjà vaincue. Il est très vraisemblable que sa défaite totale est en chemin. Les dirigeants ukrainiens n’entendent pas laisser un seul centimètre carré de sol ukrainien à la Russie et, dans ce contexte, pas un seul centimètre carré de la Crimée à la Russie.

Le fait que Poutine ne réagisse pas, même verbalement, aux incursions sur le sol russe par des opposants russes utilisant du matériel américain est très significatif : Poutine ne veut surtout pas entrer en conflit avec les Etats-Unis et ne veut pas non plus entrer en conflit direct avec l’OTAN. Il sait qu’il est en position très précaire et qu’il serait vite écrasé militairement par les forces américaines s’il devait se confronter à elles. Il sait aussi qu’il n’a militairement aucun allié, et tout juste deux fournisseurs d’armes de seconde zone (Iran, Corée du Nord).

Il n’y aura aucune négociation avec Poutine tant que l’Ukraine n’aura pas été entièrement libérée.

A ce moment deux options seront envisagées :

  • Option un : permettre à Poutine de vaguement sauver la face, et ce sera, entre autres, l’option suggérée par l’Allemagne (et sans doute par la France). Et ce sera l’option soutenue par la Chine.
  • Option deux : ne pas permettre à Poutine de sauver la face. En ce cas, Poutine sera sur un siège éjectable susceptible d’être éjecté, et des turbulences majeures auront lieu en Russie. Il existe aux Etats-Unis des partisans de l’une et l’autre option.

Certains parlent d’une possibilité d’échec de l’offensive ukrainienne. Dans une guerre, tout est possible, mais je pense cet échec très improbable. Et je pense que s’il survenait il serait désastreux car il maintiendrait, je l’ai déjà dit, une situation de guerre très nocive pour la stabilité de l’Europe et rendrait impossible la reconstruction de l’Ukraine.

Entre les deux options, ma préférence va à l’option deux. Poutine est un criminel de guerre et un criminel contre l’humanité. Il doit subir les conséquences de ses crimes. Il est important aussi que les dirigeants russes qui succèderont à Poutine (ce ne seront pas des démocrates, hélas) discernent que toute action criminelle menée par la Russie ne peut que s’achever par un échec cuisant et coûteux. Il est important, en outre, que la Chine communiste et l’Iran des mollahs comprennent que le monde occidental est capable de défendre ses valeurs jusqu’au bout. La défaite de la Russie de Poutine doit aussi être une défaite pour la Chine communiste et pour l’Iran des mollahs, et sera bénéfique pour Taïwan et pour Israël.

Il importe, quelle que soit l’option retenue, que l’Europe retrouve la stabilité, et que l’Ukraine se reconstruise, vite (les millions d’Ukrainiens refugiés en Europe doivent pour rentrer chez eux, les familles doivent se retrouver). Il faudra exiger le retour en Ukraine des milliers d’enfants ukrainiens arrachés à leurs familles en Ukraine, et déportés en Russie.

Il serait légitime que l’Ukraine rentre dans l’OTAN, comme ses dirigeants le souhaitent. Il sera indispensable que Vladimir Poutine, Valeri Gerassimov, Serguei Choigou, Evgueni Prigogine soient jugés pour leurs crimes par un tribunal international, fut-ce par contumace.

Poutine a voulu bousculer et briser l’ordre du monde. Tous les ennemis du monde occidental, tous ceux qui rêvent d’un monde gouverné par des dictateurs criminels, tous ceux qui, en France et ailleurs, se sont révélés avoir une haine de l’Occident et de la démocratie, et tout particulièrement une haine des Etats-Unis, vont découvrir que l’ordre du monde n’a pas été brisé par Poutine. 

L’administration Biden, qui voulait s’entendre avec le dictateur criminel Poutine et signer un accord avec les abominables mollahs iraniens, et qui était prête à abandonner l‘Ukraine, se retrouve dans un rôle qu’elle n’avait pas choisi d’assumer. Cela ne l’exonère pas des dégâts qu’elle provoque aux Etats-Unis, au Proche-Orient et dans le reste du monde.

Une administration de gauche anti-américaine a été poussée par les circonstances à défendre les valeurs américaines. Cela ne doit pas conduire à oublier ce qu’elle est.

© Guy Millière pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

PS. Le récent G7 a été porteur d’une fermeté remarquable. Volodymyr Zelensky a été invité à y parler. Il a été clair, et je cite ses paroles : “Tant que les envahisseurs russes seront sur notre territoire, personne ne s’assiéra à la table des négociations avec la Russie. Le colonisateur doit partir”.

Le communiqué final a été tout aussi clair, et je le transcris ici dans son intégralité :

Nous soulignons qu’une paix juste ne peut être obtenue sans le retrait complet et inconditionnel des troupes et de l’équipement militaire russes, et cela doit être inclus dans tout appel à la paix.

Nous nous engageons à poursuivre notre assistance en matière de sécurité à l’Ukraine alors qu’elle se défend contre l’agression russe, en adaptant notre soutien aux besoins de l’Ukraine.

Nous réaffirmons notre ferme engagement à faire en sorte que l’Ukraine bénéficie du soutien économique dont elle a besoin.

Nous restons unis pour imposer des sanctions coordonnées et d’autres actions économiques afin de saper davantage la capacité de la Russie à mener son agression illégale.

Conformément à l’engagement pris par le biais du groupe de travail REPO, nous continuerons de prendre les mesures disponibles dans nos cadres nationaux pour trouver, restreindre, geler, saisir et, le cas échéant, confisquer les avoirs des personnes et entités qui ont été sanctionnées dans le cadre de l’agression menée par la Russie. Nous prenons des mesures pour répertorier entièrement les avoirs des actifs souverains russes immobilisés dans nos juridictions. Nous réaffirmons que, conformément à nos systèmes juridiques respectifs, les actifs souverains de la Russie dans nos juridictions resteront immobilisés jusqu’à ce que la Russie paie pour les dommages qu’elle a causés à l’Ukraine.

Dans ce contexte, nous réitérons notre engagement à demander des comptes aux responsables russes, conformément au droit international, notamment en soutenant les efforts des mécanismes internationaux, tels que la Cour pénale internationale (CPI).

Nous nous engageons par la présente, depuis Hiroshima, le” symbole de la paix “, à ce que les membres du G7 mobilisent tous leurs instruments politiques et, avec l’Ukraine, mettent tout en œuvre pour apporter une paix globale, juste et durable à l’Ukraine dès que possible.

Le G7 s’étant tenu à Hiroshima, et certains ayant critiqué cette décision, il importe de dire que ce sont les autorités japonaises qui ont choisi Hiroshima, et elles l’ont fait parce qu’elles savent que c’est le militarisme fanatique japonais qui a conduit les Etats-Unis à ne pas avoir d’autre choix que le recours à une force telle que l’empereur ne pouvait avoir d’autre choix que capituler. Comprendre implique de connaitre la culture japonaise, les idées de giri et de gimu, l’ère Shōwa au Japon, le statut de l’empereur du Japon jusqu’en 1945 : descendant de la déesse Amaterasu, susceptible d’être vaincu seulement par une force surnaturelle. Les bombardements de Hiroshima et Nagasaki ont fait des morts, mais sauvé des millions de vies. Parler sans connaitre conduit à dire des inepties.

© Guy Millière pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

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