Celui que le Daily Mail qualifie de “l’une des plumes les plus spirituelles et originales du secteur”, éditorialiste maisondepuis samedi dernier, a pu compter lundi à la chambre des Communes, sur 225 députés conservateurs qui à sa demande se sont abstenus, sept qui ont rejeté le rapport, contre 118 qui l’ont voté.
En tout 354 députés sur 650 ont adopté ce rapport selon lequel l’ancien premier ministre aurait sciemment induit le Parlement en erreur à plusieurs reprises au sujet des rassemblements (en fait des pauses pendant le travail) au 10 Downing Street durant le confinement – confinement qu’il avait ordonné à contre-cœur.
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Pour ceux (et non pas celles et ceux) qui ont la mémoire courte souvenons-nous ne serait-ce que de la troisième mi-temps du 15 octobre 2021 à la suite d’un match caritatif Variétés Club de France contre une sélection du personnel soignant du centre hospitalier de Poissy/Saint-Germain-en-Laye dans lequel le président a participé ; de l’ostentatoire non-port du masque, de l’absence de gestes barrière ou de distance des uns par rapport aux autres pendant la soirée fastueuse de cette troisième mi-temps offerte sous les ors de l’Elysée par le chef de l’Etat aux stars du Variétés Club de France et à quelques invités dûment sélectionnés. Alors que les décisions prisent sous prétexte de crise sanitaire faisaient progresser la pauvreté en France dans des proportions inédites… Un dîner dont n’a fuité que peu d’images… si ce n’est celles où l’on voit Emmanuel Macron danser en bras de chemise et sans masque sur I Will Survive, le tube de Gloria Gaynor.
Mais revenons à nos moutons ou plutôt back on topic comme disent les Anglais. Au total, seulement huit ministres ont appuyé le rapport du comité des privilèges, y compris le secrétaire à la Justice Alex Chalk, la secrétaire à l’Éducation Gillian Keegan, le whip en chef Simon Hart (celui qui organise pour le parti le suivi des présences lors des votes) et le leader à la Chambre des communes Penny Mordaunt. Fair play ou prudent Rishi Sunak s’est abstenu laissant le sale boulot à son opposition socialiste. « La commission n’a pas trouvé la moindre preuve », avait clamé l’ancien premier ministre. Dans un long communiqué, Boris a fustigé les “conneries”, les “mensonges” et les “affirmations absurdes” contenus dans ledocument de 106 pages. “Ces conclusions de détraqués sont le point final de [mon] assassinat politique”. Les chances “de voir Johnson s’effacer sans un bruit étaient inexistantes”, reconnait The Daily Telegraph : “Mais là, face au feu nourri, il a décidé de tout faire péter.”
Boris Johnson a vivement attaqué le gouvernement actuel dans sa lettre de démission, l’accusant d’avoir renoncé à ses promesses de 2019. L’ancien dirigeant venait déjà de voir retoquée la liste de nominations à la chambre des Lords que proposent, selon la tradition, les Premiers ministres à l’issue de leur mandat. « Rishi Sunak raconte n’importe quoi », a répliqué Boris Johnson dans un communiqué, assurant qu’obtenir le feu vert de l’Holac ne représentait qu’une « simple formalité ». En effet il revient au Premier ministre en exercice d’approuver ces nominations après avis de la commission des nominations de la chambre des Lords (Holac) et selon l’usage il ne fait aucune modification à la liste soumise. Selon des médias britanniques, Boris Johnson et Rishi Sunak ont parlé récemment de ces nominations et le premier pensait avoir obtenu satisfaction du second.
Au cours du débat, un certain nombre de députés conservateurs se sont levés pour critiquer M. Johnson – y compris l’inénarrable Theresa May, ancien Premier ministre qui cherchait à enterrer le Brexit, et qui a loué la commission pour son rapport “rigoureux”. « Il n’est pas facile de juger des amis et des collègues, a-t-elle hypocritement dit, mais l’amitié, en travaillant ensemble, ne devrait pas empêcher de faire ce qui est juste. » Gardez-moi de mes amis, mes ennemis je m’en charge.
