Publié par Guy Millière le 9 juillet 2023

Il m’est arrivé de penser que l’administration Biden était destructrice sur tous les plans, mais avait, à la rigueur, une seule qualité : elle aidait l’Ukraine à survivre face à l’agression menée par le dictateur criminel russe, et elle entendait lui donner les moyens de gagner.

Je dois dire que je ne lui reconnais plus cette qualité. Elle aide effectivement l’Ukraine à survivre, mais elle le fait d’une telle façon qu’elle inflige à l’Ukraine et à son peuple des souffrances inutiles. Et elle ne donne pas vraiment à l’Ukraine les moyens de gagner.

L’administration Biden était prête à abandonner l’Ukraine à Poutine, et elle lui a donné quasiment un feu vert au moment où il a décidé d’envahir l’Ukraine. Je l’ai dit à l’époque et je le redis : l’administration Biden aurait pu laisser en Ukraine des soldats américains qui y étaient présents pour entrainer les soldats ukrainiens et ne pas les retirer au début du mois de février 2022. Poutine n’aurait pas pris le risque de tuer des soldats américains et aurait reculé. L’administration Biden ne lui a donné aucune raison de reculer. L’administration Biden aurait pu dire à Poutine que toutes les options étaient envisageables s’il envahissait l’Ukraine. Il n’est pas certain qu’après la débâcle constituée par le retrait des troupes américaines d’Afghanistan, organisée par l’administration Biden, Poutine aurait reculé, mais cela aurait été une possibilité. Joe Biden aurait pu éviter de lire sur un prompteur un discours disant qu’une “petite incursion de l’armée russe en Ukraine ne serait pas très grave”, moins d’une semaine avant l’invasion. Prononcer ces mots était presque inciter à l’invasion.

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L’administration Biden s’attendait sans doute, comme Poutine lui-même, à ce que l’invasion se termine vite, par la victoire de la Russie, et l’administration Biden a vite proposé à Volodymyr Zelensky de quitter le pays, ce qu’il a refusé.

C’est seulement lorsqu’il est apparu que l’armée russe échouait, que Volodymyr Zelensky et l’armée ukrainienne résistaient, et que l’opinion dans tout le monde occidental prenait fait et cause pour l’Ukraine agressée, que l’administration Biden a décidé d’aider militairement l’Ukraine et de pousser les pays de l’OTAN à le suivre. Mais tout en tenant des discours appelant au soutien de l’Ukraine, l’administration Biden tenait aussi des propos pusillanimes et disait qu’il fallait faire très attention de ne pas provoquer une guerre mondiale ou une attaque nucléaire russe, et tout en consacrant des milliards à l’aide militaire apportée à l’Ukraine, l’administration Biden a livré les armes qu’elle a livré avec réticence et avec retard. Il aurait été possible à l’administration Biden de livrer des HIMARS dès le mois de mars ou le mois d’avril 2022. Les HIMARS n’ont été livrés que trois mois plus tard, et les HIMARS livrés avaient été bridés de façon à ce qu’ils ne puissent tirer à plus de cent kilomètres, ce qui a donné à la Russie la possibilité d’installer des bases logistiques à cent cinq ou cent dix kilomètres du front. Des HIMARS tirant à trois cent kilomètres auraient permis des avancées de l’armée ukrainienne plus nettes et plus importantes dès l’été 2022. Les avancées de l’Ukraine qui, à l’automne 2022, lui ont permis de libérer Kherson et des centaines de kilomètres carrés à l’Est de Kharkiv ont été essentiellement dues au génie stratégique de Valery Zaluzhny, le général en chef de l’armée ukrainienne.

