
« Repose en paix, mon ami. »
Quatre fois premier ministre, à chaque fois qu’il a semblé que sa carrière politique était terminée, il a réussi à confondre ses détracteurs et à rebondir. Durant ses mandats, l’homme de droite lutte inlassablement contre le communisme, s’oppose aux magistrats « rouges » et prône l’entreprise ainsi que la baisse des impôts. Berlusconi était une personnalité publique majeure du monde des affaires, de la télévision et de la politique en Italie, un Donald Trump avant l’heure. Une combinaison du pubard Séguéla et du Bernard Tapie de la grande époque. Sa personnalité flamboyante a touché l’électorat italien, qui a continué à le soutenir malgré les allégations de corruption et de double jeu.
C’est sa vie privée, son goût pour les belles jeunes femmes et les scandales sexuels qui en ont découlé, qui ont fait la une des journaux du monde entier.
Lui-même n’a jamais caché qu’il recherchait des femmes plus jeunes que lui. Sa dernière compagne, Marta Fascina, une collègue de parti, est de plus de 50 ans sa cadette.
Quant aux allégations sur ses motivations. “Je n’ai pas besoin d’entrer en fonction pour le pouvoir. J’ai des maisons dans le monde entier, des bateaux magnifiques, de beaux avions, une belle femme, une belle famille. Je fais un sacrifice”, disait-il.
“Si, en prenant soin des intérêts de tous, je prends également soin des miens, on ne peut pas parler de conflit d’intérêts”, précisait-il.
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Né à Milan le 29 septembre 1936 dans une famille de la classe moyenne, dès ses années d’études, il démontre sa capacité à gagner de l’argent. Alors qu’il étudie le droit à l’université de Milan – il sera licencié en droit en 1961 – il joue de la contrebasse dans un groupe d’étudiants et se fait une réputation de chanteur, travaillant dans des boîtes de nuit et sur des bateaux de croisière. Il a commencé à utiliser son charme naturel dans les affaires en tant que vendeur d’aspirateurs et en vendant des essais rédigés pour ses camarades d’études.
Dans les années 1970, Silvio Berlusconi est un entrepreneur milanais à succès. Dans la capitale lombarde, il a fait fortune dans l’immobilier en bâtissant de nouveaux quartiers au cœur de l’arrière-pays milanais avec sa société Edilnord, lancée en 1963. La plus grosse pierre de cet édifice est la création du quartier résidentiel Milano 2.
Ce projet urbain lui vaut le titre de Chevalier de l’ordre du mérite et du travail, Cavaliere del Lavoro en italien. Cette distinction, qui récompense les citoyens “qui se sont rendus singulièrement méritoires” “dans l’agriculture, l’industrie, le commerce, l’artisanat, le crédit et les assurances”, lui est décernée par le président de la République de l’époque, Giovanni Leone, le 2 juin 1977. Il Cavaliere est en selle.
Plus tard, il crée la holding, Fininvest, pour gérer l’expansion de ses entreprises. Il finira par posséder Mediaset, le plus grand empire médiatique d’Italie et la plus grande maison d’édition d’Italie, Mondadori.
La remarquable capacité de Berlusconi à faire face aux tribunaux à plusieurs reprises – et à maintenir sa popularité dans la politique – était inégalée. Bien qu’il fût la cible des procureurs de sa ville natale de Milan, affirmant un jour avoir fait 2 500 apparitions au tribunal dans 106 procès en 20 ans. Au fil des ans, il a été accusé de détournement de fonds, de fraude fiscale, de fausse comptabilité et de tentative de corruption d’un juge. Il a été acquitté ou a vu ses condamnations annulées à plusieurs reprises. A l’instar d’un Trump, d’un Johnson, d’un Sarkozy, d’un Netannyahou, ses controverses ont été très médiatisées et ont constitué une toile de fond régulière tout au long de sa carrière politique. Ce n’est qu’en février 2023 qu’il a finalement été blanchi pour avoir soudoyé des témoins afin qu’ils mentent au sujet des fameuses fêtes “bunga bunga” qu’il avait organisées dans sa villa en tant que Premier ministre.
Il avait fondé son propre parti politique 30 ans plus tôt, en 1993, et en l’espace d’un an, il avait été catapulté au pouvoir. Tirant parti de son enthousiasme pour le football, il avait baptisé son parti du nom d’un chant de supporters : Forza Italia (Allez l’Italie).
En octobre 2012, condamné à quatre ans d’emprisonnement pour fraude fiscale et interdit d’exercer une fonction publique, Sylvio Berlusconi a déclaré son innocence et parlé d’un “coup d’État judiciaire”. Mais il a alors plus de 75 ans et se voit imposer des travaux d’intérêt général. Il a travaillé quatre heures par semaine avec des personnes âgées atteintes de démence dans une maison de retraite catholique près de Milan.
Il a également été interdit d’exercer une fonction publique – une interdiction qui a duré plusieurs années avant son prochain retour à la vie publique.
Il a rencontré sa deuxième femme, Veronica Lario, après qu’elle se soit produite seins nus dans une pièce de théâtre. Elle a ensuite exprimé publiquement, à plusieurs reprises, sa frustration face au comportement de son mari avec les jeunes femmes. Elle a demandé le divorce après que son mari a été photographié à la fête d’anniversaire des 18 ans du mannequin Noemi Letizia.
Son scandale le plus retentissant est celui des fêtes “bunga bunga” dans sa villa, auxquelles auraient participé des filles de joie – une histoire qui s’est soldée par une condamnation pour avoir payé une prostituée mineure pour des relations sexuelles.
Quoi qu’il en fût, en 2022, il était de retour au parlement italien avec son parti Forza Italia, membre de la coalition de droite de Giorgia Meloni.
Avec ses cheveux bruns gominés et ses liftings, Berlusconi était immédiatement reconnaissable, pour les Français l’homme qui a lancé « la 5 », ressemblait au publicitaire Jacques Séguéla combiné au Bernard Tapie de la grande époque.
Il est également devenu célèbre pour son humour incorrect. Ainsi, il a suggéré qu’un député européen allemand aurait fait un bon gardien de camp de concentration ou affirmé que Mussolini était en fait un dirigeant bienveillant.
Il a qualifié ces déclarations de plaisanteries. Cependant, il était également un ami de longue date de Vladimir Poutine et a rendu l’Ukraine responsable de l’invasion russe alors que son propre gouvernement soutenait fermement Kiev.
Lundi matin, le Pape a fait parvenir un télégramme de condoléances à la fille ainée de Silvio Berlusconi décédé quelques heures plus tôt à Milan. François « a souhaité témoigner » à Maria Elvira (plus connue comme Marina) et aux membres de la famille, sa proximité, les assurant « de sa participation sincère au deuil d’un protagoniste de la vie politique italienne, qui a exercé des responsabilités publiques avec un tempérament énergique ».
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a, de son côté, écrit « Silvio était un grand ami d’Israël et nous a toujours soutenus. Repose en paix, mon ami. »
Les nombreux Italiens qui ont voté pour lui ont estimé que la réussite en affaires de celui qu’on nommait Il Cavaliere était une preuve de ses capacités, une raison pour laquelle il devait diriger le pays.
Les funérailles d’État de Silvio Berlusconi seront célébrées par Mgr Mario Delpini, archevêque de Milan, mercredi 14 juin à 15h00, en la cathédrale de Milan, indique le diocèse de la capitale économique du pays.
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