Harriet Harman – présidente travailliste de la commission que M. Johnson a accusée de mener un “tribunal fantoche” – a remercié les membres conservateurs qui ont participé à l’enquête pour leur “dévouement et leur engagement exceptionnels”. Mme Harman a été mise en cause par Sir Jacob Rees-Mogg, partisan de Johnson, qui s’est demandé si elle était appropriée pour diriger l’enquête, compte tenu de ses tweets précédents qui avaient critiqué l’ancien premier ministre. Sir Jacob a ajouté qu’il était “ridicule” de supprimer le droit de M. Johnson d’accéder au Parlement en tant qu’ancien député. Il a dit aux députés qu’il était “absolument légitime de critiquer la conduite d’un comité, de critiquer les membres d’un comité”, ajoutant : “C’est de la politique.”
De son côté une semaine après avoir démissionné avec fracas de son poste de député, en clamant I’ll be back, Boris Johnson est déjà de retour, il a été embauché comme éditorialiste par le tabloïd conservateur Daily Mail. « Que vous soyez un fan de Boris ou non, ce sera une lecture obligatoire – à la fois à Westminster et pour des millions de personnes à travers le monde », a déclaré le journal. Une colonne que l’actuel locataire du 10 Downing Street craint qu’elle soit avant tout une meurtrière.
“La première colonne hebdomadaire de l’ancien Premier ministre est apparue en ligne vendredi en fin d’après-midi”. Boris a promis de publier des contenus “sans aucun filtre”, sur les sujets les plus variés : “Il se peut même que je doive couvrir la politique, mais j’essaierai bien évidemment de le faire le moins possible, sauf si c’est absolument indispensable” – de quoi faire frémir ses ennemis politiques – à commencer par l’actuel Premier ministre conservateur Rishi Sunak, mais aussi Sadiq Kahn, le maire travailliste de Londres qui lui a succédé.
Pour sa première colonne, l’ancien Premier ministre a sagement choisi un sujet loin de toute polémique en écrivant sur un médicament amaigrissant qu’il avait essayé, et qui avait marché ‘miraculeusement’ avec l’un de ses ministres, mais pas sur lui”. Pour le plus grand bonheur du lecteur, Boris n’hésite pas mélanger les raids d’onze heures et demie du soir dans le frigo sur le cheddar et le chorizo et la Rome antique « Laisse-moi avoir des hommes qui sont gros, » dit le dictateur romain, peu avant son assassinat. « Yond Cassius a un regard maigre et affamé. »[1] On croirait reconnaitre Rishi Sunak, non ? Il s’est avéré que César avait raison de s’inquiéter pour Cassius.
Selon un sondage publié par l’institut YouGov, si 25 % des Britanniques voudraient le voir revenir au Parlement à l’avenir, ils sont 49 % parmi les électeurs conservateurs. De son côté Nigel Farage qui n’a pas hésité à sacrifier unilatéralement les députés potentiels du Brexit Parti lors des dernières législatives (2019) pour permettre une large victoire des Tories dirigés par BoJo et assurer la réalisation du Brexit, lui a tendu la main pour créer un parti de centre droit afin de palier à la sinistrisation du Parti Tory.
Les tirages du Daily Mail qui déjà se portait bien vont bondir. Ça valait bien le contrat d’1 million de Livres Sterling qu’il aurait signé avec l’éditorialiste. Un retour aux sources pour Boris Johnson qui fut journaliste au Daily Telegraph avant de se consacrer à la politique. Mais aussi, pour celui qui fêtait lundi ses 59 ans et s’apprête à avoir un huitième enfant, une source de revenus confortables.
Reproduction autorisée avec la mention suivante : © Thierry Martin pour Dreuz
[1] Act I, scene 2 of Shakespeare’s Julius Caesar
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Sympathique coup d’oeil à ce qui se passe Outre Manche où le ‘fair play’ n’élimine pas les postures des politiciens ‘arrivistes’…