Dès l’automne 2022, Zaluzhny a dit qu’il aurait besoin pour mener une contre-offensive efficace d’ATACMS, qui permettent de tirer avec précision à plus de trois cent kilomètres, d’avions F16, et de chars Abrams. A ce jour, l’Ukraine n’a toujours pas d’ATACMS, de F16 et de chars Abrams. Les pays européens ont donné à l’Ukraine des chars allemands Léopard, mais après de longues hésitations du gouvernement allemand. Le Royaume Uni a donné des StormShadow qui tirent aussi loin que les ATACMS mais doivent être tirés depuis des avions, et faute de F16 l’Ukraine a peu d’avions. La formation de soldats ukrainiens a été plus longue que prévu, et l’Ukraine n’a pu enclencher une contre-offensive qu’il y a un mois. Parce qu’elle n’a pas les armes dont elle aurait besoin pour être pleinement efficace, l’armée ukrainienne doit procéder avec prudence, chercher la faille dans la défense russe, et sa tâche est rendue bien plus difficile par le fait que l’armée russe a eu neuf mois pour mettre en place des installations défensives et pour disséminer des milliers de mines sur les terres d’Ukraine qu’elle occupe. L’armée ukrainienne avance, mais lentement, et elle perd des centaines d’hommes : cela par la faute de l’administration Biden. Et, comme l’ont remarqué plusieurs généraux américains qui commentent les opérations en cours, personne au sein de l’administration Biden ne dit vouloir la victoire de l’Ukraine. Strictement personne ! L’administration Biden vient d’accepter de livrer à l’Ukraine des bombes à fragmentation (cluster bombs), qui seront utiles à l’armée ukrainienne, mais bien moins utiles que les ATACMS, les F 16 et les chars Abrams, qui manquent toujours.

L’explication de l’attitude de l’administration Biden est simple et a été donnée par les généraux américains susdits : l’administration Biden voudrait une solution négociée, et ne souhaite pas la pleine défaite de Poutine. Et elle veut que la guerre dure.

Ce qui explique qu’elle veut une solution négociée est qu’elle veut toujours et encore passer un accord avec le régime des mollahs et donner à celui-ci le statut de puissance hégémonique au Proche-Orient. Or, le régime des mollahs est un allié de Poutine, et lui vend des drones et des missiles, ce qui rapporte de l’argent au régime des mollahs. L’administration Biden sait qu’une pleine défaite de Poutine priverait le régime des mollahs d’une source importante de revenus. Elle sait aussi que Poutine fournit au régime des mollahs tout ce qui lui permet de se doter d’armes atomiques. Elle sait qu’une défaite de Poutine priverait le régime des mollahs de ce que Poutine lui fournit. L’administration Biden ne veut surtout pas priver le régime des mollahs d’une source importante de revenus et de ce qui lui permet de se doter d’armes atomiques, sans quoi, tout espoir d’accord avec le régime des mollahs disparaitrait. Pour espérer signer un accord avec le régime des mollahs, l’administration Biden a levé quasiment toutes les sanctions qui le frappaient, ce qui a permis aux mollahs de voir arriver dans leurs caisses des milliards de dollars.

Ce qui apparait dans ce que je viens d’écrire est qu’en acceptant sans mot dire que le régime des mollahs vende des armes à Poutine, l’administration Biden accepte que Poutine dispose de davantage d’armes pour attaquer l’Ukraine et pour tenter de conserver les territoires d’Ukraine que l’armée russe occupe. C’est d’une perfidie répugnante, et cela signifie qu’en supplément du fait que l’administration Biden ne donne pas à l’Ukraine tous les moyens pour gagner vite, l’administration Biden de facto, aide la Russie à continuer à attaquer l’Ukraine et à résister à la contre-offensive ukrainienne !

Je pourrais ajouter qu’en acceptant que Poutine fournisse au régime des mollahs les moyens de se doter d’armes nucléaires, et en ayant levé quasiment toutes les sanctions qui frappaient le régime des mollahs, l’administration Biden nuit très gravement à Israël, qui ne veut absolument pas que le régime des mollahs, qui a des buts génocidaires anti-israéliens, dispose d’armes atomiques. Israël sait aussi que l’argent reçu par l’Iran sert à financer les organisations terroristes “palestiniennes”. L’administration Biden, tout en se disant “amie d’Israël”, porte atteinte à la sécurité d’Israël ! L’administration Biden porte aussi atteinte à la sécurité de l’Arabie Saoudite, de l’Egypte et des Emirats du Golfe, pour qui le régime des mollahs est l’ennemi principal. C’est dans ce cadre qu’il faut comprendre le fait que l’Arabie Saoudite et les émirats se rapprochent de la Chine et passent sous son égide des accords avec le régime des mollahs. Il s’agit pour eux de compter sur la Chine pour modérer les ardeurs haineuses des mollahs. C’est aussi dans ce cadre qu’il faut comprendre la récente visite de Binyamin Netanyahou en Chine. Obama voulait que l’Iran des mollahs devienne la puissance hégémonique au Proche-Orient et que les Frères Musulmans prennent le pouvoir dans le monde arabe (c’était le but de ce qui a été appelé faussement printemps arabe : le printemps arabe était en réalité un hiver islamique conçu à la Maison Blanche). L’administration Biden reprend le projet d’Obama concernant l’Iran, et oblige les pays arabes sunnites à se montrer conciliants avec le régime des mollahs.

En voulant que la guerre en Ukraine dure, l’administration Biden veut contraindre Zelensky à se montrer conciliant avec la Russie, et finisse par accepter une solution négociée qui impliquerait que l’Ukraine cède un fragment de son territoire, voire plusieurs, à Poutine. Certains dirigeants européens sont favorables eux aussi à la perspective d’une solution négociée. La Chine elle-même est favorable à une solution négociée et tient à ce que Vladimir Poutine reste en place : la Russie, très affaiblie, dépend de plus en plus de la Chine, et Xi Jinping sait qu’une Russie stable, sous Poutine, lui serait soumise, et qu’une victoire nette de l’Ukraine pourrait ébranler Poutine bien davantage encore que la mutinerie menée par Evgueni Prigogine (Poutine, ce doit être souligné, est très affaibli, et je reviendrai sur ce point, ainsi que sur l’état réel de la Russie).

Une solution négociée impliquant que l’Ukraine cède un ou plusieurs fragments de son territoire à Poutine serait l’assurance que l’Ukraine ne pourrait pas se reconstruire, et que l’Europe resterait déstabilisée. Aux Etats-Unis, l’alternative à Biden sera sans doute Donald Trump, et celui-ci tient en ce moment des discours qui semblent favorables à une solution négociée, ce que je trouve consternant, et ce qui, à mes yeux, n’est pas conforme à la doctrine “paix par la puissance” que Trump a adoptée en 2016. Je soutiendrai quand même Trump, car l’administration Biden est une abomination, mais pour la première fois, Trump suscite mes réserves. Un courant isolationniste gagne du terrain chez les Républicains, et s’il se renforce, ce courant représentera un danger pour la paix mondiale. A chaque fois que les Etats-Unis sont devenus isolationnistes, des dictateurs criminels en ont tiré avantage.

Un sommet de l’OTAN va se tenir à Vilnius. La guerre menée contre l’Ukraine par Poutine et le soutien à l’Ukraine seront au programme. La Pologne, les pays baltes, la République tchèque, l’Italie, la Finlande, le Royaume Uni, et peut être la France, demanderont que l’Ukraine reçoive enfin les moyens d’une victoire nette et soutiendront l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN dès la fin de la guerre. La décision sur ces deux points dépendra de l’administration Biden. On verra très vite si l’administration Biden veut la victoire nette de l’Ukraine et l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN. Pour l’heure, l’administration Biden semble très hésitante. C’est lamentable, mais c’est l’administration Biden !

Et dois-je le répéter ? Vladimir Poutine est un criminel de guerre et un criminel contre l’humanité. Envisager de négocier avec lui, malgré ses crimes, ressemblerait à l’attitude de Daladier et Chamberlain à Munich en 1938. On sait, hélas, ce qui a suivi la rencontre de Munich en 1938. Le monde occidental est-il encore capable de se hisser à la hauteur des valeurs qui ont fait sa grandeur ? Existe-t-il encore un monde qu’on puisse appeler monde libre ? On va le savoir bientôt.

© Guy Millière pour Dreuz.info. Toute reproduction interdite sans l’autorisation écrite de l’auteur.

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